Ces dernières années, l’industrie, surtout automobile, s’intéresse au dihydrogène comme vecteur d’énergie. En effet, couplé à une pile à combustible, cela permet de générer de l’électricité sans rejet de CO2. L’une des limitations de cette technologie est la production de dihydrogène. Si l’hydrogène est bien présent dans de nombreuses molécules sur Terre, comme l’eau H2O par exemple, sous forme H2 celui-ci ne représente que 0,005 ppmv (partie par millions en volume) dans l’air. Il faut donc le produire. Cependant, les principales méthodes de production actuelle, comme le vaporeformage du méthane par exemple, sont polluantes. L’électrolyse de l’eau est un moyen de production utilisé dans l’industrie pour obtenir du H2 avec un taux de pureté élevé. Cependant, pour ne pas que cette production soit polluante, encore faut-il que la source d’électricité nécessaire à la réaction soit ellemême non polluante. Ainsi, une source d’énergie renouvelable est envisagée, comme l’énergie solaire. Le système panneau solaire couplé à un électrolyseur est étudié comme moyen de production de H2 mais également comme stockage chimique de l’énergie. Toutefois, cette technologie cumule le rendement du panneau solaire et celui de l’électrolyseur aboutissant à un rendement théorique global maximum de l’ordre de 30%. Dans le cadre de cette thèse, nous nous sommes intéressés à une nouvellefaçon de produire le dihydrogène, en fusionnant le panneau solaire avec l’électrolyseur, permettant ainsi d’augmenter le rendement maximal théorique à près de 35%: la photoélectrolyse de l’eau.
Ces travaux de thèse ont été financés par Total Energies Nouvelles. L’objectif était de mettre au point une photocathode pour réaliser la réduction de protons en dihydrogène. Cette photocathode fera ensuite partie d’une cellule complète de photoélectrolyse de l’eau, composée de deux photoélectrodes séparées par une membrane. Pour cela, des matériaux semiconducteurs de type p ont été étudiés comme photocathode. Ils sont composés d’éléments chimiques relativement abondants et les procédés de fabrication utilisés sont peu onéreux et peuvent être adaptés à l’échelle industrielle.
Contexte
Dihydrogène : généralités
Le dihydrogène est une molécule inodore, incolore, non corrosive et surtout très énergétique. En effet, la combustion d’un kilo de H2 libère trois fois plus d’énergie qu’un kilo d’essence, soit 120 MJ/kg contre 45 MJ/kg pour l’essence. En revanche, l’hydrogène est l’élément le plus léger du tableau périodique ; ainsi, sa densité est très faible. Pour produire autant d’énergie qu’un litre d’essence, il faut 4,6 L de dihydrogène comprimé à 700 bars. Il s’agit d’une contrainte pour le transport et le stockage sous forme gazeuse. Sinon, comme tout combustible, celui-ci peut s’enflammer voire exploser au contact de l’air. Toutefois, en cas de fuite d’un réservoir, l’hydrogène aura tendance à monter en altitude et à se diluer très vite dans l’air car son coefficient de diffusion est important (quatrefois plus vite que le gaz naturel et douze fois plus vite que les vapeurs d’essence [1]), ce qui peut être considéré comme un facteur de sécurité [2].
Applications actuelles
Près de 600 milliards de m3 d’H2 sont produits annuellement dans le monde. Actuellement, près de 44% du dihydrogène produits est utilisé pour le raffinage du pétrole, dans le cadre de la conversion des bruts lourds et de la désulfuration de l’essence et du gazole. 38% sert à la production d’ammoniac, par le procédé Haber-Bosch :
?2 + 3?2 → 2??3 (1.1)
Enfin, le reste est utilisé dans la fabrication de produits chimiques tels que le méthanol :
?? + 2?2 → ??3?? (1.2)
ou des hydrocarbures, via le procédé Fischer-Tropsch [3]:
(2? + 1)?2 + ??? → ???2?+2 + ??2? (1.3)
Applications futures majeures
Dans les années à venir, la population mondiale va augmenter significativement ainsi que les besoins énergétiques .
Sachant que des pays tels que l’Inde, encore en développement, ont recours à des énergies polluantes et que la question du climat est devenue cruciale, il faut trouver un compromis et essayer de développer des énergies décarbonées. Ainsi, on note que dans les années à venir, même si les énergies fossiles resteront très certainement prédominantes, la part des énergies renouvelables devrait progresser dans le mix énergétique, tant en production (kW) qu’en proportion par rapport aux autres énergies.
Mobilité
De nombreux constructeurs automobiles s’intéressent à la technologie hydrogène,tels que Toyota [6] , Hyundai, Daimler, Honda, GM, BMW, etc. Le principe est simple, la voiture fonctionne grâce à une pile à hydrogène et est non-polluante puisque la réaction du dihydrogène et du dioxygène produit uniquement de l’eau.
Deux des limitations actuelles de cette technologie sont le prix d’une voiture à hydrogène qui demeure encore élevé (> 45000 euros), du au coût de la pile à combustible, mais qui pourrait chuter aux environs de 20000 euros d’ici 2020 [7]; ainsi que le manque d’infrastructures de recharge, nécessitant un investissement conséquent de la part des états et des entreprises, le nombre de stations-services délivrant de l’hydrogène étant encore très limité [8]. Toutefois, des pays comme le Japon et l’Allemagne viennent d’annoncer la construction de stations à hydrogène et investissent pour développer le réseau. En effet, au Japon un contrat a été signé avec Air Liquide pour équiper Tokyo, Nagoya, Osaka et Fukuoka d’une centaine de stations de rechargement d’ici à fin 2015. Fin 2015, Total, en partenariat avec Linde et McPhy, a ouvert une 5ème station à hydrogène en Allemagne. Ce seront 50 stations de 700 bars qui vont être déployées en 2016 par le pétrolier [9][10]; et près de 400 stations d’ici à 2023, via l’initiative H2 mobility, afin d’alimenter près de 500000 véhicules. Des prévisions indiquent que le marché des voitures à hydrogène pourrait augmenter de 200 millions de dollars en 2015 à 73,8 milliards en 2030. Le nombre de véhicules H2 pourrait atteindre 2% du parc mondial (soit 40 millions de véhicules) en 2030 et près de 10% au milieu du siècle [11].
Stockage de l’énergie
Parmi les énergies renouvelables, l’éolien et le solaire par exemple, sont des énergies intermittentes. Il est donc nécessaire de stocker l’énergie quand la production dépasse les besoins énergétiques. Les batteries sont connues depuis longtemps comme une méthode de stockage de l’énergie, tandis que le stockage en produisant du dihydrogène tend à se développer [13].
Le couplage panneau solaire ou éolienne-électrolyseur permet de produire de l’hydrogène quand la production d’électricité est supérieure à la consommation . Celui-ci est alors stocké, sous forme gazeuse sous pression, sous forme liquide, ou à l’état solide, sous forme d’hydrures de magnésium par exemple (technologie développée par la société McPhy Energy [14]), plus facilement utilisable. Puis, lorsque la demande en énergie est supérieure à l’offre, le dihydrogène est utilisé dans une pile à combustible pour restituer l’énergie stockée.
Cependant, une étude d’Air Liquide montre que l’hydrogène ne pourra être compétitif avec les autres solutions de stockage que si le CAPEX (de l’anglais : Capital Expenditure, représente le coût de développement non-consommable ou l’investissement) nécessaire pour les électrolyseurs baisse considérablement et que simultanément il y ait un accroissement des besoins de flexibilité du réseau électrique [16].
Méthodes de production
Si le dihydrogène est très abondant dans l’univers ; sur Terre, en revanche, il n’est présent que sous forme de traces dans l’air (0,005 ppmv, partie par millions en volume). Il est donc nécessaire de le produire. Actuellement près de 95% de la production totale de dihydrogène est encore issue d’énergies fossiles (gaz naturel≈ 49%, hydrocarbures liquides ≈ 29% et charbon≈ 18%). Les 5% restants sont produits par électrolyse de l’eau [3][17].
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Table des matières
Introduction générale
1. Contexte et Etat de l’art
1.1 Contexte
1.1.1 Dihydrogène : généralités
1.1.2 Applications actuelles
1.1.3 Applications futures majeures
a) Mobilité
b) Stockage de l’énergie
1.1.4 Méthodes de production
1.2 Photoélectrolyse de l’eau
1.2.1 Principe général
1.2.2 Structures de bandes des semiconducteurs
1.2.3 Porteurs de charges et dopage
a) Semiconducteurs intrinsèques
b) Semiconducteurs extrinsèques
c) Pièges profonds
1.2.4 Transitions optiques
a) Transition directe
b) Transition indirecte
1.2.5 Conductivité des semiconducteurs
1.2.6 Jonction semiconducteur-liquide
a) Interface photoélectrode/électrolyte
b) Mise en contact de deux milieux
c) Polarisation
d) Potentiel de bandes plates
e) Influence du pH
f) Jonction semiconducteur/électrolyte sous illumination
1.2.7 Stabilité des électrodes sous éclairement
1.2.8 Rendements d’une photoélectrolyse
a) Rendement quantique
b) Rendement faradique
c) Rendement STH
1.3 Matériaux pour la photocathode
1.3.1 Caractéristiques générales
1.3.2 Familles de matériaux connues
1.3.2.1 Les oxydes de cuivre
a) Propriétés structurales
b) Propriétés électriques
c) Méthodes de synthèse
d) Photocorrosion
e) Protection
1.3.2.2 Pérovskites
a) Généralités
b) Dopage
1.3.3 Autres types de matériaux inorganiques utilisés comme photocathode
a) Delafossites
b) Spinelles
c) Non-oxydes
1.3.4 Co-catalyseur
Conclusion
Références
2. Etude des oxydes de cuivre Cu2O et CuO
Introduction
2.1 Etude des oxydes de cuivre synthétisés par voie sol-gel
2.1.1 Synthèse
2.1.2 Influence des conditions de calcination
a) Température et durée de calcination
b) Atmosphère de calcination
2.1.3 CuO : matériau comme photocathode pour la photoélectrolyse de l’eau ?
2.1.4 Influence des conditions de préparation de la solution
a) Concentration du sol
b) Influence de la mésoporosité
2.1.5 Mise en évidence de la photocorrosion
2.2 Etude des oxydes de cuivre synthétisés par électro-dépôt/anodisation du cuivre
2.2.1 Synthèse
2.2.2 Traitement réducteur du FTO
2.2.3 Influence du potentiel d’électro-dépôt
2.2.4 Influence de la durée d’électro-dépôt et d’anodisation
2.2.5 Influence du pH
2.2.6 Photostabilité des électrodes
Conclusion
Références
3. Des pérovskites comme photocathodes
Introduction
3.1 Synthèse des pérovskites
3.2 Etude du titanate de calcium
3.2.1 CaTiO3 non dopé
3.2.2 Influence du dopage
a) Dopage au fer
b) Co-dopage au fer et à l’azote
3.3 Etude du titanate de baryum
3.3.1 BaTiO3 non dopé
3.3.2 Influence du dopage
a) Dopage au fer
b) Co-dopage au fer et à l’azote
3.4 Etude du titanate de strontium
3.4.1 Influence des paramètres de synthèse
3.4.2 Influence de la température de calcination
3.4.3 Influence du dopage
a) Dopage au fer
b) Dopage à l’azote
c) Co-dopage au fer et à l’azote
Conclusion générale
Références