Origine et propagation de la Flavescence dorée
La cicadelle Scaphoideus titanus, vecteur du phytoplasme responsable de la Flavescence dorée (FD) [1–4], serait d’origine nord-américaine. Elle aurait été introduite en Europe avant 1930, lors de l’importation depuis les Etats-Unis de bois de vigne destinée à lutter contre la crise phylloxérique [5]. Malgré une origine américaine de la cicadelle, la Flavescence dorée proviendrait d’Europe [6]. L’hypothèse communément admise de son apparition est qu’un vecteur aurait transféré de manière occasionnelle le phytoplasme de type FD des plantes sauvages à la vigne sans provoquer d’épidémies. Lorsque la cicadelle S. titanus a été introduite en Europe, elle aurait entretenu le cycle du phytoplasme sur la vigne en le propageant de cep en cep, générant les premières épidémies [7]. Cette théorie a été renforcée par des études montrant que les cicadelles Dictyophara europaea et Oncopsis alni sont capables de transmettre un phytoplasme de clématites blanches ou de l’aulne à la vigne [8, 9].
La Flavescence dorée est apparue pour la première fois en Europe dans le Sud-Ouest de la France dans les années 1949-1950, plus précisément dans les vignobles d’Armagnac [10, 11]. La maladie s’est ensuite étendue de manière épidémique dans les Landes et le Gers, avant d’atteindre les Hautes-Pyrénées et le Lot-et-Garonne [12, 13]. La propagation de la maladie à travers l’Europe ne serait pas expliquée par la capacité de dispersion de l’insecte (capacité de dispersion faible de 25 à 40m) [14]. Elle serait davantage la conséquence du commerce de bois de porte-greffe ou des greffons contaminés destinés à la plantation [15, 16] et éventuellement par une expansion passive de l’insecte par le vent [17]. Actuellement, la FD est présente dans différents pays du Sud de l’Europe : Espagne, France, Italie, Portugal, Serbie, Slovénie et Suisse [18]. Pour le cas de la France, elle concerne 57 % du vignoble français [19]. La Champagne et l’Alsace restent aujourd’hui les deux seules régions productrices à ne présenter aucun cas de Flavescence dorée [20].
La Flavescence dorée : maladie « vectée » multi-symptomatique
Le système plante-pathogène-insecte vecteur : définition et fonctionnement
La Flavescence dorée est une maladie dite « vectée », c’est-à-dire transmise d’hôte à hôte par un vecteur. À la différence de maladies dites « classiques », la compréhension de la propagation de la FD est très complexe de part des interactions possibles au sein du système plante-pathogène-insecte vecteur [18].
Les pathogènes responsables de la Flavescence dorée sont des phytoplasmes, bactéries sans paroi appartenant à la classe des Mollicutes [21], classés dans le groupe ribosomique des Elm yellows (EY ou 16SR-V) [22]. Il existe trois groupes de souches associés à cette maladie (FD1, FD2 et FD3), réunis sous le nom de Candidatus phytoplasma vitis [23]. Cependant, seules les souches des groupes FD1 et FD2 ont été localisées en France, FD2 étant responsable de 85% des cas observés en France [6, 24, 25]. En ce qui concerne l’insecte vecteur, la cicadelle Scaphoideus titanus est un phytophage piqueur-suceur de la famille des Hémiptères qui se nourrit du phloème et dans une moindre mesure du xylème et du parenchyme composants les pieds de vigne [26]. L’insecte effectue une génération par an. La ponte a lieu fin août ou début septembre suite à un accouplement en août. Les œufs sont pondus sous l’écorce des souches de vigne et restent en diapause jusqu’en avril. Suite à l’éclosion des œufs, l’insecte passe par cinq stades larvaires, chacun d’environ 10 jours, avant d’être adulte en juillet avec une durée de vie d’environ un mois [18, 27].
La cicadelle acquiert le phytoplasme, responsable de la Flavescence dorée, lors de la prise alimentaire sur un pied de vigne infecté [28, 29]. Le phytoplasme est aspiré dans le phloème, se multiplie et colonise l’ensemble du corps du vecteur [29, 30]. Le vecteur infectieux pourra transmettre le phytoplasme dans un pied de vigne sain lors de chaque prise alimentaire. Au sein de la plante, une partie des phytoplasmes gagne le système racinaire et l’autre reste dans les rameaux durant l’hiver [31]. À partir du printemps suivant, les phytoplasmes colonisent les feuilles en croissance pouvant occuper complètement les tubes criblés. Cette modification peut entrainer une diminution de l’activité photosynthétique dont la synthèse de chlorophylles et de caroténoïdes [32, 33]. Les symptômes apparaissent généralement après la floraison, un à trois ans après la contamination par le phytoplasme. Ils ne sont pas forcément visibles tous les ans [18, 28]. Enfin, ils peuvent se manifester sur un seul rameau ou sur l’ensemble du pied de vigne.
Les symptômes de la Flavescence dorée
Typologie des symptômes
La Flavescence dorée affecte la vigne à différents niveaux de la plante : feuille, bois et baie. Pour la reconnaissance de la maladie, il faut nécessairement la présence simultanée sur le même rameau des quatre symptômes suivants :
1) Le non-aoûtement partiel ou total des rameaux du pied de vigne. Ce symptôme se traduit par des rameaux courbés vers le sol, donnant un port pleureur aux parties atteintes par la Flavescence dorée. Cet aspect des rameaux s’explique par le faible développement du bois, souvent accompagné d’une absence de fibres libériennes [34, 35].
2) Flétrissement des baies. Les inflorescences se dessèchent et tombent en poussière ou les baies se flétrissent partiellement rendant les raisins inutilisables [34, 35].
3) Le changement de coloration des feuilles. Ce symptôme varie en fonction du type de cépage, rougissement pour les cépages noirs, jaunissement pour les cépages blancs [34, 35]. La modification de la coloration de la feuille peut être totale ou partielle selon que tout le limbe et la nervure des feuilles ou une seule partie de la feuille sont concernés.
4) L’enroulement des feuilles. Les feuilles deviennent rigides, cassantes et se replient vers la face inférieure. Ce symptôme s’exprime de manière plus ou moins prononcée selon les cépages (noirs ou blancs). Il est par exemple plus marqué pour les cépages Chardonnay, Grenache et Alicante Bouschet [34, 36].
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Table des matières
Introduction
Liste de publications
Chapitre I : Contexte, démarche et objectif
1 Origine et propagation de la Flavescence dorée
2 La Flavescence dorée : maladie « vectée » multi-symptomatique
2.1 Le système plante-pathogène-insecte vecteur : définition et fonctionnement
2.2 Les symptômes de la Flavescence dorée
2.2.1 Typologie des symptômes
2.2.2 La coloration des feuilles
2.2.3 Facteurs de coloration des feuilles pouvant se confondre avec la Flavescence dorée
3 Les méthodes de lutte actuelle contre la Flavescence dorée
3.1 Description des stratégies de lutte
3.2 État de maîtrise de la maladie
4 Les voies de recherche pour la maîtrise de la Flavescence dorée
4.1 Bilan des apports des projets par voie de recherche
5 Potentiel des données de télédétection pour la détection des maladies des plantes
5.1 Synthèse des caractéristiques spectrales de feuilles saines et présentant des symptômes de coloration anormale
5.2 État des principales méthodes de détection des maladies des plantes utilisant des données de télédétection
5.3 État de l’art des variables utilisées pour la détection des colorations anormales des plantes
5.3.1 Les bandes spectrales
5.3.2 Les indices de végétation
5.3.3 Les paramètres biophysiques
5.3.4 Utilisation des variables (seules ou combinées) sur la qualité de détection des zones malades
6 Démarche et objectifs de la thèse
6.1 Démarche
6.2 Choix méthodologiques
6.2.1 Choix de la donnée source de télédétection
6.2.2 Choix de la méthode de détection des zones présentant des colorations anormales
6.3 Objectifs de la thèse et organisation du manuscrit
6.3.1 Objectifs de la thèse
6.3.2 Organisation du manuscrit
Chapitre II : Sites d’étude et données
1 Sites d’étude
1.1 Site 1 : AOC Gaillac
1.1.1 Caractéristiques de la viticulture
1.1.2 État phytosanitaire du vignoble
1.2 Site 2 : AOC Minervois-La-Livinière
1.2.1 Caractéristiques de la viticulture
1.2.2 État phytosanitaire du vignoble
1.3 Choix des parcelles sélectionnées
1.3.1 Caractéristiques des parcelles étudiées
2 Mesures et observations de terrain
2.1 Données descriptives par parcelle
2.2 Données descriptives par zone asymptomatique ou symptomatique
2.2.1 Protocole de localisation des zones de feuilles symptomatiques et asymptomatiques
2.2.2 Bilan des zones de feuilles symptomatiques et asymptomatiques localisées par parcelle
2.3 Données sur la teneur en pigments des feuilles
3 Données de télédétection
Chapitre III : Prétraitement des données et analyses statistiques
1 Prétraitement des données
1.1 Prétraitement des images multispectrales
1.1.1 Calcul des variables
1.1.2 Création du masque pour éliminer la zone d’inter-rangs
1.2 Prétraitement des données de terrain
1.3 Extraction des pixels de référence pour les zones asymptomatiques et symptomatiques de FD ou maladies du bois
2 Analyses statistiques
2.1 Approches univariée et multivariée
2.2 Niveaux d’analyse
2.3 Échantillonnage des zones symptomatiques et asymptomatiques
2.4 Sélection des variables discriminantes de la FD et/ou MB (étape 1)
2.4.1 Méthode pour l’approche univariée
2.4.2 Méthode pour l’approche multivariée
2.5 Cartographie des zones de feuilles symptomatiques (étape 2)
2.5.1 Par technique binaire
2.5.2 Par technique probabiliste
2.6 Validation (étape 3)
3 Échelles d’analyse
4 Bilan des variables étudiées et analyses statistiques appliquées en fonction de l’année d’étude
Conclusion