Poids des antibiotiques dans les médicaments délivrés en officine de ville

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Espèces bactériennes

Les deux bactéries les plus impliquées dans ces épisodes sont, comme pour les infections à EBLSE, E. coli et K. pneumoniae. K. pneumoniae est la bactérie retrouvée le plus fréquemment dans des épisodes d’EPC (54%) devant E. coli (38%) entre 2004 et 2016. Cependant il semble qu’E. coli soit de plus en plus impliquée dans ces épisodes (augmentation continue de 24% en 2012 à 42% en 2015)42 . Les carbapénèmes étant des antibiotiques d’utilisation hospitalière, il est logique de voir la majorité des épisodes à EPC être d’origine hospitalière (jusqu’en 2015, 11% seulement ont été signalés par des laboratoires d’analyses médicales de ville sans pouvoir éliminer l’hypothèse que ces analyses étaient pour certaines celles de patients sortant d’hospitalisation). Mais l’implication de plus en plus fréquente d’E. coli dans ces épisodes d’EPC risque d’accélérer la transmission croisée de ce mécanisme de résistance et son expansion en dehors des hôpitaux.

Evolution et diffusion

Depuis 2004 et la mise en place des signalements des cas d’infections et de colonisations à EPC, Santé Publique France constitue chaque année un bilan national des épisodes impliquant des EPC via les déclarations d’infections nosocomiales des établissements de santé et via les déclarations des agences régionales de santé et du CNR de la résistance aux antibiotiques42. Le premier épisode déclaré l’a été en 2004 et, jusqu’en 2009, seulement 9 épisodes ont été déclarés, les infections à EPC (lorsqu’il y en avait) représentant chaque année moins de 1% des infections nosocomiales signalées. Depuis 2009 jusqu’à 2016, 3 595 épisodes de plus ont été déclarés, portant à 3 604 le nombre d’épisodes déclarés impliquant des EPC (Figure 18). Ces 3 604 épisodes concernent 5 541 patients (les épisodes regroupant plusieurs patients lorsqu’un lien épidémiologique est établi entre eux). Par année à partir de 2009, ce sont dix épisodes déclarés en 2009, 28 en 2010, 113 en 2011, 233 en 2012, 400 en 2013, 650 en 2014, 938 en 2015 et 1 223 en 2016. Le nombre d’épisodes augmente chaque année et les infections nosocomiales impliquant une EPC sont de plus en plus nombreuses. En 2011, les infections nosocomiales impliquant une EPC ne représentaient seulement que 1% de la totalité des infections nosocomiales signalées.

Enterococcus faecium résistant aux glycopeptides

E. faecium est une bactérie entérocoque commensale du tube digestif également retrouvé dans l’environnement. Elle est résistante aux glycopeptides et est définie parmi les BHRe, comme les EPC. E. faecium est résistante naturellement à certaines pénicillines (G et M), aux monobactams, aux pénèmes, aux aminosides ou encore aux fluoroquinolones62. La résistance aux Glycopeptides (vancomycine et teicoplanine) a été provoquée par l’utilisation répétée de ces molécules, souvent pour le traitement des diarrhées infectieuses à Clostridium difficile (en partie aux Etats-Unis) 63 . Les bactéries E. faecium ont acquis des gènes de résistance plasmidiques nommés Van, créant des défauts d’affinité de la cible pour l’antibiotique (en particulier Van A)9. On retrouve essentiellement E. faecium dans des infections pulmonaires, urinaires et cutanées. Mais ces BHRe sont très peu virulentes, prises de manières isolées. Leur risque infectieux est faible. Elles ont un impact sur la morbimortalité lorsqu’elles sont associées à des terrains poly-pathologiques engageant déjà le pronostic vital ou des situations à risque comme des situations d’immunodépression ou d’hémodialyse par exemple. Le pronostic vital sera plus influencé par la nature de la pathologie, que par la résistance d’E. faecium. C’est d’ailleurs ce qui a permis à cette résistance de pouvoir se diffuser largement. Les bactéries E. faecium résistantes aux glycopeptides colonisant sans bruit le tube digestif, les recommandations afin de limiter leur diffusion ont été tardives. Elles sont essentiellement propagées à l’hôpital par des contacts indirects de personnes infectées à non infectées, via les équipes de soins ou du matériel contaminé. Mais elles peuvent très bien se retrouver colonisées chez des personnes n’ayant aucun antécédent de séjour hospitalier. Ces bactéries peuvent survivre dans les selles jusqu’à plusieurs mois, leur laissant l’opportunité d’être transmises à d’autres personnes après une sortie d’hospitalisation, ainsi que d’être disséminées dans l’environnement, où elles forment un réservoir de contamination (dans l’eau, les végétaux ou parmi les animaux). Le portage en collectivité est la plupart du temps asymptomatique, et ne génère aucune ou très peu d’infections. C’est ce risque écologique qui fait des bactéries E. faecium résistant aux glycopeptides des BHRe. Les autorités sanitaires redoutent un risque de transmission croisée du gène de résistance Van A, vers les souches de SARM, ce qui pourrait provoquer l’émergence de bactéries SARM toto-résistantes et créer de nombreuses impasses thérapeutiques9.
Pour le moment ce transfert de gènes de résistance reste exceptionnel. On dénombre à ce jour, environ une dizaine de cas dans le monde de souches de SARM ayant une résistance aux glycopeptides acquises grâce à des entérocoques résistant aux glycopeptides (ERG)63. Il est donc essentiel de maîtriser la diffusion de ces BHRe ainsi que l’usage des glycopeptides pour diminuer la pression de sélection exercé sur ces bactéries entérocoques.
De nouvelles molécules ont été commercialisées afin de diminuer l’utilisation des glycopeptides comme par exemple l’association quinupristine-dalfopristine ou le linézolide, mais des résistances ont commencé à apparaître. Deux autres molécules sont venues ensuite : la tigécycline et la daptomycine. Ces dernières sont actives sur les souches résistantes aux deux précédents antibiotiques mais les retours d’expériences cliniques sont encore limités, rendant leur utilisation délicate97.
E. faecium n’est pas le seul ERG mais représente la grande majorité des cas. A elle seule, elle représente 91,8% à 98,2% des cas parmi au moins neufs espèces d’ERG relevées par le CNR de la résistance aux antibiotiques entre 2006 et 201656.
L’évolution des souches résistantes à la Vancomycine d’E. faecium observée via le réseau EARS-Net France est très satisfaisante29. Après un pic en 2004 de 5%, la proportion de souches résistantes a diminué de façon croissante pour varier entre 0,8% et 0,6% depuis maintenant 2012. En 2017, la France était le 7ème pays avec le plus faible pourcentage de souches d’E. Faecium résistantes à la Vancomycine (0,8%), bien inférieur à la moyenne européenne (14,9%)27. Une évolution à la baisse est aussi enregistrée via les données des enquêtes nationales de prévalence des infections nosocomiales entre 2006 et 2012. Le pourcentage de souches résistantes a quasiment diminué de moitié, passant de 8,6% à 4,4%. Cependant sur la période d’analyse qui a suivi de 2012 à 2017, ce pourcentage a légèrement augmenté (5,07% en 2017)52,53. Un rapport de Santé Publique France a estimé de 2001 à 2015 l’évolution des infections nosocomiales à ERG via le SIN, qui reçoit et collecte tout au long de l’année les signalements d’infections nosocomiales des établissements de santé62. Au total, parmi tous les signalements d’infections nosocomiales concernant une ERG entre 2012 et 2015 (avant 2012, le statut du signalement, infecté et/ou colonisé, n’était pas renseigné), 84% représentaient une colonisation pour seulement 8% d’infections, et 3% des cas représentaient une colonisation liée à une infection. Ces chiffres viennent confirmer le caractère peu virulent de ces ERG.
Le nombre de signalements d’ERG, a connu une hausse importante à partir de 2007, avant de se stabiliser à des valeurs qui restent supérieures aux premières années d‘études. De 2001 jusqu’à 2006, le nombre de signalements restait inférieur à 50 par année. En 2007 et 2008, ce sont près de 150 et 245 signalements qui ont été transmis. Cette augmentation rapide s’explique en partie par une succession d’épisodes épidémiques régionaux. Depuis 2009, le nombre de signalements oscille entre 110 et 155 par année, et sur les six premiers mois de l’année 2015, 114 cas avaient été déclarés. De plus, même si le nombre de signalements d’ERG a diminué depuis 2009 après un pic observé entre 2007 et 2009, on observe à nouveau une augmentation lente et continue de la proportion d’infections associées aux soins dues à des ERG vis-à-vis des autres infections associées aux soins signalées: exceptée la période épidémique de 2008, entre 2010 et 2015, la proportion est passée de 7,2% à 9,9%, soit plus de 10 fois plus que les 0,7% de 2003.
Si la proportion de souches résistantes d’ERG diminue depuis maintenant une dizaine d’années, le nombre d’infections survenant au cours d’une hospitalisation concernant ces bactéries résistantes paraît quant à lui avoir augmenté, ce qui démontre une diffusion encore présente de ces BHRe (Figure 24).

Mobilisation sanitaire mise en place

La France et le Ministère de la santé prenant conscience de ce risque sanitaire grandissant, a commencé à se mobiliser dans le début des années 2000. Trois plans nationaux d’alerte sur les antibiotiques ont été mis en places lors des 15 dernières années (plans 2001-2005, 2007-2010 et 2011-2016), en collaboration avec les différentes instances sanitaires comme la Haute autorité de santé (HAS), l’Institut national de veille sanitaire (INVS), la Société de pathologie infectieuse de langue française (SPILF), l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), ou encore l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), afin de réguler et rationnaliser la prescription d’antibiotiques et diminuer leur consommation, et parvenir à leur bon usage et la restauration de leur efficacité. Ces différents plans ont pour but de mobiliser tous les acteurs et organismes pouvant à un moment donné s’inscrire dans le circuit du médicament antibiotique, autant au niveau de la santé humaine qu’animale, en atteste la présence au sein de ces deux milieux de santé, de résistances bactériennes identiques. Cet environnement bactérien menaçant et problématique, est présent dans tous les secteurs d’activité médicale 66.

Sensibilisation des patients et bon usage du médicament

Les patients sont les derniers acteurs dans le circuit d’utilisation de l’antibiotique. Leur adhésion est capitale car c’est d’eux que dépendra le respect et la réussite de toutes les mesures mises en place en amont. La sensibilisation et l’éducation au bon usage des antibiotiques est donc une mission primordiale. La transmission de l’information peut se faire à deux niveaux, via internet, la presse, des émissions et des publicités télévisées, ou sur le terrain via les différents professionnels de santé, l’assurance maladie, ou encore les autorités sanitaires. Au début des années 2000 est apparu le premier slogan publicitaire à la télévision : « les antibiotiques, c’est pas automatique » ou encore quelques années plus tard « les antibiotiques si on les utilise à tort, ils deviendront moins forts ». Il a fallu lutter d’abord contre l’idée reçue dans l’esprit des gens que les antibiotiques pouvaient soigner n’importe quelle pathologie. Encore aujourd’hui, le simple message expliquant que les antibiotiques ne seront efficaces que contre des infections impliquant des bactéries tient un rôle central dans les stratégies de communication du grand public.
L’Assurance-Maladie en association avec le CPias par exemple, développe des campagnes d’informations : chaque année est organisée depuis environ dix ans la journée européenne d’informations sur les antibiotiques 67. Des affiches, des dépliants informatifs, ou des films sont distribués dans les caisses d’assurances maladie, dans les cabinets médicaux, les hôpitaux, les pharmacies, afin de toucher le plus grand nombre de personnes. Des messages simples comme « les antibiotiques juste ce qu’il faut » ou « la bonne molécule, le bon dosage, la bonne durée » doivent permettre de renseigner les patients et apporter une nouvelle prise de conscience concernant ces médicaments 68. Des fiches thématiques pratiques sur les principales infections (angine, bronchite, cystite, grippe, etc.) et sur tous les antibiotiques pouvant être prescrits en ville sont partagées sur internet, avec des conseils simples pour respecter la bonne observance des traitements et limiter le risque infectieux 69.
Il est important que les professionnels de santé relaient ce message sur le terrain auprès des patients, afin de pouvoir modifier efficacement les comportements. Les patients n’ont pas tous accès aux mêmes types d’informations, et ils n’ont pas tous les mêmes connaissances scientifiques permettant de comprendre pleinement les risques et les enjeux de ce problème de santé publique. Il est facile pour un patient de relativiser l’importance de ces traitements et leur impact environnemental. Dans près de sept cas sur dix, ces traitements sont prescrits par des médecins généralistes, environ 87% ont une durée de prescription courte entre un et huit jours, et la plupart du temps les patients ont des traitements antibiotiques peu répétés dans l’année. L’amélioration des symptômes est souvent rapide et le rétablissement complet. Les patients peuvent avoir l’impression de prendre un traitement anodin, dans des situations ne laissant pas apparaître des facteurs de gravités70. Pour preuve, l’automédication qui peut être encore faite aujourd’hui avec ce type de médicament, qui reste un des obstacles important au bon usage des antibiotiques et une des causes de résistance bactérienne 71.
L’automédication est dangereuse pour n’importe quel type de médicament, sans avis du médecin ou du pharmacien, qu’elle concerne des produits délivrables avec ou sans ordonnance. Pourtant en France beaucoup de patients y ont recours : une recherche récente réalisée dans le grand Paris révélait ainsi que plus de 53% des individus ont eu recours à une automédication au cours du mois écoulé72. L’exemple simple du paracétamol, d’apparence sûre et sans risque, pour lequel la consommation française est certainement l’une des plus fortes en Europe, n’est pourtant pas sans danger, constituant la première cause de greffe hépatique d’origine médicamenteuse comme rappelé récemment par l’ANSM 73.
Cette automédication est d’autant plus risquée lorsqu’elle intervient pour des médicaments concernant d’anciennes prescriptions, où aucun conseil et aucun suivi ne sera établi par un professionnel de santé (contrairement à une vente en pharmacie où le patient aura eu le conseil associé à son traitement). C’est le cas pour l’automédication concernant les antibiotiques, qui peut être encore de plus lourde conséquence avec le risque de résistances bactériennes. Le piège réside dans le caractère silencieux des conséquences de cette automédication antibiotique. Les patients mésestiment, sous-estiment ou ignorent les conséquences notoires d’un mauvais usage des antibiotiques et du risque de résistance bactérienne, excepté celui des effets secondaires, au sujet desquels ils ne sont pas toujours réellement bien informés qui plus est 74. Les patients prennent le médicament dans le but d’aller mieux ou non. Le seul point pouvant les préoccuper est celui d’aller mieux sans avoir de désagréments, c’est à dire de ne pas avoir d’effets indésirables, digestifs du type épisode diarrhéique ou de candidoses. Et encore certains patients se disent « résistants » et ne pas craindre de prendre des antibiotiques sans ordonnance. Cela peut paraître caricatural, mais c’est ce qui est souvent perçu au comptoir lors d’échanges avec les patients, concernant les traitements antibiotiques. Le cas d’automédication classique est celui du patient qui déclare avoir eu des symptômes semblables à ceux qu’ils avaient pu contracter lors d’une infection par le passé. Il a donc pris le même traitement qu’il avait eu par prescription de son médecin, a fini la boîte qu’il lui restait et prétend aller mieux. Si l’état de santé ressenti est meilleur, cela confortera le patient dans sa conviction d’avoir pris la bonne décision et cela le motivera d’autant plus à se soigner seul dans le futur, dans des situations d’infections similaires ou pas, ce qui est encore plus dramatique.

Recommandations de bonnes pratiques et variabilité des pratiques de prescription

Des divergences apparaissent encore bien souvent dans les prescriptions d’antibiotiques. Une étude comparaît en 2013 et 2014 les prescriptions à destination d’enfants de pédiatres de villes appartenant à un groupe de recherche en pathologies infectieuse (groupe ACTIV), dont les prescriptions étaient conformes aux dernières recommandations, à celles de pédiatres classiques et de médecins généralistes pendant cinq mois 82. Il était tout d’abord observé une importante variabilité au niveau de l’indication principale occasionnant une prescription d’antibiotique : pour les trois types de prescripteurs l’otite moyenne aigue était la première indication mais dans 72,6% des cas pour les pédiatres du groupe ACTIV, 33% des cas pour les pédiatres classiques, et dans 25% des cas pour les médecins généralistes. Mais surtout, des variations non négligeables étaient observées au niveau du choix des molécules antibiotiques. Ces prescripteurs prescrivaient tous le plus fréquemment l’amoxicilline (recommandé en première intention) mais là aussi de manière disparate : respectivement dans 71,7%, 49,9% et 28,2% de leurs cas. Les céphalosporines, traitement de seconde intention, étaient prescrites dans 6,4%, 19% et 19,9% des cas. De manière plus générale, 10,4% des consultations des pédiatres du groupe ACTIV avaient amené à une prescription d’antibiotiques, pour 12% pour les pédiatres. Pour réduire ces différences de prescription, la création et la diffusion de protocoles nationaux de prescriptions avec des arbres décisionnels et de guides référentiels régulièrement actualisés doivent permettre de guider les prescripteurs dans leur pratique. Un nombre important de recommandations existent mais peu de référentiels officiels sont validés par la HAS. Pour que ces protocoles soient respectés et pour encourager tous les professionnels de santé à les utiliser, leur accès et leur utilisation doivent être simples. Comme souvent, beaucoup de supports pédagogiques peuvent être transmis, et une centralisation de toute cette base de données doit être faite pour être vraiment prise en compte. Le développement et la diffusion d’outils d’aide à la décision et à la prescription sont encouragés, comme par exemple la création d’application pour Smartphones d’aide à la prescription par des services universitaires ou des cliniciens et enseignants38.
La HAS partage également des fiches avec des recommandations de bon usage selon le type d’infection avec, indiquée en fonction de la pathologie, la molécule à prescrire en première intention, la durée, le dosage et, selon le type de personne, la thérapeutique de seconde intention en cas de contre-indication 85. L’utilisation de tous ces outils et logiciels d’aide à la prescription doit permettre également d’être plus vigilant notamment sur les durées de prescriptions des antibiothérapies. Des groupes de travail d’expert proposent par exemple dans les recommanda-tions des durées prescription, de ne plus proposer une fourchette de temps (entre sept et dix jours) mais une durée unique (sept jours) afin de réduire les durées de traitement80,86. Les spé-cialistes s’accordent à dire que la réduction du temps d’exposition aux antibiotiques est primor-diale pour lutter contre les résistances bactériennes 87.

Utilisation des tests rapides d’orientation diagnostique et prescription d’antibiotiques

Afin d’encourager le bon usage des antibiotiques par les prescripteurs, la Rémunération sur Objectif de Santé Publique (ROSP) a intégré en 2016 un nouvel indicateur concernant la prescription antibiotique, celui de la part de patients traités par des antibiotiques particulière-ment générateurs d’antibiorésistance (amoxicilline-acide clavulanique, céphalosporine de 3ème et 4ème générations et fluoroquinolones) 88. Une charte d’engagement publique visant tous les prescripteurs, de ville ou d’hôpital ainsi que les vétérinaires, vise à être officialisée afin de certifier l’engagement des prescripteurs à bien prescrire 89. La sensibilisation des praticiens au bon usage des antibiotiques passe également par le respect de recommandations de diagnostic. Il est important d’inciter les professionnels de santé, médecins et très prochainement les phar-maciens, à utiliser les tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) sur les agents micro-biens comme pour des angines 90. Selon le ministère de la santé, ils sont insuffisamment utili-sés : en 2017 seulement 40% des cabinets médicaux en ont commandé alors que ces dispositifs sont gratuits et, en 2011, on estimait qu’un médecin généraliste sur quatre et un pédiatre sur trois seulement, faisaient usage de ces tests. Augmenter leur utilisation est une des actions prio-ritaires désignée dans le secteur de soin de ville : cela permettrait de réduire les prescriptions injustifiées pour des maladies virales. Une récente étude dans le Sud-Est de la France évaluait l’utilisation des tests diagnostiques rapides des antigènes (TDRA) pour des pharyngites aiguës par des médecins généralistes sur la base d’une vignette rapportant le cas clinique d’un patient face auquel les médecins répondants étaient randomisés entre un bras ne disposant pas et un bras disposant d’un TDRA91. Sans surprise, 62% des médecins ne disposant pas d’un TDRA déclaraient vouloir prescrire un antibiotique. De façon beaucoup plus surprenante, un tiers de ceux disposant d’un TDRA déclaraient ne pas vouloir l’utiliser et, parmi eux, plus des trois-quarts affichaient l’intention de prescrire un antibiotique. Enfin chez les deux tiers des médecins disposant dans le scénario d’un TDRA et entendant l’utiliser, la proportion de ceux déterminés à prescrire un antibiotique malgré un résultat de test négatif n’était plus que de 13%. Même si elle se heurte indéniablement à un ensemble de représentations pour l’essentiel défavorables au sujet du test de la part d’une proportion non-négligeable de la population de médecins généra-listes libéraux (acceptabilité par les patients, temps requis, approvisionnement et maintenance, fiabilité du test), cet article donne quelques éléments semblant soutenir l’idée qu’une mise à disposition du test permettrait de réduire de façon conséquente (13% contre 62%) le recours aux antibiotiques dans une situation somme toute fréquente de consultation au cabinet.

Formation et information des professionnels de santé

Pour favoriser leur usage, des formations sur leur utilisation doivent être multipliées et l’élargissement de ces tests à de nouvelles pathologies serait une aide de plus apportée dans le diagnostic des patriciens. La formation initiale des professionnels de santé au bon usage des antibiotiques doit en ce sens s’organiser le plus tôt possible. Il a donc été décidé logiquement d’inclure comme enseignement la juste utilisation des antibiotiques dans le cursus universitaire des futurs professionnels de santé. Ces enseignements doivent permettre une prise de conscience plus précoce de ce problème de santé publique et permettre l’adhésion du plus grand nombre aux nouvelles pratiques professionnelles. Des formations sur les mesures d’hygiène doivent également être organisées afin de prévenir au maximum le risque de contamination, de transmission croisées, et les infections associées aux soins, que ce soit en ville ou durant les séjours d’hospitalisations ou les phases de retour à domicile.
Ces enseignements ne concernent pas exclusivement les médecins et sont inclus dans les programmes de toutes les professions : pharmaciens, dentistes, sages-femmes, infirmiers, vétérinaires. En théorie aucun professionnel de santé pouvant faire usage des antibiotiques, ne sera pas informé et non formé pour lutter contre le phénomène de résistance bactérienne.
La formation initiale doit être associée à un développement professionnel continu incluant cette juste utilisation des antibiotiques. Celle-ci doit permettre d’améliorer continuellement la qualité de soin et mobiliser continuellement l’ensemble des professionnels de santé. Tous n’ont peut-être pas été assez sensibilisés et formés à cette problématique de santé publique. Ce développement professionnel continu, à travers des modules de formations, des actions de sensibilisations, doit permettre de remettre à niveaux les professionnels de santé qui pourraient ne pas être avertis des dernières recommandations, et maintenir un respect du bon usage des antibiotiques.
La SPILF transmet régulièrement des bilans d’informations sur les dernières actualités, l’évolution des situations, les actions mises en places ou encore les nouvelles recommandations, et permet de maintenir une communication permanente sur cet enjeu de santé publique 92.

Evaluation et amélioration des pratiques professionnelles en milieu ambulatoire

L’évaluation des pratiques professionnelles doit également être développée afin de pouvoir axer et adapter les actions de formations envers les acteurs de santé sur les points les plus sensibles ou défaillants. Elle reste trop peu évaluée.
La Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAM-TS) a ainsi mis en place un service d’auto-évaluation pour les médecins généralistes de villes via la déclaration de leur prescription. Cela permet une analyse quantitative et qualitative de leurs actes et une comparaison, via des moyennes régionales, de leurs prescriptions avec celles de leurs confrères. Ces évaluations permettront de créer un partage d’expérience entre professionnels de santé, qui pourront situer leur pratique en comparaison avec celle de confrère. Ces évaluations permettront aussi d’accompagner et encadrer continuellement les professionnels de santé dans leur pratique. L’objectif est d’étendre ce système d’évaluation et de suivi à tous les spécialistes 93.
Les agences régionales de santé (ARS) et les services d’Assurance-Maladie sont amenés à mettre en place également un service de conseil en antibiothérapie via des infectiologues ou des référents en antibiothérapie, afin de pouvoir répondre à la demande de tous les professionnels de santé. Ce service de conseil peut être physique, téléphonique ou télématique. Afin de faciliter encore plus ce conseil, la réflexion de création de centres régionaux de conseil en antibiothérapie spécialisés dans la coordination et la réalisation de ces tâches à plus grande échelle est en cours.
La diffusion de l’information est un autre point clé pour les ARS, afin d’améliorer les pratiques professionnelles. L’accès, comme on l’a dit, aux données de prescriptions permettant aux praticiens de se repérer, mais aussi les données de consommations, de résistances bactériennes sont essentielles pour aider les prescripteurs par exemple à adapter leur prescription. Des outils de communications et des actions vers les prescripteurs sont développés pour améliorer l’accès aux informations pour les professionnels, et être sûr de pouvoir transmettre au plus grand nombre les dernières actions prioritaires ciblées.
Entre autre, parmi ces actions prioritaires, l’une d’elles ciblée dans le secteur de soin de ville est la promotion de la vaccination. Sujet controversé ces derniers temps, elle doit être encouragée autant que possible. Les médecins généralistes et les pharmaciens d’officine ont un rôle important à jouer dans le respect du calendrier vaccinal. La vaccination antigrippale par exemple, est un levier important durant la période hivernale pour pouvoir prévenir des états infectieux et la prise concomitante d’antibiotiques.
Un autre axe prioritaire est la prise en considération dans les prescriptions de la liste d’antibiotiques critiques. Des antibiotiques sont par exemple particulièrement ciblés par des mesures de précaution : l’amoxicilline-acide clavulanique, les céphalosporines de troisième génération et les fluoroquinolones.

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Table des matières

PARTIE 1. EVOLUTION DES RESISTANCES BACTERIENNES ET CONSOMMATION D’ANTIBIOTIQUES EN FRANCE
1. BACTERIES, ANTIBIOTIQUES, ECOLOGIE ET RESISTANCES
1.1. Résistance naturelle ou acquise
1.2. Pression de sélection et diffusion des résistances
1.3. Impasses thérapeutiques
2. EPIDEMIOLOGIE DES RESISTANCES BACTERIENNES
2.1. Entérobactéries productrices de bêta-lactamases à spectre étendu (EBLSE)
Densité d’incidence
Espèces bactériennes
2.1.2.1. Escherichia coli
2.1.2.2. Klebsiella pneumoniae
Milieu hospitalier et communautaire
2.2. Entérobactéries productrices de carbapénèmases (EPC)
Espèces bactériennes
Evolution et diffusion
2.3. Streptococcus pneumoniae
2.4. Pseudomonas aeruginosa
2.5. Staphylococcus aureus résistant à la Méticilline (SARM)
2.6. Enterococcus faecium résistant aux glycopeptides
2.7. Neisseria gonorrhoeae: exemple de diminution de l’arsenal thérapeutique
3. MOBILISATION SANITAIRE MISE EN PLACE
3.1. Sensibilisation des patients et bon usage du médicament
3.2. Amélioration des pratiques professionnels
Recommandations de bonnes pratiques et variabilité des pratiques de prescription
Utilisation des tests rapides d’orientation diagnostique et prescription d’antibiotiques
Formation et information des professionnels de santé
Evaluation et amélioration des pratiques professionnelles en milieu ambulatoire
Réévaluation des antibiothérapies
Démarche d’évaluation des pratiques professionnelles dans les établissements de santé
3.3. Suivi épidémiologique et orientation de la recherche contre les antibiorésistances
Une incitation financière faible pour la recherche-développement de nouvelles molécules
La réorganisation nécessaire de la recherche
La nécessité d’améliorer la connaissance et la surveillance des phénomènes
d’antibiorésistance
3.3.3.1. Des réseaux de surveillance à développer
3.3.3.2. L’étude Burden BMR
4. LA CONSOMMATION D’ANTIBIOTIQUES EN FRANCE
4.1. Place de la consommation française en Europe
4.2. Répartition et évolution de délivrance d’antibiotiques en France
Poids des antibiotiques dans les médicaments délivrés en officine de ville
Evolution en valeur
Evolution en volume
Evolution du prix moyen
4.3. Antibiotiques critiques
Amoxicilline-Acide Clavulanique
L’Amoxicilline
Céphalosporines de troisième et quatrième génération
Les carbapénèmes
La Colistine
Les fluoroquinolones
4.4. Autres antibiotiques non critiques
5. UN NOUVEL ACTE PHARMACEUTIQUE A L’ESSAI
5.1. Expérimentation de la dispensation à l’unité des antibiotiques en officine
5.2. Place et rôle du pharmacien
5.3. Prescription, conditionnement et surplus d’unités
5.4. Rationalisation de la dépense de pharmacie
PARTIE 2. DISPENSATION A L’UNITE DES ANTIBIOTIQUES A L’OFFICINE : MOTIVATIONS, ESPOIRS ET FREINS
1. RESULTATS PRINCIPAUX D’UNE EXPERIMENTATION NATIONALE
1.1. Populations étudiées et designs d’enquêtes
Recrutement des patients
Enquête téléphonique patient
Enquête pharmacie
1.2. Principales caractéristiques
Caractéristiques des pharmacies participantes
Caractéristiques des effectifs officinaux
Caractéristiques des patients recrutés
1.3. Protocole de la délivrance à l’unité des antibiotiques
1.4. Résultats de l’expérimentation
Acceptation et refus par les patients
1.4.1.1. Refus et démographie
1.4.1.2. Refus et niveau de revenus
1.4.1.3. Refus et genre
1.4.1.4. Refus et âge
1.4.1.5. Refus en fonction de l’antibiotique
Opinions des patients sur la DAU
1.4.2.1. Opinions défavorables sur la délivrance à l’unité des antibiotiques
1.4.2.2. L’automédication
1.4.2.2.1. Enseignements de l’expérimentation de dispensation à l’unité
1.4.2.2.2. Demande d’antibiotiques hors prescription médicale au comptoir de l’officine
1.4.2.2.3. Patients auto-prescripteurs
1.4.2.2.4. Patients rompus à l’usage des traitements antibiotiques
1.4.2.2.5. Rôles du pharmacien face à la demande spontanée d’antibiotiques
1.4.2.2.6. Délivrances d’antibiotiques et antibiorésistances
1.4.2.3. Traçabilité des médicaments
1.4.2.4. Le conditionnement en boîtes
1.4.2.5. La perte de comprimés
1.4.2.6. Autres motifs
2. RESULTATS D’UNE ENQUETE ORIGINALE CONDUITE EN OFFICINE DE VILLE
2.1. Matériel et méthode
Enquête
Exploitations statistiques
2.2. Description de l’échantillon des répondants
2.3. Opinions et comportements envers la consommation d’antibiotiques
2.4. Connaissances et expériences des résistances bactériennes
2.5. Disposition à la dispensation à l’unité des antibiotiques
2.6. Les motivations des patients pour la DAU des antibiotiques
Réduction du gaspillage
Réduction des dépenses de santé de l’Assurance-Maladie
Réduction de la pollution antibiotique environnementale et réduction des
résistances bactériennes
Contribution à la santé publique et amélioration de la qualité de vie
personnelle
Confiance accordée au professionnel de santé
Diminuer le nombre de médicaments stockés au domicile et réduire
l’encombrement des boîtes au niveau du rangement
Aide à l’observance du traitement
2.7. Limites
3. OPINIONS ET RETOUR D’EXPERIENCE DU PERSONNEL DE PHARMACIE SUR LA DELIVRANCE A L’UNITE DES ANTIBIOTIQUES
3.1. Description du personnel de pharmacie participant
3.2. Opinions sur la délivrance à l’unité des antibiotiques avant le début de l’expérimentation
Acceptation de la délivrance à l’unité des antibiotiques
Principaux avantages et inconvénients cités
3.3. Opinions sur la DAU et constats avant et après une année d’expérimentation pour les pharmacies expérimentatrices
Diminution du nombre d’antibiotiques délivrés et réduction du gaspillage
Limitation de l’automédication et amélioration de l’observance
3.4. Mesures de l’observance via le comptage des unités restantes
Mesures de l’observance via le comptage des unités restantes
Mesure de l’observance par l’échelle de Morisky
3.5. Limitation du temps consacré à informer le patient ou amélioration des conseils sur la prise du traitement
3.6. Augmentation des files d’attentes et ralentissement de l’activité
3.7. Les temps nécessaires à la DAU
Comparaison des temps totaux de délivrance
Temps liés au déconditionnement et à la délivrance du nombre requis de comprimés
Temps requis par l’information du patient sur la DAU
Rangement supplémentaire pour la pharmacie et problèmes de gestion de stock
Réduction de la traçabilité du médicament
3.8. Impact économique de la DAU des antibiotiques
DAU et dépenses d’Assurance-Maladie
3.8.1.1. Effets sur les dépenses de médicaments à court terme
3.8.1.2. Effets sur les dépenses d’Assurance-Maladie à moyen et long terme
Impact sur les résultats économiques des officines
3.8.2.1. Impact sur le chiffre d’affaires
3.8.2.2. Impact sur les marges
3.8.2.3. Coût d’opportunité de la DAU et honoraire de dispensation spécifique
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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