LES PHYLLOSILICATES 2:1 DIOCTAEDRIQUES
Les phyllosilicates sont des silicates hydratés, lamellaires dont les feuillets constitutifs, développés dans le plan cristallographique ab, sont formés par l’empilement de couches de tétraèdres essentiellement siliceux et de couches d’octaèdres principalement alumineux. Selon le nombre de couches tétraédriques et octaédriques composant un feuillet, on distingue plusieurs familles de phyllosilicates, dont les phyllosilicates 2:1 dioctaédriques qui nous intéressent plus particulièrement dans la mesure où ils représentent l’essentiel des minéraux identifiés dans le bassin de Paris. Ces minéraux comprennent deux couches tétraédriques encadrant une couche octaédrique .
Dans la couche tétraédrique, le cation dominant est Si4+ mais de fréquentes substitutions ont lieu avec Al3+ et, occasionnellement, avec Fe3+. Chaque tétraèdre est lié aux tétraèdres voisins par trois de ses sommets créant ainsi une surface approximativement plane d’atomes d’oxygène. Si les cations de la couche octaédrique sont principalement trivalents, alors seuls deux sites octaédriques sur trois (par demi-maille) sont occupés, et le phyllosilicate est qualifié de dioctaédrique .
Classification des différents types de feuillets suivant ξ
Si ξ=0
Il s’agit de la pyrophyllite dont la formule structurale est la suivante : Si4Al2O10(OH)2 La pyrophyllite ne contient de substitutions ni dans les sites tétraédriques ni dans ceux octaédriques. Le déficit de charge de ce feuillet est donc nul et ne nécessite pas la présence de cations compensateurs dans l’espace interfoliaire. La distance basale d001 est alors minimale à 9.2 Å.
Les smectite 0.3 ≤ ξ ≤ 0.6
Les smectites possèdent un déficit de charge foliaire faible compensé par un cation interfoliaire hydraté et échangeable. En se référant à la formule structurale générale des phyllosilicates 2 : 1 dioctaédriques, les smectites pour lesquelles x>y (majorité de charges tétraédriques) sont appelées beidellites (nontronites pour celles riches en fer), et celles pour lesquelles y>x (majorité de charges octaédriques) montmorillonites. L’incorporation de molécules neutres et polaires comme l’eau et l’éthylène glycol est très fortement conditionnée par la taille et la charge du cation interfoliaire, d’une part, et par la valeur et la localisation de la charge du feuillet silicaté d’autre part (MacEwan et Wilson, 1980).
Le test de Greene Kelly permet classiquement de déterminer la localisation du déficit de la charge (Greene-Kelly, 1953). La capacité à ne plus s’expanser au-delà de 9.5 Å après une saturation au lithium et un chauffage à 200-300°C était le critère pour appeler le minéral montmorillonite. Inversement, le gonflement du minéral à 17.8 Å après saturation au glycérol était le critère pour caractériser la beidellite. Hoffmann et Klemen (1950) ont été les premiers à expliquer la diminution d’expansibilité et de CEC pour des montmorillonites saturées au lithium après séchage par la migration du cation Li+ de l’espace interfoliaire vers les sites octaédriques vacants, assurant ainsi la compensation locale du déficit de charge octaédrique.
En analysant les compositions chimiques de plusieurs séries diagénétiques et métasomatiques, Meunier et Velde (1989) ont montré que les montmorillonites représentent le pôle smectitique des interstratifiés I/S, et que ceux-ci peuvent être considérés comme une solution solide partielle avec trois composants : Illite haute charge 0.87, montmorillonite basse charge (0.33) et haute charge (0.66).
La vermiculite 0.6 ≤ ξ ≤ 0.9
D’après la nomenclature de l’AIPEA, les minéraux argileux présentant une gamme de charge interfoliaire telle que 0.6<ξ<0.9 sont des vermiculites (Bailey, 1980). Le test le plus couramment utilisé pour mettre en évidence la vermiculite est celui préconisé par Walker (1958). Il consiste à échanger le cation interfoliaire par du magnésium puis à solvater l’échantillon au glycérol. La vermiculite possède alors une distance basale de 14.5 Å contre 18 Å pour la smectite, la vermiculite formant un complexe avec une couche de glycérol contre deux pour la smectite. Malla et Douglas (1987) ont remis en question la validité de ce test qui ne permet pas de différencier un minéral possédant une distribution de charges hétérogène d’un simple mélange alors que la méthode de saturation nalkylammonium développée par Lagaly et al. (1976) le permet. De plus, le test au glycérol est fortement influencé par la manière dont est effectuée la solvatation (ajout du glycérol en phase vapeur après préparation de la lame orientée ou ajout de glycérol liquide avant de réaliser la lame orientée-Ross et Kodama, 1984). Pour Malla et Douglas (1987), le bon moyen pour différencier vermiculite et smectite consiste à saturer le minéral argileux au potassium et à étudier sa ré-expansion après chauffage et solvatation au glycérol. La saturation au potassium, à température ambiante, permet de distinguer les minéraux dont la charge est inférieure à 0.57, leur distance basale décroissant vers 11.2-12.8 Å, et ceux dont la charge est supérieure à 0.63, dont la distance basale décroît vers 10.65 Å. La ré-expansion après chauffage à 300°C pendant environ une heure et solvatation au glycérol permet de distinguer et d’affiner la caractérisation en définissant 4 groupes :
➤ Les minéraux possédant une charge inférieure à 0.36 qui incorporent deux couches de glycérol dans leurs espaces interfoliaires et qui possèdent donc une distance basale de 18 Å (smectite ).
➤ Ceux qui possèdent une charge comprise entre 0.39 et 0.43 et qui se réexpansent à 14 Å (smectite).
➤ Ceux qui possèdent une charge comprise entre 0.46 et 0.57 qui montrent deux pics en DRX : un à 10 et l’autre à 14 Å.
➤ Enfin les minéraux possèdant une charge supérieure à 0.63 qui ne présentent aucune propriété de ré-expansion (vermiculite).
Les deux premiers groupes permettent d’affiner le découpage en terme de charge pour les smectites. Le troisième révèle un comportement hybride entre smectite et vermiculite puisque deux pics l’un à 10 et l’autre à 14 Å sont présents et pose donc le problème d’une limite arbitraire entre smectite haute charge et vermiculite. D’ailleurs, le problème de la limite basse (0.6) imposée par la nomenclature de l’APEIA pour distinguer vermiculites basses charges et smectites hautes charges a aussi été évoqué par De la Calle et Suquet (1988) pour les phyllosilicates trioctaédriques. Ces auteurs ont constaté que les vermiculites basses charges et la saponite possèdent la même séquence d’empilement des feuillets pour un cation et une humidité relative donnés et que ces deux espèces ne présentent pas de différences cristallochimiques significatives. Ils proposent alors que vermiculites basses charges et saponites constituent une même famille.
Les micas 0.75 ≤ ξ ≤ 1
La limite basse proposée pour ξ (0.75) recouvre celle des vermiculites hautes charges, posant à nouveau le problème d’une limite arbitraire. Le cation interfoliaire n’est pas hydraté donc la distance basale varie entre 9.6 et 10.1 Å. L’illite fait partie de ce groupe. Le terme illite a été initialement introduit par Grim et al. (1937) pour désigner les minéraux argileux appartenant au groupe des micas. Hower et Mowatt (1966) suggèrent que l’illite discrète formée par une réaction diagénétique contient 0.75 K par dans son espace interfoliaire. ( ) O10 OH 2 Pour Srodon et Eberl (1984), l’illite est un minéral argileux (< 4 µm, ici le diamètre de la sphère équivalente est considéré ) similaire au mica dioctaédrique alumineux et potassique non expansible à l’éthylène glycol. Ils confirment la valeur de 0.75 K en affinant la démarche. Pour eux, la valeur de 0.75 de Hower et Mowatt (1966) est une moyenne entre des feuillets hautes charges et basses charges. En extrapolant des données de la littérature, Meunier et Velde (1989) trouvent que le pôle illite présente une charge interfoliaire significativement plus élevée de 0.87. Cette valeur est similaire à celle déterminée ensuite par Srodon et al. (1992) (0.89), à partir d’analyses chimiques (EDS) en microscopie à transmission et des mesures de CEC et de surface totale. Lanson et Champion (1991) proposent également une valeur de 0.9 toujours en utilisant la microscopie à transmission (EDS).
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Table des matières
INTRODUCTION
1. CONTEXTE GEOLOGIQUE
1.1. DESCRIPTION DU SITE DE L’EST
1.1.1. Situation géographique et géologique
1.1.2. Données existantes
1.1.2.1. Minéralogie
1.1.2.2. Apport de la sédimentologie
1.1.2.3. Matière organique
1.2. L’ENRICHISSEMENT EN ILLITE DANS LES INTERSTRATIFIES
2. PHYLLOSILICATES MINERALOGIE ET STRUCTURE
2.1. LES PHYLLOSILICATES 2:1 DIOCTAEDRIQUES
2.1.1. Classification des différents types de feuillets suivant ξ
2.1.1.1. Si ξ=0
2.1.1.2. Les smectite 0.3 ≤ ξ ≤ 0.6
2.1.1.3. La vermiculite 0.6 ≤ ξ ≤ 0.9
2.1.1.4. Les micas 0.75 ≤ ξ ≤ 1
2.1.1.5. Proposition pour une classification pratique
2.2. CARACTERISATION STRUCTURALE DES PHYLLOSILICATES
2.2.1. Intensité diffractée par une espèce pure
2.2.2. L’interstratification
2.2.2.1. L’approche probabiliste
2.2.2.2. Diffractogrammes calculés caractéristiques
2.2.2.2.1. R = 0
2.2.2.2.2. R = 1 MPDO (Maximun Possible Degre of Ordering)
2.2.2.2.3. L’ordre partiel
2.2.2.2.4. La segrégation
2.2.2.3. Homogénéité du cristal
2.2.2.4. n composants
2.2.2.4.1. Probabilités indépendantes et notations utilisées
2.2.2.4.2. R = 0
2.2.2.4.3. R = 1 MPDO
2.2.2.4.4. R = 1 Ordre partiel
2.2.2.4.5. Ségrégation
2.2.2.5. Intérêt de la simulation
2.2.2.6. Le modèle structural
2.3. CE QU’IL FAUT RETENIR
3. PREPARATION DES ECHANTILLONS ET METHODES D’INVESTIGATION
3.1. PREPARATION DES ECHANTILLONS POUR LA DRX
3.1.1. Traitements préliminaires
3.1.2. Fractionnement granulométrique
3.1.3. Echange cationique
3.1.4. Préparation des lames orientées
3.1.4.1. Méthode pipette
3.1.4.2. Méthode millipore
3.1.4.3. Méthode employée
3.1.5. Enregistrement des diffractogrammes de rayons X
3.1.5.1. Alignement
3.1.5.2. Contrôle de l’humidité lors de l’enregistrement
3.2. METHODES EMPLOYEES LORS DE L’ETUDE EXPERIMENTALE
3.2.1. Protocole de lavage
3.2.2. Mesure du pH
3.2.3. Mesure des différentes concentrations dans les fluides
3.2.4. Mesure de la taille des colloïdes
3.2.5. STXM
4. ETUDE MINERALOGIQUE DE LA FRACTION ARGILEUSE FORAGE EST 104
4.1. POSITION DU PROBLEME
4.1.1. Choix des échantillons représentatifs
4.1.2. Description minéralogique classique
4.2. MODELES ENVISAGES POUR LA SERIE
4.2.1. Ségrégation
4.2.2. Modèle polyphasique
4.2.2.1. Description
4.2.2.2. Evolution avec la profondeur
4.2.2.2.1. Evolution quantitative des différentes phases
4.2.2.2.2. Evolution structurale
4.2.3. Choix du modèle
4.2.4. Pertinence du modèle
4.2.4.1. Sensibilité des paramètres
4.2.4.1.1. Modification du nombre de composants
4.2.4.1.2. Modification des probabilités de succession de feuillets
4.2.4.1.3. Modification de d001
4.2.4.1.4. Modification chimique du feuillet
4.2.4.1.5. Modification de la taille des domaines cohérents
4.2.4.1.6. Modification du pourcentage d’expansible
4.2.4.2. Difficulté d’obtenir des résultats quantitatifs
4.3. CE QU’IL FAUT RETENIR
CONCLUSION