Plurilinguisme et contamination
Méthodologie
Dans la mesure où toute méthode est fondamentalement liée à l’objet d’étude, il nous a semblé nécessaire de retenir une démarche reposant surtout sur la lexicologie dans la mesure où la lexie reste une unité linguistique bien qu’on ne puisse rejeter l’aspect sociolinguistique en ce qu’il renvoie à un état et à une situation socioculturelle donnée qui justifierait les interprétations sémantiques. Pour mener à bien notre travail, nous avons jugé intéressant que le premier chapitre soit consacrée à la situation plurilingue en Algérie, dans la mesure où les phénomènes enregistrés sont le fruit d’une situation plurilingue par excellence. Dans ce même chapître, nous nous intéresserons aux phénomènes de contamination7 proprement dite qui se trouveront analysés dans différents plans: lexical, morpho-syntaxique et sémantique. Dans le deuxième chapitre de notre travail, l’intérêt sera centré sur les emprunts et les xénismes faits de l’arabe et du berbère au français et de leur possibilité ou impossibilité d’intégration. Cette dernière sera étudiée sur trois niveaux d’abord phonétique, morpho-syntaxique et enfin sémantique même si les éléments de leurs intégrations peuvent parfois apparaître à deux des niveaux cités. Il s’agit pour le troisième chapitre d’étudier les néologismes dans leur processus de formation ainsi que leurs particularités sémantiques dans un contexte médiatique : celui des chroniques de Laâlam. Les références bibliographiques sur lesquelles nous nous sommes appuyés sont, selon nous, tributaires de l’étude visée. Elles sont utilisées surtout à des fins lexico-sémantique.
Le plurilinguisme
Qu’est-ce que le plurilinguisme ? Citons J. Dubois: « on dit d’un sujet parlant qu’il est plurilingue quand il utilise à l’intérieur d’une même communauté plusieurs langues selon le type de communication (…) et d’une communauté qu’elle est plurilingue lorsque plusieurs langues sont utilisées dans les divers types de communication 8». C’est également l’aptitude qu’a un sujet parlant à faire alternativement usage de plusieurs langues. De cela, la notion englobe-t-elle d’autres notions telles l’interférence ? F. Laroussi, quant à lui, dit du plurilinguisme [qu’il] « implique, d’une part, une diversité des langues, d’autre part, l’approbation d’une ou de plusieurs langues comme un véhicule culturel, ce qui donne lieu à la diversité culturelle ».9 Pour Cichon Et Kremnitz, le plurilinguisme « est la coexistence de plusieurs bilinguismes (enchevêtrés) ». En parlant ainsi de plurilinguisme, ce dernier peut être pris d’un point de vue individuel, celui du locuteur ou bien de celui de la société. En somme, une situation plurilingue est celle qui engendre au moins deux langues parlées (bilinguisme) par le locuteur parce que d’usage et ancrées dans la société.
Les linguistes et sociolinguistes ne sont pas unanimes quant aux appellations que pareilles situations décrivent. Pendant que certains parlent de plurilinguisme, d’autres lui préfèrent le terme de multilinguisme, d’autres encore s’arrêtent à la nomination de bilinguisme. Le terme le plus ancien et le plus généralement employé est celui de bilinguisme qui se limitait, dans son premier emploi pour certains, à désigner la compétence personnelle d’utilisation de deux langues10 distinguée des situations de trilinguisme, de quadrilinguisme et de plurilinguisme. Pour d’autres, toutes les questions touchant à la présence de deux langues dans la société et chez l’individu sont applicables à trois, quatre, cinq langues ou plus. De compétence, on ne parle plus de celle égale entre deux langues, désignée sous le terme de bilinguisme symétrique ou ambilinguisme, qui reste un idéal non atteint.
La situation d’un locuteur bi- ou plurilingue est une situation de maîtrise asymétrique des langues en questions ; l’une de ces dernières reste plus forte ou les compétences dans l’une restent différentes par rapport à l’autre11. De plus, la compétence d’emploi d’une langue n’est pas forcement signe de performance; les deux termes sont étroitement liés car l’emploi renforcé d’une langue affirme et agrandit la compétence tandis que son usage occasionnel, voire son abandon, la relègue au rang des langues passives et entraîne une diminution de la compétence disponible. Aussi, parler de plurilinguisme n’entraîne pas uniquement des aspects sur le plan individuel mais également sur le plan social car une langue est avant tout un produit social et elle ne peut être pensée en dehors de ce globe social qui la fait évoluer ou au contraire régresser voire même disparaître.
Aspect social du plurilinguisme
On indique par l’aspect social du plurilinguisme, les différents statuts sociaux que peuvent avoir les langues dans une communauté ou un Etat donné, et notamment du prestige dont elles peuvent jouir. Ce prestige est généralement inculqué par les instances de l’Etat à vouloir distribuer des rangs hiérarchiques aux langues. Ces langues dites prestigieuses reposent sur un consensus, celui de la grammaire qui doit répondre au « bon usage » au sein de la société mais également aux règles selon lesquelles la langue s’écrit car les langues « ne disposent pas toujours des institutions scientifiques qui élaborent des grammaires et des écritures référentielles, souvent leur forme référentielle est l’oeuvre d’individus »12. Nous pouvons citer l’exemple du berbère qui n’est pas codifié et ne répond pas à une norme d’écriture ; sa manifestation à l’écrit est plutôt faite par les caractères latins. Le prestige d’une langue par rapport à d’autres langues peut être traducteur d’une valeur symbolique que cette langue a pour ces locuteurs. Il n’y a pas uniquement les locuteurs d’une langue qui peuvent avoir une idée sur elle ; des valeurs voire des jugements peuvent émaner même d’individus qui ne parlent pas cette langue. Des jugements d’esthétique ou de sympathie, donc positifs, se greffent à ces langues dont les usagers sont des groupes sociaux importants.
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Table des matières
Introduction
1- Problématique
2- Objectifs
3- Méthodologie
4- Corpus
Chapitre I : Plurilinguisme et contamination
I- Le plurilinguisme
1- Qu’est-ce que le plurilinguisme ?.
1-1. Aspect individuel du plurilinguisme
1-2. Aspect social du plurilinguisme
2- Plurilinguisme et diglossie
3- Plurilinguisme et conflit linguistique
4– Le plurilinguisme en Algérie
4-1. Les langues en présence en Algérie
4-1.1. La langue arabe moderne
4-1.2. L’arabe dialectal
II- La contamination linguistique
5-1La contamination lexicale
5-2 La contamination phonétique
a) substitution de voyelles
b) substitution de consonnes
Chapitre II : xénisme et emprunt : possibilités d’intégration?
1- Xénisme ou emprunt ?.
2- Les motivations du xénisme et emprunt
3- Processus d’intégration des xénismes à la langue dans la langue emprunteuse
3-1..Intégration phonologique
a- Omission et commutation de phonèmes
b- Introduction d’un phonème nouveau
3-2.Tableau de transcription des consonnes arabes
3-2.1. Tableau des consonnes inexistantes en français
3-2.2. Tableau de transcription des voyelles arabe-français
3-3. Les signes complémentaires
3-4. Notation sur le système consonantique
3-5. Notation sur le système vocalique
3-5 1.Hésitation orthographique et usage de signes diacritiques
3-5.2. Les signes typographiques en tant qu’indice de xénisme
4- Intégration morpho-syntaxique
4-1.La catégorie du genre
4-1.1. Caractéristique du genre féminin
4-1.2. La marque des deux genres
4-1.3.L’article français en tant que marqueur du genre
4-1.3.1. Tableau des lexies du genre féminin
4-1.3.2. Tableau des lexies du genre masculin
Remarque
4-1.4. La marque du genre suffixé à la lexie
4-1.5. Les parties du discours en tant que marqueur du genre
4-2. La catégorie du nombre
4-2.1. Maintenir le pluriel de la langue donneuse
4-2.1.1. Pluriel externe
4-2.1.2.Pluriel interne
4-2.2. Adjonction de la marque du pluriel du français « s
4-2.3. Emploi des pluriels des deux langues
4-2.4. Invariabilité du nombre
4-2.5. La détermination
4-2.6.Caractéristique de l’article
4-2.6.1. Détermination des lexies arabes par l’article français
4-2.6.2. Maintenir l’article de la langue donneuse
4-2.6.3. Agglutination de l’article
4-2.6.4. Remarque sur l’article défini La
5- Intégration sémantique
5-1. Emploi et mode d’explication du xénisme
5-2. La fréquence comme critère d’une éventuelle intégration du xénisme
5-3. Contexte et signification
5-3.1.L’analyse des adages et expressions
5-3.2.Changement et évolution de sens
5-3.2.1.Dénotation vs connotation
Chapitre III : De la contamination à la néologie
1- La néologie
1-1.Les types de néologie
1-1.1. La néologie de forme
1-1.2. La néologie de sens
2- Le néologisme
2-1. Les deux types de néologismes
2-1.1 Néologismes ponctuels vs néologisme répétés
3- Repérage des néologismes et facteurs extralinguistiques
4-Les étapes de l’unité néologique
4-1. L’innovation
4-2. La connaissance
4-3. La persuasion
4-4. La diffusion
4-5. L’implantation
5-La fin du processus néologique
6- Examen de l’insertion de l’unité néologique
6-1. La fréquence comme élément de la durée et de l’intégration des néologismes
7- Les procédés de formation des néologismes
7-1. La néologie formelle
7-1.1. La dérivation
7-1.1.1 La dérivation préfixale
7-1.1.2 La dérivation suffixale
7-1.12.1. La dérivation hybride
7-1.1.2.2. Les dérivés sur la base d’un emprunt
7-1.1.2.3. Les dérivés sur la base d’un sigle
7-1.1.2.4 Dérivés sur la base d’un anthroponyme
7-1.1.2.5. Dérivés sur la base d’un toponyme
7.1.1.2.6. Dérivé sur la base d’une onomatopée
7-1.2.La composition
7-1.3. La troncation
7-1.4. La siglaison
7-2. La néologie sémantique
7-2.1. Les figures de la néologie sémantique
a- La métaphore
b- La métonymie
7-2.2. Le contexte en tant qu’élément de repérage du néologisme
7-2.3. Aspect connotatif de l’unité néologique
7-3. Motivation ou pas de l’unité néologique
Conclusion générale
Bibliographie
Résumé
Annexe
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