Jusqu’à ce jour, les maladies rénales restent un important problème de santé publique de par sa chronicité, de son identification souvent tardive et de son traitement coûteux. En France, elles touchent près de deux millions de Français :
– plus de trente-cinq mille personnes sont traitées par dialyse chronique
– trente mille personnes vivent avec une greffe rénale
– dans le monde en 2009, un adulte sur dix souffre d’une affection rénale, ce qui représente plus de deux cent cinquante millions de personnes .
A Madagascar, à notre connaissance, peu d’études sur la prévalence des pathologies rénales ont été réalisées. Cette situation nous a incités à effectuer cette étude rétrospective sur les principales pathologies néphrologiques observées dans le service de NEPHROLOGIE du Centre Hospitalier Universitaire Joseph RasetaBefelatanana sur une durée de trois ans, du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009. Notre objectif principal dans ce travail est de répertorier les principalespathologies néphrologiques rencontrées dans un service de NEPHROLOGIE, afin de mieux cerner et prendre en charge ces pathologies.
RAPPELS THEORIQUES
Le rein est un organe complexe, il est impliqué dans de nombreuses régulations, sa fonction principale est l’élaboration d’une urine dont la composition doit être telle que:
– les équilibres hydro-électrolytique et acido-basique soient respectés dans le sang
– les déchets et toxiques soient éliminés dans l’urine
– par ses fonctions endocrines, il participe aux régulations de la pression artérielle, de l’érythropoièse et du métabolisme osseux .
Classification
Comme il n’existe pas de classification universelle des maladies rénales, nous diviserons arbitrairement les pathologies rénales selon qu’elles soient d’ordre :
– tumoral : kystes, cancers rénaux,
– infectieux : infection urinaire,
– lithiasique : lithiase rénale,
– malformatif et fonctionnel en l’occurrence l’insuffisance rénale,
– et néphropathique : glomérulaire, vasculaire et tubulo-interstitielle.
Nous allons voir une à une ces différentes atteintes en rappelant brièvement la définition, l’épidémiologie, le diagnostic positif et étiologique.
Tumeurs rénales
Définition
C’est une tumeur bénigne du tissu rénal qui se présente comme une cavité remplie de liquide (3). Les maladies kystiques du rein représentent un ensemble hétérogène d’affections qui partagent en commun les caractéristiques de cavités bordées d’épithélium, remplies de liquides ou de débris semi-solides à l’intérieur des reins. Les kystes peuvent être simples ou multiples, congénitaux ou acquis. Ils peuvent survenir durant l’enfance ou chez des sujets âgés (4).
Epidémiologie
L’incidence des maladies kystiques varie d’une région à l’autre, d’un pays à l’autre. Les kystes rénaux simples sont les plus fréquents et les moins graves de toutes les affections kystiques du rein. Leur fréquence augmente avec l’âge, de 0,1 à 4 % chez l’enfant, jusqu’à plus de 30 % au-delà de 70 ans. Chez les sujets âgés, les kystes peuvent être multiples et toucher les deux reins (4). Les études ont montré que un ou plusieurs kystes simples sont présents dans plus de 50% des cas au-delà de 50 ans alors qu’ils sont inhabituels avant 30 ans et très rares chez l’enfant .
Diagnostic positif
Différents types
Il est nécessaire de savoir qu’il y existe plusieurs types de kystes rénaux (4) :
– les kystes simples,
– les maladies polykystiques du rein,
– les maladies kystiques acquises,
– et les maladies kystiques de la médullaire rénale.
Aspects anatomo-cliniques
Kystes rénaux simples
Le plus souvent les kystes simples sont asymptomatiques et sont découverts de façon fortuite sur des imageries abdominales. Occasionnellement, les patients peuvent développer : une hématurie ou des douleurs lombaires. En échographie rénale, un kyste simple est caractérisé par : des parois régulières, une bonne transmission échographique et aucun débris intrakystique. Si ces caractéristiques échographiques ne sont pas réunies, un scanner rénal doit être réalisé.
Cet examen permet dans pratiquement tous les cas de différencier des lésions bénignes ou malignes. Lorsque les kystes simples sont responsables de douleurs ou d’hypertension réninedépendante, ils peuvent être ponctionnés (sous contrôle échographique), drainés et sclérosés par l’instillation d’alcool à l’intérieur du kyste.
Maladies polykystiques du rein
Les maladies polykystiques du rein comprennent 4 affections ayant une diffusion systémique. Trois d’entre elles ont une transmission autosomique dominante :
➤ La polykystose autosomique dominante : qui est de loin la plus fréquente (1 sur 750 à 1000 naissances) et dont le gène anormal responsable est localisé sur le chromosome 6 (6). La polykystose rénale autosomique dominante est une maladie systémique. Il existe des manifestations secondaires à la présence des kystes ou d’une maladie du tissu élastique et du muscle lisse, avec atteintes rénales et extra-rénales. Les deux complications majeures sont le développement de l’insuffisance rénale chronique et les anévrysmes des artères cérébrales. Le diagnostic peut être posé devant une de ces manifestations cliniques, mais de plus en plus lors du dépistage familial.
➤ la maladie de Von Hippel Lindau : syndrome néoplasique multiple lié à une mutation dugêne VHL, transmis selon un mode autosomique dominant. Chez les individus avec une histoire familiale, la survenue d’un hémangioblastome cérébral ou rétinien, d’un phéochromocytome ou d’un cancer du rein sont suffisants pour affirmer le diagnostic (6).
➤ la polykystose autosomique récessive : les manifestations cliniques comportent un retard de croissance, des masses abdominales, une hypertension artérielle et une insuffisance rénale. Les reins sont augmentés de taille tôt dans la vie et peuvent ensuite diminuer de volume. Une coupe du rein montre des kystes fusiformes en orientation radiale. L’échographie est la méthode diagnostique de choix. L’examen des parents et dans certains cas, la biopsie hépatique des enfants atteints, sont nécessaires pour distinguer une polykystose autosomique récessive d’une présentation précoce de polykystose autosomique
➤ dominante. Une échographie rénale normale chez les parents, notamment s’ils sont âgés de
➤ plus de 30 ans, suggère fortement la polykystose (6).
➤ la sclérose tubéreuse de Bourneville : affectionmultisystémique de transmission autosomique dominante caractérisée par le développement d’harmatomes multiples dans de nombreux organes. L’atteinte rénale est absente dans l’enfance mais s’étend progressivement .
Maladies kystiques acquises
La maladie kystique acquise se rapporte au développement de kystes chez des patients ayant des reins préalablement non kystiques et ayant une insuffisance rénale terminale secondaire à une maladie autre qu’une maladie kystique du rein. La fréquence de survenue est variable, 7 à 22 % des patients ayant une insuffisance rénale chronique d’évolution lente et jusqu’à 90 % des patients traités par dialyse depuis 10 ans ou plus. Les hommes semblent avoir une fréquence plus importante de ces kystes acquis. La plupart des patients n’ont pas de symptômes liés aux kystes alors que d’autres développent des hémorragies rétropéritonéales ou intrarénales ou encore dans le système pyélocaliciel ce qui est responsable d’une hématurie macroscopique.
Maladies kystiques de la médullaire rénale
La maladie kystique de la médullaire est une affection peu fréquente qui a été appelée néphronophtise familiale juvénile. Une atteinte familiale est habituelle avec un mode de transmission autosomique récessive dans la néphronophtise juvénile familiale et autosomique dominante dans la maladie kystique de la médullaire. La néphronophtise se présente dans l’enfance ou l’adolescence et s’associe volontiers avec des atteintes extrarénales, notamment des anomalies rétiniennes (rétinite pigmentaire). La maladie kystique de la médullaire survient plus fréquemment chez des adultes jeunes. Sur le plan histologique, les reins sont de petite taille et présentent généralement quelques kystes à la jonction cortico-médullaire et dans la médullaire. Certains glomérules sont hyalinisés et les tubules d’apparence variable souvent atrophiques et tortueux. La néphropathie interstitielle chronique avec une fibrose extensible de l’interstitium est prédominante et les kystes sont en fait inconstants et de survenue tardive au stade d’insuffisance rénale terminale.
Infections urinaires
Définition
L’infection urinaire se définit par la présence de bactéries dans les urines à une concentration supérieure ou égale à 10000 germes/ml, associée à la présence de globules blancs (leucocytes) altérés à une concentration égale à 5 000 /ml et éventuellement des globules rouges (hématies) .
Epidémiologie
Pour des raisons anatomiques, l’infection urinaire est plus fréquente chez la femme. En effet, chez la femme, le méat urinaire est proche de l’anus où des bactéries sont toujours présentes. L’homme est relativement protégé des infections urinaires par la distance qui sépare l’anus et son méat urinaire-orifice (la longueur de l’urètre masculin est en moyenne de 16 cm, alors que celle de l’urètre féminin est de2 cm) (8).Les récidives infectieuses sont fréquentes chez la femme. Vingt pour cent des femmes ayant une infection urinaire vont avoir un nouvel épisode. Entre 20 et 50 ans, les infections sont 50 fois plus fréquentes chez la femme, mais après 50 ans l’incidence chez l’homme augmente nettement du fait de l’augmentation des maladies prostatiques, et le ratio est donc seulement de 3/1 chez les sujets âgés. Chez l’enfant, l’infection urinaire est rare et doit faire d’abord évoquer une malformation de la voie urinaire .
Diagnostic positif
Infection urinaire basse
Elle peut être asymptomatique mais peut survenir de façon brutale :
– une envie fréquente d’uriner, de jour comme de nuit, limitée parfois à quelques gouttes (pollakiurie),
– une douleur sus-pubienne,
– des brûlures mictionnelles,
– sang dans les urines (hématurie),
– de l’urine trouble et nauséabonde.
Le diagnostic se résume par un syndrome de cystite associée à une leucocyturie et nitriturie à la bandelette urinaire. La présence des signes de gravité suivants: sujet âgé, homme, infection récidivante (3 épisodes par an), sujet taré, impose l’ECBUet la recherche de trouble à l’écoulement des voies urinaires.
Infection urinaire haute
Elle se manifeste par :
– des douleurs à la miction ou lombaires,
– des brûlures mictionnelles,
– une hématurie,
– une pollakiurie,
– des fièvres et frissons,
– éventuellement un écoulement urétral chez l’homme .
Le diagnostic repose sur l’examen cytobactériologique des urines (E.C.B.U) qui permet de mettre en évidence le germe responsable de l’infection urinaire. Le prélèvement de l’urine doit se faire dans des conditions particulières (uriner dans un récipient stérile après une toilette soigneuse, uriner de façon à « nettoyer » l’urètre puis de récupérer ensuite les urines du 2° jet). Cet E.C.B.U. est suivi par l’antibiogramme.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS THEORIQUES
I. CLASSIFICATION
II.TUMEURS RENALES
II.1. Définition
II.2. Epidémiologie
II.3. Diagnostic positif
III. INFEC TIONS URINAIRES
III.1. Définition
III.2. Epidémiologie
III.3. Diagnostic positif
III.4. Diagnostic étiologique
IV. NEPHROPATHIES
IV.1. Néphropathies glomérulaires
IV.2. Néphropathies vasculaires
IV.3. Néphropathies tubulo-interstitielles
V. LITHIASES RENALES
V.1. Définition
V.2. Epidémiologie
V.3. Diagnostic
V.4. Etiologies
VI. INSUFFISANCES RENALES
VI.1. Insuffisance rénale aigue
VI.2. Insuffisance rénale chronique
VI.3. Etiologies des insuffisances rénales
DEUXIEME PARTIE : METHODOLOGIE
NOTRE ETUDE
I. RAPPEL SUR LE CADRE D’ETUDE
II. METHODE
II.1. Recrutement des sujets
II.2. Les paramètres étudiés
RESULTATS
I. SITUATION GENERALE
I.1. Selon l’effectif
I.2. Répartition globale selon l’âge
I.3. Répartition selon le sexe
I.4. Répartition selon la région d’habitation
I.5. Répartition selon la durée d’hospitalisation
I.6. Répartition selon le mode de sortie
II. CARACTERISTIQUES DE LA POPULATION SELON LES PATHOLOGIES RENALES
II.1. Kystes rénaux
II.2. Infections urinaires
II.3. Lithiases rénales
II.4. Insuffisance rénale
II.5.Néphropathies
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
I. SUR LA METHODOLOGIE
II. SUR NOS RESULTATS
II.1. Sur les tumeurs rénales
II.2. Sur l’infection urinaire
II.3. Sur les lithiases rénales
II.4. Sur l’insuffisance rénale
II.5. Sur les néphropathies
SUGGESTIONS
CONCLUSION
ANNEXE
BIBLIOGRAPHIE