Epidémiologie descriptive
Place du cancer du rectum à l’échelle mondiale
Incidence
Les données épidémiologiques du cancer du rectum sont en général délivrées avec celles du colon. Le cancer colo-rectal (CCR) constitue un problème de santé publique en Amérique du Nord, l’Europe ou l’Océanie ; au contraire il est plus rare dans certains pays d’Asie ou d’Afrique (figure 1). A travers le monde, l’incidence du CCR a augmenté dans la majorité des pays au cours de ces deux dernières décennies, le nombre de nouveaux cas de CCR est estimé à 1,8 millions soit 10,2% de l’ensemble des cancers en 2018 [115] contre 1,2 millions en 2008 [116]. Dans cette même période, il représente respectivement la troisième et la deuxième cause de cancer chez l’homme et la femme en France [22].
Mortalité
Le nombre de nouveaux décès survenus en 2018 dans le monde est estimé à 861.663 cas soit 9,2% de la mortalité cancéreuse globale (figure 2). Malgré le fait que l’incidence soit en augmentation dans les régions développées, la mortalité est relativement beaucoup plus prononcée dans les pays pauvres [115].
Cancer du rectum au Sénégal
Au Sénégal, selon les estimations [117], l’incidence du CCR (4,5%) est classée en 6eme position après le cancer du col de l’utérus (17,8%), le du sein (16,7%), du foie (10,2%), de la prostate (9,1%) et enfin de l’estomac (5,2%). La mortalité par CCR est également classée en 6éme position avec un taux de 4,4%.
Epidémiologie analytique
Facteurs génétiques
Polyposes adénomateuses familiales (PAF)
Une polypose familiale doit être suspectée dès qu’il existe à la coloscopie plus de dix adénomes colorectaux (plus de 100 adénomes pour la PAF et plus de dix pour la PAF atténuée). La PAF représente environ 1% des CCR [42]. La pénétrance de la PAF est complète (proche de 100%). Pour la PAF atténuée (Elle est dite « atténuée » car la majorité des patients ont un nombre de polypes colorectaux compris entre 10 et 100, avec un âge moyen au diagnostic de l’ordre de 47 ans [88], le risque d’évolution vers le CCR serait d’environ 80%. Deux gènes sont responsables des polyposes familiales : le gène APC (localisé sur le chromosome 5q21), avec une transmission autosomique dominante (PAF et PAF atténuée) et le gène MYH, avec une transmission autosomique récessive (PAF atténuée). Le risque de transmission à la descendance est de 50 % pour chaque enfant. Cependant, 20 à 25 % des cas de PAF observés sont des mutations de novo. L’âge moyen d’apparition des polypes, des signes cliniques et du cancer est respectivement de 25 ans, 33 ans, et 40 ans. Le risque cumulé de cancer gastrique, duodénal et surtout d’ampullome vatérien est de 5%.
Le syndrome de cancer colique héréditaire sans polypose (HNPCC) ou syndrome de Lynch
Le syndrome de Lynch est responsable d’environ 3 % des CCR [71]. Il a une transmission autosomique dominante à forte pénétrance (80–85 %) et représente la forme la plus fréquente de CCR héréditaire. Le risque cumulé de CCR à 70 ans est de l’ordre de 40 % pour les femmes et 70 % pour les hommes. Il est suspecté devant la présence des critères d‘Amsterdam II complétés des critères de Bethesda II dans les formes dites incomplètes (Tableau I). Le syndrome de Lynch est dû à une mutation d‘un des gènes de réparation de l’ADN (MLH1, MSH2, MSH6 ou PMS2). L’inactivation bi allélique de l’un de ces gènes conduit à un phénotype MSI-H (microsatellite instability high), qui est présent dans toutes les tumeurs associées au syndrome de Lynch. On distingue deux formes de syndrome de Lynch : Spectre HNPCC étroit : colorectal, endomètre Spectre HNPCC large : grêle, uretères et cavités excrétrices rénales, ovaires, estomac, voies biliaires, glioblastome et adénocarcinome sébacé.
Cancers colorectaux à composante héréditaire
Environ 25 % des CCR auraient une composante héréditaire liée à des allèles à faible pénétrance (APC*I1307 K, TGFR1*6Ala notamment) avec probablement également une implication importante de facteurs environnementaux. En effet, certaines agrégations familiales de CCR sans polypose, avec ou sans validation des critères cliniques d‘Amsterdam, ne sont pas associées à une instabilité micro satellitaire [68]. Cela suggère la possibilité d’un autre mode de prédisposition génétique non mendélien, caractérisé par l’effet additif de polymorphismes dans différents gènes « mineurs » de susceptibilité. On parle alors de déterminisme « oligogénique » des cancers.
Facteurs hormonaux, nutritionnels et environnementaux
Un pourcentage non négligeable des CCR, de l’ordre de 30 %, serait lié à des facteurs nutritionnels. Cela expliquerait en partie les différences d’incidence selon les pays et l’augmentation du risque chez les migrants d’un pays à bas risque vers un pays à haut risque. Les facteurs les mieux identifiés sont la viande rouge et l’excès d’alcool qui ont un rôle favorisant, le calcium et les fibres qui ont un rôle protecteur. La viande rouge est responsable d’une augmentation des composés Nnitroso responsable de dommages à l’ADN [24].
Le tabac et l’alcool
Une consommation excessive d’alcool (plus de quatre verres par jour) augmenterait le risque relatif de CCR de 51 % [38]. La probabilité d’avoir un cancer colorectal ou un adénome augmentait avec l’âge à partir de 60 ans chez les hommes et les femmes. Elle était associée de façon très significative à la consommation de tabac, même ancienne, et à la consommation quotidienne d’alcool avec des OR > 1,30) [100].
L’obésité et le surpoids
L’excès de poids (surpoids et obésité) et l’absence d‘exercice physique sont également associés au risque de CCR et seraient ainsi responsables d’environ 10% des CCR. Le syndrome métabolique, l’insulinorésistance (élévation de l’insuline, du glucose et de l’IGF1 [insuline-like growth factor 1]), De même, l’augmentation de l’IGF1 induit par l’hormone de croissance (GH) serait responsable du risque augmenté de CCR chez les patients acromégalies.
Les facteurs environnementaux
Ils sont suggérés par la prédominance de l’affection dans les pays occidentaux, alors qu’elle est rare en Afrique et par les variations d’incidence dans des populations homogènes au cours de migrations. Le niveau de risque apparaît dès la première génération au cours des migrations d’un pays de faible incidence à un pays de forte incidence.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
1. Epidémiologie
1.1. Epidémiologie descriptive
1.1.1. Place du cancer du rectum à l’échelle mondiale
1.1.2. Cancer du rectum au Sénégal
1.2. Epidémiologie analytique
1.2.1. Facteurs génétiques
1.2.2. Facteurs hormonaux, nutritionnels et environnementaux
1.2.3. Autres facteurs impliqués dans la carcinogénèse colorectale
1.3. Epidémiologie interventionnelle
2. Carcinogénèse colo-rectale
3. Bases du traitement
3.1. Bases anatomiques
3.1.1. Définition
3.1.2. Limites
3.1.3. Division et dimensions
3.1.4. Morphologie
3.1.5. Rapports
3.1.6. Vascularisation et Innervation
3.1.6.1. Vascularisation
3.1.6.2. Innervation
3.2. Bases histologiques
3.3. Bases diagnostiques
3.3.1. Diagnostic positif
3.3.1.1. Circonstances de découverte
3.3.1.2. Examen clinique
3.3.1.3. Examens paracliniques
3.3.2. Explorations pré-thérapeutiques
3.3.3. Bilan d’extension
3.3.4. Critères d’opérabilité et de résécabilité
3.3.5. Classification –Facteurs pronostiques
4. Traitement
4.1. Buts
4.2. Moyens et Méthodes
4.2.1. Radiothérapie
4.2.1.1. Radiobiologie
4.2.1.2. Protocole de radiothérapie externe
4.2.1.3. Technique de radiothérapie endocavitaire et interstielle
4.2.2. Chirurgie
4.2.2.1. Règles d’exérèses carcinologique du cancer du rectum
4.2.2.2. Techniques chirurgicales
4.2.3. Traitements associés
4.2.3.1. La chimiothérapie
4.2.3.2. Les thérapies ciblées
4.2.3.3. Les traitements médicaux non spécifiques
4.3. Indications thérapeutiques
4.4. Complications du traitement
4.4.1. Complications aigues et tardives de la radiothérapie
4.4.2. Complications de la chirurgie
4.4.3. Toxicités de la chimiothérapie
4.5. Surveillance –Evolution
4.5.1. Surveillance
4.5.2. Survie
4.5.3. Récidives
DEUXIEME PARTIE
1. Matériels et Méthodes
1.1. Cadre d’étude
1.1.1. Vocation de la structure
1.1.2. Infrastructures et équipement
1.2. Type d’étude et période d’étude
1.3. Objectifs de l’étude
1.4. Population d’étude
1.5. Recueil et analyse des données
2. Résultats
2.1. Aspects épidémiologiques
2.1.1. Fréquence
2.1.2. Age
2.1.3. Sexe
2.1.4. Niveau socio-économique
2.1.5. Antécédents de CCR
2.2. Aspects cliniques
2.2.1. Le délai de consultation
2.2.2. Circonstances de découverte
2.2.3. Examen clinique
2.3. Aspects paracliniques
2.3.1. Endoscopie
2.3.2. Etude anatomopathologique
2.3.3. Bilan d’extension
2.4. Données thérapeutiques
2.4.1. Radiothérapie
2.4.2. Chimiothérapie
2.4.3. Chirurgie
2.5. Résultats carcinologiques
2.5.1. Résultats du traitement néo-adjuvant
2.5.2. Résultats du traitement chirurgical
2.6. Aspect évolutif
3. Discussion
3.1. Données épidémiologiques
3.1.1. Fréquence
3.1.2. Age
3.1.3. Sexe
3.2. Données cliniques
3.2.1. Délai de consultation
3.2.2. Circonstances de découverte
3.2.3. Examen physique
3.3. Données paracliniques
3.3.1. Endoscopie
3.3.2. Anatomopathologie
3.3.3. Bilan d’extension
3.3.4. Classification
3.4. Données thérapeutiques
3.4.1. Place de la chimiothérapie systémique
3.4.2. Place de la radiothérapie
3.4.3. Radiothérapie pré-opératoire versus radiothérapie post-opératoire
3.4.4. Radiothérapie versus radio-chimiothérapie pré-opératoire
3.4.5. Place de la chirurgie
3.5. Résultats carcinologiques
3.6. Evolution du résultat carcinologique
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES