Les chiens et les chats sont les hôtes d’ectoparasites, parmi lesquels les puces (Ctenocephalides felis) et les tiques (Rhipicephalus sanguineus, Ixodes ricinus). Ces parasites sont abondants en France métropolitaine, et puisqu’ils peuvent provoquer un prurit qui peut aller jusqu’à des lésions cutanées, en plus de transmettre des maladies vectorielles, la lutte prophylactique contre ces arthropodes s’est développée au cours des trois dernières décennies, aussi bien par la diversité des médicaments disponibles que par l’engagement des propriétaires en ce sens.
Ces dernières années de nombreuses innovations thérapeutiques sont apparues sur le marché, pour répondre aux besoins des propriétaires : des produits faciles d’utilisation, à longue durée. Ces produits sont des géants du médicament vétérinaire, et sont cités dans près de 25% des déclarations d’effets indésirables, dont certains sont graves voire parfois mortels. C’est pourquoi ce travail rétrospectif fut lancé par le département de Pharmacovigilance de l’Agence Nationale du Médicament Vétérinaire qui dépend de l’Anses.
La pharmacovigilance a pour objectif la surveillance des effets des médicaments vétérinaires et l’information sur le risque d’événement indésirable, en particulier grâce aux déclarations de pharmacovigilance qui signalent l’observation d’un effet indésirable susceptible d’être imputé à l’utilisation d’un médicament. Ce travail rétrospectif se limite ainsi aux déclarations d’effets indésirables graves lors d’utilisation d’antiparasitaires externes chez les carnivores, puisque les effets non-graves, qui sont les plus nombreux, sont assez bien connus et documentés dans les RCP. Les effets graves sont plus pertinents en termes de communication, aussi bien pour les praticiens que les propriétaires, et peuvent encourager une discussion entre prescripteur et utilisateur.
La lutte contre les arthropodes a débuté dans le domaine de l’agriculture : le défi était de protéger les plantes sur des énormes surfaces agricoles des parasites qui les détruisent. Lorsqu’on a retrouvé des arthropodes sur les animaux domestiques, et mesuré leur impact sur la santé animale, on a naturellement utilisé l’arsenal pharmacologique existant en l’adaptant à l’espèce cible. Depuis le marché évolue, éradique les anciennes molécules écotoxiques, favorise les formulations simples d’utilisation, et les laboratoires demeurent très actifs en recherche et développement de nouveaux médicaments antiparasitaires car le marché est large et prospère. En 2002, les parasiticides représentaient 28,9% du marché mondial du médicament vétérinaire (Ahmed et Kasraian, 2002).
La prévention des infestations par les puces et tiques des animaux de compagnie est à mettre en lien avec les maladies provoquées par ces arthropodes. Pour les puces, en plus de l’observation de ces insectes ou de leurs déjections dans le pelage de l’animal, elles peuvent provoquer des anémies en cas d’infestation massive sur un animal jeune ou en mauvaise santé, elles sont le vecteur du Dipylidium caninum, et le prurit que manifestent les animaux infectés est déplaisant pour le propriétaire, inconfortable pour l’animal et peut parfois même évoluer jusqu’à des lésions graves en cas de Dermatite par Allergie aux Piqûres de Puces (DAPP). C’est un motif de consultation très courant et la prévalence des infestations de puces chez le chien est en augmentation depuis 2006 dans les observations de l’école vétérinaire de Nantes (Bailhache, 2015).
Les tiques quant à elles, transmettent diverses maladies vectorielles, en particulier la Piroplasmose, une parasitose grave et mortelle chez le chien si non traitée qui a jusqu’à 16% de prévalence dans certains départements (Chao, 2012), mais également Ehrlichiose, Hémobartonellose, …
En médecine vétérinaire, pour avoir une bonne observance et donc un traitement efficace, il faut un produit facile d’utilisation pour le propriétaire. De plus il faut bien évidemment assurer la sécurité du produit pour le patient et le manipulateur (soit le propriétaire, soit les vétérinaires et assistants qui sont alors exposés chroniquement). Les produits administrés par voie cutanée posent différents problèmes (Snyder et al., 2007): des contacts humains trop précoces avec les animaux après traitement peuvent mener à des expositions voire intoxications accidentelles des manipulateurs parmi lesquels les enfants du foyer (Jennings et al., 2002), des cas d’intoxication à la perméthrine par contact secondaire d’un chat avec un chien traité sont également rapportés à l’Anses-ANMV et documentés (Gleadhill, 2004). De plus il existe des effets indésirables qui bien que non-graves sont esthétiquement peu plaisants (décoloration cutanée, alopécie, prurit ou érythème au point d’application…) et peuvent décourager les propriétaires. Les laboratoires ont ainsi rapidement multiplié les voies d’administration des médicaments (par voie orale, injectable) pour diversifier l’offre aux propriétaires.
Ainsi pour favoriser l’observance du traitement, il faut des formulations pratiques pour le propriétaire (bonne conservation au domicile du propriétaire, traitement ponctuel avec la durée d’action la plus longue possible, voie d’administration facile avec le moins d’exposition du propriétaire au principe actif…), commercialement intéressantes (action rapide, prix avantageux), mais également adaptées au patient pour la sécurité d’utilisation. En effet les événements indésirables sont souvent dose dépendants et jamais complètement exclus. Or les chiens pèsent de 2 à 80 kilogrammes et souvent ces produits nécessitent différentes présentations pour satisfaire tous les représentants de l’espèce tout en assurant une bonne innocuité, ce qui engendre des coûts supplémentaires pour le laboratoire (Ahmed et Kasraian, 2002 ; Woods et al., 2011).
Les insecticides ou pesticides étant assez ubiquitaires par leur utilisation aussi bien en médecine humaine qu’animale mais également en agriculture, et présentant une évolution rapide avec des exigences récentes vis-à-vis des effets environnementaux, de nombreuses ressources en ligne mises à jour par des scientifiques du domaine sont disponibles. À noter le travail d’Alan Wood, membre du comité ISO qui attribue les noms courants aux pesticides, qui tient un très pratique Compendium des Noms Communs des Pesticides (Wood, n.d.) ; également le Docteur en sciences naturelles Pablo Junquera, ancien employé de laboratoires en recherche et développement d’insecticides pour la santé animale, aujourd’hui consultant indépendant, qui maintient à jour un site sur les antiparasitaires pour animaux (Junquera, n.d.).
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Table des matières
INTRODUCTION
A. Pharmacologie des antiparasitaires
1. Historique
a) Développement des antiparasitaires externes vétérinaires
b) Diversité du marché
c) Codes ATCVet
2. Spécialités disponibles en France
3. Ectoparasiticides et insecticides topiques (QP53A)
a) Pyréthrines et pyréthroïdes (QP53AC)
b) Formamidines (QP53AD)
c) Carbamates (QP53AE)
d) Composés organophosphorés (QP53AF)
e) Autres (QP53AX)
4. Ectoparasiticides systémiques (QP53B)
a) Inhibiteurs de la synthèse de chitine (QP53BC)
b) Isoxazolines (QP53BE)
c) Autres (QP53BX)
5. Endectocides : Lactones macrocycliques (QP54A)
a) Avermectines (QP53AA)
b) Milbémycines (QP53AB)
6. Récapitulatif
7. Résistances
B. Données de pharmacovigilance
1. Les autorisations de mise sur le marché des médicaments vétérinaires en France
a) Procédures pré-AMM
b) L’autorisation de mise sur le marché
c) Surveillance et actions post-AMM
2. La pharmacovigilance vétérinaire
a) Définition
b) Objectifs
3. Evénements indésirables
a) Terminologie
b) Effets indésirables graves
4. Le système de pharmacovigilance vétérinaire en France
a) Acteurs
(1) Les déclarants
(2) L’Agence Nationale du Médicament Vétérinaire
(3) Le Centre de Pharmacovigilance Vétérinaire de Lyon
(4) Le comité de suivi du médicament vétérinaire
(5) Les titulaires d’AMM
b) Système d’imputation
c) La détection de signal
(1) Les signaux en Pharmacovigilance
(2) Données et Bases de Données
(3) Outils disponibles
5. Contexte de l’étude
CONCLUSION
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