Physiopathologie de la lomboradiculalgie
Après avoir quitté le canal rachidien par les foramens, les racines nerveuses lombaires et sacrées vont former le plexus lombaire et le plexus sacral. Le plexus lombaire correspond à l’union des rameaux antérieurs des 4 premières racines lombaires.
Le plexus lombaire va ensuite donner deux branches terminales :
-Le Nerf Fémoral, issu des rameaux dorsaux de L2, L3 et L4
-Le Nerf Obturateur, issu des rameaux antérieurs de L2, L3, L4.
Il donnera également 4 branches collatérales : Le nerf ilio-inguinal, ilio hypogastrique, génito-fémoral et cutané latéral de cuisse. (9) Le plexus sacré correspond à l’union des branches ventrales des 4 premières racines sacrées et du tronc lombo sacré constitué de la branche ventrale du 5ème nerf lombaire et d’une branche anastomotique de la 4ème branche antérieure lombaire.
Le Nerf sciatique issu de L4, L5, S1, S2 et S3 est la seule branche terminale du plexus sacré. Le plexus sacré est également à l’origine de nombreuses branches collatérales dont les nerfs glutéaux et le nerf pudendal.
Sous les termes de sciatique et de cruralgie sont regroupées toutes les atteintes de ces nerfs. Ceux-ci peuvent être atteints tout au long de leur trajet depuis le rachis jusqu’aux membres inférieurs. La radiculalgie d’origine rachidienne et la radiculalgie d’origine extra rachidienne doivent être distinguées .
Lomboradiculalgie d’origine discale
Disque intervertébral normal
Le disque intervertébral est un fibrocartilage placé dans chaque espace intervertébral excepté C1-C2. Il a la forme d’une lentille biconvexe, et son épaisseur varie de 10 à 15 mm en augmentant de L1 à L5. (fig 4) Il est composé d’une partie périphérique, l’annulus fibrosus (AF) et d’une partie centrale, le nucleus pulposus (NP) occupant environ 50% de la surface discale. (12) Le disque intervertébral contient peu de cellules et principalement une matrice extra cellulaire constituée de collagènes et de protéoglycanes. L’eau occupe 60 à 90 % du volume du disque intravertébral formant un gel avec les protéoglycanes.
L’annulus fibrosus (AF) est une structure fibreuse principalement constituée de collagène de type 1, ayant une organisation fibrillaire en couches concentriques. Les principales cellules le composant sont les fibroblastes et les chondrocytes. Le nucleus pulposus (NP) est une structure gélatineuse, inextensible, incompressible mais déformable, majoritairement constituée de protéoglycanes et de collagène de type 2. Les cellules le constituant sont les cellules vacuolaires. Le disque intervertébral n’est plus vascularisé à l’âge adulte et sa nutrition se fait donc principalement par un mécanisme de diffusion à partir des plaques cartilagineuses vertébrales.
L’intégrité du disque intervertébral est dépendante de l’équilibre entre synthèse et dégradation du collagène et des protéoglycanes le constituant. L’évolution du disque intervertébral au cours de la vie se fait en 3 phases : une phase de croissance, une période de maturation puis une période de dégénérescence. La dégénérescence discale est le processus de vieillissement discal et débute dès la deuxième décennie de vie. (13) Jusqu’à l’âge de 25 ans, il existe une importante concentration en eau et en glycosaminoglycanes dans le nucleus pulposus, supérieure à celle de l’annulus fibrosus. Après 25 ans la concentration en eau et en glycosaminoglycanes s’amoindrit par augmentation de leur dégradation. De plus, la concentration en collagène diminue dans l’AF, et reste stable dans le NP. Ces modifications de la composition discale sont à l’origine d’une diminution des propriétés de résistance mécanique et de déformation du disque intervertébral, et peuvent être à l’origine de pathologies discales.
Radiculalgie d’origine discale
La radiculalgie d’origine discale fait intervenir une composante mécanique et inflammatoire. Il est admis que la composante inflammatoire est responsable des douleurs et la composante compressive est responsable des signes déficitaires.
❖ Composante mécanique :
La compression axonale aigue induit un œdème neural par augmentation de la perméabilité microvasculaire. Cet œdème intra neural est responsable d’une diminution de conduction nerveuse des fibres afférentes et efférentes. (15) Une compression de survenue rapide est responsable d’un œdème intra neural plus important qu’une compression d’installation progressive. Quand une compression de faible intensité se prolonge, une fibrose intra neurale et péri neurale se développe. En cas de forte compression prolongée, on observe des hémorragies intra neurales, une inflammation ainsi qu’une fibrose intra et péri neurale. (16) Cette compression mécanique entraîne une altération des propriétés électrophysiologiques de la racine nerveuse. En plus de l’altération axonale, la compression d’une racine nerveuse induit selon l’intensité de pression, une interruption du flux des veinules puis des capillaires et enfin des artérioles provoquant une hypoxie neurale. (15) La stase veineuse induite par la compression interrompt le flux des capillaires et donc l’apport en oxygène aux cellules neurales. Cette hypoxie neurale contribue également à une altération des propriétés électrophysiologiques.
❖ Composante inflammatoire :
Dès l’apparition d’une hernie discale, une réaction inflammatoire se met en place. La compression radiculaire n’est pas une condition nécessaire au déclenchement de la réaction inflammatoire et à l’apparition de la douleur radiculaire. Chez le porc, le simple contact du nucléus pulposus avec la racine nerveuse sans compression de celle-ci, entraine la sécrétion de nombreux facteurs pro inflammatoires à l’origine de lésions inflammatoires épidurales, de lésions de la gaine de myéline et d’une réduction de la conduction nerveuse. (17) Après son développement embryonnaire, le nucléus pulposus n’est plus vascularisé et n’est plus en contact avec le système immunitaire. L’apparition d’une hernie discale expose les antigènes du nucléus pulposus au système immunitaire, ce qui pourrait déclencher une réaction auto-immune associée à une importante réaction inflammatoire. (18) De nombreuses cytokines pro inflammatoires sont ainsi sécrétées : Interleukine 1α (IL1 α), Interleukine 1 β (IL1 β), Interleukine 6 (IL6), Interleukine 8 (IL8), Tumor Necrosis Factor α (TNF α), Granulocyte Colony Stimulating Factor (GCSF), Phospholipase A2. (19) In vitro, le TNF α est responsable d’une hyperalgésie thermique, d’une allodynie mécanique, de l’apparition d’un œdème intra neural et de l’altération des cellules de Schwann. (20) Cette réaction inflammatoire pourrait être à l’origine de la résorption spontanée du fragment herniaire. Dans l’étude de Bush sur l’évolution des hernies discales au scanner, 76% des patients présentaient une résorption au moins partielle de la hernie discale à un an.
La sténose lombaire
Anatomie du canal lombaire
Le canal rachidien est un conduit constitué par une succession d’anneaux fixes et mobiles. (22) Les anneaux fixes sont osseux, complets et limités en avant par le mur postérieur, latéralement par les lames et fermés en arrière par les pédicules. (Fig 5) Les anneaux mobiles sont limités en avant par le disque intervertébral, en arrière par les massifs articulaires postérieurs et ouverts latéralement.
Le canal rachidien lombaire peut être divisé en 3 zones : le canal central, le canal latéral et le canal de conjugaison :
• Le canal central contient le sac dural.
• Le canal latéral ou canal radiculaire est la zone dans laquelle chemine la racine nerveuse entre son origine du sac dural et le canal de conjugaison. Il peut être divisé en une partie supérieure, appelée défilé discoarticulaire et une partie inférieure, le récessus latéral.
• Le canal de conjugaison est composé d’une partie supérieure sous pédiculaire qui contient le ganglion spinal de la racine nerveuse et d’une partie inférieure en regard du disque intervertébral qui contient des éléments graisseux et vasculaires. La hauteur du canal de conjugaison est conditionnée par la hauteur du disque intervertébral.
Les sténoses centrales doivent être distinguées des sténoses latérales. Les sténoses centrales intéressent le canal central tandis que les sténoses latérales concernent le canal latéral et le canal de conjugaison.
Les sténoses canalaires centrales
La sténose centrale peut être constitutionnelle ou acquise. (23)
• Forme constitutionnelle : elle peut être secondaire à une malformation vertébrale, à une dysplasie osseuse, ou d’origine idiopathique.
• Forme acquise : elle est rarement isolée, et le plus souvent mixte, associée à une sténose latérale.
La sténose centrale acquise affecte principalement le segment mobile disco articulaire, elle est secondaire à l’hypertrophie du ligament jaune, à la présence d’ostéophytes, au bombement discal et à l’hypertrophie des massifs articulaires postérieurs.
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Table des matières
1.INTRODUCTION
1.1 Définition de la lomboradiculalgie
1.2 Epidémiologie
1.3 Physiopathologie de la lomboradiculalgie
1.3.1 Lomboradiculalgie d’origine discale
1.3.1.1 Disque intervertébral normal
1.3.1.2. Radiculalgie d’origine discale
1.3.2 La sténose lombaire
1.3.2.1. Anatomie du canal lombaire
1.3.2.2 Les sténoses canalaires centrales
1.3.2.3. Les sténoses latérales
1.3.2.4 Physiopathologie de la sténose canalaire centrale
1.3.3 Autres causes de radiculalgie
1.4 Histoire naturelle de la lomboradiculalgie aigue et chronique
1.4.2 Lomboradiculalgie d’origine discale
1.4.2 Lomboradiculalgie sur sténose canalaire centrale
1.5 Principes thérapeutiques
1.5.1 Maintien des activités habituelles
1.5.2 Kinésithérapie
1.5.3 Manipulation vertébrales et ostéopathie
1.5.4 Traitement médicamenteux
1.5.4.1 Antalgiques de palier 1
1.5.4.2 Opioïdes
1.5.4.3 Anti inflammatoires non stéroïdiens (AINS)
1.5.4.4 Corticostéroïdes
1.5.4.5 Co analgésiques
1.5.5 Les infiltrations rachidiennes
1.5.5.1 Pharmacologie des infiltrations rachidiennes
1.5.5.2 Voies utilisées
1.5.5.3 La voie interépineuse et la voie interlamaire
1.5.4.4 La voie transforaminale
1.5.5 Prise en charge chirurgicale de la lomboradiculalgie d’origine discale
1.5.5.1 Les techniques chirurgicales
1.5.5.2 Efficacité de la chirurgie dans la littérature
1.6 Particularités de la lombosciatique sur rachis opéré
1.6.1 Définitions et épidémiologie
1.6.2 Etiologies
1.6.2.1 Causes radiculaires
1.6.1.2 Etiologies de douleurs pseudo radiculaires
1.6.2 Prise en charge thérapeutique
1.6.2.1 Prise en charge conservatrice
1.6.2.2 Traitement interventionnel
1.6.2.3 Prise en charge chirurgicale
1.7 Infiltration épidurale par le hiatus sacro coccygien
1.7.1 Anatomie du hiatus sacro coccygien
1.7.2 Physiologie de l’espace épidural
1.7.2.1 Distribution des fluides dans l’espace épidural
1.7.2.2 Impact du positionnement du patient
1.7.2.3 Impact du volume injecté
1.7.3 Infiltrations par le hiatus dans la littérature
1.7.3.1 Lomboradiculagie d’origine discale
1.7.3.2 Lomboradiculalgie sur sténose lombaire centrale
1.7.3.3 Lomboradiculalgie post opératoire
1.7.4 Intérêt du guidage échographique
1.7.5 Intérêts de l’infiltration par le hiatus sacro coccygien écho guidée
1.8 Objectifs de l’étude
2.METHODES
2.1 Sélection des patients
2.2 Intervention
2.3 Evaluation
2.4 Analyse statistique
3.RESULTATS
3.1 Population et données anamnestiques
3.2 Echelles et scores avant infiltration
3.3 Evaluation de l’efficacité des infiltrations par le hiatus sacro coccygien
3.3.1 Disponibilité des données au cours du suivi
3.3.2 Résultats sur les données générales
3.3.3. Analyse par étiologie de la lomboradiculalgie
3.3.4 Comparaison de l’efficacité des infiltrations avec lidocaïne et sans lidocaïne
3.3.5 Efficacité chez les patients aux antécédents de chirurgie rachidienne
3.4 Recherche de facteurs prédictifs de succès de l’infiltration
3.5 Tolérance de l’infiltration par le hiatus sacro coccygien
4.DISCUSSION
4.1 Pertinence clinique des principaux résultats
4.2 Résultats des sous-groupes
4.3 Tolérance de l’infiltration
4.4 Forces et limites
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES