Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études
Structures Composites
Initialement en bois puis en alliage métallique, l’industrie de l’aéronautique s’est dirigée depuis une vingtaine d’années vers les matériaux composites en fibres de carbone ou de verre. Plus légers et plus résistants, ces matériaux de nouvelle génération devraient, à terme, faire baisser le poids total des avions et donc réduire leur consommation d’énergie.
Les structures composites utilisées en aéronautique sont répertoriées en Figure 22, et leur répartition dans uns structure d’avion indiquée en Figure 23. Elles se divisent dans l’ensemble en deux catégories :
Structures composites simples construites par simple empilement de fibres imprégnées de résine époxy ; on distingue :
Les composites en fibres de carbone renforcés polymère (CFRP)
Les composites en fibres de verre renforcés polymère (GFRP)
Les composites en fibres de quartz renforcés polymère (QFRP)
Les composites en fibres de verre renforcés aluminium (GLARE)
Structures composites sandwich construites par empilement d’un coeur autour d’une peau extérieure et intérieure. Dans leurs formes les plus communes, elles sont respectivement constituées d’un coeur en fibre de verre en forme de nid d’abeille avec deux peaux en composite CFRP.
Technologies de Contrôle Non Destructif
Que ce soit Boeing, Embraer, Bombardier ou Airbus, les constructeurs aéronautiques livrent à leurs acheteurs des procédures d’inspections non destructives appelées NTM (Non destructive Testing Manuel) propres à chaque avion. Ainsi, pour chaque partie de la structure, le constructeur spécifie un type de test et une démarche à suivre.
Parmi ces méthodes, nous pouvons citer :
Inspection par courants de Foucault : historiquement utilisée pour les structures métalliques et les composites en fibres de verre renforcés aluminium (GLARE)
Tests du marteau, appelés dans le domaine du CND le « tap test » : bien que rudimentaire, ce test est extrêmement utilisé (Cf. Figure 26).
Les technologies de radiographie à rayons X sont opérées dans le cas de structures de faibles épaisseurs (Cf. Figure 27).
Le test ELCH, où par un système de ventouse on mesure l’élasticité du matériau sondé (Cf. Figure 28).
L’inspection ultrason (Cf. Figure 29) par onde de volume capable de pénétrer l’épaisseur de la structure. Ainsi par simple échographie l’operateur de maintenance remonte à la présence de défauts. Dans ce cas précis, plusieurs technologies sous-jacentes existent :
o Ultrason par couplage Air/Eau/polymère : les transducteurs d’inspection sont couplés à la structure par un système de cale mécanique qui permet le respect d’un angle précis entre l’onde incidente et la surface de la structure sondée.
o Ultrason multi éléments : permet, par un système de décalage de phases entre les transducteurs, de focaliser l’émission et d’effectuer un scan angulaire ainsi qu’un C-SCAN).
La thermographie, par émission infra rouge : on chauffe localement la structure et on
mesure son spectre de rayonnement (Cf. Figure 30 et Figure 31).
Shearographie ou mesure de la résistance de cisaillement : grâce à un système mécanique à 3 points, on mesure la résistance de la structure à une contrainte de cisaillement (Cf. Figure 32).
Des solutions NDI aux systèmes SHM
Les technologies NDI précédemment citées font partie de procédures de sécurité et de maintenance qui reviennent extrêmement chères aux compagnies aériennes, sans pour autant éliminer les risques de défaillances comme le montrent les 1502 crashs aériens enregistrés aux USA entre 1990 et 2007. Dans 26% des cas, soit 386 cas, les crashs ont été fatals, avec plus de 1104 morts [45]. La majeure partie de ces crashs était due à des défaillances au niveau de la structure suite à l’accumulation de plusieurs défauts. Ces derniers, malgré les différentes inspections non destructives, finirent par atteindre un niveau critique. Ainsi en 2005, un Airbus A310 du vol TS961 perdit son stabilisateur vertical (dérive de l’empennage) en plein ciel, 5 jours après avoir subi une inspection obligatoire [46]. L’inefficacité relative des technologies NDI est essentiellement due aux paramètres suivants :
Un haut degré d’intervention humaine ;
Un temps d’inspection extrêmement long ;
La nécessite d’avoir accès à certaines zones spécifiques et de procéder à des démontages ;
L’inspection est très localisée et les résultats sont sujets à l’interprétation d’un opérateur.
Dans ce contexte, la SHM propose l’utilisation de solutions de contrôle non destructif par l’intermédiaire de capteurs distribués, directement enfouis dans la structure pour automatiser les anciennes technologies d’inspections et les rendre moins dépendantes de paramètres non maitrisables. Ceci implique l’émergence de structures intelligentes (smart structures) capables de s’auto diagnostiquer.
Les bénéfices d’une telle mutation sont doubles: certains sont immédiats et d’autres plus ‘amont’ et doivent être intégrés à une démarche de conception ; le Tableau 2 en résume les points essentiels.
Principe de la détection de défauts par ondes de Lamb
De par la propriété de conservation d’énergie des ondes de Lamb, il nous est possible de sonder des structures complexes sur une relative grande superficie. L’atténuation énergétique dépend essentiellement de la nature du matériau et de ses constantes d’absorptions. Basiquement, en s‘inspirant du monde des radars et de la navigation aérienne, il est théoriquement possible de localiser un défaut mécanique ou une irrégularité par deux méthodes dont les principes sont schématisées en Figure 46:
L’analyse de type pulse écho : technique analogue au sonar et à la télémétrie radar. Elle s’appuie sur l’identification des divers échos pour détecter une irrégularité dans la structure sondée.
L’analyse de type pitch catch [63]: technique qui s’appuie sur les distorsions harmoniques qu’introduit le défaut sur le signal attendu lors du passage de l’onde de Lamb. Dans ce cas, le diagnostic s’appuie sur la comparaison avec une signature témoin.
Génération des ondes de Lamb
Principe de transduction
La génération d’ondes acoustiques, et donc d’ondes guidées, s’appuie sur plusieurs techniques exploitant pour l’essentiel deux principaux phénomènes physiques :
La magnéto transduction [68]
La piézoélectricité [69]
Figure 47. Les sondes s’appuyant sur ce principe exploitent un courant électrique tournant couplé à un fort champ magnétique pour générer des forces de Lorentz à la surface du matériau. En faisant varier le courant, il nous est ainsi possible de créer la contrainte nécessaire pour générer des ondes acoustiques guidées.
L’inconvénient des transducteurs sans contacts exploitant les forces de Lorentz est double :
D’un côté, l’absence de porteurs chargés rend les techniques se basant sur les courants de Foucault inutilisables sur des structures diélectriques tels que les matériaux composites
De l’autre, les fréquences d’excitation sont basses. En effet, pour atténuer l’effet de peau (accumulation des porteurs en surface) et générer une contrainte en profondeur, ces sondes ont des points de fonctionnement qui peuvent descendre en dessous du kHz, ce qui est en contradiction avec la condition de détection de petits défauts.
Dans le cas de la piézoélectricité, il est possible de générer une déformation mécanique par un effecteur piézoélectrique lorsqu’il est soumis à un champ électrique externe. De façon réversible, lorsqu’ils sont soumis à une force mécanique, ces effecteurs génèrent un déplacement de porteurs qui se traduit par la création d’un champ électrique proportionnel à la contrainte appliquée. Se basant sur ce principe, il est possible de développer 3 types d’effecteurs :
Effecteur à couplage par air : La contrainte ou le champ de compression créé par l’effecteur piézoélectrique est transmis par l’air à la surface de la structure. Une fois à l’interface avec la structure, la contrainte se traduit par la génération d’une onde de Lamb [70].
Effecteur par couplage liquide ou solide : Le principe est fondamentalement le même que pour le cas précédent sauf que les rendements sont meilleurs. Ceci dit, la technique de mise en oeuvre est bien plus complexe [50].
Effecteur à contact direct : Dans cette configuration, l’effecteur est directement couplé à la structure. La déformation et les contraintes générées par ce dernier sont donc directement transmises au matériau avec une perte d’énergie minime. Comme nous allons le constater par la suite, cette perte est seulement due à la nature du collage. De par ce point il est évident que cette configuration, simple à mettre en oeuvre, est la plus optimale [71].
Effecteur piézoélectrique
Pour répondre à la problématique de positionnement sur la structure nous avons choisi la configuration la plus appropriée à savoir : transduction piézoélectrique à contact direct. Le dimensionnement de l’effecteur rend donc la génération de déformations et ainsi d’ondes acoustiques possible, à condition de modéliser le binôme du problème constitué par le phénomène à observer et le choix du matériau. Pour fixer ce dernier, il est nécessaire d’en établir les équations de piézoélectricité reliant les potentiels électriques aux déformations/contraintes. Celles-ci peuvent être résumées par l’équation suivante .
Dimensionnement de l’effecteur
Pour minimiser l’impact de la déformation normale subie par le piezo tout en assurant la génération d’une contrainte uniforme sur la structure, nous avons choisi une géométrie en forme de disque (Cf. Figure 49). De par le choix d’un facteur de forme, l’épaisseur est minime par rapport au diamètre, ce qui aura pour effet de privilégier la déformation radiale par rapport à la déformation normale.
Sur cette base, nous avons établi le cahier des charges des piezo prévus dans nos expérimentations et avons sous-traité leur fabrication à une entreprise spécialisée. Les six dispositifs retenus sont listés dans le Tableau 6 ci-dessous : ils ont tous des formes circulaires mais des épaisseurs et rayons différents. Ces deux paramètres fixent, en y associant les constantes piézoélectriques k31, d31 et la permittivité relative des différents matériaux, les modes propres d’opérations de nos effecteurs [72] [73]. Pour une simplicité de calcul, les fournisseurs de matériaux piézoélectriques englobent toutes les constantes précédemment citées en deux données Np et NT [Hz.m], représentant respectivement les constantes fréquentielles radiales et normales. Les calculs détaillés sont joints en annexe.
Ainsi pour une forme en disque d’épaisseur E et de rayon r,
Mode d’oscillation radial fixé par la relation :
Mode d’oscillation en épaisseur fixé par la relation :
Les valeurs des fréquences associées aux 2 modes ont été calculées en fonction des dimensions des disques ; leurs caractéristiques sont reportées dans le Tableau 6.
Méthodes de détections de défauts par ondes de Lamb
L’exploitation des ondes de Lamb se propageant dans des structures aéronautiques doit permettre la détection d’anomalies grâce à l’utilisation de deux approches complémentaires. La première inspirée du monde des radars permet une détection de défauts grâces aux échos que ces derniers émettent ; cette méthode s’appelle ‘pulse écho’ [77]. La deuxième approche, dite du ‘pitch-catch’ [78] , s’intéresse aux distorsions qu’introduit l’anomalie du signal transmis ; cette méthode s’applique aux défauts ayant une trop faible signature radar ce qui rend le pulse écho inefficace.
Applications aux cracks
Pour prouver la faisabilité de détection, nous nous proposons de faire le test sur une structure constituée d’une plaque simple d’aluminium AL2024 Aéronautique (Cf. Figure 58). Un défaut, ou crack, de 5 mm est introduit artificiellement à 20 cm de l’effecteur et à 5cm du bord de plaque. Deux échos doivent donc être perçus : un premier retour de faible énergie réfléchi par le crack et un deuxième de grande amplitude émis par le bord.
L’avantage de cette méthode réside dans sa simplicité de mise en oeuvre. Il suffit en effet d’un seul effecteur pour détecter un défaut. Il est cependant impossible de distinguer plusieurs défauts avec cette technique.
Pour démontrer cela, nous introduisons un nouveau défaut sur la plaque précédente à 2.5cm de l’effecteur. Nous remarquons alors une augmentation d’amplitude du premier écho reçu tandis que l’écho réfléchi par le bord perd de son énergie.
Application des méthodes de pitch catch et de pulse écho aux structures aéronautiques
Détection de défauts sur structures métalliques
En utilisant comme dispositif-test pour notre approche un matériau tel que l’aluminium aéronautique de type AL2024, nous tenterons de valider l’approche développée dans notre travail pour tenter de détecter les défauts les plus communs rencontrés sur des structures métalliques. Nous viserons en particulier les défauts de corrosions dus à l’environnement de vol des avions, ainsi que les cracks dus à un affaiblissement des structures ou à une mauvaise conception ou encore un mauvais assemblage. Pour cela nous utiliserons les méthodes de pitch catch et de pulse écho basées sur les ondes de Lamb.
Triangulation et localisation de cracks
Principe
Dans le cas de l’AL2024, nous utilisons un réseau élémentaire de 3 noeuds pour détecter un défaut en exploitant un algorithme combinant pitch-catch et pulse écho : un des trois capteurs (PZT A) émet un front d’onde tandis que les deux autres sont en mode passif et « écoutent ». Ceci permet aux capteurs PZT B et PZT C d’enregistrer la signature de la plaque après un temps de vol TOF du signal émis par PZT A.
En nous appuyant sur ce principe, nous proposons une procédure de traitement de données qui, après 4 séries de mesures, permet d’extraire le profil de réflectivité du signal émis par chaque effecteur. La procédure de détermination du temps de propagation dans la structure (TOF) sera la suivante:
PZT A émet un pulse (C et B off) Acquisition d’écho par PZT A
PZT B émet un pulse (A et C off) Acquisition d’écho par PZT B
PZT C émet un pulse (A et B off) Acquisition d’écho par PZT C
Afin de valider et d’illustrer par l’expérience la méthode décrite ci-dessus, considérons un exemple constitué par l’étude comparative de deux éprouvettes identiques en aluminium aéronautique type 2024 :
Eprouvette 1 dite de référence
Eprouvette 2 sur laquelle nous avons réalisé un trou au centre et placé 3 effecteurs selon la configuration géométrique de la Figure 62.
|
Table des matières
Chapitre 1 : Etat de l’art des solutions de contrôle de santé
1. Introduction
a. Contrôle de santé de l’humain
b. Contrôle de santé des structures physiques
2. Pourquoi s’intéresser au contrôle de santé de structures aéronautiques
a. Structures métalliques
b. Structures Composites
c. Technologies de Contrôle Non destructif
4. Des solutions NDI aux systèmes SHM
a. Systèmes SHM disponibles
d. Comparatif des solutions
5. Conclusion
Chapitre 2 : Outils de contrôle de structures aéronautiques par effecteurs piézoélectrique
1. Introduction
2. Ondes guidées élastiques
a. Ondes de Lamb
b. Principe de la détection de défauts par ondes de Lamb
3. Génération des ondes de Lamb
a. Principe de transduction
b. Effecteur piézoélectrique
c. Dimensionnement de l’effecteur
d. Validations théoriques et expérimentales
e. Interfaçage effecteur/structure
f. Banc de test
4. Conclusion
Chapitre 3 : Stratégies de diagnostic de défauts sur structures aéronautiques par ondes de Lamb
1. Introduction
2. Méthodes de détections de défauts par ondes de Lamb
a. Méthode du pulse-écho
b. Méthode du pitch-catch
3. Application des méthodes de pitch catch et de pulse écho aux structures aéronautiques
a. Détection de défauts sur structures métalliques
b. Détection de défauts sur structures métalliques
4. Conclusion
Chapitre 4: Suivi de santé de structures aéronautiques par Impédance électromécanique (IEM)
1. Introduction
2. De l’analyse modale classique au diagnostic par impédance
a. Principe de la technique IEM
b. Avantage de la méthode
c. Réalisation pratique de la méthode IEM
3. Nouvelle approche de l’IEM
a. Principe de la méthode
b. Validation expérimentale
4. Applications de la méthode
a. Détection de délaminages au sein de structures composites
b. Détection de décollement au sein de structures composites en nid d’abeille
5. Conclusion
Chapitre 5: Intégration système des techniques de diagnostic par ondes guidées et impédance électromécanique
1. Introduction
2. Problématique de l’intégration
3. Intégration des technologies basées sur les ondes guidées
a. Approche
b. Intégration matérielle
c. Intégration logicielle
d. Tests sur structures
4. Intégration des technologies basées sur l’IEM
a. Approche
b. Génération des stimuli
c. Prototype d’intégration IEM
d. Validation expérimentale
5. Conclusion
Conclusion Générale
Publications
Bibliographie
Télécharger le rapport complet