Physiopathologie de la pancréatite aiguë et grossesse

Physiopathologie de la pancréatite aiguë et grossesse

INTRODUCTION

La pancréatite aiguë est une inflammation aigue du pancréas secondaire à l’activation prématurée des pro-enzymes pancréatiques au sein même du pancréas avec pour conséquence une auto-digestion glandulaire avec libération d’enzymes protéolytiques et lipolytiques dans la loge pancréatique, l’abdomen et la circulation sanguine.L’association pancréatite aiguë et grossesse est rare. Elle survient généralement chez une jeune femme, multipare, à la deuxième ou à la troisième partie de la grossesse. L’étiologie biliaire est la plus fréquente, favorisée par les modifications gravidiques entraînant la stase et la formation de calculs et de boue vésiculaire. La démarche diagnostique (diagnostic positif et de gravité) est confrontée à plusieurs problèmes, d’une part le tableau clinique est non spécifique posant le problème de diagnostic différentiel, surtout avec les signes sympathiques de la grossesse, d’autre part, les examens radiologiques, notamment le scanner abdominal, sont contre indiqués dans la majeure partie de la grossesse. La biologie confirme le diagnostic. La prise en charge est multidisciplinaire incluant l’anesthésiste réanimateur, le gynéco-obstétricien,le chirurgien viscéral et le radiologue. Le traitement de la pancréatite aiguë gestationnelle est avant tout symptomatique.Le diagnostic précoce et la prise en charge adéquate de cette pathologie permettent l’amélioration de la morbidité et de la mortalité materno-fœtale. Le pronostic maternel est généralement bon. Les complications fœtales sont dominées par le risque d’accouchement prématuré et la souffrance fœtale aigue. [1]Nous avons mené une étude rétrospective descriptive et analytique au service de chirurgie viscérale et d’anesthésie-réanimation mère et enfant au CHU MOHAMMED VI à Marrakech, incluant toutes les patientes enceintes, admises pour pancréatite aiguë confirmée biologiquement et/ou radiologiquement à partir de janvier 2010.

Modifications anatomiques liées à la grossesse

Au cours des cinq premiers mois de la grossesse, il y’a peu de modifications anatomiques. L’utérus est encore pelvien et les rapports avec les organes de voisinage changent peu. [3]
Modifications du volume abdominal :
Après les cinq premiers mois de la grossesse, l’utérus gravide augmente de taille de façon significative et se retrouve au niveau abdominal (figure 14). [3] Note clinique : le refoulement du tube digestif par l’utérus et sa migration vers le haut rend la symptomatologie clinique atypique par son siège.

Modifications du volume utérin :
La hauteur utérine augmente avec l’évolution de la grossesse et dépasse les 30 cm à terme. Le poids utérin évolue avec l’augmentation de la hauteur utérine et atteint entre 800 g et 1200 g à la fin de la grossesse.Cette distension utérine est responsable d’une compression du système veineux cave en décubitus dorsal. Il en résulte, un trouble du retour veineux, responsable de modifications hémodynamiques en cas de chirurgie, ce qui doit être pris en considération lors de l’anesthésie [4].

Modifications gravidiques :
Certaines douleurs habituelles chez la femme enceinte secondaires aux modifications anatomiques peuvent masquer une urgence chirurgicale : C’est le cas des douleurs  ligamentaires, des contractions utérines et la distension abdominale du dernier mois de grossesse [5].

Modifications physiologiques biliaires et pancréatiques liées à la grossesse :
Au cours de la grossesse, plusieurs changements physiologiques observés pourraient avoir un rôle favorisant dans la formation de sludge vésiculaire et de calcules biliaires.  [6 ,7] En effet l’augmentation physiologique d’œstrogène et de progestérone durant la grossesse favorise la stase biliaire en diminuant la motilité vésiculaire en plus d’une relaxation du muscle lisse. [8, 9, 10]En outre, l’augmentation physiologique de cholestérol et de triglycérides dans le sérum, en plus de l’augmentation de l’acide cholique et la diminution de l’acide chénodésoxycholique a un rôle lithogène. [11] L’hyperpression abdominale par l’utérus gravide pourrait encore avoir un rôle mécanique dans la stase biliaire. [12] Tous ces facteurs associés semblent favoriser la formation de calculs biliaires chez la femme enceinte et donc la survenue secondaire d’une pancréatite aiguë.

  Activation des enzymes pancréatiques

  Deux grands mécanismes pourraient être à l’origine de la PA, basés sur l’hypothèse d’une activation des enzymes pancréatiques et une autodigestion de la glande : la théorie acineuse etla théorie canalaire ou la combinaison des deux. La théorie acineuse repose sur l’idée de la destruction des cellules acineuses par perturbation de leur fonctionnement intracellulaire avec une libération incontrôlée d’enzymes pancréatiques. Ces enzymes seraient activées par les hydrolases lysosomiales avec diffusion de l’activation au niveau de l’espace interstitiel.Dans la théorie de l’obstruction canalaire, le reflux de bile secondaire à un obstacle persistant, un œdème ou un spasme sphinctérien, entraînerait une augmentation de la pression intra canalaire. Cette augmentation de pression serait à l’origine d’une augmentation de perméabilité des parois des canaux aux enzymes protéolytiques générant une diffusion péri canalaire vers le liquide interstitiel responsable d’un œdème, d’un processus inflammatoire et des altérations de la microcirculation.

Réponse inflammatoire

 Chez 10 à 15 % des patients qui développent une PA, une réponse inflammatoire systémique sévère (SIRS) se développe conduisant aux formes de PA grave. Ce SIRS semble être causé par l’activation d’une cascade inflammatoire médiée par les cytokines, les cellules immunitaires et le système du complément.Les cytokines pro inflammatoires induisent la migration tissulaire des macrophages dans des organes distants du pancréas, dont les poumons et les reins. Les cellules immunitaires, attirées par les cytokines libérées par les macrophages, amplifient la cascade en libérant plus de cytokines, de radicaux libres et de monoxyde d’azote.Certaines cytokines pro-inflammatoires sont impliquées dans la progression de la maladie comme l’interleukine-1 (IL-1) et le tumor necrosis factor (TNF). Dans les modèles expérimentaux de PA, l’utilisation d’antagonistes de l’IL-1, d’anti-TNF d’interleukine-10 cytokine anti-inflammatoire ou de lexipafant, réduit la sévérité de la maladie.[13]

Nécrose pancréatique

  La nécrose survient dans les trois premières semaines d’évolution. La nécrose pancréatique est l’un des déterminants essentiels de l’évolution locale et du pronostic de la PA.Sa définition anatomique est celle de la Conférence de Consensus d’Atlanta de 1992 (64): la nécrose glandulaire est définie comme une (des) zone(s) de parenchyme pancréatique non viable focalisée(s) ou diffuse(s), éventuellement localisée(s) en périphérie glandulaire, et éventuellement associée(s) à une nécrose graisseuse péri-pancréatique.Cette définition anatomique est actuellement supplantée par une définition d’imagerie TDM et IRM : la nécrose pancréatique est évoquée devant la présence de zones qui ne se rehaussent pas après injection de produit de contraste. La nécrose stérile peut conduire à une défaillance d’organes, dépendant de son extension et survenant surtout si la nécrose atteint plus de 50% de la glande [64].
La complication locale la plus à craindre est l’infection de la nécrose, une complication fréquente (40 à 71%) et redoutable (mortalité 25%). L’infection de la nécrose glandulaire est généralement observée dans les 4 premières semaines, avec un pic à la deuxième semaine. Elle est notamment favorisée par deux facteurs : la présence et l’extension des nécroses intra et  extra-pancréatiques et la durée de la maladie.
Elle comporte principalement des germes intestinaux (Escherichia Coli, entérocoques, klebsielle, enterobacter, anaérobies…), ces bactéries peuvent atteindre la glande pancréatique et les coulées de nécrose par voie transpéritonéale, par la circulation sanguine ou par l’intermédiaire des canaux pancréatiques. Au moins dans un cas sur deux, la nécrose infectée se compliquera d’une défaillance d’un ou de plusieurs organes; d’abord et assez vite au niveau pulmonaire. Compte tenu de l’ampleur de cette réaction, la littérature anglosaxonne parle de “Systemic Inflammatory Réponse Syndrom (SIRS)” [64]. Dans notre série on a noté trois cas d’infection de coulées de nécroses soit 10 ,75% des cas.

CONCLUSION

La pancréatite aiguë est l’un des diagnostics qu’il faut évoquer devant des douleurs abdominales aiguës survenant au cours de la grossesse. L’étiopathogénie de la pancréatite aiguë au cours de la grossesse n’est pas encore totalement élucidé, mais des théories ont été élaborées dans ce sens décrivant de différents changements physiologiques liés à la grossesse comme étant responsable de l’augmentation du risque de survenue de la pancréatite aiguë, sans pour autant incriminer directement l’état gravide.Le diagnostic est facile grâce à la quantification de la lipase sérique>3N et à l’imagerie.Mais l’enjeu est de savoir reconnaître les pancréatites aiguës graves et leurs étiologies afin de minimiser les risques de complications maternelles et ceci grâce à une prise en charge précoce adaptée à chaque cas. Le retentissement périnatal de cette affection est essentiellement lié au risque de prématurité.La prise en charge thérapeutique sollicite une équipe multidisciplinaire (réanimateurs, gynéco-obstétriciens, chirurgiens et radiologue). Les mesures de réanimation sont généralement semblables à celle de la pancréatite aiguë chez la population générale, alors que le traitement des étiologies n’est pas encore codifié et doit être discuté au cas par cas en adoptant préférentiellement une attitude conservatrice.Le pronostic dépend essentiellement de la gravité de la pancréatite aiguë et du terme de la grossesse. Récemment, il s’est beaucoup amélioré mais des cas de mortalité materno-fœtale sont toujours rapportés.

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Table des matières

INTRODUCTION
MATÉRIELS ET MÉTHODES 
I. Type d’étude 
II. Critères d’inclusion 
III. Critères d’exclusion 
IV.Méthodologie 
RÉSULTATS 
I. Epidémiologie 
1. La fréquence
2. Age
3. L’origine
4. La gestité et la parité
5. Antécédents personnels
6. La grossesse en cours
II. Etude clinique et paraclinique 
1. Le délai d’admission par rapport à la douleur
2. Diagnostic clinique
3. Explorations biologiques
4. Score de gravité clinico-biologique
5. Explorations morphologiques
III. Etiologies 
IV.Traitement 
1. Traitement symptomatique
2. Traitement étiologique
V. L’évolution 
1. La durée d’hospitalisation en réanimation
2. Complications et mortalité maternelles
3. L’évolution de la grossesse
DISCUSSION 
I. Rappels 
1. Rappel anatomique
2. Modifications anatomiques liées à la grossesse
3. Physiopathologie de la pancréatite aiguë et grossesse
II. Discussion des résultats 
1. Epidémiologie
2. Diagnostic positif
3. Évaluation de la gravité
4. Etiologies
5. Complications de la pancréatite aigüe
6. Prise en charge thérapeutique
7. Pronostic 

CONCLUSION
ANNEXES
RÉSUMÉS
BIBLIOGRAPHIE

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