Optimisation du rendement optique du silicium : du massif au nano
Le silicium est depuis des années la brique élémentaire de la microélectronique. Son abondance naturelle ainsi que la bonne maîtrise de sa technologie ont fait de lui l’élément de choix de la technologie actuelle. Cependant, ses propriétés physiques, principalement son gap indirect, ont limité son utilisation en optoélectronique et en photonique. Pourtant, le passage à des structures nanométriques à base de silicium engendre des nouvelles propriétés prometteuses pour contourner ces limites.
Le silicium massif
Le silicium est l’élément chimique de numéro atomique 14 et de symbole Si. Par ses propriétés atomiques, le Si est classé dans la famille des semi-conducteurs. Ces derniers sont constitués d’une bande de valence et d’une bande de conduction séparées par une troisième bande dite interdite ou gap du matériau de largeur Eg et inaccessible aux électrons. Les matériaux semi-conducteurs peuvent se décomposer en deux grandes catégories : les matériaux à gap direct tel que l’arséniure de gallium (GaAs) et les matériaux à gap indirect tel que le Si. Cette notion de gap direct ou indirect est primordiale pour la compréhension des phénomènes optiques.
Dans un semi-conducteur à gap direct , le maximum de la bande de valence et le minimum de la bande de conduction se situent sur le même point de l’axe de vecteur d’onde ˛ k. Une transition radiative peut alors avoir lieu lors de la recombinaison de l’électron et du trou possédant le même vecteur d’onde ˛ k. Un photon dont l’énergie correspond à l’énergie de gap (Eg) entre les deux bandes est ainsi émis. À l’opposé, dans le cas où le maximum de la bande de valence ne coïncide pas avec le minimum de la bande de conduction, on parle de semi conducteur à gap indirect. Les transitions optiques de la bande de conduction vers la bande de valence nécessitent l’intervention des phonons afin de conserver la quantité de mouvement. Dans un tel système à trois corps, à savoir électron, trou et phonon, le taux de recombinaison radiatif est très faible. Ainsi, le silicium massif est un piètre émetteur de lumière ayant un faible rendement radiatif (environ 10⁻⁶ à température ambiante).
Le silicium nanométrique
Le silicium poreux a été élaboré et décrit pour la première fois en 1956 par A. Uhlir [1]. En revanche, l’intérêt de la communauté scientifique pour ce matériau n’a été suscité que 34 ans plus tard grâce aux travaux de L.T. Canham [2]. En eet, il découvre l’émission dans le rouge et à température ambiante du silicium poreux lorsqu’il est soumis à un rayonnement UV [2]. Depuis, le silicium nanostructuré a pu être envisagé comme émetteur de lumière.
Les propriétés optiques du silicium poreux découlent directement de sa structuration nanométrique. Dans son étude, Canham montre l’existence d’une dépendance entre la taille des pores et la longueur d’onde des photons émis. Il montre un décalage de la luminescence vers les faibles longueurs d’onde (blue-shift) lorsque la taille du silicium est réduite jusqu’au nanomètre. Ce phénomène est dû à des eets de confinement quantique qui apparaissent lorsque les dimensions d’une nanostructure semi-conductrice sont plus petites qu’une taille caractéristique, appelée rayon de Bohr excitonique (environ 4, 3 nm dans le silicium massif cristallin [3]).
En addition à l’accroissement du taux de recombinaison radiative, la théorie du confinement quantique prévoit également une augmentation du gap (augmentation de l’énergie d’émission) lorsque la taille des agrégats de silicium diminue [4,5]. Les niveaux électroniques, qui présentent une bande quasi-continue pour le semi conducteur massif, deviennent discrets pour le nanocristal et la bande interdite s’élargit avec la diminution de la taille de la particule sphérique . Cette nanostructure sphérique peut être considérée comme une boîte quantique décrite comme un puits de potentiel avec une barrière d’énergie infinie.
Formation et croissance des nanoparticules de silicium dans la silice
La première mise en évidence d’une luminescence à température ambiante et dans le visible du silicium a été obtenue dans le silicium poreux. Ce dernier est obtenu par une attaque électrochimique de la surface d’une plaquette de silicium cristallin par une solution comprenant principalement de l’acide fluorhydrique. Malgré ses propriétés de luminescence excellentes, le silicium poreux soure d’une mauvaise stabilité mécanique et chimique qui peuvent entraîner une dégradation de ses propriétés optiques [11,12]. En conséquence, son intégration dans la technologie silicium est rendue difficile.
Depuis, plusieurs tentatives ont eu lieu pour les faire croître soit directement à partir d’une phase gazeuse ou indirectement par recristallisation au sein d’une matrice. Une approche couramment employée est de produire du silicium nanostructuré dans une matrice de silice (matrice isolante et transparente) pour exploiter la qualité et la stabilité de l’interface SiO2/Si et l’amélioration des propriétés d’émission du confinement quantique du silicium.
De nombreuses méthodes ont été proposées pour élaborer les nanocristaux de Si dans la silice. Les plus largement utilisées sont basées sur le dépôt de films de silice sousstœchiométriques, avec un excès de Si contrôlé, suivi d’un recuit à haute température [13, 14]. Le recuit provoque une séparation entre les deux phases constitutives, à savoir, Si et SiO2, avec la formation de nanocristaux de Si. Ceci est conforme au diagramme de phase Si ≠ O établi par Schnurre et al. . Ce diagramme montre bien que la silice sous stœchiométrique SiOx n’est pas stable d’un point de vue thermodynamique en dessous de 1687K. Elle se décompose en deux phases : du silicium pur Si et de la cristobalite (SiO2) en dessous de 1687K et du silicium pur Si et de quartz en dessous de 1145K .
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Table des matières
Introduction générale
1 Vers l’intégration du silicium dans la photonique
1.1 Optimisation du rendement optique du silicium : du massif au nano
1.1.1 Le silicium massif
1.1.2 Le silicium nanométrique
1.1.3 Formation et croissance des nanoparticules de silicium dans la silice
1.1.4 Limitations et nécessité d’une autre approche
1.2 Optimisation via des impuretés optiquement actifs : les terres rares
1.2.1 Propriétés générales des terres rares
1.2.2 Terres rares dans la silice
1.3 Terres rares dans la silice contenant des nanocristaux de silicium
1.3.1 Processus d’excitation des ions terres rares par les nanoparticules de silicium
1.3.2 Corrélation entre structure et propriétés optiques
1.4 Silicates de terres rares
1.5 Conclusion et motivation de notre étude
2 Silice enrichie en silicium et dopée aux terres rares : élaboration & caractérisation structurale et optique
2.1 Elaboration des couches minces SiOx dopées aux terres rares
2.1.1 Evaporation sous vide
2.1.2 Pulvérisation magnétron radiofréquence
2.1.3 Recensement des échantillons de l’étude
2.2 La sonde atomique tomographique
2.2.1 Principe de fonctionnement
2.2.1.1 Evaporation par eet de champ
2.2.1.2 Spectrométrie de masse à temps de vol
2.2.1.3 Reconstruction tridimensionnelle du volume analysé
2.2.1.4 Eets de grandissement locaux
2.2.1.5 Préparation des échantillons
2.2.2 Méthodes de traitement de données de sonde atomique tomographique
2.2.2.1 Test statistique d’homogénéité
2.2.2.2 Identification des précipités
2.2.2.3 Mesure de composition
2.2.2.4 Distribution de taille et rayon moyen
2.2.2.5 Distribution de distances aux premiers voisins (1NN)
2.3 La photoluminescence
3 Caractérisation structurale et optique des couches minces SiO1,5 dopées Ce
3.1 Influence du traitement thermique
3.1.1 Propriétés optiques
3.1.2 Analyses structurales des couches
3.1.2.1 Spectrométrie de photoélectron X (XPS)
3.1.2.2 Sonde atomique tomographique
3.1.3 Corrélation entre la structure à l’échelle nanométrique et les propriétés optiques
3.2 Influence de la concentration en Ce
3.2.1 Propriétés optiques
3.2.2 Sonde atomique tomographique
3.2.3 Corrélation entre la structure à l’échelle nanométrique et les propriétés optiques
3.3 Mécanismes de précipitation
3.4 Conclusion
4 Caractérisation structurale et optique des couches minces SiOx dopées Er
Conclusion générale