Cas particulier des pays en voie de développement
Dans ces pays, la production reste faible, à cela s’ajoute qu’une grande partie des ménages sont trop pauvres pour pouvoir satisfaire les besoins fondamentaux c’est-à-dire la faculté de se nourrir. L’environnement n’arrange en rien cette situation, quelques uns de ses pays sont en proies à des insécurités sociales (entre 30 et 40 pays étaient en proie à des conflits à la fin du XXème siècle selon le FAO, 2000), économiques et climatiques. Le problème de l’agriculture est aussi lié à l’histoire et à la conception du problématique de l’agriculture vis-à-vis des pays en développement (FAO, 2000). Elle a été ainsi négligée jusqu’en 1996 où, lors de la conférence de Rome, les dirigeants du monde se sont rassemblés pour essayer de palier l’insécurité alimentaire en prenant comme objectif de la réduire de moitié en 2015 (FAO, 2006b). Aujourd’hui, 39 pays, tous des pays en développements, sont menacés de crises alimentaires chroniques dont les causes sont liées à des phénomènes locaux que ce soit d’ordre climatique, social, ou politique (FAO, 2005) . Des cas extrêmes comme celle de la corne d’Afrique montrent que les problèmes alimentaires sont loin d’être résolues. Mais la malnutrition touche particulièrement la majorité des pays africains et la situation, au lieu de s’améliorer, tend à s’aggraver. En 1998, par exemple, la consommation alimentaire par habitant, dans les pays africains, a baissé par rapport à la moyenne des trois dernières années de même que par rapport aux ressources alimentaires minimaux nécessaires pour maintenir un état nutritionnel minimal. Cette étude effectuée par Shapouri et Rosen (1999) a montré que l’écart de consommation était estimé à 6, 7 millions de tonnes tandis que l’écart de nutrition se situait à 13, 9 millions. Ces pays ne possèdent pas non plus les ressources nécessaires pour financer leurs importations de denrées alimentaires ainsi que les investissements nécessaires dans le secteur agricole car une partie de leur budget de fonctionnement proviennent des aides extérieurs. La Banque mondiale a, par exemple, consenti un prêt de 2,8 milliards de USD pendant la période 2005 pour l’agriculture dans les pays en développement (Banque mondiale, 2005).
Destruction de terres arables et de l’environnement
La planète est menacée par des problèmes environnementaux majeurs, à cela s’ajoute la destruction due à une exploitation des terres agricoles. En effet, plus les terres sont exploitées, plus le coût marginal augmente et les producteurs ont tendance à utiliser d’autres facteurs tels que l’engrais. Cette tendance se répercute sur les prix. Le prix de vente du produit sur le marché est égal à son coût de production s’il avait été produit sur les terres les moins fertiles c’est-à-dire à son coût marginal de production. Ici, l’exploitation intensive des terres les rend moins fertile. Pour accroître donc leurs productivités les exploitants doivent recourir à des moyens de productions plus sophistiqués et plus chères. Selon Ricardo D., (1821), lorsqu’on met en culture une terre de mauvaise qualité, la valeur d’échange des produits bruts augmente car leur production exige plus de travail. L’utilisation de l’engrais est d’ailleurs considérée comme l’une des causes de l’augmentation des prix. Le prix en USD de certains engrais (par ex. superphosphate triple et muriate de potasse) a, par exemple augmenté de plus de 160% au cours des deux premiers mois de 2008, par rapport à la même période de 2007 (FAO, 2008a). À cela s’ajoute que pour les Etats-Unis qui sont responsables de 40 % des exportations de céréales du monde, le coût de l’engrais représente entre 25% et 30 % du coût de la production céréalière (FMI, 2008a). Cette productivité des terres disponibles est aussi compromise par la pollution, la salinisation et la dégradation du sols, causé par une mauvaise gestion de l’intensification et réduisant les rendements potentiels (Banque mondiale, 2008). 5 à 10 millions d’hectares de terres agricoles sont ainsi perdus chaque année en raison d’une dégradation sévère. Elle est compromise par la raréfaction de l’eau. Sans irrigation, il n’y aura pas d’augmentation de rendements et la production nécessaire aux besoins de la population mondiale croissante et stabilisé la production alimentaire n’aurait pas été possible. A l’échelle de la planète, les pertes de surfaces arables sont estimées à une variation comprise entre 70 000 et 140 000 km210. Au cours de l’histoire, plus de terres a été mis au service de l’agriculture ceci à cause de l’augmentation de la population et de l’expansion du marché (Banque mondiale, 2008). Mais dans les parties les plus peuplées de la planète, l’accès des terres est désormais fermées. En Asie, par exemple, la terre est devenue très rare car l’urbanisation y est très rapide. Les politiques appliqués (dont la plus connue en ce moment est la révolution verte) aggravent aussi la dégradation des terres du fait de leur utilisation intensive qui contribue à sa dégradation rapide. Enfin, les terres cultivables sont menacées par la dégradation du climat. L’environnement se réchauffe du par l’activité des Hommes. Ce changement climatique a des répercussions sur l’économie. Elle engendre des coûts économiques en particulier sur l’agriculture (FMI, 2008a). La raréfaction des terres arables et leur dégradation conduis donc à une hausse des coûts de production ou à une baisse même de la production entraînant une baisse de l’offre et la hausse des prix des produits alimentaires. La constatation de ces faits fait croire que la dégradation des terres arables a fait augmenter les coûts de production et donc le prix des denrées alimentaires. Pourtant, ces hypothèses sont contraires à la réalité. En effet, depuis quelques décennies, la production ne cesse de battre des records (cf. chapitre I), de plus, l’intégration de nouvelles technologies surtout dans les pays développées mais aussi dans les pays émergents accroît la productivité tout en diminuant les coûts de production. Et enfin, si la productivité des terres diminue, elle ne diminue pas du jour au lendemain, or l’augmentation des prix des produits agricoles a été très rapide. La dégradation des terres arables ne peut expliquer qu’en partie la montée des prix ces produits alimentaires du fait que l’utilisation des entrant énergétiques se généralisent de plus en plus alors que leur prix ne cesse d’augmenter.
Les agrocarburants
L’utilisation des biocarburants tend à se généraliser dans les pays dépendant des produits pétroliers. Cette tendance est due, depuis peu à l’augmentation du prix du baril de pétrole sur le marché international, mais aussi sur la prise de conscience de l’effet dévastateur de ces produits pour l’environnement. En 2006, la production de biocarburants au niveau mondial était de 40 milliards de litres (Banque mondial, 2008). Toutefois, Cette situation s’accorde avec la montée générale des prix des produits agricoles. Les soupçons ont alors été émises sur l’implication de la production de biocarburant dans l’envolée des prix des produits alimentaires.
• L’éloge des biocarburants : Face à la montée des prix des produits alimentaires, chaque pays essaie de trouver une alternative pour échapper à l’emprise des pays producteurs de pétrole. Ils se tournent alors vers les biocarburants qui constituent une source potentielle d’énergie renouvelable. Une analyse sur la production et la consommation, c’est-à-dire depuis l’utilisation des matières premières aux dépenses liées à la consommation de biocarburants montre que l’utilisation d’un mélange de 85 % d’alcool et 15 % d’essence diminue de plus de 40 % la consommation globale d’énergie fossile (European Commission, 1999)18. Cette analyse encourage ainsi les dirigeants soucieux de dépenser moins en termes de carburants à faciliter l’activité des producteurs de cette nouvelle source d’énergie. Mais d’autres raisons plus écologiques poussent aussi les pays à encourager la production de biocarburants. La protection de l’environnement en diminuant l’émission de gaz à effet de serre est fréquemment citée pour justifier l’appui politique aux biocarburants.
• La part de produits alimentaires détournée pour la fabrication de biocarburant : Les biocarburants constituent une source de revenu relativement nouveau pour les producteurs agricoles, surtout pour les produits de base. Ils suscitent alors de nouveaux débouchés pour eux. Les produits alimentaires les plus utilisés dans la fabrication de biocarburant sont le maïs et la canne à sucre. Cependant, d’autres produits comme le manioc sont de plus en plus exploité à cette fin. Avec ces incitations et l’augmentation du pétrole, les producteurs agricoles trouvent leur compte dans les biocarburants. Ainsi, la part de l’agriculture de base destinée à la fabrication d’agrocarburant augmente de plus en plus. Pour les Etats-Unis, par exemple, environ un cinquième des récoltes de maïs ont été consacrées à la production de biocarburants pendant la période 2006-2007 (Banque mondiale, 2008). De plus les pays dépendants du pétrole projettent d’augmenter leur consommation de biocarburant. Ainsi, par exemple, l’UE projettent d’augmenter la part des biocarburants dans la consommation d’énergie totale à 10% en 2015 (FMI, 2008a). Le problème des agrocarburants est double, à part le détournement de l’offre de produits alimentaires comme le maïs, ou les oléagineux à leur profit, les terres utilisées pour la production agricole de base sont, eux aussi, menacées d’être détournées pour la production de plantes servant à la production de biocarburants. Ainsi, plusieurs sociétés de production de biocarburants multinationaux sont en train de s’accaparer les terres cultivables dans les pays en développement pour la production de biocarburant. 21st Century Energy (USA) a, par exemple investit 130 millions de dollars (US) en Côte d’Ivoire pour la production d’éthanol à base de canne à sucre, de maïs et de sorgho doux, de graines de coton et de résidu de noix de cajou, tandis que Sun Biofuels (R.U.) a acquis 18.000 hectares de terres agricoles de première qualité pour produire du jatropha en Tanzanie.
• Les impacts de ses détournements sur le prix des produits alimentaires : Plusieurs rapports affirment que la production de biocarburant a énormément contribuée à l’augmentation des prix des produits agricoles de base alors que d’autres rapports affirment le contraire. Le débat reste donc ouvert. Mais la part des biocarburants dans la montée des prix alimentaires de base est liée au pays exploitant le produit. Pour le Brésil, par exemple, il produit, avec les Etats-Unis, les 90% de la production mondiale d’éthanol alors qu’elle ne contribue pas à la hausse des prix de la canne à sucre. Les Etats-Unis sont, par contre, accusés d’être les principaux responsables de cette hausse générale des prix alimentaires. Ceci est dû au fait que le Brésil produit localement ses matières premières.
Les causes structurelles
Rappelons tout d’abord ce qu’est une structure. Selon Perroux F., Ce sont les diverses proportions et relations relativement stables caractérisant un ensemble économique localisé dans le temps et dans l’espace (Bourdanove C., et Martos C., 1992). La structure fait donc état de tous les éléments qui peuvent perdurer dans le temps et qui sont encrés dans le système économique. D’après cette définition, la destruction des terres arables, les changements climatiques, l’augmentation de la demande des pays émergents, et la distorsion du marché sont classées comme des causes structurelles.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : CONTEXTE ET EVOLUTION DE LA SITUATION ALIMENTAIRE MONDIALE
I.1 LE MARCHE DES PRODUITS ALIMENTAIRES MONDIAL
I.1.1 Situation de l’offre
– La production mondiale
– Les exportations mondiales
I.1.2 Situation de la demande
• Les importations de céréales
• Les importations de produits oléagineux
I.1.3 Situation des stocks
I.2 SITUATION ALIMENTAIRE MONDIALE
I.2.1 Cas particulier des pays en voie de développement
I.2.2 Les aides alimentaires
I.3 LES EVOLUTIONS RECENTES CONCERNANT LES ECHANGES DE PRODUITS ALIMENTAIRES
I.3.1 Evolution des prix
I.3.2 Les principaux produits agricoles touchés par l’augmentation de prix
CHAPITRE II : ANALYSE DES DETERMINANTS DE LA FLAMBEE DES PRIX DES PRODUITS AGRICOLES
II.1 MECANISME DU MARCHE
II.1.1 Confrontation de l’offre et de la demande
II.1.2 Les déséquilibres du marché
II.2 LES CAUSES QUI ONT FAIT FLAMBER LES PRIX
II.2.1 Les causes liées à l’offre
a – Destruction de terres arables et de l’environnement
b – Changements climatiques et les aléas météorologiques
c – Les distorsions du marché causées par les droits de douane et les subventions
• Les accès au marché
• Les subventions à l’exportation des produits agricoles
• Les soutiens internes ou subvention des producteurs locaux
d – Baisse des stocks de produits alimentaires
e – Augmentation des prix du pétrole
• L’évolution récente du prix du pétrole
• L’impact du prix du pétrole sur le prix des denrées alimentaires
II.2.2 Les causes liées à la demande
a – Augmentation de la demande alimentaire
b – Les agrocarburants
• L’éloge des biocarburants
• La part de produits alimentaires détournée pour la fabrication de biocarburant
• Les impacts de ses détournements sur le prix des produits alimentaires
II.2.3 Les autres causes qui sont liées à la mondialisation
a – La Crise financière ou crise des subprimes
b – La dépréciation du dollar face aux autres monnaies
II.2.4 Les causes qui ont amplifiés la flambée des prix
a – Anticipation à la hausse du prix des produits alimentaires et spéculation
• Les anticipations
• Les spéculations financières
b – Les embargos alimentaires
CHAPITRE III : LES EFFETS DE LA MONTEE DES PRIX DES PRODUITS ALIMENTAIRES
III.1 EFFET AU NIVEAU MONDIAL
III.1.1 Impact sur la croissance mondiale
III.1.2 Impact sur les échanges
III.2 EFFET AU NIVEAU DES PAYS
III.2.1 Dans les pays développés
III.2.2 Dans les pays en développement
III.2.3 Au niveau des consommateurs
III.3 LES ACTIONS ENTREPRISES PAR LES DIFFERENTS ACTEURS ECONOMIQUES FACE A LA CRISE
III.3.1 Au niveau international
III.3.2 Au niveau des pays
III.4 LES GAGNANTS ET LES PERDANT DE LA CRISE ALIMENTAIRE
III.4.1 Les gagnants de la crise alimentaire
a – Les producteurs
b – Les spéculateurs
III.4.2 Les perdants de la crise alimentaire
CHAPITRE IV : LA NATURE DE LA CRISE ALIMENTAIRE
IV.1 ANALYSE SELON LE TYPE DE L’ORIGINE DE LA CRISE
IV.1.1 Les causes structurelles
IV.1.2 Les causes conjoncturelles
IV.1.3 Les causes qui ont tendance à devenir structurelles
IV.1.4 Les origines physiques
IV.1.5 Les origines financières
IV.2 LES IMPACTS DE CETTE HAUSSE SUR LE MARCHE DES PRODUITS ALIMENTAIRES
IV.2.1 Les effets à long terme de cette hausse
IV.3 LES PROBLEMES DES PAYS EN DEVELOPPEMENT FACE A LA CRISE ALIMENTAIRE
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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