Physiopathologie des TMO-MRC

Physiopathologie des TMO-MRC

Hyperparathyroïdie secondaire

Chez les patients HDC, on observe une hyperphosphorémie puis une diminution de la synthèse de 1-25 dihydroxy vitamine D (1-25 (OH)2 vitamine D) due à la réduction de la masse néphronique [13]. Ceci provoque une hypocalcémie en réaction à une synthèse accrue de la PTH qui augmente très tôt au cours de l’IRC (HPT II) dès que le débit de filtration glomérulaire (DFG) est réduit à 60 – 80 ml/min [13].

L’hyperphosphatémie contribue directement et indirectement à la fragilité squelettique associée aux TMO-MRC, en partie grâce à la stimulation de la synthèse de PTH et de fibroblast growth factor 23 (FGF23) [15]. Le FGF23 est principalement produit par les ostéocytes et les ostéoblastes et exerce ses actions physiologiques majeures dans le rein, stimulant l’excrétion urinaire de phosphate et inhibant la synthèse de calcitriol après s’être lié à un complexe formé par des récepteurs alpha klotho et canoniques de FGF. La synthèse de FGF23 est freinée dans l’os par une protéine DMP1 (Dentin Matrix Protein 1). L’augmentation de la concentration du FGF23, du fait de sa surexpression mais également par rétention (du fait de la réduction néphronique), est responsable d’une diminution de la réabsorption proximale des phosphates et d’une diminution de la synthèse rénale du calcitriol (par inhibition de la 1-alfa hydroxylase) [15]. L’hyperparathyroïdie secondaire est aggravée par une désensibilisation des récepteurs parathyroïdiens (récepteurs calciques, récepteurs de la vitamine D) entraînant une perte du rétrocontrôle négatif de la 1-25(OH)2 vitamine D et du calcium sur la sécrétion de la PTH [5]. La 1 25(OH)2 vitamine D a un effet direct sur les glandes parathyroïdes dont elle freine la sécrétion de la PTH en inhibant la transcription du gène du prépro-PTH. La baisse de synthèse rénale de 1-25(OH)2 vitamine D par défaut de la 1 alpha hydroxylation favorise l’hyperparathyroïdie et réduit l’absorption intestinale du calcium [16] (Cf figure 1). Il en résulte une balance calcique négative et une hypocalcémie ionisée tendant à stimuler la production parathyroïdienne en PTH avec hyperplasie secondaire. Cette stimulation de la sécrétion de la PTH assure dans un premier temps l’homéostasie du métabolisme phosphocalcique par activation de la synthèse de calcitriol, stimulant l’absorption digestive du calcium par diminution de l’absorption tubulaire du phosphore et par stimulation de la résorption osseuse jusqu’ à une filtration glomérulaire de 25ml/min [17]. Cette stimulation permet d’une part de maintenir la calcémie à un niveau suffisant pour empêcher l’hypersécrétion d’hormone parathyroïdienne. Secondairement, ces mécanismes de compensation sont dépassés ; l’hyperphosphorémie et la production de PTH augmentent, la synthèse de 1-25(OH)2 vitamine D se réduit, l’hypocalcémie s’aggrave et les glandes parathyroïdiennes s’autonomisent (HPT tertiaire) [16]. Au total, l’élévation chronique de la PTH est responsable d’une activation des ostéoblastes et des ostéoclastes => ↑ formation osseuse ostéoblastique et ↑ résorption osseuse ostéoclatique => ↑ du remodelage osseux => Fibrose médullaire => Ostéite fibreuse.

Ostéomalacie

Plusieurs mécanismes peuvent conduire à une ostéomalacie chez le patient insuffisant rénal chronique [19]. La cause la plus fréquente était liée à une intoxication aluminique secondaire à la présence d’aluminium dans l’eau d’alimentation du générateur de l’HD et à la prise massive de chélateur aluminique du phosphore [19]. Chez les HDC, il existe une corrélation entre l’aluminémie ou le contenu osseux en aluminium et la quantité totale d’hydroxyde d’alumine ingérée. L’absorption de l’aluminium semble cependant varier d’un patient à l’autre et les facteurs qui la déterminent sont encore mal identifiés. Les dérivés 1-alphahydroxylés de la vitamine D paraissent augmenter son absorption [20]. La carence martiale augmente l’absorption d’aluminium comme elle stimule celle du fer dont l’aluminium partage les protéines vectrices [21]. Les ostéomalacies sont caractérisées par un remodelage osseux faible et un défaut de minéralisation de la matrice osseuse secondaire à :
– L’intoxication aluminique qui est devenue exceptionnelle de nos jours du fait de bonnes pratiques cliniques et d’un traitement d’eau adapté [22].
– Une carence profonde en vitamine D qui ne doit plus se voir avec une supplémentation appropriée en vitamine D [11, 22]
– L’acidose métabolique sévère qui est plus fréquente au cours des néphropathies interstitielles.

Ostéopathie adynamique (OA)

➨ Ostéopathie adynamique aluminique :
L’aluminium peut ralentir le remodelage osseux en diminuant la sécrétion parathyroïdienne par toxicité directe des glandes parathyroïdiennes. Il semble aussi diminuer l’affinité de la PTH pour son récepteur ainsi que la stimulation de l’activité de l’adénylcyclase dans des cultures de cellules de 18 types ostéoblastiques, ce qui pourrait aggraver son effet sur la sécrétion hormonale, en créant un état de résistance périphérique à l’hormone parathyroïdienne [23] et donc une hypoparathyroïdie.
➨ Ostéopathie adynamique non aluminique :
La fréquence des ostéopathies aluminiques a décru de façon spectaculaire avec le contrôle de la teneur du bain de dialyse en aluminium et l’abandon presque total de la prescription des gels d’alumine. Cependant, des lésions histomorphométriques identiques à l’ostéopathie adynamique aluminique ont été récemment observées en l’absence de dépôts osseux d’aluminium chez des patients HDC qui n’avaient pas reçu de gels d’alumine et qui avaient été traités avec une eau appauvrie en aluminium [17]. Cette « ostéopathie adynamique idiopathique » s’accompagne comme l’ostéopathie adynamique aluminique d’une phosphatasémie alcaline normale et parfois d’une tendance à l’hypercalcémie sous dérivés vitaminiques D ou fortes doses de carbonate de calcium. Elle s’observe chez des malades qui ont un taux normal ou bas de PTH circulante [24]. Une surcharge osseuse en fer peut être associée à un os adynamique. Le diabète et l’hypogonadisme sont d’autres facteurs favorisants. Mais ces facteurs étiologiques restent très inconstants et la majorité des ostéopathies adynamiques sans dépôts d’aluminium paraît être due à un excès de traitement de l’HPT, aboutissant à un état d’hypoparathyroïdisme [25]. Au total, l’OA est caractérisée par l’absence d’activité cellulaire ostéoblastique et ostéoclastique =>↓ de la formation osseuse et l’absence d’accroissement du tissu ostéoïde => ↓ du remodelage osseux.

Physiopathologie de l’ostéoporose

La physiopathologie de la perte osseuse chez le patient insuffisant rénal chronique est complexe. D’une part, elle implique les troubles du remodelage liés aux anomalies de la PTH circulante. D’autre part, l’hypogonadisme souvent précoce chez les femmes [19] et les hommes [26] vient s’ajouter. De plus, l’inflammation chronique (avec TNF- α et IL-6 circulants élevés) entretenue par les troubles de la nutrition [27] associés à l’augmentation de la concentration sérique des adipokines pouvant influencer la masse osseuse comme la leptine, la résistine ou l’adiponectine [28] sont autant des facteurs potentiels de perte osseuse chez l’urémique et dont l’impact réel n’est pas encore connu.

Amylose β2 microglobuline

A l’état physiologique ce polypeptide est libéré par les leucocytes. Sa production est accrue au cours des syndromes inflammatoires, son catabolisme et son élimination sont quasi exclusivement rénaux. L’insuffisance rénale s’accompagne d’une augmentation progressive des taux circulants de la β2 microglobuline. En effet, en dépit du calibre des membranes d’hémodialyse son élimination n’est que partielle. De plus, l’hémo-incompatibilité du circuit extracorporel et la présence de résidus bactériens dans le dialysat sont responsables d’un état micro-inflammatoire, ce qui majore la libération de la β2 microglobuline s’accompagnant d’une précipitation tissulaire et d’une polymérisation de fibrilles amyloïdes dans la synoviale, les ligaments, les tendons, les cartilages, l’os sous chondral et les disques intervertébraux [29]. L’âge, l’intoxication aluminique et l’ancienneté de l’hémodialyse favorisent ces dépôts amyloïdes. Enfin, on a démontré in vitro que la β2 microglobuline pouvait avoir diverses activités sur les cellules osseuses. Elle semble ainsi capable de promouvoir la multiplication des ostéoblastes [30] en partie par l’intermédiaire de l’IGF1 (insuline growth factor 1). Elle pourrait aussi inhiber la minéralisation osseuse [31]. La β2 microglobuline glyquée, qui semble en partie  constituer les dépôts d’amylose chez les HDC, est capable de stimuler la sécrétion d’IL1 et de TNF α par les macrophages et pourrait, par ce biais, stimuler la résorption osseuse [32]. Le rôle que son accumulation pourrait avoir dans le développement de l’ostéodystrophie rénale reste cependant à apprécier.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I. TMO-MRC
I.1. Epidémiologie
I.2. Physiopathologie des TMO-MRC
I.3. Nosologie et formes anatomo-cliniques des TMO-MRC
I.3.1. Nosologie de l’ostéodystrophie rénale
I.3.2. Formes anatomo-cliniques des TMO-MRC
I.3.2.1. Ostéite fibreuse
I.3.2.2. Ostéomalacie
I.3.2.3. Ostéopathie mixte
I.3.2.4. Ostéopathie adynamique
I.3.2.5. Amylose à β2microglobulaire
II. FRACTURE EN HEMODIALYSE
II.1. Épidémiologie
II.2. Evaluation et facteurs de risque
II.2.1. Evaluations des facteurs de risques
II.2.2. Facteurs de risque de fracture
II.3. Prévention et traitement des fractures chez le dialysé
II.3.1. Prévention du risque fracturaire dans la population des HDC
II.3.2. Traitement des fractures chez les hémodialysés
DEUXIEME PARTIE
I. PATIENTS ET METHODES
I.1. Cadre d’étude
I.1.1. Structure
I.1.2. Personnel du service
I.1.3. Activités des unités d’hémodialyse
I.2. Type et période d’étude
I.3. Population d’étude
I.4. Collecte des données
I.5. Paramètres étudiés
1.5.1. Données démographiques
I.5.2. Comorbidités et antécédents des patients
I.5.3. Paramètres de dialyse
I.5.4. Données cliniques
I.5.5. Données biologiques
I.5.6. Données radiologiques
I.5.7. Données thérapeutiques
I.6. Définition des variables opérationnelles
I.7. Analyses statistiques
I.8. Considérations éthiques
II. RESULTATS
II.1. Résultats descriptifs
II.1.1. Diagramme de flux
II.1.2. Données épidémiologiques
II.2. Comorbidités et antécédents
II.2.1. MRC
II.2.2. Comorbidités et antécédents
II.2.3. Paramètres de dialyse
II.2.4. Données cliniques
II.2.Données biologiques
II.2.1. Données radiologiques
II.2.1.1. Radiographie standard
II.2.1.2. Autres
II.2.2. Données histologiques
II.2.3. Données thérapeutiques
II.2.4. Traitement curatif de la fracture
II.3. Résultats analytiques
II.3.1. Données épidémiologiques
II.3.2. Comorbidités et antécédents
II.3.3. Données cliniques
II.3.4. Données paracliniques
II.3.5. Données thérapeutiques
III. DISCUSSION
III.1. Données épidémiologiques
III.1.1. Prévalence
III.1.2. Age
III.1.3. Genre
III.1.4. L’ancienneté en dialyse
III.2. Néphropathies initiale, comorbidités et antécédents
III.2.1. Néphropathie initiale
III.2.2. Comorbidités et antécédents
III.3. Les paramètres de dialyse
III.3.1. Abords vasculaires
III.3.2. Dose de la dialyse et temps de dialyse par semaine
III.4. Données cliniques
III.4.1. Circonstance de survenue de la fracture
III.4.2. Poids sec et IMC
III.4.3. Troubles de la marche
III.4.4. Siege de la fracture
III.5. Données Biologiques
III.5.1. Profil Phosphocalcique
III.5.2. Albuminémie
III.5.3. Phosphatase alcaline totale
III.5.4. CRP
III.5.5. Anémie
III.6. Données radiologiques
III.7. Données thérapeutiques
III.7.1. Traitement des TMO
III.7.2. Traitement de la fracture
CONCLUSION

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