En Afrique subsaharienne, l’agriculture, l’élevage et la pêche ont toujours été les principales activités qui ont contribué au développement économique local et aux moyens de subsistance des communautés. La majeure partie de la population vit dans les campagnes. Au Sénégal, 57% de la population vit dans le monde rural (Banque Mondiale, 2010). Depuis quelques décennies, vu la précarité des conditions de vie dans le monde rural causée en grande partie par les nombreuses sécheresses des années 1970 ; et la baisse actuelle de la pluviométrie due au changement climatique, on assiste à une très forte migration.
Les migrations en général, sont une forme de réponse aux nécessités socio-économiques et écologiques. Elles traduisent également des stratégies communautaires d’adaptation et de survie. La région de Thiès particulièrement la Commune de Ngoundiane, constitue un véritable bastion de mobilité compte tenu de plusieurs facteurs notamment l’échec des politiques agricoles, la précarité des ressources naturelles, la faiblesse des revenus et les facteurs économiques. Au regard de tous ces facteurs environnementaux, politiques, sociodémographiques, la migration est devenue non seulement nationale, mais aussi sous régionale, régionale, et globale. Elle ne concerne plus seulement les jeunes en âge d’apprentissage de métier, et les hommes mais aussi les femmes qui souvent en tant que chefs de ménage sont à la recherche de conditions meilleures pour leur famille.
Aujourd’hui, les zones extractives en milieu rural constituent des points stratégiques où la migration bat son plein. Elles représentent à la fois d’espaces attractifs et répulsifs de migrants. Pour le cas de la zone Sud de la Commune de Ngoundiane qu’attirant plus les étrangers, elle représente un point de départ ou de transit pour la population locale active. Ainsi, le rôle et la place des migrations dans cette zone minière constituent l’une des questions les plus croustillantes qui ne cessent d’alimenter les débats. Elles représentent une source de revenu substantiel. Leur apport reste visible et déterminant dans presque toute la vie des ménages : nourriture, habillement, santé, événements sociaux comme le mariage, baptêmes, décès etc. Ainsi, le PADT de la Communauté rurale de Ngoundiane; 1998 / 1999 révèle dans le « domaine de l’habitat malgré la faiblesse des revenus agricoles, l’habitat de la commune est constitué de plus de 64 % de bâtiments en ciment. Ceci est possible grâce à l’exode. Dans certains villages, les exodés ont construit des salles de classes ou participent à la réparation de forage. Dans les localités de Diack les femmes ont équipé leur chambre en payant des armoires, des lits en bois et des tapis. Elles s’équipent aussi en ustensiles, en payant des fourneaux à gaz et des assiettes.» Parallèlement, le petit commerce de services prospère grâce à leurs investissements. Tous ces derniers ont fini par donner un nouveau visage à allure urbaine à la localité rurale. Ils affectent profondément le plan économique, social et spatial. D’où l’intérêt de porter notre étude sur le rôle et place des migrations dans les zones extractives : cas de la zone Sud de la Commune Ngoundiane.
Problématique
Contexte
Inséparables de l’histoire de l’humanité et du peuplement des cinq continents, les migrations font depuis le début des années 2000, l’objet d’une attention particulière des acteurs du développement tant dans leur caractère national qu’international. La population des villes, notamment, a été multipliée par 10 entre 1900 et 2000 et 40 % de cet accroissement est liés aux migrations internes. Au niveau international, les migrations attirent toujours plus de candidats formant une communauté de 200 millions de personnes en mouvement, ayant décidé (ou non) d’expérimenter une vie hors de leurs pays de naissance. Ces mobilités désignées actuellement sous le qualificatif « migration » sont d’une grande ampleur dans les zones extractives. Elles affectent différemment le fonctionnement et contribuent à la transformation socio-économique et spatiale des territoires miniers surtout en milieu rural.
Les études sur les questions migratoires dans les zones extractives sont moins fournies. Notre objectif de recherche s’inscrit néanmoins dans ce créneau car nous avons remarqué dans notre revue littéraire que le phénomène spécifique des migrations ainsi que leurs rôles et leurs répercussions sur les secteurs socio-économiques a peu été traité par les chercheurs dans ces dits territoires.
Au Sénégal, les migrations de manière générale constituent une des stratégies de lutte contre la pauvreté en milieu rural. En effet, leurs retombées économiques surtout financières sont estimées en mai 2008 par la Direction de la Prévision et des Etudes Economiques (DPEE) et des Finances au Sénégal (2008) à 459,1 milliards. Plus tard, en 2013, selon le Dr. Ameth Saloum Ndiaye maitre de conférence à la Faseg de l’UCAD, le volume des transferts d’argent des migrants est évalué à 1652 millions de dollars soit 961,464 milliards de FCFA. Conséquemment, elles sont « une opportunité et un défi en matière de développement. » .
Revue critique de la littérature
La littérature consacrée à la migration est abondante et diverse. Mais il n’existe pas à notre connaissance d’études portant sur la place et le rôle des migrations dans les zones extractives en milieu rural. Néanmoins, les ouvrages ci-dessous indiqués offrent un apport précieux dans la connaissance de notre zone d’investigation et dans l’éclairage des questions soulevées par notre sujet d’étude.
Paul. Pélissier (1966), dans son volumineux ouvrage consacré aux « paysans du Sénégal, les civilisations agraires du Cayor à la Casamance », montre que ces paysans, au cours de leur histoire ont fait preuve d’une véritable capacité d’adaptation aux situations diverses auxquelles ils étaient confrontés et assimilés sélectivement, les innovations agronomiques compatibles avec leurs techniques. Pour l’auteur, cela n’a pas été pour eux synonyme de « sclérose » mais de souplesse et d’ingéniosité créatrice. En effet, les succès d’intégration et d’assimilation des cultures asiatique ou des plantes d’origines américaines comme l’arachide, le maïs ou le manioc sont en quelques sortes des exemples illustratifs.
En gros, il démontre le savoir-faire et l’importance de l’arachide et du mil dans la paysannerie du Sénégal et surtout du bassin arachidier. Cet ouvrage est un instrument précieux pour une connaissance de la géographie rurale. Mais l’analyse faite par l’auteur nous paraît révolu. Au-delà de la barrière linguistique, le monde rural a connu aujourd’hui des mutations très importantes.
Sall. Babacar (1993) analyse la « modernité paysanne en Afrique noire, au Sénégal.» Avec un raisonnement stratégique, il met en œuvre la façon dont les paysans réussissent à tirer avantage du système de production agricole devant des situations de contraintes multiples (mutation de travail, changement statut, fluctuation des prix).
Par ailleurs, cet ouvrage propose une modernité paysanne qui se construit de manière originelle en articulation avec les entreprises multinationales, l’Etat, le marché international et l’informatique qui révèle la capacité de la paysannerie à réinventer les savoirs agronomiques, le travail agroindustriel et les politiques en fonction de leur propres rationalités.
Gastellu Jean Marc et Marchall.Jean.Yves (1997) dans « ruralité des pays du sud à la fin du XIX siècle », amorcent la question du monde rural qui assume des modifications de son environnement, en relation avec la croissance démographique et l’extension ou la fermeture de la frontière agricole. Les auteurs évoquent aussi les mouvements migratoires qui recomposent les réseaux et structurent des groupes développant un rôle important dans la transformation de ces espaces et multiplient les connexions entre le monde rural et celui urbain. Ainsi, ils affirment qu’ « au sein de l’espace rural les aires se modernisent et se dynamisent autour de petites villes. L’agriculture bien que soumise à de fortes contraintes est toujours gestionnaire de l’espace. Mais ce sont surtout d’autres secteurs d’activités inscrits en milieu rural qui créent la dynamique : Entreprise, services, et transport. Ils apparaissent sinon comme facteurs d’intégration du moins comme entre ville et campagne ».
Pierre George (1976) à travers la « migration internationale » procède à une identification des différents types de mouvements et les éléments qui les accompagnent. Par conséquent, George distingue deux grandes échelles de migrations : celle de l’intérêt individuel et celle de l’intérêt collectif. Il affirme que la « migration est une corrective à la pauvreté de l’individu et du groupe sociale auquel il appartient ». Ainsi, il apparait au regard de l’auteur que la migration résultante d’un certain nombre de facteurs engloppant certaines notions (durée du séjour, distance…) vise à améliorer les conditions de vie de l’individu par l’intermédiaire de certain de ses membres et des envois de fonds.
|
Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
I. Problematique
II. Cadre operatoire
III. Revue critique de la litterature
IV. Cadre theorique et discussion conceptuelle
V. Méthodologie
PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DE LA ZONE SUD DE LA COMMUNE NGOUNDIANE
Chapitre I : Cadre physique du milieu
Chapitre II : Cadre humaine
Chapitre III : Relation entre systeme de production et migration
DEUXIEME PARTIE : ROLE ET PLACE DES MIGRATIONS DANS LA ZONE EXTRACTIVE
Chapitre I : Caractéristiques socio-economique des menages migrants de la zone sud
Chapitre II. motifs de depart et caracteristiques des migrants
Chapitre III. Migration et modernisation de la zone sud de la commune de Ngoundiane
CONCLUSION GENERALE
ORIENTATIONS BIBLIOGRAPHIQUES
Annexes
Table des matières