Notion d’architecture thermique
Définition
Une architecture thermique est un ensemble de composants de conversion, stockage et transport d’énergie dont le but premier est d’assurer la satisfaction de demandes thermiques. La notion d’architecture thermique couvre les demandes thermiques des bâtiments (résidentiels, tertiaires), des procédés industriels et des exploitations agricoles. Les architectures thermiques impliquent des vecteurs énergétiques carbonés ou non carbonés, dont les principaux sont le vecteur électrique, le gaz naturel, le fioul, le charbon, la biomasse et les ordures ménagères.
Notion de centralisation
Lorsqu’un réseau de distribution achemine de l’énergie thermique d’un nombre réduit de centrales de production et/ou stockage vers des consommateurs distants cette fourniture est dite centralisée en énergie. Une fourniture centralisée en capacité consiste en une réserve de capacité centralisée capable de couvrir des appels de puissance extrêmes mais peu fréquents. Plutôt qu’un critère de longueur du réseau de distribution pour décider du caractère centralisé d’une fourniture d’énergie, les deux approches suivantes peuvent donner une indication du degré de centralisation:
– Les durées typiques de distribution de la chaleur dans le réseau sont du même ordre de grandeur que celles des variations des demandes concernées.
– La part de l’énergie dédiée en centrale à la compensation des pertes de charge d’une part et thermiques d’autre part est significative devant la demande des consommateurs.
Critères de performance
Un système technologique passe par des phases de conception, fabrication, utilisation et mise au rebut (Bartolozzi, Rizzi, Frey, 2017). Les composants d’une architecture thermique subissent en plus une phase d’installation sur site. Chacune de ces phases est associée à des flux financier, matière et/ou énergie. La facilité et l’efficacité associées à l’échange de ces flux sont évaluées selon des critères propres à chaque étape du cycle de vie de l’architecture.
Economiques
Les critères économiques quantifient les coûts de l’architecture thermique supportés par une ou plusieurs parties prenantes. Parmi ces critères, la valeur actuelle nette (NPV) rend compte de la rentabilité des projets sur un horizon de plusieurs mois ou années. Le coût actualisé de l’énergie (LCOE) ramène la NPV au service utile assuré par le système, i.e. la satisfaction des demandes thermiques. Enfin, le taux de rentabilité interne (IRR) est le taux de dévaluation du capital qui permet d’annuler la NPV à la fin de l’horizon considéré (Leurent, 2018). Sur des projets réels, le taux de dévaluation est notamment contraint par les capacités d’emprunt du financeur. C’est donc d’avantage un paramètre qu’un résultat du modèle, ce qui exclut l’usage de l’IRR comme mesure de la performance économique. Par ailleurs, le LCOE a l’avantage de permettre une comparaison rapide de différentes architectures fournissant le même service. C’est donc ce critère qui est retenu.
Environnementaux
La majorité des travaux de la littérature prennent en compte au plus la phase d’utilisation de l’architecture pour qualifier son impact environnemental. Fröling et al. vont plus loin en réalisant l’analyse de cycle de vie (ACV) d’une infrastructure de distribution d’un RDC (Fröling, Holmgren, Svanström, 2004; Fröling, Svanström, 2005; Persson, Fröling, Svanström, 2006). Leur travail couvre les phases de fabrication, installation sur site, utilisation et mise au rebut d’une infrastructure de troisième génération (3GDH) en Suède, selon des données de la fin des années 1990. L’unité fonctionnelle est une conduite aller-retour de longueur 100m utilisée pendant 30 ans. Ils concluent que la phase d’utilisation de l’infrastructure représente 50% de l’impact environnemental pour beaucoup des critères étudiés. On retiendra que ce chiffre varie entre 60 et 95% environ en ce qui concerne les émissions de GES.
Cette ACV exhaustive est riche en enseignement mais peu généralisable. Par ailleurs, alors que des objectifs clairs de réduction des émissions de GES sont énoncés, il n’en va pas de même pour les autres catégories d’impact. On retrouve par exemple une quantification des quantités de particules fines émises ou de dépletion des matières premières, impacts pour lesquels aucun consensus national ou international de préservation n’a été acté. En pratique, et pour la suite du travail, le critère retenu est la contribution au dérèglement climatique en phase d’opération. Elle est quantifiée par la quantité de GES émis en scope 1 – émissions directes – et scope 2 – émissions indirectes énergétiques. Le premier scope regroupe notamment la combustion d’énergies fossiles tandis que le deuxième couvre la production d’électricité importée sur le territoire pour usage par l’architecture.
Energétiques
Les critères énergétiques qualifient les flux énergétiques en phase d’opération entre les composants de l’architecture et l’extérieur.
Rendement exergétique
Outre les rendements énergétiques usuels (quantité), une attention croissante est portée à l’exergie et à l’origine des sources primaires (qualité). En particulier, le rendement exergétique et la quantité d’énergie primaire associés à l’opération d’une architecture thermique qualifient respectivement la capacité du système à utiliser une énergie adaptée à chaque usage et sa dépendance aux ressources brutes disponibles. Kouhia et al. (Kouhia et al., 2019) insistent sur l’idée selon laquelle le rendement exergétique seul ne traduit pas la réalité physique d’approvisionnement des vecteurs. Ils utilisent pour l’optimisation linéaire d’un RDC le facteur PeXA (Primary Exergy Factor). Ce facteur tient compte à la fois de l’énergie primaire associée à un vecteur et de l’exergie qu’il porte. Cette méthode révèle que les bonnes performances exergétiques apparentes des PAC (permises par des hauts COP) sont partiellement compensées par le fait que le facteur d’énergie primaire de l’électricité est élevé (lorsque cette électricité provient du réseau national). Cela résulte pour ces PAC en des performances exergétiques du même ordre de grandeur que celles des équipements de production de chaleur à base d’énergie fossile, telles les chaudières gaz.
La difficulté d’utilisation du facteur PeXA réside dans détermination des facteurs d’énergie primaire (FEP) des vecteurs énergétiques conventionnels. Au niveau de l’Europe, quatre méthodes d’établissement du FEP de l’électricité donnent des valeurs distantes de jusqu’à 43% (Esser, Sensfuss, Amann, 2016). Par ailleurs, ce facteur dépend fortement du mix électrique, et en particulier de la proportion d’énergies renouvelables de ce mix, dont l’évolution exacte dans les années à venir est inconnue.
Pour raisons, le facteur PeXA n’est pas retenu. Le contenu exergétique des vecteurs échangés avec le système (vecteurs ?1′, ?2′, … ) est la valeur de référence utilisée pour le calcul d’efficacités exergétiques.
Satisfaction de la demande thermique
La part de demande thermique insatisfaite sur le total exprimé dans le système est également un critère de qualité. Il est étudié par Nadal et al. (Nadal et al., 2020), en complément du coût actualisé de l’énergie, dans un système autonome électrique comprenant des sources intermittentes. Cet indicateur est d’autant plus pertinent que la satisfaction des demandes dans leur totalité est un objectif secondaire du système dans l’étude Nadal et al., ce qui n’est pas le cas des architectures thermiques profitant encore de sources d’énergie flexibles telles que les fossiles. La satisfaction de la demande est ici considérée comme obligatoire.
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Table des matières
Introduction
Contexte général
Contexte spécifique au sujet
Contexte scientifique
Objectifs scientifiques
Contenu du manuscrit
I. Chapitre I: Périmètre d’étude pour l’évaluation des performances des architectures thermiques
I.1 Notion d’architecture thermique
I.2 Critères de performance
I.3 Aspect spatial
I.4 Aspect temporel
I.5 Gestion des incertitudes
I.6 Conclusion
II. Chapitre II: Méthodologie de comparaison des architectures thermiques
II.1 Etat de l’art
II.2 Modélisation pour l’étude des systèmes énergétiques
II.3 Application du modèle
II.4 Conclusion
III. Chapitre III: Réduction de la complexité
III.1 Réduction de la complexité spatiale
III.2 Réduction de la complexité temporelle
III.3 Conclusion
IV. Chapitre IV: Définition de profils temporels de demande thermique
IV.1 Caractérisation des demandes thermiques
IV.2 Projet Tabula-Episcope
IV.3 Adaptation du modèle Tabula : demandes en chauffage et climatisation
IV.4 Résultats du modèle adapté
IV.5 Demande en eau chaude sanitaire
V. Chapitre V: Application de la méthodologie à un cas d’étude européen
V.1 Introduction
V.2 Définition des cas d’étude
V.3 Implémentation
V.4 Résultats
V.5 Critiques
Conclusion générale
Définition d’un modèle pour la comparaison d’architectures
Adaptation d’un modèle de prédiction de demandes thermiques résidentielles
Application à un cas d’étude européen
Perspectives