Phénomènes de résistances à l’immunothérapie et microenvironnement tumoral

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Traitements du cancer du poumon

Comme dans la majorité des cancers, la prise en charge du patient diffère en fonction du stade d’avancement du cancer du poumon. Le tableau 3 résume les différents traitements en fonction du stade de la maladie. Lorsque cela est possible, le traitement par chirurgie reste le principal traitement du cancer du poumon. La chirurgie a pour objectif le retrait de la totalité de la tumeur une fois localisée. Le retrait du tissu tumoral implique l’ablation partielle du poumon (lobectomie) ou totale du poumon (pneumectomie) [58]. Au stade IV (métastatique), le traitement du cancer du poumon consiste en l’administration multimodale de chimiothérapie (exemple : dérivés de platine), chimiothérapie ciblée sous condition d’expression de biomarqueurs ou de mutations comme les mutations EGFR dans le cas des inhibiteurs aux tyrosines kinases ou l’expression de PD-L1 dans l’administration des traitements par l’immunothérapie.
Durant les 20 dernières années, le traitement du CPNPC a évolué de l’utilisation des thérapies à base de cytotoxique vers l’utilisation de thérapies ciblées. Les dérivés de platine (Cisplatine en combinaison avec d’autres cytotoxiques) représentaient le standard pour le traitement du CPNPC au stade avancé [59]. D’autres combinaisons thérapeutiques ont vu le jour avec l’utilisation du pemetrexed et l’ajout du bevacizumab (anticorps monoclonal) dirigé contre le VEGF mais sans impact significatif sur la survie du patient [60]. L’avènement des thérapies ciblées a changé le paradigme du traitement du CPNPC. L’incorporation du génotypage de la tumeur lors du traitement permet d’apporter une médecine individualisée où des taux de réponses plus importants et une amélioration globale de la survie des patients qui en bénéficient ont été observés [61].
Le traitement basé sur l’expression de biomarqueurs a vu le jour en 1990 avec l’utilisation du gefitinib, inhibiteur aux tyrosines kinases (ITK) dirigée contre EGFR avec une amélioration de la symptomatologie et une réponse radiologique partielle [62]. En comparaison avec la combinaison carboplatine & paclitaxel, le gefitinib a augmenté la survie sans progression de la maladie (PFS à 9,5 mois en comparaison de 6,3 mois) [63].
L’aspect biomoléculaire du cancer du poumon est très hétérogène et différentes mutations peuvent orienter le clinicien vers le choix d’une thérapie ou une autre. Cette hétérogénéité dépend également du type et sous-type histologique du tissu tumoral.

Principes généraux de la réponse immunitaire

Avant de s’intéresser aux traitements par immunothérapie, nous devons comprendre comment s’organise la réponse immunitaire dans le contexte tumoral. La réponse immunitaire se base sur trois principes fondamentaux : (1) la détection des cellules du non-soi, (2) la production des effecteurs et de fonctions luttant spécifiquement contre les cellules infectées ou malignes et (3) le développement d’une réponse durable dans le temps [64]. La réponse immunitaire se sépare en deux : la non-spécifique et la spécifique.
Réponse innée :
La réponse non-spécifique ou innée est une réponse rapide du système immunitaire sans reconnaissance spécifique du pathogène ou de l’allergène. Cependant cette réponse n’est pas durable. La réponse innée se base sur deux types de cellules : les NK et les phagocytes (neurophiles, monocytes et macrophage) [65].
Réponse acquise :
La réponse immunitaire acquise ou adaptative implique le développement de mémoire contre les différents antigènes. Cette forme d’immunité est lente et repose sur l’acquisition de nouvelles compétences des cellules T et B naïves [64]. La première étape de l’activation de la réponse immunitaire acquise consiste en la rencontre des cellules lymphocytaires T à l’aide du T-Cell Receptor (TCR) avec les cellules présentatrices d’antigènes ou de peptide par le biais de complexe majeur d’histocompatibilité. Cette première interaction s’accompagne de signaux co-stimulant permettant une activation optimale des cellules immunitaires.
Processus d’activation :
L’une des molécules co-stimulatrices est le CD28. Le plus connu est CD28 et est présent sur les cellules lymphocytaires naïves. Il se lie au CD80/CD86. L’absence de cette liaison résulte en une apoptose chez les cellules lymphocytaires, une incapacité de production des interleukines-2 ainsi que la perte des signaux de prolifération. Le CD28 permet d’améliorer la capacité de production des cytokines chez les cellules immunitaires ainsi que le signal anti-apoptotique BCL2 augmentant la durée de la réponse immunitaire [66]–[69]. Cette capacité d’activation des cellules lymphocytaires a été observée lors d’une étude clinique du TGN1412, anticorps monoclonal anti-CD28 agoniste, ayant entrainer une libération massive de cytokines chez 6 volontaires sains après seulement 90 min d’injection intraveineuse [70]. D’autres molécules participent également à l’activation du signal comme les CD40, CD137, CD27 ainsi que le CD134.
Processus d’inhibition :
Afin de réguler le signal d’activation, d’autres molécules co-inhibitrices du signal sont exprimées comme CTLA-4 (Cytotoxic T-lymphocyte associated protein 4), PD-1/PD-L1 (Program death ligand 1), TIM3 (T-cell immunoglobulin and mucin containing protein-3), Lag-3 (lymphocyte activation gene-3) ou encore TIGIT (T cell immunoreceptor with Ig and ITIM domains). Ces molécules apparaissent progressivement lors de la réponse immunitaire entrainant une régulation négative à la fin de la réponse immunitaire. Cette régulation est indispensable d’un point de vue physiologique en évitant l’apparition d’un emballement auto-immun.
CTLA-4 :
La molécule CTLA-4, appartient à la superfamille des immunoglobulines (Ig) et participe à l’inhibition des lymphocytes. Son rôle dans l’organisme est essentiel au maintien de l’homéostasie de la réponse immunitaire. Chez des souris déficitaires du gène CTLA-4, les lymphocytes ont proliféré de façon anarchique et ont provoqué une défaillance majeure des organes menant à une mortalité précoce (3 à 4 semaines) [71].
PD-1/PD-L1 :
D’autres molécules inhibitrices exprimées sont les PD-1/PD-L1. PD-1 est une molécule exprimée sur les LT, NK et LB activées [72]. PD-1 se lie sur deux cibles PD-L1 et PD-L2. PD-L1 est quant à lui exprimé sur différentes sous population de macrophages et est régulée positivement au niveau des cellules tumorales en réponse aux INF-γ et d’autres médiateurs de l’inflammation [73], [74]. La voie d’activation PD-1/PD-L1 contrôle l’induction et la maintenance de la tolérance immunitaire au sein du microenvironnement tumoral. L’interaction entre PD-1 et ses deux ligands provoque des baisses au niveau de l’activation, prolifération, sécrétion des cytokines et la survie des LT [75]. PD-L1 quant à lui est exprimé sur des cellules immunitaires activées comme les LT et LB et sur les cellules tumorales afin d’échapper à la réponse antitumorale (Figure 9) [76]–[78]. La voie PD-1/PD-L1 est modulée par différentes voies de signalisation des cellules cancéreuses, on retrouve la voie PI3K (Phosphatidine-3-kinase) /AKT (Protein Kinase B), MAPK (mitogen-activated protein kinase) ou encore NF-kB (Nuclear Factor) [75]. A l’inverse de CTLA-4 dont l’expression débute dès les premiers instants de la réponse immunitaire, l’expression de PD-1 sur les cellules du système immunitaire (LT, LB et NK) débute après l’activation de ses dernières afin d’exercer son rôle d’inhibition du signal [79].

Traitement du cancer à base d’immunothérapie

Parmi ces thérapies innovantes, l’anti-CTLA-4 (ipililumab) a été le premier anticorps monoclonal (immunoglobuline G1) à être approuvé par la FDA (Food and Drug Administration) pour bloquer l’action inhibitrice du CTLA-4 dans le mélanome [85].
Devant l’efficacité thérapeutique de l’ipilulimab pour le traitement du mélanome, différents essaies cliniques ont vu le jour afin de traiter le cancer du poumon sur l’action cytotoxique induite par l’anti-CTLA-4. Cependant, l’immunothérapie à base d’ipulilumab n’a pas présenté d’aussi bons résultats que ceux pour le traitement du mélanome. D’autres combinaisons incluant l’anti-CTLA-4 avec la chimiothérapie (dérivé de platine, taxol) ont été testées mais ont échouées à produire des résultats aussi intéressant que dans le mélanome. Il semblerait donc que cette voie de signalisation n’est pas prédominante dans le CPNPC.
De nombreux cancers, dont le CPNPC, surexpriment le PD-L1 suggérant un mécanisme commun des cancers pour l’échappement à la réponse du système immunitaire [86], [87]. En effet, PD-1 intervient lors de la tumorogenèse en désactivant les lymphocytes T reconnaissant l’antigène spécifique de la tumeur [73]. Son interaction avec PD-L1 inclut entre autres l’inhibition de la prolifération, de la survie, du signal effecteur (relargage de cytokine & de cytotoxique) ainsi que le recrutement et l’aide à différentiation des CD4+ en Treg augmentant ainsi l’inhibition de la réponse immunitaire des LTC [88]. PD-L1 est également exprimé sur une grande population de LT infiltrés à l’origine de la réponse antitumoral où ils sont « épuisés » ou dans un état pseudo-inactif. Le blocage de cette interaction PD-1/PD-L1 permet de restaurer la fonction et l’activité du système immunitaire des LT-CD8 à l’aide d’anticorps comme l’anti-PD1 (pembrolizumab ou nivolumab) ou l’anticorps anti-PDL1 (atezoluzumab) utilisés en clinique [89]–[91].
Le pembrolizumab est utilisé en 1ère et 2ème ligne de traitement, chez les patients avec un cancer présentant un stade avancé avec un niveau d’expression de PD-L1 supérieur à 50% [92]. En 2ème ligne de traitement, le nivolumab (anti-PD1) et l’atezoluzumab (anti-PDL1) sont administrés chez les patients indépendamment du statut PD-L1.
Le pembrolizumab est une IgG4 hautement spécifique dirigée contre PD-1 (Tableau 5). En se liant à PD-1, il permet de bloquer l’interaction en ses deux ligands PD-L1 & PD-L2 [93]. Au cours de l’étude Keynote 001, le taux de réponse était de 19,4% avec une durée médiane de réponse de 12,5 mois [94]. On remarquera que dans cette étude, le taux de réponse était plus important (45,2%) entre les patients exprimant la protéine PD-L1 au-delà de 50% que ceux compris entre 1 à 49%. Cette différence au niveau de l’expression de PD-L1 s’est également vue sur la médiane de survie avec 11,3 mois chez les patients précédemment traités présentant un taux d’expression allant de 1 à 49% en comparaison à une médiane de survie de 15,4 mois chez les patients précédemment traités ayant un taux d’expression supérieur à 50% [95].
L’administration des anticorps anti-PD1 ou anti-PD-L1 est soumise à un seuil d’expression de PD-L1 avant administration chez le patient. Le taux d’expression de ce biomarqueur est réalisé à l’aide de tests d’immunohistochimies (IHC) afin d’obtenir une valeur prédictive de la réponse au traitement. Cependant, ces tests manquent de spécificité et de sensibilité. Ils dépendent du type d’anticorps, des valeurs seuils admises (nombre de PD-L1 sur la surface des cellules tumorale) mais également de l’évolution de l’expression de PD-L1 et du site de la biopsie.
À noter que l’expression de PD-L1 n’est pas le seul facteur permettant de déterminer la réponse ou non de l’immunothérapie. En effet, il existe des différences de réponses au sein même des sous-types histologiques et de leurs interactions avec le MET. Pour l’adénocarcinome, le facteur clé de la réponse immunitaire réside dans l’interaction des cellules LT-B régulatrice alors que pour les carcinomes épidermoïdes, ce sont les macrophages qui sont au centre de la réponse immunitaire [96].

Les anticorps monoclonaux (ACM)

Le traitement par immunothérapie repose pour une partie sur l’administration d’anticorps qui interagissent avec des cellules clé du système immunitaire. Ces anticorps sont des immunoglobulines qui se lient de façon spécifique à leur cible avec des valeurs d’affinité de l’ordre du nanomolaire (10-9 M) dans le cas du pembrolizumab et du picomolaire (10-12 M) dans le cas de l’atezolozumab. Cette spécificité des anticorps monoclonaux pour leur cible présente l’avantage de cibler préférentiellement les cellules tumorales qui surexpriment le PDL-1 des et des cellules saines.
La structure des anticorps se divise en deux parties : La partie (I) reconnaissant spécifiquement l’antigène et la partie (II) effectrice du signal permettant de recruter les cellules responsables de la réponse immunitaire. Les parties (I) et (II) se composent respectivement de deux chaines de polypeptides légères et lourdes. La partie (I) est nommée Fab (fraction antigen binding) responsable de la reconnaissance de spécifique de l’antigène. Celle-ci est hautement variable et permet d’acquérir cette spécificité de reconnaissance contre l’antigène. La partie (II) est appelé Fc (Constant fragment), non variable. Elle permet la médiation de la réponse physiologique des anticorps suite à la fixation de la partie Fc sur les cellules effectrices comme les NK ou LT-CD8 [97]. Le site de fixation sur les cellules endogènes est nommé Fc récepteur gamma (FcγR). Par conséquent, en fonction du types cellulaires, des effets différents peuvent être observés comme l’initiation de cytotoxicité liaison-dépendante à l’égard de la cible. Parmi les effecteurs, on retrouve en majorité des Ig de types G1 et G3 [98]. Les IgG1 sont particulièrement efficace dans la promotion de cytotoxicité liaison-dépendante envers la cellule cible, et de ce fait, ce sont les types d’Ig les plus utilisées et recherchées dans le traitement du cancer. On retrouve le trastuzumab, le cetuximab, le pembrolizumab ou encore l’atezolizumab.
Le premier ACM utilisé en thérapie chez l’homme provenait de la souris, cependant, il présentait très peu d’efficacité à induire une réponse cytotoxique chez l’homme et sa clairance était rapide. Ainsi, de nouvelles combinaisons d’ACM ont vu le jour en intégrant des composants d’immunoglobuline humaine. Il en existe 4 types et sont regroupés dans la Figure 11 avec des degrés d’immunogénicités et des propriétés pharmacocinétiques / pharmacodynamiques différentes.
Les anticorps chimériques comprennent 65% à 90% de protéines humaines et possèdent une Fc humaine permettant ainsi l’action cytotoxique des ACM. Quant aux humanisés, ils présentent 95% de protéines humaines [99].

Principes pharmacologiques des ACM

La haute affinité des anticorps pour un antigène spécifique les rend particulièrement intéressants  pour cibler une molécule responsable de la pathologie et limiter ainsi les interactions avec d’autres cellules non tumorales [100]. Le Tableau 6 résume les différents modes d’actions.
La neutralisation : Cette action permet de bloquer la liaison entre un ligand et son récepteur en vue d’arrêter la cascade de signalisation. Dans le traitement du cancer, ce type d’interaction permet la perte de l’activité de la cellule tumorale, la baisse de la prolifération ainsi que l’activation de processus pro-apoptotiques [101].
L’ADCC (antibody-dependent cellular cytotoxicity) : Cette action pharmacologique permet, une fois l’ACM lié à son ligand, d’engager une liaison avec cellules effectrices comme les macrophages, les NK ou les LT-CD8 afin de lyser la cellule cible [102].
Le CDC (complement-dependent cytotoxicity) : Une fois liée à sa cible, l’ACM forme une cascade de protéines permettant d’attaquer la membrane et de lyser la cellule [102] .
Le DDC (Drug-delivery carrier) : Une fois conjugué à des molécules cytotoxiques ou des radioisotopes, les ACM permettent de délivrer les substances toxiques aux cellules cibles. L’avantage de cette technique réside dans la haute spécificité des ACM qui permet de délivrer une forte concentration des molécules d’intérêt au niveau de la région tumorale tout en diminuant les effets sur les cellules saines [102].

Phénomènes de résistances à l’immunothérapie et microenvironnement tumoral

La grande efficacité de l’immunothérapie dans le traitement du CPNPC a été démontrée, particulièrement dans les cas où les tumeurs expriment un taux de PD-L1 important (>50%). Cependant, la majorité des patients développent des formes de résistances primaires et seulement 15 à 20% d’entre eux parviennent à développer une réponse complète ou partielle. La résistance acquise survient également chez les patients initialement répondeurs atteints de CPNPC avancé traités par CI [103]–[108]. Ces mécanismes de résistances ne sont pas pleinement compris mais différentes voies de recherches s’y intéressent.
Sharma et al [109] ont résumé les différentes formes de résistances sous trois classifications : Résistance primaire, résistance adaptative immunitaire et résistance acquise (Figure 12). Par exemple, l’expression de PD-L1 peut être constitutive ou induite afin d’éviter l’attaque immunitaire et son expression est modulée par la synthèse de l’INF-γ. L’expression donc de PD-L1 est donc considérée comme une forme de résistance adaptative [109]. INF-γ étant sécrété lors de la réponse immunitaire anticancéreuse en permettant : (1) d’améliorer la reconnaissance entre l’antigène aux cellules immunitaires, (2) le recrutement des cellules immunitaires et (3) des effets antiprolifératifs et pro-apoptotique [110]. En revanche, une exposition prolongée aux INF-γ peut conduire à une augmentation de l’expression de PD-L1 et à un échappement, participant ainsi aux différentes formes de résistances [111].
La résistance primaire : On retrouve cette forme de résistance chez les patients qui présentent une résistance aux CI et ne répondent donc pas aux traitements par immunothérapie d’emblée. L’une des raisons concernerait la non-expression d’antigènes d’intérêt par la tumeur [112]. Une autre alternative pourrait être que les cellules cancéreuses présentent l’antigène mais développent un mécanisme inhibant la présentation de ces mêmes antigènes aux complexes majeur d’histocompatibilité (CMH) [113], [114].
La résistance acquise : Un quart à un tiers des patients traités par immunothérapie anti-CTLA4 ou anti-PD1 rechutent dans le cas du mélanome [115]. Les différents mécanismes potentiels de cette forme de résistance seraient liés à la perte des fonctions effectrices des cellules T, un signal inhibiteur important ainsi que le développement de mutation permettant cet échappement thérapeutique.
D’autres formes de résistances existent et peuvent être classifiées comme étant intrinsèques ou extrinsèques aux cellules cancéreuses. Ces résistances intrinsèques se produisent au sein même des cellules et englobent des caractéristiques comme l’expression de gène, la signalisation cellulaire, la reconnaissance immunitaire et les réponses aux dommages d’ADN. Les résistances extrinsèques sont imputables au microenvironnement tumoral à la suite de la bio-activation des cellules T [116], [117].
Parmi les phénomènes intrinsèques, l’expression des néo-antigènes est la clé permettant de stimuler la réponse immunitaire. Ces néo-antigènes sont soumis à des mutations où celles-ci sont associées à la réponse du traitement anti-PD1 [118], [119]. En effet, dans le CPNPC, les tumeurs avec un faible taux de mutation ou de néo-antigènes étaient corrélées à une faible médiane de survie dans la progression de la maladie [119]–[122]. En plus de la faible expression des néo-antigènes, il existe une forte hétérogénéité au niveau du CPNPC participant aux différents phénomènes de résistances [120].
Figure 12 : Identification de PD-1/PD-L1. La liaison du TCR et CMH active la réponse adaptative. La liaison entre le PD-1 et le PD-L1 peut empêcher la transduction du signal des cellules T et ainsi inhiber la réponse immunitaire. L’anti-PD1 et PD-L1 permettent de lever cette inhibition. (TCR : Récepteur des cellules T) [123].
Les lymphocytes T infiltrés (LTI) participent aux phénomènes extrinsèques responsables de la résistance immunitaire. Les LTI sont des cellules immunitaires différenciées et comprennent des CD8 actifs spécifiques de la tumeur (marqueur de bon pronostic dans le CPNPC), des CD4 actifs (Tregs, Th1, Th2 et Th17) sécrétant des cytokines et INF-γ responsables de l’activation et de la suppression des CD8 infiltrés [124]–[126]. La constitution de ce système cellulaire autour de la tumeur permet de définir 3 profiles de tumeur : chaude, altérée ou froide en fonction du nombre LTI et de cytokines pro-inflammatoire [127].
Dans le CPNPC, l’utilisation de l’immunothérapie provoque l’expression d’autres systèmes de checkpoints inhibiteurs comme l’expression de LAG-3 ou de TIM-3. LAG-3 ou Lymphocyte activation gene-3 présente un intérêt majeur étant donné que son expression est généralement associée à celle de PD-1 sur les cellules immunitaires du microenvironnement. D’après les études menées par Huard et al [128], le blocage de l’interaction entre LAG-3 et le CMH II augmente la prolifération des cellules lymphocytaires ainsi que la production de cytokines. Malgré des résultats modestes en préclinique, Okazaki et al [129], démontrent une efficacité de la combinaison des traitements par immunothérapie en combinant l’anti-PD1 et l’anti-LAG-3.

Pharmacocinétique des anticorps monoclonaux

Comme vu précédemment, les anticorps monoclonaux sont des protéines hautement spécifiques de leur cible et présentent des actions pharmacologiques distinctes. Par rapport aux petites molécules, les ACM présentent des caractéristiques pharmacocinétiques (PK) différentes et sont influencés par d’autres facteurs comme l’expression de la cible, son renouvellement, la charge totale, l’immunogénicité, et bien d’autres encore.
Les différents anticorps thérapeutiques utilisés en cliniques sont des IgG et présentent la même structure tri-dimensionnelle que les autres classes d’anticorps (Figure 17). Ce sont des macromolécules de 150 kDa (≈ 150 000 g/mol) possédant deux chaines lourdes identiques et deux chaines légères variables [171]. Les chaines légères ou variables comprennent le fragment responsable de la fixation des anticorps à la cible. La fraction cristallisable des deux chaines lourdes peut se lier sur deux types de récepteurs Fcγ (FcγR) sur les cellules effectrices et le récepteur néonatal (FcRn) au niveau des vésicules intracellulaires des cellules endothéliales [172]. Ce dernier est présent sur différentes cellules et participe activement à la PK des ACM.
Le récepteur FcRn :
Le FcRn participe à la protection et la distribution des ACM. En se fixant sur le FcRn, les ACM sont internalisés au sein de la cellule. En fonction du pH (acide), les ACM forment un complexe avec le FcRn permettant de les recycler en dehors de la cellule. Une fois l’endosome recyclé, le complexe ACM-FcRn se dissocie au contact du pH physiologique. Des phénomènes de compétitions peuvent avoir lieu au niveau du FcRn provoquant la dégradation des ACM dans l’espace lysosomale [173]. La liaison au FcRn présente un enjeu important dans le développement des ACM permettant notamment d’augmenter leur temps de demi-vie (20 jours à 60 jours) [174]. Ces interactions ACM-FcRn peuvent être exploitées pour limiter leur durée de vie dans un contexte diagnostic et dosimétrique (voir dans la section 4.3. Dosimétrie) [175].
Administration des ACMs :
La voie d’administration principale est la voie intraveineuse (I.V) sous forme de perfusion suivi par la voie sous-cutanée et la voie intramusculaire. En sous-cutanée, la biodisponibilité peut varier entre 20 et 90% et l’absorption dépend principalement du système lymphatique [177].
Distribution des ACMs :
La distribution physiologique des ACM est limitée au niveau de l’espace vasculaire et à l’espace interstitiel dû à leur taille et à l’hydrophilie. La distribution de l’espace vasculaire vers l’espace interstitiel se déroule principalement par mouvement de convection (flux sanguin vers l’espace interstitiel). Les facteurs pouvant influencer le processus de distribution comprennent la diffusion passive (très faible), la pinocytose, l’endocytose récepteur-dépendante, l’élimination du tissu, la charge et l’hydrophobicité [178] ainsi que la fixation à la cible ou le « turnover » du récepteur.
Métabolisme et catabolisme des ACMs :
Il existe différentes voies d’élimination des ACM : la dégradation protéolytique, l’élimination Fcγ-récepteur-dépendante, la clairance cible-dépendante, l’endocytose non-spécifique, la formation de complexes immuns et la clairance FcRn-dépendante [177]. On peut différencier deux types de clairance : spécifique et non-spécifique. La principale forme d’élimination des ACM est la dégradation protéolytique (non-spécifique) en peptides puis en acides aminées qui seront réutilisés dans la néosynthèse protéique ainsi que les phénomènes de pinocytoses [178], [179]. En général, la clairance non-spécifique est lente et non saturable résultant en une PK linéaire (dose-proportionnelle).
La clairance spécifique dépend de l’interaction entre les ACM et leur cible. Une fois fixée, les ACM sont internalisés et dégradés au niveau cellulaire. La clairance spécifique participe à la PK non-linéaire qu’on peut observer sur des profils cinétiques sanguins car elle dépend de l’expression de la cible, du « turnover » (capacité de renouvellement de la cible), de sa modulation à la hausse ou à la baisse. Dans le cas de cibles membranaire, le cetuximab et le panitumumab présentent des PK non-linéaire à faible dose puis linéaire à dose élevée, une fois la cible saturée [180].
Un autre phénomène peut impacter la pharmacocinétique des ACM : la sécrétion d’ADA ou anti-drug antibodies. En dépit du succès des ACM, l’administration répétée de ces derniers provoquent la sécrétion d’ADA [181]. La formation des ADA impacte la PK et la réponse pharmacodynamique (PD) en réduisant leur efficacité [182]. Les ADA se divisent en deux catégories [183]:
– ADA neutralisant (ntADA) qui bloquent et interfèrent directement avec la capacité de l’anticorps à se lier à sa cible.
– ADA non neutralisant (bADA) qui reconnaissent d’autres épitopes sur l’anticorps, cependant l’anticorps conserve sa capacité de reconnaissance.
En clinique, les ntADA attirent particulièrement l’attention car ils diminuent l’efficacité des ACM. L’impact sur la PK a été décrit par Eli D. Ehrepreis [184] concernant l’Infliximab. Les auteurs remarquent une clairance des patients plus importante, des niveaux plasmatiques plus bas et une baisse de l’efficacité thérapeutique. Typiquement, la clairance chez les patients avec une sécrétion d’ADA est de 12,89 mL/h en moyenne comparée à 9,9 mL/h en moyenne chez les patients sans ADA (Figure 18).

Modélisation par approche de population

La modélisation pharmacocinétique par approche de population a été introduite par Sheiner et al en 1972 [188]. Elle repose sur l’analyse compartimentale avec des spécificités concernant l’estimation des paramètres pharmacocinétiques. L’approche de population considère l’ensemble des données PK des individus d’une même population simultanément contrairement à l’approche classique en deux étapes qui consiste à estimer les paramètres PK individuellement puis d’en déduire la moyenne et l’écart-type sur l’ensemble des individus étudiés. L’analyse en deux étapes ne permet pas de prendre en compte l’erreur réalisée sur l’estimation des paramètres PK individuels et la variabilité interindividuelle est souvent surestimée.
Les paramètres PK lors de l’analyse par approche de population sont décrits par des distributions statistiques et chaque individu correspond à une réalisation de ces distributions. Ce type de modèle mathématique est appelé : modèle non linéaire à effets mixtes. L’approche de population présente différents avantages puisque toutes les données sont analysées simultanément, elle permet d’inclure des individus ayant peu d’observations, par exemple dans les cas où il est impossible d’avoir accès à un nombre de prélèvements sanguins important pour des raisons de faisabilité ou d’éthique. Cette approche permet également de quantifier la variabilité interindividuelle des paramètres PK et de tester quelles covariables (physiologiques ou/et pathologiques) permettent d’expliquer cette variabilité. La sélection des covariables repose sur les connaissances des propriétés de la molécule, de la famille de molécule ou de la physiologie. Par exemple, en fonction de l’expression de biomarqueurs ou de la synthèse d’ADA, la PK des ACM peut en être impactée, se traduisant ainsi en une variabilité de l’estimation des paramètres PK. Cependant, si ce type d’approche permet d’effectuer des analyses même en l’absence d’un grand nombre de prélèvements par individu, elle nécessite néanmoins d’avoir un nombre minimal d’individus (20 à 30 individus) pour obtenir une estimation correcte des paramètres [189].
L’écart entre les concentrations observées et celles prédites par le modèle à partir des paramètres PK individuels correspond à la variabilité résiduelle. L’origine de ces écarts est variée : elle peut être due aux erreurs sur le temps de prélèvements sanguins, aux erreurs de dosages ou à une inadéquation du choix du modèle de structure. Sur Monolix, cette variabilité est décrite par le modèle d’erreur (a et b) et elle peut être de 3 types (Figure 20) :
– Modèle d’erreur constant ou additif (a).
– Modèle d’erreur proportionnel (b).
– Modèle d’erreur combiné ou mixte (a & b).

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Table des matières

Remerciements
Table des matières
Liste des abréviations
Figures
Tableaux
Introduction générale
A. Revue de la bibliographie
1. Le cancer du poumon non à petites cellules
1.1. Histologie
1.2. Étiologie
1.3. Biologie du cancer CPNPC
1.4. Épidémiologie
2. Diagnostic
3. Traitements du cancer du poumon
3.1. Principes généraux de la réponse immunitaire
3.2. Traitement du cancer à base d’immunothérapie
3.2.1. Les anticorps monoclonaux (ACM)
3.2.2. Principes pharmacologiques des ACM
3.3. Phénomènes de résistances à l’immunothérapie et microenvironnement tumoral
4. Immuno-TEP & Compagnon diagnostic
4.1. Immuno-TEP
4.2. Principaux radioisotope de l’immuno-TEP
4.3. Dosimétrie
5. Pharmacocinétique des anticorps monoclonaux
5.1. Pharmacocinétique par approche non compartimentale et compartimentale
5.2. Modélisation par approche de population
5.3. Estimations des paramètres pharmacocinétiques
5.3.1. Estimation des paramètres pharmacocinétiques de population
5.3.2. Estimation des paramètres pharmacocinétiques individuels
5.4. Évaluation du modèle
5.5. Modélisation pharmacocinétique appliquée aux anticorps monoclonaux
B. Travaux personnels
1. Objectif de la thèse
2. Matériels et méthodes
2.1. Modèle murin syngénique de CPNPC
2.2. Mise en place d’une méthode de radiomarquage d’un anti-PDL1 murin et imagerie TEPCT
3. Preclinical pharmacokinetics and dosimetry of an 89Zr labelled anti-PDL1 in an orthotopic lung cancer murine model
4. Pharmacokinetic modelling of a radiolabelled anti-PDL1 with zirconium 89 in a syngenic lung cancer mice model: Can we estimate the best imaging time?
C. Discussion générale
D. Conclusion et perspectives
Références bibliographiques

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