Physiopathologie de l’infection par Salmonella Abortusovis

Physiopathologie de l’infection par Salmonella Abortusovis

Déclaration des avortements chez les petits ruminants

D’après l’enquête 3, environ 91 % des vétérinaires estiment que les éleveurs déclarent un avortement ou une série d’avortements ponctuels (série d’avortements espacés dans le temps) dans moins de 50 % des cas. Ils sont environ 62 % à déclarer la même chose pour des avortements groupés. De même, dans l’enquête 2, les LVD déclarent réaliser 882 analyses sur des prélèvements ovins et 976 analyses sur des prélèvements caprins pour la recherche de la fièvre Q. Or, d’après l’Agreste (2014), le cheptel français est formé de 4 849 338 brebis et 885 559 chèvres ce qui donnerait, si l’on se basait sur les seules analyses fièvre Q, un taux d’avortement de 0,02 % chez les ovins et de 0,11 % chez les caprins. Ces taux étant très faible et vraisemblablement très loin de la réalité du terrain, ils confirment que les avortements ne sont que trop rarement déclarés chez les petits ruminants.Un vétérinaire a évoqué la transhumance et le fait que les éleveurs laissent pâturer leurs bêtes et qu’ils ne voient pas toujours les avortements puisque les avortons peuvent être rapidement dévorés par les rapaces dans certaines régions de France (JORF, Arrêté du 28 février 2008) mais cet argument ne peut pas être retenu pour les élevages hors sol ou qui ne transhument pas. Par ailleurs, comme expliqué lors de l’étude des résultats, les éleveurs ne déclarent pas d’avortements tant que ceux ci sont sporadiques et n’entrainent pas de pertes économiques majeures à leurs yeux. De plus, le peur de sanction ou du regard du voisinage est aussi un facteur prépondérant selon les praticiens. Ceci fait écho au travail de Bronner et al. (2013 b) sur les facteurs influençant la déclaration des avortements chez les bovins par les éleveurs et les vétérinaires.De plus, d’après les résultats obtenus pour la question 3 de l’enquête 3 (Pour vous quel est le frein à la déclaration d’avortement ovin/caprin ?), pour 81 % des vétérinaires, la brucellose n’est pas un sujet de préoccupation pour les éleveurs ce qui minimise les déclarations d’avortement pourtant obligatoires. De même 62,5 % des vétérinaires font référence à l’ignorance des éleveurs d’une aide de l’Etat au moins en ce qui concerne les analyses pour la recherche de la Brucellose et en partie pour la recherche de l’agent de fièvre Q (Maaf, 2011 b ; Touratier, De Cremoux et Bronner, 2012). Enfin, pour 25 % des vétérinaires, les protocoles de déclaration d’avortement pour la mise en place d’un diagnostic différentiel est un procédé fastidieux et trop administratif (Venereau, Champion et Passerat de la Chapelle, (2010-2011) ; JORF, Arrêté du 10 octobre 2013).

 Prélèvement, acheminement des échantillons pour la recherche d’agents abortifs

 Les prélèvements

D’après les réponses fournies par les laboratoires lors des enquêtes 1 et 2, il semble que la prise de sang est le prélèvement de choix pour les vétérinaires lorsqu’ils sont face à un avortement. De même, d’après les praticiens, dans près de 44 % des cas, seul l’animal avorté est prélevé mais ce n’est pas la méthode préconisée (Nouvel et al., 2013). Par ailleurs, les enquêtes auprès des laboratoires ont permis de mettre en évidence que les prélèvements tels que les avortons entiers ou le placenta étaient très souvent souillés à l’inverse des organes d’avorton ou des cotylédons. Ces souillures peuvent compromettre la réalisation d’analyses dans de bonnes conditions. Enfin, pour 90 % des praticiens, les échantillons sont analysés, que leur état de conservation soit bon ou non et qu’ils soient acheminés au laboratoire selon une procédure définie ou déposés directement par l’éleveur ou le vétérinaire. Cela n’oriente ni vers une prise de conscience et une application des vétérinaires sur le terrain ni vers une amélioration du taux d’élucidation dans la recherche d’agents abortifs.Nouvel et al. (2013) ont décrit les procédures de prélèvement à réaliser en cas d’avortements chez les petits ruminants. Ils suggèrent d’envoyer prioritairement l’avorton entier au laboratoire afin qu’il soit prélevé sur place car cela évite la présence de souillures sur les échantillons.Par ailleurs, le vétérinaire doit privilégier le prélèvement de cotylédons directement dans le vagin ou in utéro afin de garantir d’avoir des échantillons propres. Si le praticien ne dispose que du placenta, il devra prélever des houppes cotylédonaires en sélectionnant celles comportant des lésions caractéristiques (type nécrose). Si un échantillon de placenta n’est pas envisageable, le praticien devra se tourner vers un prélèvement de mucus vaginal à l’aide d’un écouvillon qui est d’ailleurs préconisé pour la recherche de Brucellose et dans le cadre du protocole fièvre Q mais cela ne suffit pas car ce prélèvement semble être inadapté pour la recherche de l’agent de la toxoplasmose. Toute contamination environnementale doit être évitée car elle pourrait fausser les résultats notamment dans la recherche de Coxiella burnetii et Chlamydophila abortus (Lars et Buret, 2013 ; Nouvel et al., 2013).De plus, le liquide stomacal et les organes abdominaux de l’avorton seront prélevés ainsi que l’encéphale entier ou du liquide encéphalique pour la recherche de toxoplasmes. Ces prélèvements devront préférentiellement être réalisés au laboratoire pour éviter toute contamination et même si l’encéphale entier est plus intéressant pour le laboratoire (avec notamment le tractus optique et la partie rostrale du pont), des prélèvements par ponction peuvent être utilisés (Lars, 2013 ; Nouvel et al., 2013).

Emballage et acheminement des prélèvements

L’envoi postal semble être le mode d’acheminement le moins adapté puisque selon les laboratoires, il est plus souvent à l’origine de la réception de prélèvements en cours de putréfaction. Cependant, les vétérinaires semblent relativement sensibles à cela puisque malgré une mise au froid tardive ou absente pour certains d’entre eux (dans moins de 25 % des cas pour 93,5 % des laboratoires interrogés lors de l’enquête 1), la majorité a recours à un transporteur ou fait déposer les prélèvements directement au laboratoire par l’éleveur lorsqu’il s’agit d’un avorton par exemple. En effet, les règles de conservation (De Cremoux, Corbière et Nicollet, 2014) sont mieux respectées lorsqu’il s’agit de prélèvements autres que les échantillons de sang comme en témoignent les résultats de la question 14 (A quelle température stockez-vous les prélèvements avant de les envoyer ?) de l’enquête 3.L’emballage et le transport sont aussi capitaux pour la réalisation d’analyses dans de bonnes conditions. C’est ce qu’a décrit Nicollet (2013). Dans l’idéal, les prélèvements devront être envoyés dans les 48 heures qui suivent l’avortement (De Cremoux, Corbière et Nicollet, 2014). Si cela n’est pas le cas, le praticien doit impérativement indiquer le délai sur la demande d’analyses car cela peut conditionner les analyses réalisées. En effet, si les prélèvements ont été effectués depuis plus de 48 heures, il se peut que la bactériologie ne soit plus une méthode appropriée et le laboratoire s’orientera alors vers d’autres techniques analytiques. Toujours d’après Nicollet (2013), les échantillons doivent être conservés et acheminés à +4 – +8°C et la congélation/décongélation est déconseillée pour les analyses bactériologiques ou les PCR pour la détection de virus.De plus, les échantillons abortifs appartiennent à la classe 6.2 des Matières dangereuse selon les dispositions de l’ADR. On distingue alors trois catégories et les échantillons réalisés dans le cadre d’avortements appartiennent à la catégorie B. Ils sont donc soumis à l’instruction d’emballage P650 de l’ADR qui consiste en un triple emballage et les mentions « UN 3373 » et « Matière biologique, catégorie B » doivent apparaitre sur le colis (UNECE, 2007).

Agents abortifs recherchés et méthodes utilisées

Il semble que pour l’ensemble des vétérinaires, les cinq agents abortifs décrits comme majeurs à savoir Coxiella burnetii (Rodolakis, 2009), Salmonella Abortusovis (Pardon et al., 1988), Toxoplasma gondii (Innes et al., 2009 ; Menzies, 2011 ; Moreno et al., 2012), Chlamydophila abortus (Stuen et Longbottom, 2011) et le virus de la Border disease (Givens et Marley, 2008 ; Yoo, 2010 ; Ali et al., 2011), sont les plus rencontrés sur le terrain. En effet, même si d’autres pathogènes comme Listeria, Neospora, Campylobacter ou encore Schmallenberg ont été cités, cela n’était que ponctuel et les praticiens ont souvent recours à ces recherches lorsque les premières analyses se sont révélées infructueuses.Par ailleurs, d’après l’enquête 3, près de 48 % des vétérinaires font appel à un autre laboratoire que leur département d’exercice. Dans 43,5 % des cas, cela est dû au fait que tous les laboratoires départementaux ne réalisent pas les mêmes analyses et que certains agents abortifs ne peuvent pas être recherchés dans les laboratoires d’origine des vétérinaires. Il existe en effet un regroupement de spécialisation des laboratoires sur un ensemble de départements et ces derniers transfèrent les prélèvements qu’ils reçoivent lorsqu’ils ne réalisent pas les analyses demandées (Agnel et Gauthier, 2013). Par ailleurs, pour bon nombre de vétérinaires qui ont fait ce choix, cela s’explique par la disparité entre les départements avec des départements jugés plus adaptés, plus précis, plus rapides, plus spécialisés ou moins chers (différence de prix entre laboratoire mise en évidence dans l’Enquête 2). Cela fait écho à la disparité qui réside dans les pratiques des différents laboratoires (Agnel et Gauthier, 2013) et dans le niveau des subventions accordées par les Conseils généraux et régionaux (Maaf, 2011 b ; Touratier, De Cremoux et Bronner, 2012).De plus, si certains vétérinaires font appel à un laboratoire d’analyse voisin, c’est uniquement parce que l’éleveur qui a subi un épisode abortif vit dans le département voisin ou qu’il en fait la demande. Cependant, comme le soulignent les laboratoires et les vétérinaires, une harmonisation dans les analyses tout comme les prélèvements est vivement souhaitée sur le terrain.En ce qui concerne les analyses, on note un recours aux analyses directes ou indirectes selon les agents recherchés. Par exemple, la recherche de salmonelles semble plutôt effectuée avec des analyses directes alors que pour les toxoplasmes, les analyses indirectes sont encore largement utilisées. Ainsi, les techniques de diagnostic direct et indirect sont souvent utilisées en association dans les laboratoires.
De plus, comme le soulignent Pépin, Lambert et Bachy (2013) dans une synthèse sur les méthodes d’analyse parue dans le bulletin des GTV, les techniques analytiques sont de plus en plus performantes et rapides mais leur efficacité dépend en grande partie des conditions dans lesquelles elles sont réalisées. En effet, les échantillons sont encore trop souvent mal conservés (n’arrivent pas sous couvert de froid ou prélèvement trop tardif par rapport à l’avortement), souillés ou inadaptés pour les analyses demandées. Une collaboration optimale en matière de prélèvements, modalités d’envoi et demande d’analyse entre praticiens et laboratoires devrait permettre d’améliorer les choses.

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Table des matières

LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES ABRÉVIATIONS
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : Étude bibliographique
5 1. Quid de la brucellose ?
2. Coxiella burnetii, agent de la fièvre Q
2.1. Etiologie
2.2. Epidémiologie descriptive et analytique
2.3. Physiopathologie de l’infection par Coxiella burnetii
2.3.1. Pathogénie chez l’animal.
2.3.2. Pathogénie chez l’homme
2.4. Modalités de l’excrétion de Coxiella burnetii et conséquences pour le diagnostic
2.5. Description des performances des tests diagnostiques disponibles
2.6. Plan de maitrise de la fièvre Q
3. Chlamydophila abortus ovis, agent de la chlamydiose
3.1. Étiologie
3.2. Épidémiologie
3.3. Physiopathologie de l’infection par Chlamydophila abortus
3.4. Modalités de l’excrétion et conséquences pour le diagnostic
3.5. Description des performances des tests diagnostiques disponibles
4. Salmonella Abortusovis, agent de la salmonellose
4.1. Étiologie
4.2. Épidémiologie
4.3. Physiopathologie de l’infection par Salmonella Abortusovis
4.4. Modalités d’excrétion et conséquences pour le diagnostic
4.5. Description des performances des tests diagnostiques disponibles
5. BDV, agent de la Border Disease ou « Pestivirose ovine » ou « Maladie de la frontière »
5.1. Étiologie
5.2. Épidémiologie
5.3. Physiopathologie de l’infection par le BDV et le BVDV
5.4. Modalités d’excrétion et conséquences pour le diagnostic
5.5. Description des performances des tests diagnostiques disponibles
5.5.1. Tests diagnostiques pour la recherche du BVDV
5.5.1. Tests diagnostiques pour la recherche du BDV
6. Toxoplasma gondii, agent de la toxoplasmose
6.1. Étiologie
6.2. Épidémiologie
6.3. Physiopathologie de l’infection par Toxoplasma gondii
6.4. Modalités d’excrétion et conséquences pour le diagnostic
6.5. Description des performances des tests diagnostiques
DEUXIÈME PARTIE : Enquêtes 1 et 2 auprès des laboratoires vétérinaires départementaux, supports et compléments de l’enquête 3 présentée en troisième partie
1. Matériel et méthodes
1.1. Les interlocuteurs
1.1.1. Choix de l’interlocuteur
1.2. Les questionnaires
1.2.1. Choix du support
1.2.2. Diffusion
1.2.3. Collecte et analyse des données
2. Résultats des enquêtes 1 et 2
2.1. Enquête 1 : Diagnostic différentiel des avortements chez les petits ruminantsEnquête auprès des laboratoires (étude en cours menée par le groupe national sur le diagnostic différentiel chez les petits ruminants, animé par l’Institut de l’Élevage (Mme R. de Cremoux) et l’École NationaleVétérinaire de Toulouse, dans le cadre des actions de l’UMT Santé des Petits Ruminants)
2.1.1. Participation à l’étude
2.1.2. Gestion des prélèvements reçus par le laboratoire
2.1.3. Traitement des échantillons
2.1.4. Chlamydiose : description des techniques employées
2.1.5. Toxoplasmose : description et techniques employées
2.1.6. Border Disease : description et techniques employées
2.1.7. Salmonellose : description et techniques employées
2.1.8. Conseils en termes de prélèvements et d’analyses
2.2. Enquête 2 (Rousset et Nicollet, 2010)
2.2.1. Participation à l’étude
2.2.2. Acheminement des prélèvements autres que sang ou sérum
2.2.3. Descriptions des demandes d’analyse pour la fièvre Q abortive
2.2.4. Techniques d’analyses utilisées pour la fièvre Q abortive
2.2.5. Interprétation des résultats d’analyses utilisées pour la fièvre Q abortive
2.2.6. Coûts des analyses pour la fièvre Q abortive
2.2.7. Capacités de stockage pour tous les types de prélèvements analysés
2.2.8. Participation à un réseau pilote de laboratoires
TROISIÈME PARTIE : Enquête inédite auprès des vétérinaires praticiens
1. Intérêts et objectifs de l’enquête 3
2. Matériel et méthodes
2.1. Les interlocuteurs
2.1.1. Choix de l’interlocuteur
2.1.2. Choix de l’échantillon
2.2. Le questionnaire
2.2.1. Choix du support
2.2.2. Diffusion
2.2.3. Collecte et analyse des données
3. Résultats de l’enquête 3
3.1. Enquête 3 : Méthodologie de prélèvement et d’identification d’agents abortifs ovins et caprins auprès des vétérinaires praticiens
3.1.1. Participation à l’étude
3.1.2. Appréciation du niveau de déclaration des éleveurs
3.1.3. Les prélèvements en vue d’un diagnostic étiologique
3.1.4. Sensibilisation et formations sur les avortements et leurs déclarations
3.1.5. Attentes et ressentis face à la situation actuelle
QUATRIÈME PARTIE : Discussion
1. Limites de l’enquête 3
1.1. Population ayant participé à l’enquête
1.2. Protocole d’enquête
1.2.1. Canal de communication : l’envoi du questionnaire par mail
1.2.1.a. Choix du canal de communication
1.2.1.b. La diffusion
1.2.1.c. Temps nécessaire pour compléter le questionnaire
1.2.2. À propos des questions du formulaire
1.3. Résultats de l’enquête
1.3.1. Présentation des résultats
1.3.2. À propos de la qualité des réponses obtenues
2. Mise en perspective des résultats de l’enquête 3 avec les enquêtes 1 et 2
2.1. Déclaration des avortements chez les petits ruminants
2.2. Prélèvement, acheminement des échantillons pour la recherche d’agents abortifs
2.2.1. Les prélèvements
2.2.2. Emballage et acheminement des prélèvements
2.3. Agents abortifs recherchés et méthodes utilisées
2.4. Attentes et perspectives
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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