Pigments d’oxydes métalliques et traitements organiques

Pigments d’oxydes métalliques et traitements organiques

Nous développerons dans cette partie les principales connaissances concernant les pigments, leur mode de synthèse et la physicochimie de surface résultante. Puis nous aborderons la description des principales molécules organiques retenues pour assurer le traitement de ces surfaces ainsi que les modes de traitement appliqués sur ces surfaces.

Pigments d’oxydes métalliques 

Les pigments retenus dans cette thèse sont un oxyde d’aluminium (α-alumine lamellaire blanche), trois oxydes de fer (goethite jaune, hématite rouge, oxyde de fer noir de type magnétite) et un oxyde de titane (anatase blanche). Ils peuvent être synthétisés par des méthodes spécifiques. Ainsi la goethite aciculaire peut être obtenue par réaction du bromure de cétyltriméthylammonium sur du FeCl3 [4, 5] ou par réaction de Fe(NO3)3 par de la potasse [6] alors que l’hématite sphérique peut résulter de l’hydrolyse de FeCl3 [7, 8]. La magnétite sous forme de nanosphères peut être obtenue par réaction de l’ammoniaque sur une solution composée encore de FeCl3 et de FeSO4 [8]. Donc le chlorure ferreux peut servir de base à la synthèse de ces différents oxydes de formes différentes mais tous d’échelle nanométrique. Le dioxyde de titane, sous forme de nanoparticules d’anatase, peut être synthétisé par différents procédés : sol-gel [33], hydrolyse de sels inorganiques [34] ou traitement ultrason [33]. L’alumine peut se présenter sous de multiples formes, allant de l’amorphe à des cristaux de différentes tailles et formes. Celle que nous analyserons est formée de lamelles planes de très faible épaisseur. La décomposition d’hydroxyde d’aluminium à haute température, procédé Bayer, constitue la méthode principale pour obtenir les lamelles de phase α. Ces hydroxydes sont purifiés en milieu acide par précipitation d’hydroxyde technique, c’est à dire gibbsite. Une alternative consiste à calciner d’abord la gibbsite à 700-900°C puis la traiter avec un acide, pour purifier l’alumine. Dans tous les cas l’alumine α est formée par cristallisation à haute température (1300°C) [35].

Physicochimie de surface 

La composition chimique de la surface diffère notablement de celle en volume. Tous ces pigments présentent des groupements hydroxyle en surface, surtout en milieu aqueux [15, 20, 21, 31, 36, 37-39]. La densité surfacique de ces groupements dépend de la nature du pigment mais également de la structure cristallographique du pigment et du plan cristallin [38]. Ainsi, parmi les oxydes d’aluminium, l’anatase comporte apparemment plus de groupements OH que le rutile et est plus hydrophile. Ce phénomène peut être expliqué par leur différence d’énergie de la bande interdite qui vaut 3,2 eV pour l’anatase, ce qui lui donne un caractère photocatalyseur, contre 3 eV pour le rutile ce qui permet plus facilement de décomposer l’eau à la surface de l’anatase et donne des groupements OH [40]. La présence de ces groupements OH favorise la réactivité des surfaces mais se combine avec l’effet de charges électriques en surface du fait du caractère isolant de ces oxydes [3, 5, 6, 8, 12, 29,  41-47]. Ces charges électrostatiques participent à l’attraction des particules et leur agglomération [19]. Elles peuvent être écrantées par des charges créées dans le solvant qui forment une double couche [3, 19, 41, 42, 44-47]. Son importance dépend du tampon du milieu et principalement de son pH, donc de la densité de protons H+ qui peuvent être adsorbés sur la surface d’hydroxyde de métal [3, 19, 41, 42, 44-47]. Les charges sont en moyenne positives en milieu acide, négatives en milieu basique et, pour chaque type de pigment il existe un pH qui assure la neutralité électrique, c’est le point zeta [3, 8, 41-42, 47]. Ainsi ce point isoélectrique apparaît pour l’alumine α à pH = 9,1 [45], pH = 6 pour TiO2 [41] et pH = 6,5 pour la magnétite [6]. Ce point isoélectrique n’est pas une description absolue de l’acidité de la surface mais de la force relative des interactions [41]. L’affinité des protons pour une surface d’hydroxydes métalliques peut être prévue en fonction du pH et de la concentration de tampon [48-49]. Ce modèle de complexation multisites prévoit la valeur de logK en fonction de la structure cristallographique du pigment et de sa morphologie. L’affinité des protons individuels est calculée à partir de la valence et de la longueur des liaisons chimiques. Ce modèle donne des résultats quantitatifs pour nombre d’oxydes métalliques et en particulier des oxydes de fer [42].

Traitements de surface 

Les fonctions chimiques, essentiellement OH, présentes à la surface de ces oxydes métalliques peuvent être impliquées dans des interactions ou des liaisons chimiques avec des matériaux minéraux ou organiques. Le traitement avec de nouveaux oxydes métalliques change la physicochimie de surface, et en particulier le point isoélectrique [3]. Nous allons essentiellement concentrer notre analyse bibliographique sur les traitements organiques.

Nature et modes de traitement

De très nombreux traitements organiques ont été proposés en particulier pour les pigments à base d’oxyde. Une grande variété de composés chimiques peuvent être impliqués : silicones (Si-OR, R=groupement alkyl [50]), silanes (éthoxy silane), traitements fluorés (téflon, perfluoro polyméthyl isopropyl éther [51]), méthacrylate de méthyle [6, 28, 52-55], polyacrylamide [23], acide carboxylique [9, 14, 24, 29], trifluoro éthanol [26], savon (myristate de sodium, stéarate de sodium), collagène et chitosan [6, 51]. Ces matériaux peuvent être constitués de petites molécules, tels les savons, ou de polymères tels les silicones. Ces polymères peuvent être pré polymérisés ou polymérisés in-situ. Ces traitements peuvent être appliqués en phase gaz, pour effectuer une polymérisation en même temps que le traitement de la poudre, déposés en phase sèche par mélange de poudres, ou sous forme de solution liquide. Les épaisseurs et la régularité du traitement dépendent fortement du mode d’application. Il existe une grande diversité à l’intérieur de la famille des traitements en solution qui peut résulter d’une polymérisation des monomères, dissout dans le solvant suivie d’une adsorption [56] ou adsorbés préalablement à la polymérisation [4, 57], d’une adsorption sous forte d’agitation mécanique [51] ou d’une simple précipitation [38, 58]. L’épaisseur et la régularité des couches adsorbées varient beaucoup suivant le mode de traitement. Elles sont nettement plus régulières à la suite d’un traitement suivi d’une polymérisation, que par dépôt direct [56].

Isothermes d’adsorption 

Il s’agit de connaître la quantité de matière effectivement déposée sur les pigments à la suite des traitements. Ceux-ci s’effectuant généralement en solution diluée la plupart des auteurs analysent les résultats sous la forme d’isothermes d’adsorption [2, 3, 23, 28, 29, 44- 45, 54, 56, 59-60, 62]. Tous les résultats expérimentaux sont, d’après les auteurs, bien décrits par la théorie. Rappelons que les isothermes d’adsorption décrivent l’évolution de la quantité de matière adsorbée sur une surface en fonction de la concentration de matière organique en solution. Les hypothèses sont draconiennes pour que les isothermes soient décrites par des modèles tels que ceux de Langmuir ou de Freundlich [23]. Rappelons qu’elles résultent d’une condition d’équilibre entre adsorption et désorption qui, dans le cas d’une faible interaction soluté-soluté donne l’équation de Langmuir, et d’une forte interaction l’équation de Freundlich. Ils supposent une uniformité de la surface pour que les sites d’adsorption soient équiprobables, que les évènements d’adsorption soient indépendants et que la saturation corresponde à une monocouche. Ces conditions peuvent être a priori remplies pour des petites molécules interagissant avec la surface, mais semblent plus discutables, d’une part, dans le cas de molécules chimiquement liées car le processus d’adsorption-désorption est très fortement déséquilibré et, d’autre part, dans le cas de polymères multifonctionnels car alors les sites d’adsorption sont a priori liés via la présence de la chaîne macromoléculaire. Malgré ces réserves, tous les résultats obtenus avec des polymères sont traités avec une isotherme de Langmuir ou de Freundlich [23, 28, 29, 46, 54, 55, 59-60, 62]. Cette question reste en suspend ainsi que la nature du phénomène d’adsorption. S’agit il d’une interaction intermoléculaire ou d’une liaison chimique ?

Adsorption ou réactivité chimique 

La nature des interactions et des liaisons a été très étudiée dans le cas de l’adsorption de molécules organiques sur des pigments d’oxydes métalliques hydroxylés en surface [6, 7, 9, 18 , 21, 23, 25, 26, 28, 29, 32, 47, 50, 61-63]. C’est bien évidemment un point crucial pour connaître la stabilité du traitement. Il a été reconnu dans de nombreux cas qu’une liaison chimique intervenait entre un acide organique et les groupements hydroxyle de la surface [23, 25, 26, 28]. Mais cette liaison chimique n’est rencontrée que dans un domaine défini de pH [6, 18, 28, 29]. A faible pH, acide, des liaisons chimiques ont été observées alors que de simples interactions de type van der Waals sont généralement décrites pour un pH élevé, de type basique [18, 23, 28, 29, 47, 60]. Ces liaisons ont été mises en évidence par spectrométrie infrarouge [6, 19, 21, 23, 25, 26, 28, 32, 47, 50, 60], XPS [7, 9, 32], RMN du solide [19, 62] et RPE [63] qui font apparaître de nouvelles bandes spécifiques aux liaisons. Il semble que cette adsorption dépende peu de la masse molaire [2, 32] mais soit favorisée par le caractère ionique des fonctions portées par le polymère [23]. Une liaison chimique peut intervenir de plusieurs manières dans le cas d’acides organiques. Un ligand peut être de type monodentate, formant une simple liaison avec un ion métallique de l’oxyde, bidentate de chelation, par complexation des deux oxygènes d’un même groupement acide sur un seul ion métallique, ou bidentate de pontage, lorsque chacun des oxygènes d’un même groupement acide est lié à un ion métallique [23]. Une liaison monodentate a été reconnue pour la liaison du polyacrylamide anionique sur l’hématite au point isoélectrique de l’hématite alors qu’elle semble bidentate, chelation et de pontage, de part et d’autre de ce point isoélectrique [23]. Par contre, seules des liaisons hydrogène sont détectées avec un polyacrylamide non-ionique, quel que soit le pH dans le domaine exploré [23]. Une liaison bidentate de pontage a été décrite pour la réaction de l’acide organique sur différents oxydes [2, 21, 28, 31, 61-62], avec une cinétique de transformation lente de liaisons hydrogène vers une réaction chimique [21, 28, 31, 62]. La nature de la liaison chimique semble aussi dépendre de la nature des fonctions chimiques initiales pour un même substrat. Ainsi, des liaisons bidentate covalentes ont été décrites pour des fonctions carbamate alors qu’elles semblent de type ionique pour les acides acryliques [61]. Ce même type de complexe bidentate semble possible après décomposition d’un fluoro-éthanol sur une surface d’alumine à 250K alors qu’il est physisorbé à 100K [26]. L’adsorption du polymère diminue alors le pH associé au point isoélectrique [6, 18, 23, 47, 60]. C’est un moyen de détection de l’adsorption. Une seule étude fait apparaître un effet de la dissociation de l’acide acrylique, via le biais du pH, sur l’accroissement de viscosité de la solution [18].

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Table des matières

Introduction
Chapitre I Bibliographie
I.1 – Introduction
I.2 – Méthodes expérimentales
I.3 – Pigments d’oxydes métalliques et traitements organiques
I.3.1 – Pigments d’oxydes métalliques
I.3.2 – Physicochimie de surface
I.4 – Traitements de surface
I.4.1 – Nature et modes de traitement
I.4.2 – Isothermes d’adsorption
I.4.3 – Adsorption ou réactivité chimique
I.4.4 – Conformation moléculaire en surface des pigments
Chapitre II Les pigments et leur caractérisation
II.1 – Choix des pigments et données fournisseurs
II.2 – Caractérisation des pigments
II.2.1 – Caractérisation des pigments par diffraction des rayons X
II.2.2 – Observation des pigments par microscopies électroniques à balayage et en transmission
II.2.3 – Composition volumique des pigments
II.2.4 – Caractérisation de la surface des pigments
II.2.4.1 – Caractérisation de la surface des pigments par XPS
II.2.4.2 – Caractérisation de la surface des pigments par ToF-SIMS
II.2.5 – Caractérisation de la surface de l’alumine par AFM
II.3 – Conclusion
Chapitre III Les polymères utilisés pour traiter les pigments
III.1 – Choix des polymères et données fournisseurs
III.2 – Caractérisation des polymères
III.2.1 – Concentration des émulsions
III.2.2 – Analyse RMN en solution
III.2.3 – Caractérisation par spectrométrie infrarouge
III.2.4 – Caractérisation par ToF-SIMS
III.2.5 – Caractérisation par XPS
III.3 – Conclusion
Chapitre IV Le traitement de l’alumine par les polymères
IV.1 – Mode opératoire
IV.2 – Effets du traitement de surface sur les propriétés de l’oxyde d’aluminium
IV.2.1 – Effet sur la sédimentation
IV.2.2 – Effet sur la mouillabilité de la surface du pigment
IV.3 – Analyse thermogravimétrique de l’alumine traitée
IV.3.1 – Méthode expérimentale
IV.3.2 – Etude de la perte de masse des alumines
IV.3.2.1 – Alumine initiale
IV.3.2.2 – Alumine traitée
IV.3.2.3 – Analyse par chromatographie gazeuse et spectrométrie de masse
IV.3.2.4 – Alumines lavées
IV.3.2.5 – Discussion et conclusion
IV.4 – Analyse des traitements polymère par spectroscopie infrarouge
IV.4.1 – Introduction
IV.4.2 – Méthode expérimentale
IV.4.3 – Etalonnage de la méthode quantitative par analyse FTIR de l’alumine
IV.4.4 – Méthode de mesure du relargage du polymère à partir de l’alumine par des solvants
IV.5 – Étude par XPS de la chimisorption de polymères sur l’alumine lamellaire
IV.5.1 – Calcul d’une épaisseur théorique
IV.5.2 – Analyse d’une poudre par XPS
IV.5.3 – Analyse quantitative d’une poudre par XPS
IV.5.3.1 – Influence de la microtopographie de la surface
IV.5.3.2 – Calcul des concentrations atomiques
IV.5.4 – Chimisorption du polymère B sur l’alumine lamellaire
IV.5.5 – Chimisorption du polymère A sur l’alumine lamellaire
IV.5.6 – Discussion
IV.5.7 – Action d’un solvant
IV.6 – Observations par AFM
IV.7 – Conclusion
Conclusion

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