Physiopathologie de l’athérosclérose
D’une physiopathologie complexe, l’athérosclérose a fait l’objet de nombreuses controverses : tant sur ses causes (existence d’une exception française, rôle du cholestérol…) que sur les mécanismes de sa formation, sur laquelle plusieurs théories se sont succédées .
Mécanismes de la formation de la plaque
La formation de la plaque d’athérosclérose a été à l’origine de plusieurs théories :
– en 1852, Von Rokitanski proposait la plaque athéromateuse comme résultant d’un dépôt excessif de produits dérivés du sang principalement de la fibrine ;
– 1860, Virchow propose la théorie de l’infiltration lipidique ou les lipides plasmatiques sont absorbés directement à travers l’intima, certains s’y déposant ;
– en 1908, Ignatowsky montre la relation entre un régime carné et la survenue de l’athérosclérose, renforcé en 1913 par Anitschow et Chalatow qui démontrent la responsabilité du cholestérol d’où la théorie de l’imbibition lipidique de la paroi artérielle ;
– en 1976, Russel Ross propose la théorie de l’effraction endothéliale où l’athérosclérose serait le résultat d’une lésion de l’endothélium artériel.
– A ce jour, les mécanismes de l’athérogénèse ne sont pas totalement connus, néanmoins certaines étapes sont bien connues, d’autres sont encore à l’état d’hypothèses.
La théorie la plus récente est issue d’études expérimentales associées à des observations anatomopathologiques faites sur des plaques humaines. Elle emprunte de larges extraits de chacune des théories précédentes, montrant la grande intrication des événements. Elle décrit l’athérosclérose comme étant une maladie inflammatoire chronique des grosses artères à localisation intimale ; l’agent d’agression entraînant la réaction est très probablement le cholestérol LDL modifié notamment par une oxydation .
Activation de la cellule endothéliale
La présence de LDL cholestérol oxydés dans la paroi intimale entraine plusieurs conséquences :
– La sécrétion par la cellule endothéliale d’ICAM-1(Inter Cellular Adhesion Molecule1) et de VCAM-1(Vascular Cell Adhesion Molecule1), provoque au niveau de la lumière artérielle un ralentissement des cellules mononuclées (monocytes et lymphocytes) et leur adhésion à leur paroi artérielle. Une fois adhérente les cellules vont infiltrer dans l’espace sous endothélial attirées par le MCP-1 (macrophage chemotractant protein-1) synthétisées par les cellules endothéliales et les cellules musculaires lisses.
– La sécrétion de M-CSF (macrophage colony stimuling factor) par la cellule endothéliale. Le M-CSF favorise le recrutement des monocytes circulants dans la paroi artérielle et leur transformation en macrophages.
– La synthèse de lysophosphatidylcholine (LPC) qui provoque la migration des cellules musculaires lisses d’un phénotype contractile à un phénotype indifférencié ou synthétique. Les cellules musculaires lisses indifférenciées se caractérisent par une diminution de la contractilité et une synthèse accrue de protéines .
Le contact entre le macrophage et le LDL cholestérol oxydé provoque une phagocytose du LDL oxydé par stimulation de récepteurs spécifiques, les récepteurs « scanvenger » ou éboueurs : SR-A1, SR-A2, CD 36, CD68 .
Formation de la cellule spumeuse
Elle résulte d’une capture excessive de lipoprotéines LDL oxydé par le macrophage, ceci du fait de l’absence de l’autorégulation négative par le taux de cholestérol intra cellulaire. Il est à noter que les cellules spumeuses peuvent provenir de l’internalisation des LDL oxydés par les cellules musculaires lisses. Le cholestérol internalisé dans les macrophages se réestérifie formant des gouttelettes lipidiques conduisant à la formation de macrophages spumeux. La présence de cellules musculaires dans l’intima est la première étape de la formation de la plaque d’athérome .
Plaque athéroscléreuse mûre simple non compliquée
Organisation athéroscléreuse de la plaque
Plaques athéroscléreuses
Ce sont des élévations régulières de couleur blanche ou jaune clair qui font saillie dans la lumière artérielle, recouvertes d’une couche endothéliale saine. Leur taille varie de 3 à 15 mm mais la coalescence de plusieurs plaques voisines peut former des amas de plus grand diamètre. A la coupe apparaît une zone superficielle blanche et ferme et une zone profonde jaunâtre et molle d’où s’écoule parfois une substance grumeleuse nommée bouillie athéromateuse. Au microscope, les plaques athéroscléreuses forment un épaississement focal (n’occupant qu’un secteur de la circonférence) de l’intima, constitué d’une armature fibreuse périphérique entourant un centre graisseux. L’importance relative de chacun de ces deux parties de la plaque est très variable, mais leur association est constante (Figure 6). En volume, la sclérose prédomine toujours largement sur l’athérome (proportion de 9 à 1). La sclérose est dense, souvent siège de calcifications.
La plaque renferme :
➤ Le tissu fibreux à structure stratifiée : il recouvre en surface le centre athéromateux (chape scléreuse). Il trace en profondeur la limite entre la plaque et la média. Cet anneau fibreux donne sa rigidité à la lésion. Il est composé de collagène, de mucopolysaccharides, d’élastine, de fibrine et de cellules musculaires lisses clairsemées. Des granulomes inflammatoires peuvent être présents à la jonction de la plaque avec la média, constitués de cellules géantes multinuclées, plasmocytes, lymphocytes, macrophages, contenant des inclusions lipidiques et pigmentaires.
➤ Le centre athéromateux : il est constitué de lipides contenus dans des cellules spumeuses (macrophages chargés de vésicules lipidiques) et surtout ans l’espace extracellulaire. Les lipides représentent jusqu’à 60% du poids sec des plaques athéroscléreuses. Il s’agit d’esters de cholestérol (50%), de cholestérol libre (25%) et de phospholipides (25%), libérés lors de la dégénérescence des cellules spumeuses.
➤ La paroi des artères athéroscléreuses : elle est très richement irriguée par des vaisseaux (néo-vaisseaux) à parois fines provenant essentiellement de ramifications des vasa vasorum de l’adventice.
➤ D’autres constituants de l’artère et athérosclérose : la lame limitante élastique interne est dédoublée et fragmentée et perd son individualité morphologique. La média sous-jacente à une plaque athéroscléreuse est amincie, parfois réduite à fine tunique.
Dans l’adventice existent des infiltrats cellulaires à prédominance lymphocytaire souvent distribués le long des vasa vasorum hypertrophiés. Ces infiltrats et la présence de granulomes sur le pourtour des plaques témoignent du caractère inflammatoire de la maladie. Il n’y a pas de fibroblastes ; les cellules conjonctives responsables de la sclérose sont exclusivement des cellules musculaires artérielles.
❖ L’utilisation des anticorps monoclonaux : elle a pu montrer une dualité à l’origine des cellules spumeuses (macrophages et cellules musculaires lisses), la participation des lymphocytes T au développement de la réaction inflammatoire chronique intra-vasculaire et l’importance du processus prolifératif des cellules musculaires lisses.
Plaques calcifiées (médiaclacose)
Il s’agit d’un processus d’artériosclérose non-athéromateuse :
– Rare avant 50 ans.
– Touchant les 2 sexes de façon égale.
– Diffus (membres supérieurs et inférieurs, artères cérébrales).
– N’affectant pas le calibre de la lumière artérielle (sauf complication ou athérosclérose associée).
– Visible sur les radiographies (calcifications concentriques et régulières) ou le scanner à faisceau d’électrons (artères coronaires).
Progression de la plaque
L’organisation et la progression de la plaque d’athérome se réalisent de manière auto promotionnelle. En effet la présence de macrophages et de cellules dans l’intima entraîne une réaction inflammatoire par la sécrétion de cytokines pro inflammatoires d’origine mixte vasculaire et leucocytaire : TNFα (tumor necrosis factor), interleukines (IL-1, IL-6, IL-8, IL-12), oncostatine-M, interféron γ .
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
Chapitre 1 : Athérosclérose
1- Définitions
2- Epidémiologie
3- Rappels
3-1. Paroi artérielle normale
3-2. Physiopathologie de l’athérosclérose
3-2-1. Mécanismes de la formation de la plaque
3-2-2. Activation de la cellule endothéliale
3-2-3. Formation de la cellule spumeuse
3-2-4. Plaque athéroscléreuse mûre simple non compliquée
3-2-4-1. Organisation athéroscléreuse de la plaque
3-2-4-1-1. Plaques athéroscléreuses
3-4-1-2. Plaques calcifiées (médiaclacose)
3-2-5. Progression de la plaque
4- Anatomie pathologique
4-1. Strie lipidique
4-2. Plaque d’athérosclérose non compliquée (plaque stable)
4-3. Lésions compliquées (plaques instables)
5-Complications de la plaque
5-1. Facteurs intrinsèques de la rupture de la plaque
5-2. Facteurs extrinsèques de la rupture de la plaque
6-Topographie des lésions
7-Conséquences cliniques de la rupture de la plaque
Chapitre 2 : Facteurs de risque cardiovasculaires
1- Définitions
2- Facteurs de risque cardio-vasculaire
2-1. Facteurs de risque classiques
2-1-1. Facteurs de risque non modifiables
2-1-1-1. Le sexe
2-1-1-2. L’âge
2-1-1-3. L’hérédité
2-1-2. Facteurs de risque modifiables
2-1-2-1. L’hypertension artérielle
2-1-2-2. Les dyslipidémies
2-1-2-3. Cholestérol total
2-1-2-4. High Density Lipoprotein (HDL) cholesterol
2-1-2-5. Low Density Lipoprotein (LDL) cholesterol
2-1-2-6. Triglycéride
2-1-2-7. Le tabagisme
2-1-2-8. Le diabète
2-1-2-9. L’obésité
2-1-2-10. Le syndrome métabolique
2-1-2-11. La sédentarité
2-1-2-12. L’alcoolisme
2-1-2-13. Le stress
2-2. Nouveaux facteurs de risque cardiovasculaire
2-2-1. L’hyperhomocystéinémie
2-2-2. Lipoprotéine a
2-2-3. La CRP
2-2-4. Microalbuminurie
2-2-5. La pression pulsée
2-2-6. L’épaisseur intima-média
2-2-7. L’indice de pression systolique
Chapitre 3 : l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs
1-Définition
2-Rappels
2-1. Historique
2-2. Epidémiologie
2-3. Anatomie des artères des membres inférieurs
2-4. Anatomie pathologique
2-5. Physiopathologie
3- Manifestations Cliniques
3-1. Type de description : AOMI par obstruction fémorale ou poplitée
3-1-1. Circonstances de découverte
3-1-1-1. Signes fonctionnels
3-1-1-2. Signes physiques
3-1-2. Classification
4- Examens complémentaires
4-1 Biologie
4-2 Mesure de l’Indice de Pression Systolique
4-3 Echo Doppler artérielle
4-4 Mesure transcutanée de la piO2
4-5 Test de STRANDNESS
4-6 Artériographie
4-7 Angio-IRM
4-8- Exploration comorbidités
4-8-1 Explorations cardiaques
4-8-2 Explorations cérébro-vasculaires
4-8-3 Explorations rénales
4-8-4 Recherche d’anévrysme de l’aorte abdominale
5. Formes Cliniques
5-1. Syndrome de LERICHE
5-2. Artérite diabétique
5-3. Blue Toe Syndrom
6- Evolution et pronostic
6-1 Eléments de surveillance
6-2 Modalités évolutives
6-2-1. Evolution spontanée
6-2-2. Complications
6-2-3. Evolution locale
6-2-4. Evolution générale
7- Diagnostic différentiel
8- Etiologies
8-1. Les vascularites
8-1-1. Les vascularites des vaisseaux de gros calibre
8-1-1-1. La maladie de Horton
8-1-1-2. La maladie de Takayasu
8-1-2. Les vascularites des vaisseaux de moyen calibre
8-1-2-1. La périartérite noueuse (PAN)
8-1-2-2. La maladie de Buerger
8-1-2-3. La maladie de Kawasaki
8-1-3. Les vascularites des vaisseaux de petit calibre
8-1-3-1. Les vascularites liées aux anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA)
8-1-3-1-1. La maladie de Wegener
8-1-3-1-2. Le syndrome de Churg et Strauss
8-1-3-1-3. La polyangéite microscopique (PAM)
8-1-3-1-4. Le purpura rhumatoïde de Henoch-Schönlein
8-1-3-1-5. La cryoglobulinémie mixte essentielle
8-1-3-1-6. La vascularite cutanée leucocytoclasique
8-2. Athérosclérose et ses facteurs
8-3. Atteintes segmentaires
8-4. Autres causes
9- Traitement
9-1. Buts
9-2. Moyens
9-2-1. Suppression des facteurs de risque cardio-vasculaire
9-2-2. Les mesures hygiéno-diététiques
9-2-3. Traitement médical
9-2-3-1. Médicaments anti-thrombotiques
9-2-3-2. Médicaments adjuvants
9-2-4. Rééducation
9-2-5. Traitement chirurgical
9-2-5-1. Revascularisation chirurgicale
9-2-5-1-1. L’endartériectomie
9-2-5-1-2. Les pontages
9-2-5-2. Méthodes hyperémiantes
9-2-5-2-1. Sympathectomie lombaire
9-2-5-2-2. Stimulation péridurale
9-2-5-3. Les amputations
9-2-6. Traitement instrumental
9-2-6-1. Techniques
9-2-7 Résultats
9-2-8 Surveillance
9-3. Les indications thérapeutiques
9-3-1. AOMI asymptomatiques
9-3-2. Claudication intermittente
9-3-3. Ischémie critique
9-3-4. Surveillance des patients traités
9-3-5. Troubles trophiques
9-3-5-1. Soins locaux
9-3-5-1-1. Hygiène des pieds
9-3-5-1-2. Soins locaux des troubles trophiques
9-3-5-2. Soins généraux
DEUXIEME PARTIE : METHODOLOGIE ET RESULTATS
CHAPITRE 1 : METHODOLOGIE
I. Cadre d’étude
I.1 Historique et évolution administrative
I-2 Caractéristiques physiques
I-2-1 Situation et limites de la commune
I-2-2 Reliefs et types de sols
I-2-3 Climat
I.2.4 Les ressources végétales
I-3 Milieu humain
I-3-1 Evolution démographique
I-3-2 Composition de la population
I-3-3 Les mouvements migratoires
I-3-4 La situation sanitaire
II. Patients et méthodes
II.1 Type d’étude
III. Population cible
III-1 Critères d’inclusion
III-2 Critères de non inclusion
III-3 Critères d’exclusion
IV. MODALITES PRATIQUES
IV-1. Déroulement des étapes de l’enquête
IV-2. Aspects éthiques
V- PARAMETRES ETUDIES
V-1. Les données socio-démographiques
V-2. Les antécédents personnels
V-3. Les antécédents familiaux
V-4. Les données cliniques
V-5. Les données paracliniques
VI-DEFINITION OPERATIONNELLE DES VARIABLES
VII-Moyens d’étude
VII.1 Ressources humaines
VII.2 Ressources matérielles et techniques
VII.3 Analyses statistiques
CHAPITRE 2 : RESULTATS
1. Description de la population
1.1. Données socio-démographiques
1.1.1. Répartition des sujets selon le sexe
1.1.2. Répartition des sujets selon l’âge
1.1.3. Répartition des sujets selon le sexe et l’âge
1.1.4. Répartition selon le niveau de scolarisation
1.1.5. Répartition selon le niveau d’instruction
1.1.6 Répartition selon l’activité socio-professionnelle
1.2. Les facteurs de risque cardio-vasculaire
1.2.1. Hypertension artérielle
1.2.2. Diabète
1.2.3. Dyslipidémie
1.2.4. Tabagisme
1.2.5. Alcoolisme
1.2.6. Obésité
1.2.7. Sédentarité
1.2.8. Syndrome métabolique
1.2.9. Les antécédents familiaux
1.3. Maladie rénale
1.4. La prévalence des anomalies de l’indice de pression systolique (IPS)
1.5. IPS bas et les facteurs de risque cardio-vasculaire
1.5.1. IPS bas et le sexe
1.5.2. Répartition de l’IPS bas et l’âge
1.5.3. IPS bas et douleur au mollet
1.5.4. IPS bas et tabagisme
1.5.5. IPS bas et l’hypertension artérielle
1.5.6. IPS bas et diabète
1.5.7. IPS bas et dyslipidémie
1.5.7.1. IPS bas et hypercholestérolémie total
1.5.7.2. IPS bas et hyperLDL-cholestérolémie
1.5.7.3. IPS bas et hypoHDL-cholestérolémie
1.5.7.4. IPS bas et hypertriglycéridémie
1.5.8. IPS bas et sédentarité
1.5.9. IPS bas et obésité
COMMENTAIRE
I. Contraintes et limites de l’étude
II. Commentaire sur la méthodologie
III. Les anomalies de l’indice de pression systolique (IPS)
III.1. Prévalence de l’AOMI
III.2. Profil des sujets présentant un IPS bas
CONCLUSION
RECOMMANDATIONS
REFERENCES
ANNEXES