PARTICULARITÉ DE LA COMPOSITION D’UN BAP
Un volume de pâte élevé
Il est connu que les frottements intergranulaires diminuent l’ouvrabilité des bétons (Kennedy, 40). Afin de permettre une bonne déformabilité des BAP et un remplissage correct des coffrages, un volume important de pâte doit être maintenu. Son rôle est de couvrir la surface des granulats afin de diminuer les frictions entre les particules et favoriser la dispersion des granulats. Selon l’AFGC (AFGC, 08), ce volume doit être compris entre 330 et 400 l/m3.
Une quantité de fines (< 125 µm) élevée
Afin d’assurer une ouvrabilité suffisante et une résistance à la ségrégation et au ressuage limitée, les BAP intègrent dans leurs formulations une certaine quantité de fines de l’ordre de 500 kg/m3 (AFGC, 08). La partie liante des BAP est constituée d’un mélange de ciment et d’addition telle que le filler calcaire, la cendre volante ou le laitier granulé, etc. Le choix de la nature et du dosage de l’addition doit tenir compte des exigences prescrites dans le cahier des charges.
Utilisation des superplastifiants
L’apparition des BAP est étroitement liée aux avancées technologiques réalisées dans le domaine des adjuvants et plus particulièrement celui des superplastifiants. Ces derniers sont composés des polymères à chaînes macromoléculaires qui permettent l’obtention de la fluidité et la diminution des frottements intergranulaires. Les superplastifiants réagissent avec les particules du ciment et les additions minérales. Lorsque l’on introduit un superplastifiant dans une suspension cimentaire, les polymères viennent se fixer à la surface des particules solides du mélange par adsorption. Cette adsorption s’effectue sur les phases hydratées du ciment (Bonneau, 97). Les groupes anioniques du polymère neutralisent les différentes charges et confèrent à la surface des particules de ciment une charge négative (Jolicoeur, 98). Ceci conduit à une répulsion électrostatique entre les particules voisines de ciment et contribue à la défloculation et la dispersion des solides dans la suspension. De plus, la dispersion peut être aussi par effet stérique, en effet, des chaines secondaires sont griffées sur la chaine principale du polymère et repoussent les grains de ciment par effet stérique ou entropique (Uchikawa et al., 97). Plus la longueur de ces chaines est importante est plus l’effet stérique est important .
L’utilisation éventuelle d’un agent de viscosité (rétenteur d’eau)
L’effet des superplastifiants est double, d’une part il augmente l’ouvrabilité du BAP et il réduit sa viscosité d’autre part. Afin de remédier à ce dernier point, on a souvent recours à des agents de viscosité. Ce sont généralement des dérivés cellulosiques, des polysaccharides ou des suspensions colloïdales. Leur rôle est d’empêcher le ressuage et de limiter les risques de ségrégation en rendant la pâte plus épaisse. Leur utilisation est justifiée dans le cas des bétons à fort rapport E/C car les fines n’étant alors pas suffisantes pour fixer l’eau dans le béton. En revanche, dans le cas des BAP à faible rapport E/C, leur utilisation ne semble pas être justifiée.
Un faible volume de gravillon
L’utilisation des granulats concassés ou roulés est autorisée pour la formulation des BAP. Concernant les granulats recyclés, actuellement aucune note technique ou norme n’autorise leur emploi. Les gros granulats sont à l’origine des blocages du béton en zone confinée, c’est la raison pour laquelle leur volume est limité dans les BAP. En général, on admet un rapport massique gravillon / sable (G/S) de l’ordre de 1, qui peut être augmenté dans le cas des ouvrages peu ferraillé ou bien diminué dans le cas contraire. Dans la majorité des cas, le diamètre maximal Dmax des gravillons dans les BAP est compris entre 10 et 20 mm (AFGC, 08). L’augmentation du Dmax conduit à des risques de blocages.
LES ADDITIONS MINÉRALES
Différents types d’additions minérales
Une addition minérale est une poudre d’une finesse supérieure à celle du ciment. Elle peut être ajoutée et/ou substituée au ciment lors de sa fabrication (ciment composé) ou ajoutée directement dans le malaxeur lors de la fabrication du béton. Elle permet ainsi d’améliorer certaines propriétés ou conférer aux matériaux des propriétés particulières. On distingue deux types d’additions : les additions inertes et les additions réactives. Les données bibliographiques (AFGC, 08) recommandent l’emploi de quantités importantes de fines dans un BAP pour assurer sa stabilité à l’état frais et éliminer les risques de ségrégation. Quand ce volume est occupé intégralement par du ciment Portland, il fournit au matériau durci, un niveau de performance excessif par rapport aux spécifications demandées. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que le dégagement de chaleur engendré par les réactions exothermiques produites lors de l’hydratation du ciment peuvent provoquer des fissurations de l’élément et il est donc naturel de remplacer une partie de ce volume par des additions minérales, qui sont moins réactives que le clinker et d’un coût inférieur sur le plan énergétique et environnemental. On passera en revue dans cette partie, les additions minérales qui seront utilisées lors de l’étude expérimentale.
Fillers (calcaire et siliceux)
Ce sont des poudres de roche (calcaire ou siliceuse) obtenue par broyage et/ou sélection, dont les caractéristiques sont définies par la norme NF P18-508 et 509 (NF P18-508, 12 ; NF P18- 509, 12) respectivement pour les fillers calcaires et siliceux. La demande en eau des fines siliceuse telles que le quartz est supérieure à celle des fillers calcaires d’usage plus courant dans les bétons. Ceci est dû à la forme anguleuse des particules de quartz. En plus de leur effet physique, des études sur les fillers calcaires (Bachiorrini, 85 ; Ramachandran, 86), ont montré qu’ils présentent une certaine activité physico-chimique, qui favorise l’accélération de l’hydratation du clinker par la création de sites de nucléation (germination) hétérogène, notamment, lorsque l’addition est finement broyée. Néanmoins, l’effet n’est remarquable que seulement au jeune âge. D’après les mêmes études, le calcaire réagit avec les aluminates du ciment pour former des carboaluminates de calcium hydratés, qui sont favorables à la durabilité du matériau (Bachiorrini, 86). À long terme, les fillers siliceux peuvent contribuer faiblement à une réaction pouzzolanique (de Larrard, 02). D’un point de vue industriel, les fillers calcaires présentent de bonnes caractéristiques de régularité à la production. D’autre part, leur couleur généralement claire les rend favorables à l’obtention de parements architectoniques.
Laitier granulé de hauts fourneaux
Les minerais de fer sont utilisés pour la fabrication de la fonte ; en plus de leurs phases ferreuses, ces minerais contiennent aussi des minéraux proches de ceux du cru du clinker. Lors du processus de fusion du minerai dans les hauts fourneaux à une température allant de 1135 à 1350°C, se produit la séparation gravitaire, la fonte se dépose dans la partie inférieure du four, tandis que le laitier surnage en partie supérieure dû à sa faible densité par rapport à la fonte. À la sortie du four, le laitier à une température avoisinant celle de la fusion, est refroidi brusquement à l’eau (trempe) et le laitier prend l’appellation de laitier granulé défini par la norme NF EN 15167-1 (NF EN 15167-1, 06). La vitrification du laitier granulé par la trempe confère au matériau son pouvoir hydraulique latent. Un broyage fin du laitier lui permet d’être utilisé comme addition dans les ciments et les bétons. Considéré au début comme un déchet de la sidérurgie, ensuite comme coproduit, l’utilisation du laitier granulé reste cependant limitée en Algérie au domaine de la cimenterie en raison de son faible pouvoir hydraulique. Le laitier granulé procure au matériau des performances mécaniques et une durabilité accrues (Duval, 92 ; Behim, 05), c’est pourquoi les ciments au laitier sont particulièrement indiqués pour les bétons soumis à des ambiances agressives.
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Table des matières
INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE I ÉTAT DE L’ART DES BÉTONS AUTOPLAÇANTS
1. INTRODUCTION AUX BÉTONS AUTOPLAÇANTS
2. PARTICULARITÉ DE LA COMPOSITION D’UN BAP
2.1. Un volume de pâte élevé
2.2. Une quantité de fines (˂ 125 µm) élevée
2.3. Utilisation des superplastifiants
2.4. L’utilisation éventuelle d’un agent de viscosité (rétenteur d’eau)
2.5. Un faible volume de gravillon
3. LES ADDITIONS MINÉRALES
3.1. Différents types d’additions minérales
3.2. Utilisation des additions minérales en Algérie
3.3. Effets des additions minérales sur l’écoulement des matériaux cimentaires
3.4. Effets des additions minérales sur les propriétés physico-chimiques des matériaux cimentaires
4. APPROCHES DE FORMULATION DES BAP
4.1. Approche japonaise basée sur l’optimisation du mortier
4.2. Approche du LCPC basée sur l’optimisation de la compacité des mélanges granulaires
4.3. Approche basée sur l’association d’une pâte optimisée et d’un squelette granulaire humide
5. CARACTÉRISATION DES BAP À L’ÉTAT FRAIS
6. RHÉOLOGIE DES BÉTONS AUTOPLAÇANTS
6.1. Définition des propriétés rhéologiques
6.2. Types de comportements rhéologiques
6.3. Corrélation entre les essais empiriques et les mesures rhéologiques
7. EFFETS DES ADDITIONS MINÉRALES SUR LA RÉSISTANCE MÉCANIQUE ET LA DURABILITÉ DES BAP
7.1. Résistance mécanique
7.2. Porosité
7.3. Absorption capillaire
7.4. Perméabilité au gaz
7.5. Diffusion des ions chlorure
7.6. Carbonatation
7.7. Lixiviation
8. SYNTHÈSE DE L’ÉTAT DE L’ART
CHAPITRE II CARACTÉRISATION DES MATÉRIAUX ET PROCÉDURES EXPÉRIMENTALES
1. MATÉRIAUX UTILISÉS
1.1. Ciments
1.2. Additions minérales
1.3. Granulats
1.4. Plastifiant et superplastifiants
1.5. Eau de gâchage
2. CONFECTION ET CONSERVATION DES ÉPROUVETTES
2.1. Préparation de la pâte
2.2. Préparation du mortier et confection des éprouvettes
2.3. Préparation du béton et confection des éprouvettes
3. PROCÉDURES EXPÉRIMENTALES
3.1. Caractérisation microstructurale
3.2. Caractérisation de la pâte
3.3. Caractérisation du mortier
3.4. Caractérisation des BAP à l’état frais
3.5. Caractérisation mécanique et propriétés de transfert des BAP
4. SYNTHÈSE
CHAPITRE III INFLUENCE DES ADDITIONS MINÉRALES SUR L’ÉCOULEMENT DES SUSPENSIONS CIMENTAIRES
1. DEMANDE EN EAU DES MÉLANGES CIMENTAIRES
1.1. Influence de la surface spécifique sur la demande en eau et sur la compacité des pâtes
1.2. Influence du dosage de l’addition minérale sur la demande en eau et sur la compacité des pâtes
2. DEMANDE EN SUPERPLASTIFIANT DES MÉLANGES CIMENTAIRES
3. ETUDE RHÉOLOGIQUE DES SUSPENSIONS CIMENTAIRES
3.1. Préparation des suspensions cimentaires
3.2. Mesure des propriétés rhéologiques des pâtes
3.3. Relation entre essais empiriques et mesures rhéologiques
4. SYNTHÈSE
CHAPITRE IV CONTRIBUTION DES ADDITIONS MINÉRALES À L’ECOULEMENT DES BÉTONS AUTOPLAÇANTS
1. MÉTHODE UTILISÉE POUR LA FORMULATION DES BÉTONS
1.1. Procédure de formulation
1.2. Détermination du point de saturation
1.3. Formulation des bétons de référence
1.4. Démarche expérimentale de l’étude
1.5. Séquence de malaxage des bétons
2. OUVRABILITÉ ET SÉQUENCE D’ESSAI
2.1. Essais d’ouvrabilité
2.2. Séquence de réalisation des essais d’ouvrabilité
3. RÉSULTATS OBTENUS SUR BÉTONS
3.1. Bétons d’ouvrage
3.2. Béton à hautes performances
4. SYNTHÈSE
CONCLUSION GÉNÉRALE