Physiologie de la douleur et transmission du message douloureux

Raisons qui expliquent les difficultés reliées à l’application des données probantes

Avant de tenter d’identifier les raisons qui rendent difficiles l’application des connaissances scientifiques, il convient de définir ce concept. Selon les Instituts de recherche en santé du Canada (lRSC), le concept d’application des connaissances se définit comme « l ‘échange, la synthèse et l’application éthique de connaissances, dans un système complexe d’ interactions entre chercheurs et utilisateurs» (IRSC, 2016).
Estabrooks, Floyd, Scott-Finlay, O’Leary et Gustha (2003) soutiennent que les raisons qui peuvent expliquer la sous-utilisation des connaissances sont complexes et qu’elles impliquent des facteurs liés aux caractéristiques des individus, des organisations et des résultats de la recherche eux-mêmes (Belkhodja et al., 2007; Landry, Amara, & Lamari, 2001). D’autre part, plusieurs études ont démontré qu’au-delà des connaissances accessibles, des facteurs liés aux valeurs et au contexte organisationnel influencent l’utilisation des résultats de recherche et peuvent entraver ou faciliter leur utilisation (Belkhodja et al., 2007; Hemsley-Brown & Sharp, 2003; Kitson, Harvey, & McCormack, 1998; McKenna, Ashton, & Keeney, 2004; Meijers et al., 2006).
Par ailleurs, l’utilisation de moyens spécifiques afin de favoriser la dissémination des connaissances n’est pas nécessairement suivie d’une plus grande utilisation des données de recherche (Chagnon, Daigle, Gervais, Houle, & Béguet, 2009). En effet, une recension de 253 études ayant évalué l’efficacité de la dissémination et de l’ implantation de guides de pratique dans le domaine de la santé rapporte des effets modestes à modérés quant à l’amélioration des soins (Grimshaw et al. 2004). Une revue systématique de 118 essais contrôlés dont l’ objectif était de vérifier l’ impact des mesures d’ audit et de suivi continu sur la pratique professionnelle révèle des résultats similaires avec des effets mitigés de ces stratégies sur l’utilisation des résultats de recherche (Jamtvedt, Young, Kristoffersen, O’Brien, & Oxman, 2006).

Implanter des méthodes de prévention de la douleur

Maintenant qu’il est universellement admis par les autorités scientifiques et institutionnelles que les nouveau-nés ressentent la douleur et qu’ ils y réagissent, il est urgent de diminuer l’ écart entre l’état actuel des connaissances et les pratiques de soins.
Des moyens simples, tels que l’allaitement au sein, l’administration d’ une solution sucrée associée ou non à la succion non nutritive et le contact peau à peau avec la mère ont scientifiquement été prouvées efficaces pour prévenir ou soulager la douleur provoquée par les soins invasifs mineurs chez les tout-petits (Johnston et al., 2014; Shah, Herbozo, Aliwalas, & Shah, 2012; Stevens, Yamada, Lee, & Ohlsson, 2013).
Bien que les fondements théoriques et empiriques des méthodes de soins probantes soient bien documentés, leur application quotidienne au sein d’ un contexte d’ intervention représente un défi de taille. La prise en charge de la douleur du nouveau-né en maternité est une réalité de la pratique quotidienne des soignants. Cependant, il leur est difficile d’ appréhender à la fois toutes les composantes techniques, sécuritaires, soignantes et psychologiques qui se juxtaposent et la simultanéité des réponses que le nouveau-né réclame (Fresco, 2004). À tout cela s’ajoute les enjeux de la responsabilité de chacun selon la fonction qu’ il occupe, selon le manque ou non de moyens, de ressources.
L’ environnement humain, comme la présence des parents, l’attitude des soignants et leurs réponses aux différents besoins, influence la douleur de l’enfant (Billot, 2001). Il est indispensable d’ évoquer l’effet placebo d’ un soin dû au soignant lui-même: prend-il en compte la douleur ou la nie-t-il? Est-il rassurant ou non? Répond-il correctement aux besoins de l’enfant?
Bien que des échelles d’évaluation de la douleur du nouveau-né soient maintenant disponibles, leur utilisation n’est pas répandue. C’ est encore plus vrai en maternité où l’évaluation de la douleur ne s’ inscrit pas dans l’observation systématique du bien-être médical du nouveau-né, à l’instar d’autres indicateurs comme le poids, la température, la fréquence cardiaque, la fréquence des selles, etc. (Fresco, 2004).

Définition de la douleur

La douleur est habituellement définie comme une expérience individuelle dont l’expression dépend de la capacité de chacun à la communiquer à autrui (Wolf, 1999). Melzack et Wall (1970) l’ ont défini comme un phénomène purement sensoriel associé à un stimulus douloureux ayant une composante affectivo-émotionnelle due au désagrément causé par cette expérience, amenant à des comportements d’ éviction ou de réduction du stimulus.
Selon l’International Association for the Study of Pa in (IASP, 1979) et l’Académie américaine de pédiatrie (AAP, 2000), la douleur se définit ainsi: « Une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à une lésion tissulaire ou potentielle, ou décrite en des termes évoquant une telle lésion ». Ces définitions sont cependant peu adaptées à la réalité du nouveau-né. En effet, le nourrisson est incapable de communiquer directement son expérience douloureuse et les émotions qui s’y rapportent. Il n’a pas acquis le langage, ni l’apprentissage préalable lui permettant de reconnaitre la douleur. Selon Wolf (1999), la perception douloureuse du nourrisson ne peut jamais être prouvée mais présumée sur des arguments qui se fondent sur une cause probable, un contexte et des changements de comportement. Anand et Craig (1996), quant à eux, soutiennent que la perception de la douleur est inhérente à la vie sans nécessité d’expérience antérieure, s’exprimant par des altérations comportementales, équivalents précoces d’expression verbale de la douleur. C’ est donc cette définition d’Anand et Craig (1996) qui est retenue pour cette étude.

Physiologie de la douleur et transmission du message douloureux

Le terme nociception est largement utilisé pour évaluer la perception douloureuse chez le nouveau-né. La nociception dépend de l’ intégrité de l’ appareil sensoriel, des récepteurs qui sont impliqués dans la réponse aux stimuli douloureux, de la transmission et de l’ intégration de cette information par la moelle, et finalement de la projection de ces signaux qui véhiculent les informations chez le sujet conscient (Wolf, 1999).
À la naissance, tous les récepteurs de douleur sont en place chez le nouveau-né et leur densité est similaire à celle de l’ adulte (Annequin, 2002; Gleiss & Stuttgen, 1970).
La communauté médicale internationale reconnait même que l’on peut parler de douleur dès 5 mois et demi de grossesse. L’ ensemble des structures neuroanatomiques nécessaires à la détection et à la transmission de l’ influx nociceptif (douleur) de la périphérie jusqu’ au cortex cérébral sont fonctionnelles vers la 26e semaine de gestation (Carbajal, 2005). Comme le système nerveux des nouveau-nés n’ est pas assez développé et que les mécanismes inhibiteurs de la transmission des stimulations nociceptives (douloureuses) sont immatures; ils peuvent en fait, présenter un seuil de douleur et une tolérance à la douleur inférieurs à ceux des grands enfants ou des adultes (Carbajal, 2005).

Les conséquences de la douleur du nouveau-né

Ne pas prendre en compte la douleur est néfaste. Les enfants se souviennent d’ avoir eu mal. En effet, on reconnait maintenant que la douleur subie en période néonatale peut être mémorisée. Selon Taddio et al. (1995), les effets de la circoncision néonatale sur la réponse à la douleur de la vaccination chez le garçon suggèrent une mémoire de la douleur à 4-6 mois. Lors de cette étude, la comparaison des scores de douleur obtenus chez 87 nourrissons au moment de leur vaccination à 4-6 mois, montre des scores significativement plus élevés chez les garçons circoncis sans anesthésie à la naissance comparé aux garçons non circoncis (Taddio et al., 1995). Quoique aucune randomisation n’ ait été effectuée, ce qui laisse supposer que d’ autres facteurs aient pu modifier les résultats, ces observations démontrent la possibilité que l’ enfant apprenne d’ une expérience douloureuse précoce et que cette mémorisation affecte la réaction future à la douleur (Porter, Grunau, & Anand, 1999; Taddio et al., 1995). Plus récemment, d’autres études ont démontré l’influence des souvenirs sur les ressentis des enfants bien portants face à une douleur ultérieure. Ainsi, prévenir ou soulager la souffrance empêchera ce cruel souvenir de s’ inscrire dans l’ histoire de l’ enfant (Noël, Chambers, Mc Grath, Klein, & Stewart, 2012).

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Table des matières

Introduction 
Problématique
Objectifs, questions spécifiques de la thèse
Objectifs de la thèse
Contexte théorique 
Raisons qui expliquent les difficultés reliées à l’application des données probantes 
La douleur 
Implanter des méthodes de prévention de la douleur
Définition de la douleur
La douleur aiguë
Physiologie de la douleur et transmission du message douloureux
Réponses comportementales à la douleur
Les conséquences de la douleur du nouveau-né
Recommandations concernant la vitamine K et le dépistage des maladies métaboliques
Les évidences concernant les méthodes non pharmacologiques pour la prévention ou soulagement de la douleur du nouveau-né lors des soins douloureux 
Effets analgésiques des solutions sucrées
Saccharose (sucrose)
Glucose
Mécanisme d’action analgésique, effets secondaires et recommandations concernant les solutions sucrées
L’ allaitement maternel: une méthode efficace pour soulager la douleur
Le contact peau à peau avec la mère
Évaluation de la douleur
Les échelles d’évaluation de la douleur
Liens avec le programme Amis des bébés (IAB)
Modèle et théorie utilisés pour le développement, l’ implantation et l’ évaluation du programme 
L’ approche centrée sur la théorie de Chen (1990, 2005, 2015)
Avantages d’ utiliser ce modèle
Évaluation du changement de comportement des soignants selon la Théorie de l’action planifiée d’Ajzen (1985, 1991)
Théorie de l’action raisonnée (Fishbein & Ajzen, 1975, 1980)
Théorie de l’ action planifiée d’Ajzen (1985, 1991)
Hypothèses quant aux effets possibles du programme
Méthode 
Développement du programme 
Rappel des objectifs du programme
Modèle d’action 
Organisation chargée de l’implantation du programme
Personnes qui implantent le programme
Partenaires
Contexte écologique
Protocoles
Population cible du programme
Modèle de changement 
Interventions
Déterminants
Résultats
Devis de l’étude 
Évaluation du programme
Participants
Critères d’inclusion pour les infirmières
Critères d’inclusion pour les parents
Critères d’exclusion
Taille de l’échantillon
Profil des professionnelles participant à l’étude
Profil des parents participant à l’étude
Instruments de mesure 
Fidélité de l’instrument utilisé pour les infirmières
Déroulement de l’étude 
Recrutement des participants
Considérations éthiques
Calendrier des activités d’évaluation
Plan d’ analyses des données
Résultats 
Rappel des objectifs de la thèse et des questions de recherche 
Résultats du questionnaire auto-administré aux infirmières sur l’ application du programme, l’attitude, les connaissances et habiletés 
Acquisition de connaissances
Résultats des audits de dossiers quant à l’ application du programme
Résultats du questionnaire auto-administré chez les parents quant à la participation et la satisfaction (confiance, rassurance et sécurité) 
Mode d’ alimentation choisi par les parents pour leur enfant
Effets du programme (application des méthodes de prévention de la douleur) sur les parents
Facteurs qui favorisent la progression de la démarche d’ implantation des méthodes de prévention de la douleur et qui soutiennent un changement de pratique des infirmières
Valorisation du geste relié à l’application des méthodes de prévention de la douleur
Perception d’un avantage pour leur famille
Effets positifs de la formation dispensée à l’ implantation du programme
Recommandations, lignes directrices et données probantes : des arguments pour convaincre
La nouveauté
Collaboration de la chef de programme et de l’ ASI
Identification des avantages et anticipation des difficultés comme stratégie d’ implantation
Visibilité du projet en tant que stratégie d’ implantation
Implication de l’ équipe médicale
Projet qui s’ inscrit dans la gouvernance clinique de l’ établissement
Saisir les opportunités comme stratégie d’ application des méthodes de prévention de la douleur
Facteurs qui entravent la progression de la démarche d’ implantation des méthodes de prévention de la douleur
La consignation des notes: une difficulté dans l’ implantation du programme
L’ évaluation objective de la douleur lors des soins
L’ arrivée non planifiée de nouveau personnel: une entrave à l’ implantation
Les critiques négatives: source de difficulté
Perception d’ avoir moins de contrôle sur le moment des soins: une difficulté dans l’ utilisation des méthodes
Discussion
Résultats de l’ étude
Défi d’ implanter des données probantes
L’ importance de la formation
Double fonction d’ acteur du programme et chercheur-évaluateur
Objectifs à moyen et long terme
Forces du programme et de l’ étude
Contribution de la thèse au domaine de la psychologie
Limites de l’ étude
Recommandations pour bonifier l’ implantation et l’ évaluation du programme
Conclusion

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