Politique de réalisation, d’acquisition et gestion des photos
Présentation du Site et Musée romains d’Avenches (SMRA)
Le SMRA ou Site et Musée romains d’Avenches est le terme qui désigne les sites archéologiques et le musée romain d’Avenches. Cette ville se situe au nord du canton de Vaud ; elle est connue pour ses vestiges romains, notamment son amphithéâtre, son théâtre, les restes du mur d’enceinte ou encore les thermes. La plupart des monuments appartiennent au canton, certains à la commune. La ville se nommait Aventicum quand elle était la capitale de l’Helvétie romaine. Le musée se trouve dans la tour de l’amphithéâtre. C’est un musée archéologique qui présente les objets issus des fouilles d’Aventicum. Le canton est propriétaire des vestiges et objets antiques découverts dans son sol ; en Suisse, l’archéologie territoriale relève de la compétence des cantons.
Statut, autorité de tutelle:
Le SMRA est une entité cantonale. Il fait partie des 9 musées cantonaux qui dépendent de l’Etat de Vaud (Devanthéry et al., 2017). Les musées cantonaux gèrent de manière autonome le patrimoine qui leur est confié.
Le SMRA est un musée d’archéologie et, depuis 2015, « le patrimoine archéologique vaudois est régi par deux lois. L’une est centrée sur la protection du territoire et du bâti, l’autre sur les collections mobilières » (Devanthéry et al., 2017, p.20). Le SMRA dépend ainsi du Service Immeubles, Patrimoine et Logistique (SIPaL) pour le patrimoine immobilier et du Service des affaires culturelles (SERAC) pour le patrimoine mobilier. Le SIPaL est rattaché au département des finances et des relations extérieures (DFIRE) tandis que le SERAC est rattaché au département de la formation, de la jeunesse et de la culture (DFJC). En principe, les objets sont sous la responsabilité de l’Archéologie cantonale, donc du SIPal, jusqu’à ce qu’ils sortent de terre et avant d’arriver dans les musées. Une fois qu’ils sont au musée, ils sont à la charge du SERAC qui s’occupe des objets tangibles, des collections (Devanthéry et al., 2017).
Missions:
« Les missions confiées à l’équipe du Site et Musée romains d’Avenches sont multiples : recherches sur le terrain, conservation, restauration et valorisation des collections et des monuments, études, publications et archivage de la documentation » (Aventicum, 2018). La diffusion des photos des collections entre dans le cadre des missions du musée. Elle contribue à rendre visible le patrimoine que le musée gère.
Contexte muséal, évolution des musées
Un musée cumule en principe les trois activités suivantes : la collecte, le conditionnement et l’exposition au public (Duplain Michel, 2006). Les musées ont le plus souvent été créés autour de collections. « L’histoire du musée d’Avenches commence elle-même en 1824 lorsque la Municipalité décide de racheter et rassembler les objets issus des fouilles […] » (Devanthéry et al., 2017).
Les musées se sont longtemps consacrés à des missions de conservation et description des œuvres avant de mettre l’accent sur la valorisation et la diffusion des collections auprès du public (Mencarelli, Pulh, 2012). Depuis les années 1980, le musée a une vocation sociale, une fonction de présentation et de communication. La médiation culturelle, qui se charge de mettre en relation les offres culturelles avec le public ou plus simplement de proposer des animations à l’intention des visiteurs, est apparue dans les années 1990 (Wikipedia, Médiation culturelle).
« Les expositions se multiplient, deviennent des offres culturelles et rivalisent dans le marché des loisirs avec d’autres formes de divertissement » (Blanc et al., 2009). Le bâtiment qui abrite le musée est souvent lui-même une œuvre d’art qui fait rayonner la ville et qui attire le public ou le touriste (Duplain Michel, 2006). En archéologie, le musée est souvent intégré dans un site. Celui-ci est valorisé au même titre que les collections. L’ensemble du parc archéologique est, en général, agrémenté de panneaux explicatifs. Des spectacles, des jeux sont organisés dans les arènes. La réalité augmentée sur smartphone se développe aussi et permet de visualiser in situ les restitutions en 3D de monuments semi-disparus (Defretin, 2014). Le site d’Avenches est déjà équipé de lunettes 3D stéréoscopiques.
Contexte juridique
Les musées sont confrontés dans leur quotidien à des questions de droit lorsqu’il s’agit, par exemple, d’acquérir les images d’un photographe, de les fournir à un chercheur ou de les mettre en ligne ou sur les réseaux sociaux. Les questions juridiques concernent essentiellement le droit d’auteur, mais aussi le droit à l’image, la protection des données ou le droit des contrats. Nous commencerons par ces derniers pour revenir plus longuement sur le droit d’auteur.
Le droit à l’image, droits de la personnalité (CC) et loi sur la protection des données (LPD)
Le droit à l’image n’est pas expressément mentionné dans les lois suisses. Il faut se référer à la loi sur la protection des données (LPD) et aux droits de la personnalité présentés dans l’art.
28 du code civil suisse (CC, art. 28). On peut ajouter l’art. 13 de la Constitution suisse qui concerne la protection de la sphère privée.
Le droit à l’image s’applique aux personnes figurant sur les photos. « […] La personne que l’on souhaite photographier possède un droit à l’image qui lui permet, en règle générale, de s’opposer à la fixation et à la diffusion de son image » (PFPDT, 2014). L’image ou la photo est une donnée personnelle. Selon la LPD, « les données personnelles sont toutes les informations qui se rapportent à une personne identifiée ou identifiable » (LPD, art.3 let.a). « Cette loi garantit le droit à l’autodétermination en matière d’information et interdit […] le traitement non autorisé ou la communication de données personnelles » (PSC, 2015). « Les droits de la personnalité sont inséparables de la personne jusqu’à sa mort, et peuvent être invoqués à tout moment. Par conséquent, avant de publier une photo d’archives, on prendra soin d’identifier les personnes qui y sont représentées et de demander leur consentement » (PFPDT, 2014).
Le droit des contrats, code des obligations (CO)
Le droit des contrats est régi en Suisse par le Code des obligations (CO). Les contrats peuvent être tacites (CO, art. 1). Dans les musées, des contrats sont, par exemple, conclus pour pouvoir utiliser les œuvres des photographes ou des auteurs. Ceux-ci peuvent céder leurs droits par un contrat de cession ou autoriser l’utilisation de leurs œuvres par un contrat de licence (concession de licence) (cf. 2.3.2) (cf. aussi Pantalony p.21). Il existe aussi des contrats de licence « Creative Commons » (cf. 2.4.5). On peut ajouter des contrats de prêts d’objets pour des expositions temporaires. Dans ces contrats figurent, par exemple, l’interdiction de photographier au musée les objets prêtés (JEAN et al., 2017). Il y a également des contrats de travail ou de commande avec les photographes internes et externes.
Propriété intellectuelle, loi sur le droit d’auteur (LDA)
La création artistique est protégée par le droit d’auteur. Le droit d’auteur est un sous-ensemble de la propriété intellectuelle (LDA ; RS 231.1). « On entend par droit de la propriété intellectuelle l’ensemble des règles juridiques protégeant la créativité [et les biens immatériels] » (Salvadé, 2015) (cf. IPI, 2018).
De nombreux ouvrages et sites internet présentent le droit d’auteur. On peut citer les textes de l’IPI (2015), de Salvadé (2015), de SUISAblog, de WEHRLIN et al. (2011), du CCDL (2018) pour la Suisse et celui de Mattatia (2017) pour la France. « La loi sur le droit d’auteur confère des droits aux auteurs tels que [les photographes], les compositeurs, les écrivains, les peintres, les sculpteurs, les dessinateurs, les architectes, les designers, les réalisateurs et les chorégraphes » (IPI, 2015, p.4). Seule une personne physique peut être considérée comme auteur (LDA, art.6). «C’est [aux auteurs] qu’il revient de décider si leur œuvre peut faire l’objet d’une utilisation, par exemple, être reproduite, diffusée ou représentée, à quel moment et dans quelles conditions » (IPI, 2015, p.4).
Politique d’acquisition, réalisation et gestion des photos
La diffusion des images des musées ne peut se faire correctement que si, en amont, les photos des collections ou des événements ont été acquises, réalisées et inventoriées avec soin et conformément au droit. Frochot (2015) dit que « souvent les photothèques, même bien gérées sur le plan de la conservation et de la gestion des photographies, ne sont absolument pas organisées en vue d’une exploitation juridique des contenus ». Les fonds de photos doivent être tenus avec une certaine rigueur juridique pour être exploités licitement. Et cette tâche incombe en général aux employés du musée qui donnent accès à l’œuvre, qui sont les intermédiaires entre l’œuvre et ses utilisateurs.
Les photographes
Pour les musées, il est important de régler la question des droits d’auteur au moment de la réalisation ou de l’acquisition des photos. Ils doivent savoir qui détient les droits, ils doivent les avoir ou pouvoir les demander lors de la numérisation ou mise en ligne des photos (Benhamou,2015).
Les photos peuvent être réalisées en interne par un photographe du musée ou être acquises auprès d’un photographe externe. Les photos amateures des visiteurs ou du personnel ne sont pas traitées ici. Si le musée a un photographe en interne, ce n’est pas le musée qui a les droits, mais le photographe. Les droits d’auteur appartiennent à la personne physique qui a créé l’œuvre (LDA, art.6). Les droits moraux, notamment le droit de paternité est incessible, mais l’auteur peut y renoncer.
Contrat de cession ou contrat de licence
« Le contrat de cession est un contrat par lequel l’auteur, ici le photographe, cède ses droits patrimoniaux sur une œuvre [..]. Le contrat de cession peut être relié à la notion de vente » (Sharelex, 2014a). La personne qui acquiert le droit ne devient pas l’auteur, mais le titulaire du droit (il obtient un droit dérivé). Il le reçoit en tant que droit exclusif et peut exploiter l’œuvre dans son intégralité (représentation, reproduction, diffusion, etc.). Il peut transférer à son tour le droit acquis. L’auteur ne peut plus exploiter lui-même son œuvre, ni la céder à autrui (CCDL, 2018).
Lorsque l’auteur ne veut pas renoncer à son statut juridique, il peut accorder de simples droits d’utilisations (licences) par un contrat de licence (CCDL, 2018). « Lorsqu’il est conclu à titre onéreux, le contrat de licence correspond à la location ; lorsqu’il est conclu, à titre gratuit, il correspond au prêt » (Sharelex, 2014a). L’auteur reste propriétaire de l’œuvre. Il autorise l’exploitation de l’œuvre de manière limitée, partielle et ne donne pas l’exclusivité à une personne (Camille, 2017). « Le contrat de licence officialise […] une collaboration entre le titulaire des droits de propriété intellectuelle (l’auteur) et le tiers autorisé à utiliser ces droits »(Camille, 2017)
Les droits d’auteur liés aux photos, le crédit photo, le copyright
À chaque publication, reproduction, commercialisation d’une photographie, il est obligatoire de mentionner le crédit photo. C’est la signature d’une photo ; elle permet le respect du droit d’auteur (Ooreka, 2018). Le crédit photo comprend le nom du photographe et le gestionnaire des droits (l’artiste lui-même ou l’agence photographique ou l’institution qui conserve l’image, galerie, musée, etc.). Certains ajoutent les conditions de distribution à la suite (licence Creative Commons, libre de droit ou domaine public) (Friportail, 2009). Le crédit photo est placé sous la photo ou à côté de celle-ci. Il se trouve parfois en marge ou en fin d’ouvrage. Il prend les formes suivantes :
Photo © Pierre Dupont (nom du photographe) / Agence Pol (gestionnaire des droits); © Pierre Dupont / Agence Pol ; Photo Pierre Dupont / Agence Pol. (Ooreka, 2018)
Le sigle © (copyright) n’est pas obligatoire. « Pour qu’une œuvre soit protégée par la loi, aucune formalité comme l’inscription dans un registre ou l’apposition du fameux signe © n’est requise. […] Jusqu’à preuve du contraire, la personne mentionnée sur les exemplaires de l’œuvre est présumée être l’auteur » (SSA, 2012). Mais ce sigle est utilisé partout pour signaler l’existence d’un droit d’auteur. Il est utile et tout le monde le comprend. Les sociétés de gestion demandent qu’il soit utilisé lorsqu’elles accordent une autorisation de reproduction. « Celle-ci est subordonnée à la mention du nom de l’auteur, du titre de l’œuvre, du signe ©, de l’année et du nom de la société (Jean et al. 2017, p.5) »26
Les droits liés aux objets de la collection et le droit au profit du propriétaire matériel
Une photo représente souvent un objet. Il faut aussi prendre en compte les droits des auteurs dont les œuvres ou créations sont représentées sur les photos. Il existe donc des droits sur les photos et il existe des droits sur les objets photographiés. Les auteurs décident eux-mêmes à quelles conditions leurs œuvres peuvent être reproduites (LDA, art. 10). Et photographier une œuvre protégée par le droit d’auteur est considéré comme une façon de reproduire l’œuvre (Verbauwhede, 2006). Si les objets que l’on souhaite photographier sont des œuvres au sens de la loi (LDA art. 2 al.2) et qu’ils ne sont pas tombés dans le domaine public, ils sont protégés et il faut identifier qui détient les droits. Si c’est le musée lui-même, le musée peut les photographier et mettre les reproductions à disposition du public. Si ce n’est pas le musée, il faudra une autorisation de l’auteur pour les photographier et éventuellement payer une redevance même si le musée est le propriétaire de l’œuvre. Le musée est généralement propriétaire de ses œuvres, mais n’a pas toujours les droits sur ses œuvres. « La propriété incorporelle est indépendante de la propriété de l’objet matériel […] » (Pierrat, 2017). Le nom de l’auteur de l’œuvre devra aussi être mentionné sur la photo (Verbauwhede, 2006).
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Table des matières
1. Introduction
1.1 Mandat
1.2 Présentation du Site et Musée romains d’Avenches (SMRA)
1.2.1 Statut, autorité de tutelle
1.2.2 Missions
1.3 Description du projet du SMRA relatif à la politique de diffusion des images
1.4 Définitions
1.5 Objectif général
1.5.1 Objectifs spécifiques
1.6 Axes de recherche et questions de recherche
1.7 Périmètre de la recherche
2. Revue de la littérature
2.1 Contexte muséal, évolution des musées
2.2 Contexte juridique
2.2.1 Le droit à l’image, droits de la personnalité (CC) et loi sur la protection des données (LPD)
2.2.2 Le droit des contrats, code des obligations (CO)
2.2.3 Propriété intellectuelle, loi sur le droit d’auteur (LDA)
2.3 Politique d’acquisition, réalisation et gestion des photos
2.3.1 Les photographes
2.3.2 Contrat de cession ou contrat de licence
2.3.3 Les droits d’auteur liés aux photos, le crédit photo, le copyright
2.3.4 Les droits liés aux objets de la collection et le droit au profit du propriétaire matériel
2.3.5 Représentation des personnes et des monuments : le droit à l’image et la liberté de panorama
2.3.6 Les inventaires
2.4 Politique de mise en ligne et suivi des images
2.4.1 Présentation des collections sur internet et les réseaux sociaux
2.4.2 Description de l’objet mis en ligne
2.4.3 Suivi des images publiées sur le web
2.4.4 Suivi des images publiées sur les réseaux sociaux
2.4.5 Les images publiées sous licence Creative Commons (CC)
2.5 Politique liée à l’utilisation des photos, conditions d’utilisation
2.5.1 L’utilisation des images
2.5.2 Conditions générales d’utilisation (CGU) des photos
2.5.3 Les photos prises au musée et leur utilisation ; droit du maître des lieux
3. Analyse de l’existant
3.1 Collections et fonds du SMRA
3.2 Politique de réalisation, d’acquisition et gestion des photos
3.3 Politique de mise en ligne des images
3.4 Politique liée à l’utilisation des images, conditions générales
3.4.1 Prise de vues au musée et utilisation de ces photos
4. Méthodologie
4.1 Introduction
4.2 Revue de la littérature
4.3 Analyse de l’existant
4.4 Entretiens semi-dirigés et questionnaire en ligne
4.4.1 Procédure d’échantillonnage
4.4.2 Collecte des données
4.4.3 Méthode d’analyse des données
4.5 Validité et fiabilité de la recherche
4.6 Conclusion
5. Résultats des entrevues et du questionnaire en ligne
5.1 Politique d’acquisition, réalisation et gestion des photos
5.2 Politique de mise en ligne et suivi des images
5.3 Evaluation des usages, conditions d’utilisation des images
6. Interprétation des résultats et réponses aux questions de recherche
6.1 Politique d’acquisition, réalisation et gestion des photos
6.2 Politique de mise en ligne et suivi des images
6.3 Evaluation des usages, conditions d’utilisation des images
7. Conclusion, recommandations, livrables
8. Bibliographie
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