Ouvrages génie civil : les digues et les barrages

La France compte aujourd’hui plus de 9 000 km de digues de protection contre les inondations fluviales ou maritimes, 6 700 km de voies d’eau navigables endiguées, plus de 1 000 km de digues d’aménagement hydraulique et de grands canaux d’irrigation, sans compter des dizaines de milliers de barrages. Dans leur grande majorité, ces ouvrages hydrauliques sont construits avec des remblais d’alluvions car de tous temps ce type de matériau s’est révélé économique. Les inondations qui ont affecté le sud de la France au cours des deux dernières décennies (Camargue 1993 et 1994, Alpes Maritimes 1994, Aude et Pyrénées orientales 1999, Gard 2002, basse et moyenne vallée du Rhône 2003, côte vendéenne 2010), ont mis en lumière les défaillances des digues et les conséquences désastreuses qui en ont découlé d’un point de vue sécuritaire et économique. A titre d’exemple, les récentes inondations dans le sud-est de la France (rupture de la digue d’Aramon en septembre 2002 et des digues de Fourques et du Nord d’Arles en décembre 2003) cumulent un coût de plusieurs milliards d’euros. Dans de nombreux des cas, les ruptures de digue sont imputables aux phénomènes d’érosion interne qui fragilisent peu à peu les ouvrages ou leur fondation. Notre patrimoine d’ouvrages hydrauliques contient des ouvrages d’âges extrêmement variés, certains datant d’avant la Révolution, et, comme ils sont en général en terre, ils ont bien souvent fourni les conditions idéales pour le développement d’une végétation arborescente, dense et ancienne lorsque l’entretien est déficient depuis de nombreuses années. De nos jours, le nombre d’accidents mortels liés à des ruptures ou défaillances d’ouvrages (inondations de la Nouvelle Orléans aux USA lors de l’ouragan Katrina en août 2005, et en ce début d’année les inondations dans l’Ouest de la France au cours de la tempête Xynthia) justifie un regain d’études et ainsi que le renforcement récent de la réglementation française pour de tels ouvrages. On estime que, parmi les quelque 6 000 km de digues de protection contre les inondations soumises à la réalisation d’ici 2014 d’une étude de dangers (classes A, B et C) en application de la nouvelle réglementation , seulement un tiers sont dans un état connu satisfaisant. Par différence, ce sont de l’ordre de 4000 km de digues qui nécessiteront, dans les cinq prochaines années, des investigations approfondies afin de s’assurer de leur sécurité et probablement des travaux de remise en état. D’après un recensement récent des différentes causes de  ruptures des digues fluviales allemandes, effectué en 2007 par le bureau d’étude « SCHOLZ & LEWIS mbH », 50% des accidents seraient liés à des phénomènes d’érosion interne, 30% seraient dus à des surverses et les 20% restant seraient imputables à la présence des arbres et/ou de leurs racines qui eux même favorisent d’ailleurs l’érosion interne.

Ouvrages génie civil : les digues et les barrages 

En France, il existe une grande variété de digues et de barrages en terre, qui s’explique par les différentes époques de construction, les différents matériaux utilisés dans leur édification, ainsi que par les modifications successives que les ouvrages ont connus depuis leur création (confortement, réparation, rehaussement…).

Définitions des ouvrages 

Les barrages et les digues sont des ouvrages hydrauliques construits dans le but de stocker les eaux ou de se protéger de leurs effets. Les barrages sont implantés perpendiculairement au cours d’eau ou à l’écoulement alors qu’en général les digues le sont longitudinalement. Les digues se séparent alors en deux grandes familles : les digues à charge hydraulique permanente assurant le stockage ou le transport de l’eau et les digues de protection contre les inondations (Royet and Mériaux 1998).

● Les digues à charge hydraulique permanente correspondent principalement à des digues de navigation, de dérivation ou d’irrigation. On compte, pour les petits canaux de navigation, environ 10 ruptures par an sur les 6 700 km de canaux navigables (Daly et al. 2005). Il s’agit souvent de digues très hétérogènes, mal connues des gestionnaires d’ouvrages, à l’exception des digues récentes d’aménagements hydroélectriques (Rhône et Rhin).
● Les digues de protection contre les crues sont des ouvrages dont une partie est construite au-dessus du terrain naturel afin de contenir épisodiquement un flux d’eau supérieur à la moyenne (Mériaux et al. 2003). L’essentiel du parc de ce type de digues est ancien et leur constitution est généralement très mal connue par les gestionnaires sauf pour les quelques ouvrages ayant fait l’objet d’un diagnostic approfondi récent à l’appui de sondages géotechniques.

Les digues sont dans leur grande majorité réalisées en terre (ou remblai), s’agissant d’un matériau peu couteux s’il est disponible à proximité de l’emprise des travaux et adapté à la construction d’ouvrages à long linéaire (terrassements en déblai remblai). Deux types de conception sont possibles :
– La digue homogène : le même matériau de remblai assure les fonctions d’étanchéité et de stabilité mécanique de l’ouvrage (exemples : digues de Camargue en limon étanche, digues d’aménagement hydroélectrique du Rhône en matériau semiperméable). Une couche imperméable ou non (par exemple : des dalles en béton ou un perré) peut venir s’ajouter en amont (côté cours d’eau ou canal) à ce type de configuration pour renforcer l’étanchéité ou protéger de l’érosion externe.
– La digue zonée : un noyau compacté argileux ou limoneux constitue la barrière imperméable de l’ouvrage, située au centre de l’édifice constitué de matériaux plus perméables (matériaux sablo-graveleux, enrochements,) disposés en recharges. On se rapproche alors d’une conception de type grand barrage en remblai.

Les modes d’érosion des ouvrages

L’érosion ne se développe que si deux conditions sont réunies : l’arrachement des particules et leur transport (Blais 2005). Il existe différents type d’érosion pour les ouvrages :
● L’érosion externe, visible à l’œil nu, est le résultat de l’entrainement des particules d’un sol sous l’action d’un écoulement de surface (courant hydraulique, ruissellement) ;
● L’érosion interne se caractérise par l’entraînement des particules d’un sol sous l’action de l’écoulement qui le traverse (écoulement souterrain). L’érosion interne est un terme général qui rassemble différents phénomènes : renard hydraulique (érosion de conduit ou de fissure), érosion régressive, érosion de contact, suffusion .

La surveillance régulière des digues et le diagnostic approfondi des mauvais fonctionnements éventuels sont nécessaires. Plusieurs guides ont été édités afin d’aider les gestionnaires dans cette tâche de surveillance et d’entretien de leurs  ouvrages (BAW 2005; DVWK 1993; Mériaux et al. 2006; TAW 1994). Par ailleurs, des documents techniques existent et énoncent des recommandations sécuritaires basées sur le retour d’expérience des gestionnaires (FEMA 2005; STOWA 2000; TAW 1999; US-ARMY 2008) mais il n’y a pas de publication scientifique sur les impacts de l’enracinement des arbres dans les ouvrages hydrauliques. Il était donc pertinent d’entamer une étude globale sur le développement des systèmes racinaires ligneux dans les digues et les barrages, abordant les problématiques des impacts liés aux arbres vivants, aux arbres morts (racines en décomposition) et à la question de l’emploi de méthodes non destructives de détection des systèmes racinaires.

Architecture des racines et structure des systèmes racinaires 

Nous avons pu distinguer deux échelles d’observation des systèmes racinaires : l’architecture racinaire et la structure des enracinements. Dans le premier cas, il s’agit de la morphologie à l’échelle de la racine, dans le second cas, de la morphologie de la souche dans sa globalité.

Architecture des racines 

A l’échelle de la racine, la mise en place de l’architecture racinaire est le résultat des processus de croissance primaire (en longueur) et secondaire (en diamètre), de ramification (production d’axes secondaires) et de réitération (duplication des racines) (Atger 1991; Atger and Edelin 1994b; Barthélémy et al. 1995). L’alimentation du système racinaire par le houppier permet l’allongement subterminal des racines (organogénèse) tandis que la croissance en épaisseur est assurée par les radicelles, à l’autre extrémité du système (Drenou 2006). Les racines se caractérisent donc par des propriétés architecturales et fonctionnelles (Atger 1991).

Les fonctions des racines
Les deux fonctions principales des racines sont l’ancrage de l’arbre et l’acquisition des ressources du sol nécessaire à la survie du végétal (eau et ions) (Atger and Edelin 1994a; Fitter 2002). On distingue trois types de racines chez l’arbre mature : (i) les racines ligneuses principales (ou charpentière) qui assurent l’ancrage de l’arbre (résistance au vent et aux éventuels courants hydrauliques et à la force de gravité), (ii) les racines ligneuses de prospection qui joue un rôle d’exploration du sol (recherche des ressources disponibles) et (iii) les racines non ligneuses (radicelles et mycorhizes*) qui assurent l’absorption et le stockage de l’eau et des éléments nutritifs. Toutes ces racines ont, par ailleurs, une fonction commune : la conduction, c’est-à-dire le transport de la sève brute des racines vers la tige et, en retour, celle de la sève élaborée vers les racines (Drenou 2006).

Les caractéristiques architecturales
Les variables caractérisant l’architecture racinaire sont la topologie et la géométrie. La topologie se caractérise par la forme des embranchements et des connections physiques entre les racines, tandis que la géométrie est définie par la morphologie, la dimension, l’orientation et la distribution spatiale des racines (Reubens et al. 2007; Sinoquet et al. 1997).

De nombreuses caractéristiques sont identifiées afin de décrire l’architecture racinaire. Elles traduisent la morphologie, la dimension et l’organisation des racines. Les protocoles de description et de mesures – in situ et en laboratoire – exposés dans la littérature scientifique présentent des similitudes. Les informations extraites de (Böhm 1979; Danjon et al. 1999a; Reubens et al. 2007) représentent un inventaire complet des différentes caractéristiques à prendre en compte . L’analyse du nombre, du diamètre, de la longueur et du volume des racines en fonction de la profondeur et de la distance radiale par rapport à la souche ou encore du nombre, de la longueur des racines en fonction de leur inclinaison et ordre hiérarchique, sont des relations logiques qui ont été mises en évidence. D’après Danjon et al. (1999), le nombre, le diamètre, la longueur et le volume des racines sont fonctions de la distance par rapport à la souche.

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Table des matières

INTRODUCTION
Contexte
Problématique
PREMERE PARTIE : ETAT DE L’ART
Sommaire
1. Ouvrages génie civil : les digues et les barrages
1.1. Définitions des ouvrages
1.2. Les modes d’érosion des ouvrages
2. Architecture des racines et structure des systèmes racinaires
2.1. Architecture des racines
2.1.1. Les fonctions des racines
2.1.2. Les caractéristiques architecturales
2.2. Structure des systèmes racinaires
2.2.1. Influence de l’espèce et du milieu
2.2.2. Influence des contraintes externes
2.3. Systèmes racinaires et terrains en pente
2.3.1. Rôle et impacts des racines
2.3.2. Relations entre propriétés des racines et stabilité des pentes
2.3.3. Relations entre structure racinaire, propriétés du sol et stabilité des pentes
3. Techniques d’acquisition et de traitement des données sur les systèmes racinaires
3.1. Le numériseur magnétique
3.1.1. Principe
3.1.2. Acquisition des données
3.1.3. Traitement et analyse des données
3.1.4. Utilisation et références
3.2. Le numériseur laser
3.2.1. Principe
3.2.2. Utilisation et références
3.3. La photogrammétrie
3.3.1. Principe
3.3.2. Utilisation et références
4. Méthodes d’étude de la croissance racinaire
4.1. Suivi du développement des systèmes racinaires
4.2. Modélisation de la croissance racinaire
4.3. Lecture des cernes de croissance annuels
5. Méthodes d’étude de la décomposition des racines
5.1. Identification du bois décomposé
5.2. Paramètres influençant la décomposition du bois
5.3. Protocoles de mesure du degré de décomposition
5.3.1. Evaluation qualitative du degré de décomposition
5.3.2. Evaluation quantitative du degré de décomposition
6. Techniques de détection des systèmes racinaires
6.1. Rayons X et traceurs
6.2. Le radar de sondage souterrain (GPR)
6.3. Les méthodes de détection électriques
7. Conclusion partielle
DEUXIEME PARTIE : MATERIELS ET METHODES
Sommaire
Préambule
1. Les sites d’étude
1.1. Localisation des sites d’interventions
1.2. Présentation et caractéristiques des sites
1.2.1. Donzère et Montélimar
1.1.2. Lyon
1.1.3. Pertuis
1.2.4. Grenoble
1.2.5. Cosne-sur-Loire
1.2.6. Castérino
1.2.7. Monjoux
2. Excavation et description des systèmes racinaires
2.1. Protocole sur le terrain
2.1.1. Identification des arbres
2.1.2. Extraction des systèmes racinaires
2.1.3. Prélèvement et analyse des matériaux
2.2. Recueil et analyse des données
3. Description et mesures des racines
3.1. Protocole de mesure
3.2. Analyse des données
4. Etude dendrologique
4.1. Plan d’échantillonnage
4.2. Protocole
5. Décomposition
5.1. Plan d’échantillonnage
5.1.1. Dispositif expérimental sur la digue de l’Isère
5.1.2. Dispositif expérimental sur la digue de Castérino
5.2. Protocole
5.2.1. Sur le terrain
5.2.2. Au laboratoire
6. Détection électrique
6.1. Plan d’échantillonnage
6.2. Protocole
7. Conclusion partielle
TROISIEME PARTIE : RESULTATS ET DISCUSSION
Chapitre 1. Structure des systèmes racinaires
1.1. Présentation de l’article I
1.2. Article I : Tree root systems structure on earth dikes
1.3. Conclusions de l’article et perspectives
Chapitre 2. Architecture racinaire
2.1. Présentation de l’article II
2.2. Article II : Root systems architecture on dykes: a typology purpose
2.3. Conclusions de l’article et perspectives
Chapitre 3. Croissance racinaire
Préambule
3.1. Présentation de l’article III
3.2. Rappels des caractéristiques dendrologiques du bois
3.3. Article III: Caractérisation de la croissance racinaire d’essences ligneuses implantées sur des digues fluviales
3.4. Conclusions de l’article
3.5. Comparaison anatomique du bois de racines sur digues et sur sols de montagne
3.6. Perspectives
Chapitre 4. Décomposition racinaire
Préambule
4.1. Présentation du projet d’article IV
4.2. Projet d’article IV : Tree roots decay in earth dikes
4.3. Conclusions du projet d’article et perspectives
Chapitre 5. Détection des systèmes racinaires
5.1. Présentation de l’article V
5.2. Rappels des propriétés électriques des matériaux
5.3. Article V: Detection of buried tree root samples by electrical measurements
5.4 Conclusions de l’article et perspectives
CONCLUSION

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