Place de la sanction à l’école

Dans la société romaine, les pères ont droit de vie et de mort sur leurs enfants. Les châtiments corporels font partie des méthodes éducatives habituelles permettant d’obtenir l’obéissance de l’enfant. Dans ce contexte sociétal très violent, « la violence la plus répandue reste (…) la violence pédagogique » (Danielle Gourevitch 2002). Aussi, les enseignants frappent les élèves. Ces pratiques éducatives furent rapportées par Augustin d’Hippone (philosophe romain) et Horace (poète grec). C’est au XVème et XVIème siècle avec les valeurs défendues par l’humanisme (Erasme, Rabelais et Montaigne) que commencent à se développer des méthodes éducatives non brutales. Les sanctions hiérarchisées font leur apparition en fonction de la gravité de la faute à réprimer. Il faut attendre la fin du XVIIIème siècle pour que l’usage systématique des châtiments corporels soit contesté. Les pratiques sont justifiées par la mesure dans leur usage (« rien n’est plus nuisible que l’accoutumance aux coups ; l’usage déréglé qui en est fait transforme une nature bien douée en un caractère intraitable (….) leur répétition continuelle fait que le corps s’endure aux coups comme l’esprit aux paroles » Erasme ; pour Montaigne, il faut user d’une « sévère douceur »).

Pour Rousseau (XVIIIème siècle), l’enfant est naturellement bon depuis sa naissance c’est la société qui le perverti. Il faut bannir les pédagogies coercitives, fondées sur la punition et laisser s’épanouir la nature de l’enfant qui l’oriente vers ses goûts et lui permet de développer ses dons. Il est important de l’aider à grandir en fonction de sa personnalité. Au XIXème siècle, la place des enfants au sein de la société évolue en même temps que la place du père (cf. références juridiques). La place des châtiments corporels est de ce fait remise en question. La vision chrétienne selon laquelle l’enfant est chargé du péché originel et doit être redressé sous la contrainte, évolue. L’enfant considéré comme naturellement pervers change de position au plan anthropologique. Cela entraine une évolution de son statut en terme de juridique.

Malgré ces évolutions, les sanctions punitives sont restées très présentes jusqu’à la fin du XXème siècle car la discipline scolaire trouve son origine dans la vision chrétienne de l’enfant et dans le régime militaire. L’organisation de l’école reprend les codes qui s’apparentent à ces deux systèmes. Aussi, les sanctions reprennent les traditions monacales (privations), auxquelles s’ajoutent des punitions militaires (arrêts, prison).

Un tournant s’est clairement opéré en 1989 avec l’adoption par l’Assemblée générale des Nations Unies de la convention relative aux droits de l’enfant .C’est à partir de ce moment que la place de l’enfant a réellement changé.

Aujourd’hui, elle s’apparente à celle de tout être humain: l’enfant est sujet de droit dès sa naissance. En tant qu’élève, il a sa place dans sa classe et dans l’établissement. Cette Convention met l’accent sur le droit à l’éducation de l’enfant et lui donne le droit à la parole dans toute affaire le concernant. Ce principe modifie le rapport de l’enfant à la sanction. Plutôt que de punir, on explique ce qui est contraire à la norme et prend en compte sa parole. Il en découle un nouveau rapport à la sanction lié au sentiment de justice. La violence n’a plus sa place dans l’éducation des enfants à l’école. Pour répondre à ce besoin de justice, les punitions proportionnées à la gravité des fautes doivent devenir la norme et le rappel à la loi permet d’éviter toute forme d’autoritarisme. Il en va de l’intérêt de tous : enfants et communauté éducative. Le but étant de vivre en communauté dans un climat scolaire serein favorable aux apprentissages.

Ce bref rappel historique montre que les évolutions ont été très importantes, en particulier dans les pays développés. Pour autant, des différences demeurent entre pays dans le rapport à la sanction, comme en témoigne, par exemple, le débat et les législations différentes sur la fessée . Ces différences semblent également toucher les pratiques enseignantes. Ayant effectué mon stage en pratique accompagnée à Québec dans une école alternative mettant en œuvre la pédagogie Freinet, j’ai observé une classe dans laquelle la sanction éducative semblait très réfléchie, mesurée et objective… et me semble-t-il, différente de ce qui existe en France. C’est pourquoi, j’ai souhaité approfondir le sujet de la sanction et analyser les représentations qu’ont les enseignants de leurs pratiques éducatives en matière de sanction de manière comparative entre la France et le Québec.

Selon J.J. Rousseau (1762), le discours est vain car l’enfant n’est pas en mesure de raisonner et envisage souvent les demandes de l’éducateur comme des exigences personnelles. La question de la légitimité est donc soulevée. L’éducation est vue comme une soumission. Le rapport avec l’enfant s’inscrit dans la domination. Ce rapport inégalitaire amène l’enfant à envisager des stratégies d’évitement (mensonge, duplicité). Cette vision des choses conduit Rousseau à développer une thèse selon laquelle la sanction doit être une « conséquence naturelle » pour éviter qu’elle ne soit perçue comme une volonté de l’éducateur de soumettre l’enfant. Aussi, il faut selon Rousseau contraindre l’enfant pour l’éduquer mais la contrainte doit être impersonnelle et objective. De cette manière, on prépare l’enfant à respecter les lois sociales qu’il devra suivre en tant que citoyen. L’enfant est amené à respecter les lois non pas en raison d’une autorité mais par la force des choses. C’est ainsi que la place de l’expérimentation est primordiale dans l’éducation. La véritable punition découle des expériences et la sanction en lien avec ces expérimentations est objective et impersonnelle. L’enfant prend la mesure de ses actes et la sanction est un retour sur ses actes.

La vision de Kant (1776-1787) n’envisage pas l’enfant sous le même angle. Pour Kant, l’enfant est un sauvage qui ne cherche que l’assouvissement de ses désirs dans une démarche non réfléchie. C’est grâce à l’éducation que l’on permet à l’enfant dans un premier temps de « dompter sa sauvagerie » par la discipline. Ensuite, la culture (apprentissage de la lecture et de l’écriture) lui permettra d’avoir une valeur individuelle. Puis, l’éducation visera sa socialisation. Enfin, l’ultime étape constituera la moralisation. Dans la pratique, Kant envisage deux manières de faire : une éducation physique et une éducation pratique.

L’éducation physique s’apparente à de la discipline. Il s’agit d’obéir à des nécessités, à des règles. Les sanctions physiques sont préconisées en cas de désobéissance. Le deuxième volet de l’éducation physique est le travail. « Le travail, c’est d’abord l’obéissance. Travailler, c’est reconnaitre le poids du monde, sa réalité et s’y soumettre ». L’éducation physique permettra de mettre en forme la volonté de l’enfant. Cette éducation n’est pas uniquement répressive mais également positive car elle instaure des règles qui constitueront un cadre pour la deuxième partie de l’éducation dite « pratique » par Kant au moment de l’adolescence. C’est alors que l’enfant fera usage de sa réflexion et exercera sa liberté pour devenir un être moral.

Sur le plan de la sanction, pour Kant, selon la période éducative, la sanction diffère. Dans un premier temps, les sanctions physiques sont le moyen de remédier à la désobéissance aux règles. Il justifie ces pratiques par le fait que l’enfant est un être sensible (se rapproche de JJ Rousseau de ce point de vue), non réfléchi ou chez l’adolescent qui ne répondrait pas aux sanctions morales. La sanction éducative permet de se soumettre à des lois objectives pour apprendre à obéir. Dans un deuxième temps, « si l’on veut fonder la moralité, il ne faut pas punir » Kant. Il convient toutefois de sanctionner sur le plan moral notamment à l’adolescence. A l’adolescence, la raison permet de comprendre le concept de loi et de devoir. Kant préconise d’utiliser « le penchant à être estimé et aimé pour donner aux châtiments un effet durable », pour ancrer dans la mémoire les sanctions morales et les rendre dissuasives (humiliation, honte). A terme, il s’agit d’obéir à des maximes personnelles car selon la théorie kantienne, l’homme moral n’obéit qu’à lui-même grâce à sa volonté raisonnable.

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Table des matières

Introduction
Première partie : La sanction : des approches et des pratiques diverses
Section 1 : La sanction en France : des approches différenciées
Section 2 : Le concept de sanction au Québec : une gestion par l’anticipation
Deuxième partie : Comparaison des conceptions et pratiques de la sanction des enseignants en France et au Québec
Section 1 : Eléments méthodologiques de recherche en vue d’une étude
qualitative et comparative
Section 2 – Présentation et analyse des résultats
Section 3 : ANALYSE REFLEXIVE : Mon expérience de classe
Conclusion 

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