Le diabète est une maladie au premier rang des pathologies chroniques dans le monde selon l’OMS, et la première maladie non contagieuse avec 537 millions de diabétiques dans le monde en 2021. Sa prévalence est en croissance constante, en lien notamment avec la progression de la sédentarité et de l’obésité.
Le diabète est un déséquilibre métabolique entrainant une hyperglycémie chronique. Il représente un enjeu de santé publique de grande importance, car son dépistage précoce ainsi que la mise en place de mesures hygiéno-diététiques et de traitements permettent de freiner son évolution, et d’éviter des complications à court et long termes. Ces répercussions, liées à la toxicité du glucose présent en excès dans le sang, peuvent être de gravité importante : à court terme avec un risque de coma en cas d’hypoglycémie ou d’hyperglycémie majeures, et à long terme des risques de cécité, d’accidents vasculaires cérébraux et infarctus du myocarde, d’insuffisance rénale chronique ou d’amputation des membres inférieurs. Ces complications peuvent impacter de façon majeure la qualité de vie des diabétiques.
Physio-pathologie : définition, causes et types de diabètes
(ANSM 2017c) (OMS 2021) (INSERM 2019) (Santé Publique France 2022) (Moniteur des Pharmacies n°3260 2019) (Duron 2006) (Dusselier 2018) (Gourdy et al. 2008) (Boullu-Sanchis 2003) (Guillausseau et al. 2009) (Dusselier 2018) (HAS 2014d)
Le diabète désigne une pathologie liée à un déséquilibre du métabolisme glucidique conduisant à la présence en excès de glucose dans le sang, de façon prolongée : on parle d’hyperglycémie chronique. La présence de glucose dans le sang à jeun est due à une mauvaise utilisation de celui-ci : soit par difficulté d’action de l’insuline, on parle alors d’insulinorésistance, soit par une déficience de la sécrétion d’insuline, on parle dans ce cas alors d’insulinopénie (ANSM 2017c) (OMS 2021). Le diabète intègre différentes catégories selon son mode d’apparition et son mécanisme pathologique, dont les deux plus grandes catégories sont les diabètes de type 1 et 2.
➤ Le diabète de type 1 dit aussi diabète insulinodépendant : (ANSM 2017c) (OMS 2021) Maladie auto-immune liée à la destruction des cellules bêta des îlots de Langherans du pancréas. Une action immunitaire va produire des anticorps anti-cellules bêta, entrainant une atrophie des îlots pancréatiques et une carence sévère en insuline de façon précoce. Dans 90% des cas, il n’y a pas d’antécédents familiaux de diabète et il s’agit de mutations de novo. Les origines du diabète de type 1 sont mal connues, souvent le résultat de prédispositions génétiques et de facteurs environnementaux. Le diabète de type 1 représente 5 à 10% des patients diabétiques adultes. Ses signes cliniques sont : un amaigrissement sans perte d’appétit, une asthénie, une polyurie (liée à la fuite rénale du glucose) et une polydipsie compensatrice. D’apparition rapide et bruyante, il est le plus souvent dépisté en milieu hospitalier à la suite d’une complication aigue, ou d’une dégradation de l’état général. Son traitement se fait uniquement par insuline.
➤ Le diabète de type 2 : (ANSM 2017c) (INSERM 2019) Il est lié à un mécanisme d’insulino-résistance, c’est-à-dire une résistance des cellules pancréatiques à l’action de l’insuline. Les cellules bêta sont fonctionnelles, contrairement au cas du diabète de type 1. La sécrétion d’insuline est d’abord élevée, en réponse à la résistance périphérique à l’insuline, puis devient insuffisante. Le patient se retrouve en hyperglycémie par l’effet conjoint de cette hypoinsulinémie couplée à la stimulation de la néoglucogenèse. Forme la plus fréquente de diabète, le diabète de type 2 représente environ 90% des patients diabétiques. Il apparaît le plus souvent au-delà de 30 ans, mais des cas peuvent être découverts chez les enfants ou adolescents, notamment ceux souffrant d’obésité. La plupart des malades présentent des prédispositions génétiques qui vont se coupler aux facteurs environnementaux (la sédentarité et l’obésité, qui sont deux causes principales et indépendantes, l’alimentation …). Les principaux facteurs de risques pouvant conduire au développement d’un diabète de type 2 sont également l’âge, un antécédent de diabète gestationnel ou de diabète familial, et un état de prédiabète (Santé Publique France 2022). D’apparition progressive et silencieuse, il est le plus souvent découvert au cours de campagnes de dépistage (un dépistage ciblé peut être proposé en cas suspicions liées à des antécédents) ou à l’apparition de complications. Le traitement comporte des médicaments qui vont sensibiliser à l’action de l’insuline et éventuellement un traitement par insuline.
Le syndrome métabolique est une association de facteurs cliniques et biologiques constituant un état prédisposant au diabète de type 2 : il associe une obésité abdominale (tour de taille > 94 cm chez l’homme et > 80 cm chez la femme) à au moins deux des critères suivants :
o Hypertriglycéridémie (> 1,5 g/L ou > 1 g/L à jeun)
o HDL cholestérol bas (< 0,40 g/L chez l’homme ou < 0,50 g/L chez la femme)
o Hypertension artérielle (> 130/80 mmHg) .
Le prédiabète est un stade précurseur du diabète défini par une hyperglycémie modérée à jeun à risque d’évoluer en diabète, au-dessus des normales mais en deçà du seuil de définition du diabète de type 2. Les glycémies à jeun sont comprises entre 1,1g/L (6,1 mmol/L) et 1,26 g/L (7mmol/L) selon les critères de l’OMS. Un état de prédiabète nécessite une surveillance biologique annuelle de son évolution. (Moniteur des Pharmacies n°3260 2019) .
Il existe d’autres formes plus rares de diabètes :
➤ Diabètes dits « secondaires » : (Duron 2006) (Dusselier 2018) Ces diabètes peuvent être liés à des maladies génétiques, des maladies endocriniennes (notamment secondaire à une hyperthyroïdie), des maladies du pancréas, ou à certains traitements médicamenteux (en particulier une corticothérapie au long cours provoquant une prise de poids et une hyperproduction hépatique de glucose).
o Diabète secondaire à une pancréatopathie : il est lié à une disparition partielle ou totale du pancréas. Les principales causes en sont une pancréatite chronique calcifiante (dont l’origine la plus fréquente est l’alcoolisme), les cancers du pancréas, l’hémochromatose, la mucoviscidose ou une pancréatectomie (partielle ou totale). Il est d’apparition progressive et nécessite une insulinothérapie. (Gourdy et al. 2008)
o Diabète fibro-calculeux (dit tropical) : il s’agit d’une pathologie qui se rencontre fréquemment chez les adolescents ou jeunes adultes en dénutrition majeure, notamment dans les pays en voie de développement. Dans un cas sur deux, le sujet avec une pancréatite va développer un diabète avec une importante insulinorésistance.
o Les diabètes secondaires d’origine génétiques, ou diabètes monogéniques : (Boullu-Sanchis 2003) (Guillausseau et al. 2009) Ils représentent 2 à 5% des diabètes non insulinodépendants. Le diagnostic des diabètes monogéniques se fait par test génétique face à un tableau clinique évocateur (contexte familial, diabète non insulino-dépendant avant 30 ans, absence de surpoids ou d’obésité). Un dépistage familial préventif pourra éventuellement être envisagé. Parmi ceux-ci, on trouve principalement :
Les diabètes MODY (Maturity Onset type Diabetes of the Young) : Il s’agit de diabètes monogéniques non insulino-dépendants, de forme héréditaire à transmission autosomique dominante qui apparaissent chez l’enfant ou l’adolescent avant 25 ans. Il existe 6 formes de MODY selon les gènes atteints : le gène de l’enzyme glucokinase GCK (qui intervient dans le métabolisme glucidique au niveau des cellules pancréatiques et hépatocytaires), et cinq gènes codant des facteurs de transcription nucléaires de l’expression de protéines impliquées dans le transport ou le métabolisme du glucose. Il se classent en MODY 1, 2, 3, 4, 5 et X.
Le diabète MODY 2, peu sévère (touchant le gène de la GCK), en est le type le plus fréquent (60% des cas de MODY en France), suivi du MODY 3 (20% des MODY en France), qui a des complications fréquentes et sévères. Les diabètes MODY forment un groupe très hétérogène tant sur le plan génétique que clinique.
Le diabète mitochondrial ou MIDD (Maternally Inherited Diabetes and Deafness) : Il représente 0,2 à 3% des cas de diabètes et est le plus souvent diagnostiqué chez le jeune adulte autour de 25 ans. Il s’agit également d’une forme monogénique de diabète mais dont la mutation se situe sur l’ADN mitochondrial. Sa transmission est donc uniquement maternelle mais il peut toucher les hommes comme les femmes. Sa physiopathologie ressemble le plus souvent à celle du diabète de type 2 avec cependant un IMC faible ou normal. Il se caractérise par une surdité neurosensorielle bilatérale progressive, une atteinte des organes métaboliques, des douleurs musculaires et une forme de rétinopathie spécifique (dystrophie maculaire réticulée).
◈ Diabète de type 3 ou 1B : (Dusselier 2018)
Cette forme de diabète concerne les populations d’origine africaine avec au début une évolution proche du diabète de type 1, une phase de rémission sous insulinothérapie puis de rechute en cas d’arrêt de l’insuline ou de changement pour un traitement per os.
◈ Diabète gestationnel : (Dusselier 2018) (HAS 2014d)
Il s’agit d’une hyperglycémie qui apparait dans 3 à 6% des grossesses, le plus souvent autour de la 24e semaine de grossesse (26e semaine d’aménorrhée). Ce diabète est lié à une mauvaise adaptation de l’organisme aux modifications du métabolisme liées à la grossesse, et notamment la production de l’HPL (Hormone de Croissance Placentaire) qui s’oppose à l’action de l’insuline. Dans la plupart des cas, le diabète est limité à la durée de la grossesse et va disparaître à son terme. Il est cependant un facteur de risque d’apparition d’un diabète de type 2 post-grossesse chez la mère. Le risque de récidive est majoré en cas de nouvelle grossesse.
Son dépistage est primordial en raison des complications qu’il peut engendrer :
– Hypertension chez la mère
– Augmentation de la sensibilité aux infections
– Mort fœtale in utero
– Complications métaboliques du fœtus, en particulier la macrosomie fœtale (qui peut entrainer des traumatismes obstétricaux), mais aussi une obésité, un diabète non insulinodépendant
– Césarienne en cas de glycémie non contrôlée au moment de l’accouchement.
|
Table des matières
INTRODUCTION
I – RAPPELS SUR LE DIABETE
1) Physio-pathologie : définition, causes et types de diabètes
2) Dépistage et diagnostic du diabète
3) Données épidémiologiques
4) Mécanisme de sécrétion de l’insuline et voie incrétine
5) Diabète et voie incrétine
6) Complications liées au diabète
II – RECOMMANDATIONS POUR LA PRISE EN CHARGE DU PATIENT DIABETIQUE
1) Objectifs de la prise en charge du diabète
2) Mise en place de la prise en charge du diabète
3) Classes pharmacologiques utilisées en thérapeutique
4) Dernières recommandations pour la prise en charge du diabète de type 2
a. Objectifs d’HbA1c
b. Stratégie thérapeutique médicamenteuse pour le diabète de type 2
III – NOUVELLES THERAPEUTIQUES ANTIDIABETIQUES
1) Analogues de GLP-1
a. Spécialités existantes et caractéristiques pharmacologiques
b. Mécanisme d’action
c. Indications et place dans la thérapeutique
d. Posologies
e. Précautions d’emploi et contre-indications
f. Interactions
g. Effets indésirables
h. Mode d’utilisation et de conservation
2) Insulines
a. Note sur les spécialités biosimilaires (ABASAGLAR® spécialité biosimilaire de LANTUS®)
b. Insulines à durée d’action prolongée
i. Spécialités existantes et caractéristiques pharmacologiques
ii. Mécanisme d’action
iii. Indications et place dans la thérapeutique
iv. Posologie
v. Précautions d’emploi et contre-indications
vi. Interactions
vii. Effets indésirables
viii. Mode d’utilisation et de conservation
c. Insuline à courte durée d’action
i. Spécialité existante et caractéristiques pharmacologiques
ii. Mécanisme d’action
iii. Indications et place dans la thérapeutique
iv. Posologie
v. Précautions d’emploi et contre-indications
vi. Interactions
vii. Effets indésirables
viii. Mode d’utilisation et de conservation
3) Association de plusieurs classes pharmacologiques : insuline et analogue de GLP-1
a. Spécialité existante et caractéristiques pharmacologiques
b. Mécanisme d’action
c. Indications et place dans la thérapeutique
d. Posologie
e. Précautions d’emploi et contre-indications
f. Interactions
g. Effets indésirables
h. Mode d’utilisation et de conservation
4) Inhibiteurs du SGLT2 (gliflozines)
IV – PRISE EN CHARGE DU PATIENT DIABETIQUE A L’OFFICINE ET DELIVRANCE
1) Information et orientation des patients
2) Règles générales pour la réalisation d’une injection par voie sous-cutanée
3) Médicaments du diabète et voyage
4) Diabète et Covid-19 : impact de la pandémie sur la prise en charge des patients diabétiques
CONCLUSION
ANNEXES