Organisation moléculaire du VIH-1
Le VIH (Virus de l’Immunodéficience Humaine) a été identifié en 1983 (1, 2). Son organisation moléculaire est assez bien connue, mais les fonctions de différents gènes de même que leurs interactions avec les composants cellulaires, restent encore à élucider.
Structure du VIH
La particule virale majeure de forme sphérique, possède un diamètre d’environ 100 nm. . La membrane externe est d’origine cellulaire et de nature lipidique et glycoproteique. Sa surface externe est recouverte entre autre de glycoprotéines tandis que sa face interne est tapissée de protéines matricielles. Du coté externe, on distingue la sous unité gp120 SU liée de manière non covalente à la protéine transmembranaire, la gp41 TM et aux protéines cellulaires telles les antigènes d’histocompatibilité, l’actine … (7). Cependant le rôle effectif de ces constituants cellulaires reste encore à élucider. Du côté interne, se trouve la matrice, constituée d’environ 2000 copies de la protéine p17 codée par le gène gag .
Dans la matrice virale, baigne une capside de forme conique composée presque exclusivement de la p24 CA, produit également du gène gag (environ 2000 copies) au stade mature. Immature, elle est de forme icosaédrique (9). La protéine p6 de fonction non encore entièrement précisée est aussi présente. On lui prêterait cependant un rôle dans la facilitation du passage du génome viral dans le noyau de la cellule infectée. On a aussi la protéase PR qui joue un rôle dans la maturation de la particule virale, la Transcriptase Inverse (TI) et l’Intégrase. Bien que de longueur variable d’une souche à l’autre (environ 9,2 kD), le génome viral est constitué de deux molécules d’ARN de structure identique. Cet ARN non épissé serait lié àune petite molécule d’ARNt lys qui jouerait un rôle dans la stabilité de la structure virale. (10). Il est pourvu de séquences non codantes contenant des sites potentiels de liaison avec des constituants cellulaires: les LTR (long Terminal Repeat). Les gènes vif, nef, vpu, rev et tat sont considérés comme des gènes accessoires, leur incorporation dans le génome viral étant discuté pour certains d’entre eux.
Le génome du VIH-1
Le génome du VIH-1 contient donc neuf gènes différents dont les trois principaux sont: gag, pol et env, commun à tous les rétrovirus. Il est encadré par de structures non codantes, les LTR qui possèdent de nombreux sites de liaison aux protéines d’origine cellulaire et ont également pour rôle, l’activation transcriptionnelle et la régulation du cycle de réplication virale.
Leur rôle semble de mieux en mieux connu. En effet, cette région aurait certaines affinités non seulement avec le NF-kB, mais aussi avec la protéine du gène tat dans l’activation de la transcription du génome viral (14). L’action du NF-kB est également l’une des voies importantes utilisées par les bactéries et virus dans la stimulation de la transcription (15). D’autres éléments importants ont aussi été mis en évidence dans les LTRs. C’est le cas de la région SP1 (située entre les bases 377, 388, et 399) et de TATA (acide aminé 453) qui sont responsables après stimulation basale, de la réplication virale (16). La région TATA est le signal de la transcription en ARNm et de la polyadénylation (530 bases). Il se trouve dans la jonction U3/R. On trouve également le signal d’encapsidation ψ spécifique des ARN génomiques viraux et d’après les travaux de Clever et coll (17), contient 4domaines – SL1 à SL4 – chacun formant une structure en boucle, le domaine SL3 apparaissant comme étant le plus conservé.Le rôle de la protéine tat dans l’expression génique et la régulation de la transcription du génome viral sont essentiels. En effet, elle est capable de réguler le taux de transcription des gènescellulaires en interférant avec le mécanisme de signalisation cellulaire induisant de ce faitson dysfonctionnement. Elle augmente le taux de transcription virale en interférant positivement sur les étapes d’initiation et d’élongation. Cettefonction est contrôlée par l’action conjuguée des protéines de régulation virale et cellulaire qui interagissent avec la région TAR (Trans Acting Region) (18) également impliquée dans la régulation de la transcription de l’ADN proviral et de l’ARNm (19). En effet, l’hyperphosphorylation du domaine C terminal de lacarboxyle, (CTD ou Carboxyl C terminal Domain) par l’ARN polymérase. Il a été corrélé à la formation du complexe d’élongation (20). Cette étape de phosphorylation a été proposée comme l’une des étapes les plus importantes de la transcription médiée par la Phosphatase Kinase C au sein d’un complexe dénommé TAK (Tat – Associeted Kinase) (21, 22) et formerait avec la Cycline T une liaison stable (23). Les facteurs de transcription cellulaire tels que le NF-kB et le SP1 sont également connus comme pouvant jouer un rôle direct ou indirect dans l’activation du gène tat .
On a aussi l’élément RRE (Rev Response Element) qui jouerait un rôle dans le transport de l’ARN non épissé. Il est le site de fixation de la protéine virale rev. (23a). Le rôle de cet élément a été revue par Victoria W. Pollard .
Les gènes et les protéines de structure
GAG (Group Antigen), ce gène est le premier cadre de lecture ouvert sur le génome viral et est responsable de la production des protéines internes du virus. Il a une longueur globale d’environ 1500 pb et code pour un précurseur, la Pr55gag qui, sous l’action de la protéase virale, est clivée en 4 protéines : la protéine de la matrice p17 (MA), de la capside p24 (CA), de la Nucléocapside (la p7 NC) et la p6. Ce précurseur est associé à la membrane cellulaire après translation (26). Sa variabilité est estimée à environ 15% et interagit avec d’autres protéines virales et cellulaires.
La protéine de la matrice (p17 MA) est dérivée de la région N-Terminale myristifiée de la Pr55Gag et participe à la stabilité de la structure virale, grâce à sa liaison avec des lipides de la membrane interne. Cependant, une infime partie de cette protéine reste liée à la protéase virale (27) et jouent un rôle dans le transport nucléaire du génome virale. Son rôle est aussi prouvé dans l’étape de bourgeonnement du virion (28). Elle pourrait aussi intervenir dans les mécanismes d’intégration du virion (29) eu égard à sa présence dans ce complexe et y jouerait aussi un rôle dans la stabilité de ce complexe .
La protéine p24 est une protéine de 24kD qui compose la capside du virus. Elle est phosphorylée et se présente sous forme oligomérique. Elle se condense autour du génome viral pour former la nucléocapside de forme conique. La p24 interagit avec la protéine chaperonne cyclophiline A et l’inhibition de cette liaison peut bloquer la réplication virale (31). Elle jouerait également un rôle à travers les résidus 151 à 231 (extrémité C terminale) dans l’assemblage des virions et semble intervenir dans la dymérisation de l’organisation du gène gag (32). Aussi, deux résidus de ce gène paraissent important, le processus de repliement de ces résidus permettant la condensation du cœur de la protéine. Il s’agit des résidus Pro1 et Asp51 (33). La NC (Nucléocapside) ou p7 (7kD) est issue du clivage du gène gag. Elle se lie à l’ARN par un signal d’empaquetage ψ et serait indispensable à l’assemblage de l’ARN dans le virion. Elle a la particularité de posséder une région particulière CCHC (Cys-Cys-His-Cys) qui jouerait un rôle important dans la spécificité de l’incorporation de l’ADNc dans le génome cellulaire. (34). Par sa partie N terminale elle interviendrait également dans l’assemblage du virion. Toutefois, cette étape se ferait en synergie avec la protéine de la capside (35) et pourrait aussi jouer un rôle dans l’hybridation de l’ARNt Lys comme amorce dans l’étape de transcription de l’ARN viral (36). La protéine p6. Elle joue un rôle dans l’incorporation de vpr lors de l’assemblage de particules virales. Elle jouerait aussi un rôle un dans l’étape bourgeonnement et de relargage des particules virales .
Le gène de l’enveloppe
Ce gène code pour deux protéines: la Gp-120SU (sous unité) et la Gp41TM (Transmembranaire). Ces deux glycoprotéines sont issues du clivage d’un précurseur, la gp-160 et modifié par glycosylation dans le réticulum endoplasmique et l’appareil de golgi. Cette protéine sera par la suite clivée par la protéinase virale en deux protéines majeures: la SU et la TM. Par la présence de ces deux protéines, l’enveloppe joue un rôle dans l’interaction et la fusion de la particule virale avec l’enveloppe de la cellule hôte. Ce gène est à ce jour le plus étudié en phylogénie moléculaire compte tenu de sa grande variabilité. Celle-ci serait à l’origine de l’échappement du virus des mécanismes immunologiques de défense de l’organisme. La protéine de surface, la Gp120 SU, une protéine de 120kD est composée de 5 domaines constants (C1 – C5) très bien conservés d’une souche virale à l’autre et de cinq autres domaines hypervariables (V1-V5), particulièrement hétérogènes entourés de ponts disulfure. A leur base, ces domaines variables forment des boucles. Les quatre premiers étant exposés à la surface du gène. Le domaine de liaison avec la glycoprotéine Gp41TM est localisé dans la partie non variable de la Gp120SU. Cette région conservée possède également des sites de liaison avec les récepteurs viraux. La région V3 (boucle V3) bien que n’étant pas impliquée dans la liaison avec la molécule CD4 est cependant apparue importante dans le choix du tropisme viral (lymphocyte ou macrophage). La boucle V3 est également la principale cible d’anticorps neutralisants qui bloquent l’infectiosité du VIH. (38, 39). Des études de neutralisation sur des souches cultivées en lignées cellulaires ont montré que les anticorps anti-V3 possédaient un spectre très étroit. En effet, la plupart ne neutralisant que des souches génétiquement voisines de celles ayant servi à l’immunisation. Certains anti-V3 sont cependant capables de neutraliser un spectre plus large d’isolats. Ils sont dits groupes spécifiques (40). Ces anticorps anti-V3 auraient pour spécificité, de reconnaître des épitopes conservés, ceci en dépit de la grande variabilité de la boucle V3. Cependant, l’efficacité de ces anti corps sur les isolats cliniques est très relative (41). Cette inefficacité relative sur les souches cliniques serait liée à la position de cette boucle sur la souche virale. En effet elle parait exposée à la surface de la Gp120, bien en évidence dans des isolats de laboratoire, alors que dans les isolats cliniques, elle est moins accessible. (42, 43). La boucle V3 détermine également l’efficience avec laquelle, le CD4 soluble peut bloquer l’infectivité de la souche virale .
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Table des matières
INTRODUCTION
I. Classification et origine du HIV
II. Le VIH dans le monde
III. Organisation moléculaire du VIH-1
A. Structure du VIH
B. Le génome du VIH-1
1. Les LTRs
2. Les gènes et les protéines de structure
3. Le gène de l’enveloppe
4. Rôle fondamental des enzymes virales : transcriptase Inverse, la Protéase et l’Intégrasse
i. Structure de la protéase
b. Rôle de la transcriptase inverse
5. Rôle de la Protéase virale
C. Cycle réplicatif du virus
1. Phase précoce de l’infection
2. Phase tardive
3. Encapsidation de l’ARN
4. Assemblage et bourgeonnement des particules virales
D. Les gènes et protéine de régulation
1. Le gène vif (Virus Infectivity factor)
2. Le gène Tat
3. Le gène rev
4. Le gène nef (Negative factor)
5. Le gène vpr
6. Le gène Vpu
E. Pathogenèse de l’infection par le VIH
1. Facteurs biologiques
F. Histoire naturelle de l’infection VIH chez l’homme
1. Définition et classification du SIDA
2. Les différentes phases de l’infection
a. La primo-infection
b. La phase chronique
c. La phase terminale
3. Les différents profils d’évolution
a. Les progresseurs rapides
b. Les asymptomatiques à long terme ou progresseurs lents
G. Tropisme des VIH
IV. La diversité génétique du phosphorylation
A. Origine de la diversité génétique du phosphorylation
1. Causes de la variabilité
2. Faible fidélité de la transcriptase inverse et fort taux de réplication
3. La recombinaison du VIH
4. Les pressions de sélection
B. Epidémiologie moléculaire : le VIH dans le monde
1. Types et groupes du HIV
a. Diversité génétique des souches de HIV
i. Le groupe M
ii. Les groupes O et N
iii. Les recombinants et CRFs
C. Impact de la variabilité génétique
a. Conséquences au sein d’un individu
b. Influence de la variabilité sur les tests diagnostics
c. Impact de la variabilité sur le plan Biologique
d. Impact sur la prise en charge thérapeutique et les thérapies
D. Méthodologies de la détermination des sous types VIH-1
1. Détermination du génotype par séquençage (méthode de référence)
a. Séquençage et phylogénie moléculaire
b. Génotypage par HMA (« Heteroduplex Mobility Assay »)
c. Génotypage par MHA (« Multi-region Hybridation Assay »)
d. Sérotypage
V. TRAITEMENTS ET RESISTANCES AUX ANTIRETROVIRAUX
A. Les cibles des antirétroviraux actuels
1. Les inhibiteurs de la RT
a. Les inhibiteurs nucléosidiques de la RT (INRT)
b. Les inhibiteurs non-nucléosidiques de la RT (INNRT)
c. Les inhibiteurs de la protéase
i. Inhibiteur nucléotidique de la RT
ii. Inhibiteurs de fusion (238)
2. Nouvelles molécules antirétrovirales (239)
a. Inhibiteurs de l’intégrase
b. Les Inhibiteurs Non-nucleosidique de la Transcriptase inverse. (INNTI)
c. Les Inhibiteurs nucléosidiques de Transcriptase Inverse
d. Inhibiteurs de liaison des CD4
e. Antagonistes des Co-recepteurs
f. Inhibiteurs de protéase
g. Alternatives aux cibles moléculaires classiques
i. Inhibiteurs de la transcription
ii. Oligonucléotides anti-sens
iii. Immunothérapie
VI. Les résistances aux antirétroviraux
A. Induction de mutations de résistance
1. Classification des mutations
a. Mutations de résistances
b. Les résistances aux différentes classes d’inhibiteurs
i. Mutations aux INRT
ii. Les NEM (nucléotide excision mutations)
c. Les mutations de résistances
CONCLUSION