Perception des messages de promotion de la vaccination contre la rougeole
La rougeole
La rougeole est une MEV particulierement contagieuse : en plus de se transmettre par le contact avec des secretions du nez ou de la gorge, elle peut egalement se transmettre par voie aerienne (Centers for Disease Control and Prevention, 2017; World Health Organization, 2009). En effet, le virus peut rester dans l’air jusqu’a deux heures apres qu’une personne infectee ait tousse ou eternue (Centers for Disease Control and Prevention, 2017). Ainsi, chez les personnes non immunes qui habitent avec un cas infecte, plus de 90 % developperont l’infection (Gastanaduy et Goodson, 2017). En considerant une population ou aucun individu ne serait immunise contre la rougeole, les chercheurs en sante publique considerent en general qu’un cas de rougeole pourrait infecter de 12 a 18 personnes (Guerra et al., 2017). Ceci represente une contagiosite plus elevee que de nombreuses maladies virales telles que la poliomyelite et la variole (Coughlin, Beck, Bankamp et Rota, 2017). La rougeole est une MEV pouvant occasionner des complications respiratoires et neurologiques potentiellement fatales : dans les pays developpes, il est estime qu’environ un deces survient pour 3000 cas de rougeole (Comite consultatif national de l’immunisation, 2006). De plus, une encephalite aigue peut affecter un cas sur 1000 et entrainer des dommages neurologiques permanents (A. A. P. Committee on Infectious Diseases, 2012). Bien que la rougeole ait ete declaree eliminee du Canada en 1998 et des Etats-Unis en 2000, elle fait quand meme l’objet de preoccupations, car des cas de rougeole acquis a l’etranger peuvent ensuite transmettre la maladie dans la population locale et potentiellement retablir l’endemicite2 de cette maladie (Katz et Hinman, 2004; Katz et al., 2004). Ainsi, des eclosions surviennent encore au Canada et aux Etats-Unis et peuvent affecter
un grand nombre de personnes
(De Serres et al., 2015; Phadke et al., 2016; Sherrard et al., 2016). Par exemple, au Quebec, une epidemie est survenue en 2011 et a resulte en 678 cas (De Serres et al., 2015). De plus, en decembre 2014, une epidemie de rougeole a debute a Disneyland en Californie et a traverse les frontieres : 125 cas ont ete rapportes aux Etats-Unis (Zipprich et al., 2015) et une epidemie de 159 cas est survenue dans la region de Lanaudiere au Quebec suite a l’importation de la maladie par un voyageur (Panić et Gheorghe, 2016). Or, pour une proportion importante des individus qui ont ete infectes lors des epidemies recentes de rougeole aux Etats-Unis, il y avait eu un refus vaccinal (Clemmons et al., 2015; Phadke et al., 2016) et pratiquement tous les cas de la region de Lanaudiere (156/159) etaient membres d’une communaute spirituelle qui refuse la vaccination (Panić et Gheorghe, 2016). Tel que rapporte dans la revue de litterature de Phadke et al. (2016), le refus du vaccin contre la rougeole est ainsi associe avec un risque plus eleve de rougeole chez les personnes non vaccinees. De plus, lorsque la prevalence des refus vaccinaux augmente en un lieu geographique donne, le risque de rougeole augmente aussi chez les personnes vaccinees (Phadke et al., 2016). En effet, des personnes vaccinees qui se trouvent dans une region ou il y a plus de gens non vaccines, et donc plus de probabilites que la rougeole soit en circulation (Omer et al., 2009), ont alors un risque plus eleve de contracter cette MEV, car l’efficacite du vaccin n’est pas de 100 % (Agence de la sante publique du Canada, s.d.).
Afin d’eliminer la rougeole d’un pays, l’Organisation mondiale de la Sante (OMS) a etabli qu’une couverture vaccinale nationale d’au moins 95 % doit etre atteinte pour les deux doses de vaccins requises, et ce, a l’echelle regionale (World Health Organization, 2017). Le calendrier vaccinal du Quebec prevoit l’administration d’une premiere dose du vaccin contre la rougeole a 12 mois et une seconde a 18 mois. En 2014, une enquete a permis d’evaluer que 88,6 % des enfants quebecois avaient recu ces deux doses une fois qu’ils avaient atteint l’age de 24 mois (Boulianne, Audet et Ouakki, 2015). Pour ce qui est des autres provinces et territoires du Canada, la premiere dose du vaccin est egalement offerte a 12 mois, mais la deuxieme l’est a differents moments selon les provinces et territoires (entre 18 mois et 6 ans) (Agence de la sante publique du Canada, 2017b). Dans une enquete realisee en 2015, dont la population cible incluait l’ensemble des enfants canadiens a l’exception de ceux vivant dans les reserves autochtones, il a ete estime que la couverture vaccinale contre la rougeole avec au moins 1 dose etait de 89,2 % (intervalle de confiance a 95 % (IC 95 %) : 85,0 – 92,3) chez les enfants de 2 ans (Statistique Canada, 2017). Les couvertures vaccinales des jeunes enfants quebecois et canadiens contre la rougeole sont donc en deca de la cible de 95 %.
Hésitation vaccinale
Depuis que le Groupe strategique consultatif d’experts sur la vaccination (SAGE) de l’OMS a ete forme en 1999, differentes regions du monde lui ont rapporte qu’elles observaient de la mefiance et une diminution de l’acceptation de la vaccination (Schuster et al., 2015). Les inquietudes par rapport a la securite et l’efficacite des vaccins seraient d’ailleurs une des raisons les plus frequentes pour lesquelles les parents retardent ou refusent la vaccination de leurs enfants (Smith, Humiston, Parnell, Vannice et Salmon, 2010). Bien qu’auparavant, les parents etaient souvent categorises comme etant simplement ≪ pour ≫ ou ≪ contre ≫ la vaccination, il apparait depuis plusieurs annees que la realite est plus complexe (Gust et al., 2005). Afin de caracteriser la position des parents au sujet de la vaccination, plusieurs classifications utilisant 4 ou 5 categories ont ete proposees (Benin, Wisler-Scher, Colson, Shapiro et Holmboe, 2006; Gust et al., 2005; Keane et al., 2005; Leask et al., 2012). Dans chacune de ces classifications, differents facteurs pouvaient avoir ete utilises pour distinguer ces categories, tels que les attitudes, croyances et perceptions au sujet des vaccins; la facon d’obtenir ou de rechercher des informations sur la vaccination; la confiance accordee aux professionnels de la sante et les comportements vaccinaux.
Par exemple, Leask et al. (2012) suggerent 5 categories : les ≪ unquestioning acceptors (accepteurs inconditionnels) ≫, qui font vacciner leurs enfants sans avoir de questionnement; les ≪ cautious acceptors (accepteurs prudents) ≫, qui tiennent compte du fait que les vaccins peuvent avoir des effets secondaires severes, mais rares, et qui vaccinent en esperant que tout ira pour le mieux; les ≪ hesitants (hesitants) ≫, qui font vacciner leurs enfants, mais qui ont des preoccupations importantes sur les risques de la vaccination; les ≪ late or selective vaccinators (vaccinateurs selectifs ou en retard) ≫, pour lesquels leurs preoccupations les amenent a retarder l’administration de certains vaccins ou a en refuser certains; et, finalement, les ≪ refusers (refuseurs) ≫ qui refusent tous les vaccins pour des raisons philosophiques, religieuses ou suite a des experiences negatives avec le systeme medical. Bien que chacune des classifications ait ses particularites, il en ressort que la position d’une personne au sujet de la vaccination peut se placer sur un continuum allant d’une demande active de tous les vaccins a un refus convaincu de tous les vaccins (Dube et al., 2013). Le concept d’hesitation vaccinale ferait reference au continuum se trouvant entre ces deux extremes (Dube et al., 2013). D’abord, MacDonald et le groupe de travail sur l’hesitation vaccinale du SAGE ont propose de definir l’hesitation vaccinale principalement comme un comportement plutot que comme une attitude. Selon ces auteurs (MacDonald et SAGE Working Group on Vaccine Hesitancy, 2015), ≪ l’hesitation vaccinale ≫ refere a un delai dans l’acceptation ou un refus de la vaccination malgre la disponibilite des services. Ils precisent que ≪ l’hesitation vaccinale ≫ est complexe, qu’elle se presente selon des contextes specifiques et qu’elle peut donc varier dans le temps, selon les lieux et selon le type de vaccin.3
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Table des matières
Résumé
Table des matières
Liste des tableaux
Liste des figures
Liste des abréviations et acronymes
Remerciements
Introduction
Chapitre 1- Problématique et revue de littérature
1.1 La rougeole
1.2 Hésitation vaccinale
1.3 Messages narratifs
1.3.1 Données probantes sur l’impact des messages narratifs en comparaison avec
l’impact des messages didactiques
1.3.2 Caractéristiques modulant l’effet des messages narratifs
1.4 Conclusion de la problématique
1.5 Objectifs de recherche
1.5.1 Objectif général
1.5.2 Objectifs spécifiques
Chapitre 2- Cadre théorique
Chapitre 3- Démarche méthodologique
3.1 Type d’étude et justification
3.2 Contexte de l’étude
3.3 Sélection des participants
3.3.1 Population à l’étude et échantillonnage
3.3.2 Critères d’inclusion et d’exclusion
3.3.4 Recrutement
3.4 Collecte des données
3.4.1 Groupes de discussion
3.4.2 Questionnaires
3.5 Analyse des données
3.5.1 Analyse des données qualitatives
3.5.2 Analyse des données quantitatives (questionnaire PACV)
3.5.3 Analyse mixte (données qualitatives et quantitatives) : classification de l’attitude générale des participants sur la vaccination
3.6 Critères de rigueur
3.7 Considérations éthiques
Chapitre 4- Résultats
4.1 Portrait sociodémographique des participants
4.2 Croyances, perceptions et attitudes des participants sur la vaccination
4.2.1 Attitude générale
4.2.2 Perceptions et croyances des participants selon les construits du modèle des croyances relatives à la santé
4.2.3 Confiance envers les différentes instances impliquées dans la vaccination des enfants
4.2.4 Norme subjective
4.3 Perception des messages de promotion de la vaccination contre la rougeole
4.3.1 Histoire A : message narratif et émotif dans lequel une mère témoigne
4.3.2 Histoire B : message narratif et émotif dans lequel un médecin témoigne
4.3.3 Histoire C : message exposant des faits dans lequel une mère témoigne
4.3.4 Histoire D : message exposant des faits dans lequel un médecin témoigne
4.3.5 Comparaison de l’influence des histoires sur les construits au coeur du modèle des croyances relatives à la santé
4.3.6 Autres comparaisons
Chapitre 5- Interprétation et discussion
5.1 Discussion sur les croyances, perceptions et attitudes sur la vaccination
5.1.1 Considérations sur la catégorisation de l’attitude sur les vaccins en général
5.1.2 Dualité entre l’empowerment et la confiance
5.1.3 Utilité des concepts au coeur du modèle des croyances relatives à la santé
5.1.4 Norme subjective
5.2 Discussion sur la perception des messages de promotion de la vaccination contre la rougeole
5.2.1 Efficacité des messages narratifs et émotifs
5.2.2 Efficacité des messages factuels
5.2.3 Comparaison des deux messages les plus efficaces : un message narratif dans lequel une mère témoigne vs un message factuel dans lequel un médecin témoigne84
5.3 Limites et forces
5.3.1 Limites
5.3.2 Forces
5.4 Implication des résultats pour la santé publique et pour la recherche
Conclusion
Bibliographie
Annexe I : Projet de recherche dirigé par Dre S. Michelle Driedger
Annexe II : Messages développés, première version
Annexe III : Informations contenues dans les messages correspondant aux construits au coeur du modèle des croyances relatives à la santé
Annexe IV : Recrutement pour les groupes de discussion
Annexe V : Guide d’animation des groupes de discussion
Annexe VI : Questionnaire sociodémographique
Annexe VII : Questionnaire sur les attitudes parentales au sujet des vaccins
destinés aux jeunes enfants (questionnaire PACV),
Annexe VIII : Formulaires de consentement
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