Le paludisme est une érytrocytopathie fébrile et hémolysante due à un hématozoaire du genre Plasmodium, transmis à l’homme par la piqûre infectante d’un moustique du genre Anopheles. Cinq espèces de Plasmodium sont décrites chez l’homme : P. falciparum (Wellch 1897), la plus dangereuse, P. malariae (Laveran, 1881), P. ovale (Stephens, 1922), P. vivax (Grassi et Feletti, 1890), et P. knowlesi qui, initialement décrit chez les primates, a été récemment trouvé infectant pour l’homme (Singh, Kim Sung et al. 2004). Le paludisme constitue un problème majeur de santé publique frappant surtout les pays intertropicaux, qui pour la plupart, sont pauvres. En 2010 il y a eu plus de 216 millions de cas cliniques de paludisme dans le monde, dont 81% en Afrique soit 174 millions. Le nombre des décès dus au paludisme est estimé à 655000 pour l’année 2010, dont 91% en Afrique. À l’échelle mondiale, 86% des décès imputables au paludisme ont frappé des enfants de moins de 5 ans (OMS 2011). Au Mali, le taux d’incidence du paludisme grave représente 35,41‰ contre 108,98‰ de paludisme simple (SLIS 2010). Il représente également la première cause de décès chez les enfants de moins de cinq(5) ans, et d’anémies chez les femmes enceintes. Les principaux vecteurs du paludisme rencontrés sont les membres du complexe Anopheles gambiae, abondant surtout en saison pluvieuse, et Anopheles funestus, plus fréquent en saison sèche fraiche (Touré, et al., 1979). Ce modèle de répartition temporelle des vecteurs favorise la transmission continue du paludisme pendant toute l’année. Ainsi on parle de transmission par relai (Sangaré D., 2000).
La lutte anti vectorielle est la méthode la plus efficace pour prévenir la transmission du paludisme. La lutte chimique par l’utilisation des insecticides à effet rémanent est la plus courante, dominée par l’usage des matériels imprégnés d’insecticide.
Les pyréthrinoïdes forment le seul groupe d’insecticide autorisé par l’OMS dans l’imprégnation des moustiquaires à cause de leur faible toxicité sur les mammifères et de leur rémanence plus élevée (Zaim et al., 2000). Ils représentent aussi la majorité des insecticides (6/12) recommandé par l’OMS dans la pulvérisation intra domiciliaire pour les mêmes raisons évoquées ci-dessus.
Au Mali les stratégies de lutte anti vectorielle sont essentiellement basées sur l’utilisation des moustiquaires imprégnées d’insecticide. Différentes études ont montré l’efficacité de l’utilisation de ces moustiquaires imprégnées sur l’incidence du paludisme (Choi et al. 1995). Récemment la pulvérisation intra domiciliaire a été introduite par la Direction du Programme National de Lutte contre le Paludisme au niveau de trois cercles. En effet, le Mali, a été sélectionné en décembre 2005 comme un des 15 pays bénéficiaires de l’initiative du président Bush contre le paludisme PMI (President’s Malaria Initiative). Le but principal du PMI est de réduire de 50% la mortalité imputable au paludisme dans les pays bénéficiaires. C’est dans le cadre de ce projet que la pulvérisation intra-domiciliaire, composante majeure de la lutte anti vectorielle ayant fait ses preuves dans l’éradication du paludisme, dans les années 1950-60, a été mise en œuvre par le programme national de lutte contre le paludisme (PNLP) en 2008. Le PNLP avec l’appui de PMI a procédé à la pulvérisation intra domiciliaire dans les cercles de Bla et de Koulikoro en 2008. Dans le cadre de l’extention de ce programme le cercle de Barouéli a été sélectionné. Une intervention d’une telle envergure nécessite au préalable une connaissance du niveau de la résistance des vecteurs aux insecticides qui sont utilisés. Elle nécessite aussi une information sur les paramètres entomologiques de la transmission afin de pouvoir mesurer l’impact de l’intervention. Le phénomène de résistance des vecteurs du paludisme aux insecticides n’est pas nouveau. Des études ont montré que Anopheles gambiae est résistant à la permethrine et au DDT au sud du Mali (Fanello et al. 2003, Tripet et al., en 2006). Il est nécessaire de connaitre le niveau de susceptibilité des vecteurs avant la pulvérisation intra domiciliaire (PID), compte tenu du fait qu’il n’y a pas eu d’évaluation antérieure dans le cercle de Barouéli. Il est aussi nécessaire d’évaluer les paramètres entomologiques de la transmission du paludisme. Ainsi la présente étude a été initiée pour déterminer les paramètres entomologiques de la transmission du paludisme et la susceptibilité du complexe An. gambiae aux insecticides avant la PID. Elle pourrait fournir des informations au PNLP sur l’efficacité des insecticides à utiliser, et le niveau de la transmission du paludisme.
GENERALITES
Parasite du paludisme et son cycle biologique
Le parasite
Il existe cinq espèces plasmodiales capables d’infecter l’homme. Les plasmodies font parties du règne des protistes, phylum des Apicomplexa, classe des Haemosporidea, sous-classe des Coccidia, ordre des Haemosporida, sous-ordre des Haemosporiina, famille des Plasmodidae, au genre Plasmodium. Ce genre comprend deux sousgenres : le sous-genre Plasmodium (P. vivax, P. ovale, P. malariae) et le sous-genre Laverania (P. falciparum) enfin la cinquième espèce P. knowlesi, qui initialement décrit chez les primates récemment comme infectant l’homme (Singh, Kim Sung et coll. 2004).
Cycle biologique du parasite
Au cours d’un repas de sang un moustique femelle infestant, injecte les sporozoïtes à l’homme (figure1), qui gagnent rapidement le foie : c’est la phase exo-érythrocytaire. Après une phase de multiplication, les parasites sont libérés dans la circulation sanguine et pénètrent dans les hématies, puis subit différentes transformations (mérozoïtes, trophozoïtes et schizontes), c’est la phase érythrocytaire ou endoérythrocytaire ; qui est responsable des manifestations cliniques de la maladie. Ces manifestations sont entre autre :
– accès fébriles et rythmés,
– une destruction massive d’hématies qui entraîne une anémie hémolytique,
– un sub-ictère,
– une détérioration de l’état général pouvant aboutir à la cachexie.
Vecteurs du paludisme
Classification
Le vecteur du paludisme est un moustique. Il appartient au règne animal, à l’embranchement des arthropodes, à l’ordre des diptères, sous-ordre des nématocères, famille des culicidés, sous-famille des Anophelinae, genre Anopheles.
Biologie
Les anophèles femelles pondent leurs œufs à la surface de l’eau. Ces œufs, munis de flotteurs remplis d’air éclosent généralement 24 à 36 heures après la ponte (Holstein, 1949). La larve subit trois mues consécutives qui par les modifications morphologiques qu’elles engendrent, la conduisent au stade nymphal. Le stade larvaire dure généralement de huit à douze jours à la température normale de l’eau et en milieu tropical selon les espèces (Rodhain et al., 1985). La figure 2 représente le schéma du cycle biologique d’un Anophelinae. La nymphe a l’aspect d’une virgule, au bout de 24 à 48 heures elle se transforme en moustique adulte ou imago qui émerge de l’eau. Seules les femelles sont hématophages, les mâles se nourrissent de suc provenant des plantes.
Après la phase nymphale le moustique émerge et se repose sur son support, durant 10 à 24 heures, pendant que sa cuticule durcit, que ses ailes se déploient et que l’appareil génital mâle subit une hémi rotation de 180o, le rendant fonctionnel.
Les mâles et femelles s’accouplent, soit en vol pendant un essaimage (formé par les mâles), soit posé sur un support. Les mâles s’accouplent plusieurs fois dans leur vie mais les femelles ne s’accouplent le plus souvent qu’une seule fois (Clement, 1992). Les femelles inséminées conservent le sperme dans une poche, la spermathèque, d’où elles rélarguent les spermatozoïdes lors des pontes successives (Page, et al 2007). Le mâle ne se nourrit que de jus sucrés, fournisseurs d’éléments énergétiques. La femelle, outre l’absorption de jus sucrés, prélève du sang tous les deux à trois jours sur un hôte vertébré. Elle trouve dans ce repas sanguin les éléments protéiques nécessaires pour le développement des ovocytes. Au cours du repas de sang, elle peut prélever jusqu’à quatre fois le volume de son abdomen. Après le repas de sang, la femelle se repose, le plus souvent près du sujet sur lequel elle s’est gorgée pour digérer le sang pendant 1 à 2 heures. Pendant la digestion, les ovocytes grossissent jusqu’à occuper la plus grande partie de l’abdomen qui paraît blanc par transparence. Il est facile de déterminer à l’œil nu les stades d’évolution de l’abdomen pendant la digestion du sang. Ainsi suivant leur état de réplétion (Figure 3), les spécimens sont classés en :
➣ femelles à jeun ou non gorgée : femelles âgées ou non n’ayant pas encore pris du repas de sang après une ponte,
➣ femelles gorgées : femelles ayant pris fraîchement un repas de sang,
➣ femelles semi-gravides : abdomen à moitié noirâtre contenant du sang en digestion, avec la partie apicale blanche du fait du développement des ovaires,
➣ femelles gravides : femelles ayant développé des œufs conservés encore dans l’abdomen.
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Table des matières
1. INTRODUCTI0N
2. OBJECTIFS
2.1 Objectif général
2.2 Objectifs spécifiques
3. GENERALITE
3.1 Parasite du paludisme et son cycle biologique
3.2 Vecteurs du paludisme
3.2.1 Classification
3.2.2 Biologie
3.2.3 Morphologie
3.2.4 Distribution géographique des membres des complexes Anopheles gambiae et funestus en Afrique
3.2.4.1 Systématique du groupe Anopheles funestus
3.2.4.2 Systématique et distribution du complexe Anopheles gambiae
3.3 Lutte anti vectorielle
3.3.1 La lutte contre l’anophèle au stade adulte
3.3.2 La lutte contre l’anophèle au stade larvaire
3.4 La résistance des vecteurs du paludisme en Afrique
3.4.1 Définition de la résistance
3.4.2 Les différents types de résistance
4. MATERIEL ET METHODES
4.1 Sites d’étude
4.2 Période et type d’étude
4.3 Techniques de collecte et de traitement des moustiques
4.4 Recherche d’infections plasmodiale
4.5 Détermination de l’origine de sang
4.6 Test d’insecticide
4.6.1 Matériel
4.6.2 Moustiques utilisé pour le test (An. gambiae s.l)
4.6.3 Température et humidité relative pendant le test
4.6.4 Insecticides utilisés pour le test
4.6.5 Procédure du test
4.7 Identification moléculaire des moustiques
4.8 Paramètres entomologiques mesurés
4.9 Analyses et interprétations des résultats
4.10 Considérations éthiques
5. RESULTATS
5.1 Composition de la faune résiduelle dans les sites d’étude
5.1.1 Fréquence d’An. gambiae s. l
5.1.2 Composition spécifique de la faune non vectrice du paludisme dans les sites d’étude selon la méthode de la (CN)
5.2 Structure moléculaire de la population vectrice dans les sites d’étude
5.2.1 Densité et pluviométrie
5.2.2 Taux d’infection
5.2.3 Agressivité des vecteurs par spray catch
5.2.4 Taux d’anthropophilie
5.2.5 Taux d’inoculation entomologique
5.2.6 Taux de parturité
5.2.7 Habitudes trophiques
5.3 Test de susceptibilité d’An. gambiae s. l aux insecticide
5.3.1 Temps de knock-down (kdt) dans les sites d’étude
5.3.2 Taux de mortalité après 24 heures des moustiques soumis aux insecticides
6. COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS
6.1 Composition vectorielle
6.2 Etudes entomologiques de la transmission
6.3 Susceptibilité d’An. gambiae s. l aux insecticides
6.3.1 Susceptibilité aux cinq insecticides testés
7. CONCLUSION ET RECOMMENDATIONS
8. BIBLIOGRAPHIE
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