Mรฉtaparadigmes infirmiers
Cโest sous lโimpulsion de thรฉoriciennes amรฉricaines, notamment Jacqueline Fawcett en 2005, que la discipline infirmiรจre a รฉtรฉ amenรฉe ร dรฉfinir des modรจles conceptuels qui ont pour but de dรฉcrire la profession et de donner une orientation ร la recherche en servant de base ร lโรฉlaboration des thรฉories. Ces mรฉtaparadigmes sont au nombre de quatre : les soins infirmiers, la personne, la santรฉ et lโenvironnement (Pรฉpin, Kรฉrouac & Ducharme, 2010, p.49). Selon Potter et Perry (2010), qui reprennent les dรฉfinitions des mรฉtaparadigmes selon Fawcett, les soins infirmiers comprennent toutes les interventions que lโinfirmiรจre effectue en prรฉsence de la personne soignรฉe, le degrรฉ de collaboration entre les deux รฉtant fluctuant. Ces interventions ont un but et visent souvent un rรฉsultat qui sโinscrit dans une dรฉmarche de soins globale. La personne correspond au bรฉnรฉficiaire de soins et ne sโarrรชte pas nรฉcessairement ร un individu, car il peut aussi sโagir dโune famille, dโun groupe, voire dโune communautรฉ. La santรฉ est dรฉfinie comme le bien-รชtre gรฉnรฉral le plus optimal quโune personne soit en mesure dโatteindre.
Enfin, lโenvironnement se rapporte ร tout ce qui fait partie du milieu dans lequel baigne la personne ; il peut donc sโagir aussi bien de son milieu physique que social, par rapport aux autres individus qui gravitent autour dโelle. Reprenons ร prรฉsent les dรฉfinitions de chacun des mรฉtaparadigmes selon Fawcett, afin de dรฉmontrer comment nous les considรฉrons dans notre travail. Les soins infirmiers : dans un contexte de fin de vie, ils visent ร apporter ร la personne soignรฉe le plus grand confort possible. Cela implique par exemple lโรฉvaluation et la gestion de la douleur, autant physique que psychique. Les soins ont pour but de prรฉserver la dignitรฉ et le libre arbitre de la personne mourante, quand bien mรชme ses facultรฉs intellectuelles ne seraient plus intactes, et de faire respecter sa volontรฉ. La personne : elle correspond ร un adulte atteint dโune pathologie incurable et en situation de phase terminale, hospitalisรฉe dans un รฉtablissement de soins aigus gรฉnรฉraux. Des projets ou des besoins peuvent nรฉanmoins รชtre toujours prรฉsents chez la personne, quant au temps qui lui reste ร vivre et comment elle compte lโorganiser.
La santรฉ : en situation de soins palliatifs, la promotion et le maintien de la santรฉ sont abandonnรฉs au profit de la notion de confort et de dignitรฉ. Une personne en fin de vie nรฉcessite toujours des soins, et ce, mรชme si tout objectif curatif a รฉtรฉ abandonnรฉ. Contrairement aux domaines de soins ร visรฉe curative, oรน le confort peut รชtre mis un peu en retrait au profit de la guรฉrison, la notion de qualitรฉ de vie est absolument primordiale en contexte de fin de vie et l’intรฉgralitรฉ des acteurs de la prise en charge travaillent dans la continuitรฉ de cet objectif- lร . Lโenvironnement : les soins palliatifs peuvent รชtre prodiguรฉs dans nโimporte quel รฉtablissement de soins et pas seulement dans les structures spรฉcialisรฉes. La gรฉriatrie, la pรฉdiatrie, la chirurgie, la mรฉdecine, la traumatologie, les homes, les appartements protรฉgรฉs, le milieu carcรฉral etc., tous ces services sont concernรฉs. Cependant, dans notre travail, nous nous pencherons plus particuliรจrement sur le contexte des soins aigus gรฉnรฉraux. Actuellement, 80% des personnes meurent dans des services hospitaliers non spรฉcialisรฉs (OFSP, 2012) et donc, les infirmiers avec une formation de base en soins gรฉnรฉraux sont ceux qui seront les plus amenรฉs ร prendre en charge ces situations palliatives. Nous concentrons nos recherches sur des situations palliatives en soins aigus gรฉnรฉraux, car nous souhaitons aborder la problรฉmatique de maniรจre la plus globale et la moins spรฉcifique possible, afin de la rendre inhรฉrente ร nโimporte quelle situation.
Savoirs infirmiers
Un savoir peut รชtre dรฉfini comme รฉtant un ensemble de connaissances acquises grรขce ร lโรฉtude et ร lโexpรฉrience qui interfรจrent dans notre maniรจre de percevoir et de comprendre le monde (Pรฉpin & al. 2010). Dans un texte rรฉdigรฉ en 1978, Carper a exposรฉ quatre savoirs, relatifs aux soins infirmiers. Le savoir empirique : selon Pรฉpin et al. (2010), le savoir empirique est issu directement de la recherche scientifique, de lโobservation, de lโexploration, de la description et de lโexplication des phรฉnomรจnes. Il sโagit de lโutilisation et du dรฉveloppement des รฉcrits basรฉs sur la pratique infirmiรจre et dont le contenu a des fondements scientifiques dรฉcoulant dโautres sciences (biologie, physiologie, sociologie, psychologie, etc.). Chez une personne en fin de vie, le savoir empirique propose des pistes quant ร la substitution dโune hydratation naturelle par une hydratation artificielle. Nous disposons ainsi dโun large รฉventail de techniques validรฉes par lโexpรฉrience de la communautรฉ scientifique ou encore des moyens utilisรฉs par le personnel soignant pour pallier le sentiment de soif lors de lโarrรชt de lโhydratation.
Le savoir รฉthique : il sโappuie sur des valeurs et des rรจgles morales. Il intervient dans de nombreuses situations de soins qui ne peuvent รชtre clarifiรฉes ni par la loi ni par des rรฉglementations institutionnelles ou un code de dรฉontologie. Ainsi, le dรฉveloppement du savoir รฉthique part de lโhรฉritage de la comprรฉhension morale de lโinfirmier qui rรฉflรฉchit ร sa pratique en se questionnant sur ce quโil est ยซ juste ยป ou pas de faire (Chinn & Kramer, 2008 ; dans Pรฉpin & al. 2010). Le savoir รฉthique prend une place importante dans notre TB, car cโest le fondement de notre questionnement par rapport ร lโarrรชt de lโhydratation. Il nโexiste pas de lois qui dรฉfinissent clairement oรน commence et oรน sโarrรชte la frontiรจre entre soin et acharnement. En revanche, la loi dรฉfinit clairement les frontiรจres de certaines pratiques comme lโeuthanasie, le suicide assistรฉ, lโacharnement thรฉrapeutique, etc. Toutefois, la marge de manoeuvre ร lโintรฉrieur de ce cadre lรฉgal demeure relativement large. Ainsi, lorsque ni la loi, ni la dรฉontologie, ni les rรจgles institutionnelles ne peuvent apporter une rรฉponse, on se retrouve en prรฉsence dโun dilemme รฉthique oรน il conviendra de prendre une dรฉcision allant dans le sens de ยซ ce quโil y a de plus juste ร faire pour cette personne et dans cette situation bien prรฉcise ยป. Gรฉnรฉralement, on choisit une valeur prioritaire qui prime sur les autres et qui dรฉfinit une ligne de conduite ร adopter. Le savoir esthรฉtique : il correspond ร lโart des soins infirmiers. Contrairement ร la science qui laisse peu de place ร la crรฉativitรฉ et ร lโinventivitรฉ, il est liรฉ aux gestes quotidiens de lโinfirmier, ร la dextรฉritรฉ, ร la fluiditรฉ des gestes techniques ou encore ร la justesse des dialogues quโil entretient avec les patients. Selon Wainwright (2000 ; dans Pรฉpin & al., 2010), le savoir esthรฉtique est une voie prometteuse pour amรฉliorer la qualitรฉ des soins et est constamment renforcรฉ ou modifiรฉ par les expรฉriences personnelles du soignant.
Le savoir esthรฉtique fait ici appel ร des connaissances qui ne sont pas nรฉcessairement basรฉes sur un fondement scientifique. Or, dans le milieu des soins palliatifs, lโinventivitรฉ est parfois de mise face ร lโabsence de donnรฉes probantes ou lors de situations qui nรฉcessitent lโintervention dโautres compรฉtences que le savoir technique, comme la communication avec la personne mourante.
Revue exploratoire de littรฉrature
Aujourdโhui la majoritรฉ des personnes meurent dans des institutions et nรฉcessitent des soins de fin de vie que lโon nomme soins palliatifs. Selon lโOFSP et la CDS (2012), il y a eu 60’000 dรฉcรจs en Suisse au cours de l’annรฉe 2012. 80% ont eu lieu en institution et deux tiers des personnes concernรฉes ont nรฉcessitรฉ des soins palliatifs, soit 8’000 (20%) en รฉtablissement spรฉcialisรฉ et 32’000 (80%) dans des services prodiguant des soins gรฉnรฉraux. On peut donc constater que les situations de fin de vie sont des cas de figure frรฉquemment rencontrรฉs par les infirmiers et que, mรชme si la majoritรฉ de ces accompagnements requiรจrent des soins palliatifs, la plupart d’entre eux s’effectuent aujourd’hui dans des รฉtablissements oรน le personnel soignant n’est pas forcรฉment au bรฉnรฉfice d’une formation spรฉcifique. En matiรจre de qualification professionnelle des soignants, il existe des diffรฉrences selon le type dโinstitution : les hรดpitaux disent plus frรฉquemment disposer de soignants ayant une formation spรฉcialisรฉe en soins palliatifs (45 %) que les EMS et les services ambulatoires (30%). Toutefois, les collaborateurs de services ambulatoires suivent plus frรฉquemment des formations rรฉguliรจres en soins palliatifs (prรจs de 40 %) que ceux des hรดpitaux et des EMS (28%). (Office fรฉdรฉral de la statistique, p.9, 2012) ยซ Les soins palliatifs incluent la gestion des symptรดmes pendant les soins de la maladie aiguรซ, de la maladie chronique et les soins de fin de vie (stade terminal). ยป (OMS, p.1, 2004).
On peut donc voir ici, que la fin de vie concerne le stade ultime de la maladie, contrairement aux soins palliatifs, qui peuvent รชtre prodiguรฉs alors que la personne n’est pas considรฉrรฉe comme mourante. La fin de vie et les soins palliatifs sont donc deux choses diffรฉrentes. Cependant, comme mentionnรฉ ci-dessus, les soins palliatifs devraient aussi รชtre pratiquรฉs en fin de vie. Dans quel cas alors une personne est-elle considรฉrรฉe en fin de vie? Les mรฉdecins dรฉcident du pronostic de fin de vie lorsque les thรฉrapies intensives ne sont plus utiles ร la personne. On les remplace par des soins quโon dit ยซ de confort ยป afin que le patient puisse vivre dignement les derniers instants de son existence. Cette รฉtape est donc considรฉrรฉe comme partie intรฉgrante et finale de la vie dโun รชtre humain (Thiel & Aubry, 2011). En dโautres termes, la fin de vie est une notion abordรฉe lorsquโune personne est proche de la mort et quโil nโy a plus lโespoir de retour en arriรจre. Ceci peut รชtre dรป ร la vieillesse mais aussi ร des pathologies prรฉexistantes ou nouvelles. Ce pronostic ne peut รชtre รฉtabli que par des mรฉdecins qui ont mรปrement rรฉflรฉchi ร la situation.
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Table des matiรจres
CHAPITRE 1 : INTRODUCTION
CHAPITRE 2 : PROBLรMATIQUE
2.1. Question de dรฉpart
2.2. Pertinence pour les soins infirmiers
2.2.1. Mรฉtaparadigmes infirmiers
2.2.2. Savoirs infirmiers
2.3. Revue exploratoire de littรฉrature
2.4. Concepts retenus
2.5. Perspective pour la pratique
CHAPITRE 3 : CONCEPTS ET CHAMPS DISCIPLINAIRES INFIRMIERS
3.1. Dรฉfinition des concepts retenus
3.1.1. La fin de vie
3.1.2. La qualitรฉ de vie
3.1.3. Lโhydratation
3.1.4. Lโรฉthique et le dilemme รฉthique
3.2. Cadre thรฉorique
CHAPITRE 4 : MรTHODE
4.1. Question de recherche
4.2. Bases de donnรฉes
4.3. Critรจres de sรฉlection
4.4. Combinaison des descripteurs
4.5. Articles retenus
CHAPITRE 5 : DISCUSSION
5.1. Synthรจse des rรฉsultats des articles
5.1.1. Le point de vue de la triade patient-famille-mรฉdecin
5.1.2. Les avantages et les inconvรฉnients de lโhydratation artificielle
5.1.3. Le rรดle et les attitudes infirmiรจres
5.2. Dรฉveloppement des rรฉsultats en lien avec la question PICOT
5.3. Propositions pour la pratique
CHAPITRE 6 : CONCLUSION
6.1. Apports du travail de Bachelor
6.2. Limites
6.3. Perspectives pour la recherche 104
CHAPITRE 7 : RรFรRENCES107
CHAPITRE 8 : ANNEXES 115
ANNEXE I : Analyse dโarticle116
ANNEXE II : Analyse dโarticle 126
ANNEXE III : Analyse dโarticle134
ANNEXE IV : Analyse dโarticle143
ANNEXE V : Analyse dโarticle 151
ANNEXE VI : Analyse dโarticle160
ANNEXE VII : Analyse dโarticle 171
ANNEXE VIII : Analyse dโarticle182
ANNEXE IX : Analyse dโarticle190
ANNEXE X : Analyse dโarticle 197
ANNEXE XI : Analyse dโarticles 205
ANNEXE XII : Analyse dโarticle 215
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