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EPIDEMIOLOGIE DU CANCER DU SEIN
Situation dans le monde
En termes de fréquence, le cancer du sein est le deuxième cancer dans le monde après celui du poumon. Selon l’OMS, une augmentation de l’incidence de plus de 20% et une hausse de la mortalité de 14% ont été observées ces dernières années. Ainsi avec ¼ cas de cancer chez les femmes, il constitue l’une des principales causes de décès par cancer dans les pays les moins développés. En 2012, 6,3 millions de femmes ont été diagnostiquées, avec un cancer du sein confirmé au cours des cinq années précédentes et annuellement 1,7 million de femmes sont atteintes.
Son incidence est cependant variable d’un pays à l’autre allant de 80% ou plus en Amérique du Nord, en Suède et au Japon, à près de 40 à 60% dans les pays sous-développés (18).
Situation au Sénégal
Selon les estimations de la LISCA, plus de 1000 cas de cancer du sein sont annuellement diagnostiquées au Sénégal, avec environ 600 décès par an parmi ces cas répertoriés (60%). Cette mortalité serait surtout liée à un dépistage tardif, à une évolution rapide de la maladie ainsi qu’à un défaut de prise en charge.
En 2008, selon une étude réalisée à l’Institut Juliot Curie de Dakar, le cancer du sein est au 2e rang des cancers gynécologiques et mammaires. Il s’agirait d’une situation similaire dans tous les pays d’Afrique subsaharienne. L’âge moyen de survenue est 47,6 ans et ainsi les patientes concernées sont relativement plus jeunes comparés à celles des pays européens (20). Au Sénégal, le cancer du sein survient à partir de 20 ans, augmente de fréquence aux alentours de 30 ans pour atteindre un pic dans la tranche d’âge de 40 à 44 ans. Ainsi, plus de la moitié des cas (57,3 %) surviennent avant 50 ans. Une puberté précoce, une ménopause tardive, une première grossesse après 30 ans et une multiparité constituent des particularités retrouvées chez la plupart des patientes sénégalaises (20).
PATHOGENESE ET CLASSIFICATION DU CANCER DU SEIN
Pour une meilleure compréhension de l’oncogenèse et des différents types
de classification du carcinome mammaire, nous débuterons cette partie par un rappel de l’anatomie et de l’histologie du sein.
Anatomie et histologique du sein
Le sein est un organe constitué principalement d’un tissu graisseux rattaché à la paroi thoracique par les muscles pectoraux. Entourée par un tissu adipeux, la glande mammaire est une structure tubulo-alvéolaire formée par 15 à 25 lobes irréguliers irradiants à partir du mamelon. Ces lobes sont séparés par une couche de tissu conjonctif. Ils se divisent en plusieurs lobules terminés par des canaux galactophores ou lactifères qui se rejoignent au niveau du mamelon et forment une dilatation appelée sinus lactifère. Ainsi, ils drainent chaque lobe par l’intermédiaire d’un orifice présent à la surface du mamelon (11) (Figure 2).
L’aspect conique du sein est maintenu grâce à la présence du tissu adipeux. L’aréole de la peau entourant le mamelon est pigmenté et renferme des glandes sébacées ou Glandes de Morgani. Ces dernières s’hypertrophient pendant la grossesse et prennent alors le nom de tubercule de Montgomery.
Au plan histologique, les canaux et lobules sont bordés par deux couches de cellules: (i) une couche de cellules luminales issues des cellules progénitrices. et exprimant des marqueurs associés aux récepteurs hormonaux (œstrogènes, progestérone) (16),(60)des cytokératines et des facteurs de transcription (1) , (53) et (ii) une couche de cellules myoépithéliales entourant les cellules luminales, donc en contact avec la lame basale et exprimant aussi des cytokératines et des marqueurs musculaires comme l’actine (6).
Cancérogenèse
Il s’agit d’un processus multifactoriel au cours duquel, la succession d’altérations génétiques induirait progressivement la transformation des cellules normales en cellules cancéreuses. Ces altérations peuvent aboutir à l’inactivation de gènes suppresseurs de tumeurs et ∕ou à l’activation d’oncogènes. Selon Hanahan et Weinberg, huit modifications de la physiologie cellulaire seraient essentielles à la transformation des cellules normales (33):
– une indépendance vis-à-vis des signaux de croissance ;
– une perte de la sensibilité vis-à-vis des signaux antiprolifératifs ;
– une résistance à l’apoptose ;
– un potentiel réplicatif illimité ;
– une aptitude à envahir les tissus et à métastaser ;
– une néo angiogenèse ;
– une reprogrammation tumorale du métabolisme énergétique
– un échappement à la surveillance immunitaire.
L’histoire naturelle du cancer du sein peut être divisée en trois phases: (i) un état précancéreux suivi d’une phase initiale, (ii) une phase d’invasion locale avec un envahissement locorégional par les cellules cancéreuses et (iii) une phase de métastase ou de cancer généralisé caractérisée par une dissémination des cellules malignes puis la formation de foyers tumoraux secondaires.
Phase initiale
Elle débute par des lésions génétiques au niveau d’une ou de plusieurs cellules. Ce sont des lésions de l’ADN non réparées, liées à la transformation d’un proto-oncogène en oncogène ou à l’altération de la fonction d’un gène dit suppresseur de tumeur ou encore à l’inactivation d’un gène impliqué dans la réparation de l’ADN. L’agent initiateur ou cancérogène peut être chimique physique ou virale (Figure 2).
Il y’a d’abord l’apparition de lésions précancéreuses ou dysplasies, reconnaissables à l’examen microscopique. Les cellules précancéreuses constituant ces lésions peuvent dans un délai variable se transformer en cellules cancéreuses suite à une accumulation d’anomalies génétiques (33).
Au niveau des épithéliums séparés du tissu conjonctif mammaire par une membrane basale, il est possible de décrire un stade de cancer in situ avec une prolifération de cellules épithéliales cancéreuses qui n’envahissent pas le tissu conjonctif. Ce carcinome in situ peut demeurer non invasif pendant de nombreuses années, mais dans la très grande majorité des cas il évolue spontanément vers un carcinome invasif (Figure 3) (9).
Phase d’invasion locale
Encore appelée phase de promotion, elle démarre par le franchissement de la membrane basale à la suite d’une prolifération intra-épithéliale. En effet, sous l’influence d’agents dits « promoteurs », les cellules cancéreuses donnent naissance à un clone cellulaire issu de la prolifération de cellules chez lesquelles la voie de signalisation intercellulaire a été altérée. Il existe de nombreux promoteurs parmi lesquels on retrouve l’alcool, des corps étrangers comme l’amiante, des agents infectieux et certaines hormones.
Capables de dégrader par protéolyse enzymatique les constituants de la membrane basale et de la matrice extracellulaire, les cellules cancéreuses envahissent de proche en proche les structures environnantes. A ce stade, on parle de carcinome ‟micro-invasif″. La tumeur s’étend progressivement dans le sein envahissant ses différents constituants et les tissus normaux sont au fur et à mesure remplacés par des cellules tumorales qui utilisent préférentiellement les capillaires lymphatiques et sanguins, pour se propager (58).
Ce sont des cellules capables de se multiplier de façon autonome, insensibles à une inhibition exercée par les cellules voisines par contact direct ou par l’intermédiaire de cytokines (58). Elles acquièrent de nouvelles propriétés telles qu’une autosuffisance en signaux de croissance associée à un potentiel réplicatif illimité, d’échappement à l’apoptose et une possibilité d’invasion tissulaire et de métastases.
Phase de généralisation ou de métastase
Durant cette troisième phase, certains agents mutagènes endogènes ou exogènes, et des événements épigénétiques favoriseraient l’agrandissement des lésions précancéreuses à type de polype, de dyskératose ou papillome (78).
Les cellules cancéreuses se détachent de la tumeur d’origine et entrent dans le courant sanguin ou le système lymphatique pour rejoindre d’autres parties du corps et y former de nouvelles tumeurs. Cette dissémination est à l’origine des métastases avec la reproduction dans d’autres organes de nouvelles tumeurs. Lorsque ces localisations secondaires sont retrouvées au niveau des nœuds lymphatiques, on parle de dissémination ganglionnaire. Lorsqu’elles se développent dans des parties du corps comme le foie, les poumons, les os ou encore le cerveau, elles prennent l’appellation de cancers métastatiques (32).
Plusieurs facteurs seraient impliqués dans cette dissémination. Il s‘agit de facteurs liés soit au patient lui-même de par son statut immunologique, son état nutritionnel et ses facteurs génétiques; soit à la tumeur notamment avec l’agressivité des cellules tumorales qui produisent diverses substances pro-tumorales.
La galectine 3 (Gal-3) serait fortement impliquée dans la survenue des métastases. Ses actions pro-tumorales ont été largement rapportées et certaines sont illustrées au niveau des figures 3A-C (2). Il s’agit d’une protéine de la famille des lectines capable de se lier spécifiquement avec les galactosides. Elle est naturellement secrétée par les macrophages activés et possède de nombreuses fonctions cellulaires. Présente dans le noyau, dans le cytoplasme et à la surface des cellules, elle peut diffuser très facilement dans les matrices extracellulaires et participer à de nombreux processus biologiques (adhésion, activation cellulaires…). Son rôle a été démontré dans le cancer, l’inflammation et la fibrose et ses actions biologiques sont variables suivant sa localisation. En effet, la fraction membranaire de la Gal-3 interviendrait dans le développement normal des cellules et tissus d’adultes (61) tandis que la Gal-3 intra-cytoplasmique demeure un inhibiteur de l’apoptose de cellules cancéreuses (Figure 3a).
Cette inhibition de l’apoptose des cellules cancéreuses a été précédemment décrite dans les cancers du sein, de la prostate, de la thyroïde et du rein (2, 27, 75). Elle est cependant associée à une destruction des lymphocytes intra-tumoraux dans ces mêmes types de tumeurs. Cette action immunosuppressive résulterait d’un phénomène d’apoptose extrinsèque induite par la Gal-3 extra cellulaire libre (36) (Figure 3a).
En outre, la Gal-3 contribuerait à l’échappement de la tumeur face au système immunitaire par l’induction d’une angiogenèse tumorale (Figure 3b). Cette action pro- angiogénique serait surtout due à la Gal-3 membranaire qui contribue à deux niveaux : (i) permettre la fixation puis la diapédèse des cellules tumorales au niveau de l’endothélium vasculaire (ii) faciliter leur sortie de la circulation sanguine puis leur adhérence à des tissus sains au niveau desquels vont se former les localisations secondaires en cas de métastase (2, 15) (Figure 3c)
Classification
Classification histologique
L’étude histologique du sein montre l’existence de différents types de cancers mammaires. Initialement établie par l’OMS en 1981, la classification histologique de ces tumeurs a été révisée en 2003 (Tableau I).
Les types de cancer du sein fréquemment rencontrés selon la classification histologique sont les suivants :
le CCIS définit comme une lésion intra-canalaire caractérisée par une prolifération cellulaire accrue, des atypies cellulaires légères à marquées et une tendance inhérente mais non obligatoire vers un carcinome mammaire infiltrant (76). C’est un carcinome des canaux galactophores n’infiltrant pas le tissu conjonctif et caractérisé par une prolifération anormale des cellules épithéliales. L’aspect macroscopique du CCIS peut se traduire par une tumeur à contour irrégulier mal individualisé. Il représente 85 à 90 % des carcinomes in situ et de manière approximative 15 à 20 % des cancers du sein (38). Il est le plus souvent détecter lors de la mammographie de dépistage et le diagnostic est confirmé par l’anatomopathologie de la lésion.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUES
I. DEFINITION ET HISTORIQUE DU CANCER DU SEIN
II. EPIDEMIOLOGIE DU CANCER DU SEIN
II.1. Situation dans le monde
II.2. Situation au Sénégal
III. PATHOGENESE ET CLASSIFICATION DU CANCER DU SEIN
III.1. Anatomie et histologique du sein
III.2. Cancérogenèse
III.2.1. Phase initiale
III.2.2. Phase d’invasion locale
III.2.3. Phase de généralisation ou de métastase
III.3. Classification
III.3.1. Classification histologique
III.3.2. Classification clinique ou stadification
III.3.3. Classification moléculaire
III.3.4. Classification en grade ou SBR
IV. FACTEURS DE RISQUE DU CANCER DU SEIN
IV.1. Facteurs hormonaux
IV.2. Facteurs génétiques
IV.3. Facteurs environnementaux
IV.4. Autres facteurs de risque
V. IMMUNOLOGIE DU CANCER DU SEIN
V.1. Effecteurs et mécanismes d’action
V.2. Notion d’ »immunoediting »
V.3. Mécanismes d’échappement des cellules cancéreuses
VI. DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT DU CANCER DU SEIN
VII. HYPOTHESE ET OBJECTIFS DE L’ETUDE
DEUXIEME PARTIE : ETUDE EXPERIMENTALE
I. MATERIELS ET METHODES
I.1. Cadre d’étude
I.2. Population d’étude
I.3. Etudes immunologiques
I.3.1. Matériel et consommables de laboratoire
I.3.2. Détermination des taux de Gal-3
I.4. Analyses statistiques
II. RESULTATS
II.1. Caractéristiques de la population d’étude
II.1.1. Données cliniques et thérapeutiques
II.1.2. Données biologiques
II.2. Profils des taux sériques de Gal-3 à l’inclusion
II.2.1. Comparaison des taux de Gal-3 entre les contrôles et les patientes
II.2.2. Relation entre l’âge et les taux sériques de Gal-3 chez les patiente
II.2.3 patientes
II.2.4 Comparaison des taux sériques de Gal-3 suivant le stade SBR chez les patientes
II.2.5. Relations entre les facteurs clinico-biologiques et le taux de Gal-
II.3. Profil évolutif des taux sériques de Gal-3 au cours du traitement
II.3.1. Evolution des taux de Gal-3 suivant le stade SBR
II.3.2. Evolution des taux de Gal-3 suivant le protocole de chimiothérapie .
II.3.3. Profil évolutif des taux sériques de Gal-3 suivant la réponse clinique à la chimiothérapie
III. DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES BIOBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE
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