La thèse concerne les pompes à chaleur réversibles (pouvant fonctionner en mode chaud et froid) destinées au secteur tertiaire, et vise leur optimisation en prenant en compte les variations de leurs performances hors régime nominal. La thèse aborde ainsi plusieurs thèmes qui vont de la modélisation thermodynamique détaillée, aux simulations thermiques des bâtiments, jusqu’aux approches de conception optimisée des pompes à chaleur (PAC) du point vue de leur performance saisonnière.
Contexte
Le confort thermique : un défi environnemental économique et énergétique
La croissance du parc de bâtiments en France manifestée par 421 755 logements mis en chantier et en secteur tertiaire environ 39 millions de m² (+ 5,7%) en 2006, est accompagnée par des installations de systèmes thermiques de climatisation nécessaires au confort thermique de l’homme. D’après les chiffres clés du bâtiment 2007 de l’ADEME [ADEME 2007] sur les 17 546 000 m² de surfaces neuves, on recense 5 165 000 m² (+ 50 % sur les 5 dernières années) de surfaces climatisées et 2 592 000 m² (+ 120 % sur les 5 dernières années) de surfaces rafraîchies; parallèlement, le taux de climatisation centralisée diminue, alors que le taux de climatisation décentralisée augmente. 50% des bureaux et 39% des commerces sont climatisés. Ces deux branches représentent à elles seules près de trois quarts des surfaces climatisées.
Cette pénétration croissante de la climatisation dans le secteur tertiaire, soutenue par la réversibilité croissante des systèmes, est aussi suivie par une augmentation des ventes de climatiseurs dans le domaine résidentiel. Ces systèmes thermiques contribuent aux consommations électriques, et par suite aux émissions de CO2, et à une facture énergétique élevée.
Des directives internationales en cours d’élaboration (EPBD, ECODESIGN Lot 1, Lot 10, ENTR/Lot 6 à venir, Directive EnR, Certificats blancs) visent la réduction de ces consommations en améliorant les performances énergétiques annuelles de ces systèmes.
Statistiques énergétiques (Bouquet énergétique)
Le parc des moyens de production d’électricité français est dominé par des moyens de production compétitifs, comme le nucléaire, l’hydraulique, l’éolienne et le photovoltaïque, et de moyens de productions thermiques classiques. Sa structure est à 77% nucléaire, 12% hydraulique, éolienne et photovoltaïque, et 11% thermique classique. Les principaux producteurs restent, dans l’ordre, EDF (près de 90% du marché), CNR et Endesa-France. [DGEMP 2007] .
Cette spécificité du parc français de production électrique dominé par l’électricité nucléaire propre en termes d’émissions de gaz à effets de serre, conduit à des contenus en CO2 par kWh d’électricité consommé de l’ordre de 60 à 120 g CO2/kWh en moyenne, à comparer à la moyenne européenne de 340 g CO2/kWh environ.
En particulier, le kWh de chauffage émet 180 g de CO2, cet indicateur « chauffage » comprend la consommation de chauffage électrique et les pompes de circulation des chaudières fuel et gaz. L’indicateur « usage intermittent » regroupe cuisson, lavage et produits bruns, et l’indicateur « usages de base » froid, ECS, autres usages résidentiels, agriculture, transports, BTP et armées climatisation dans le secteur tertiaire [ADEME 2005]. Le contenu en CO2 du kWh de chauffage électrique reste compétitif par rapport au contenu du chauffage au fioul de 271 gCO2 et du chauffage au gaz naturel de 206 gCO2.
Secteur du bâtiment premier secteur consommateur d’énergie
Selon les chiffres clés du bâtiment publiés par l’ADEME [ADEME 2007], et les statistiques énergétiques publiées en juin 2008, par le Ministère de l’Industrie, et le Ministère de l’Écologie, de l’Energie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire [MEEDAT 2008], le secteur du bâtiment français consomme 43,5 % de l’énergie finale en 2007 (Consommation finale d’énergie : consommation totale d’énergie primaire diminuée de la consommation de la « branche énergie » i-e centrales électriques, raffineries, consommation internes et pertes). Ce secteur constituant le premier secteur consommateur d’énergie émet environ 100 millions de tonnes de CO2 par an représentant 25 % des émissions nationales.
Place des pompes à chaleur sur le marché de la climatisation
Principe thermodynamique
Une pompe à chaleur est un système thermodynamique qui transfère la chaleur d’une source chaude à une source froide par apport d’un travail mécanique de compression. Le compresseur peut être électrique ou entraîné par un moteur à combustion gaz. Une PAC est appelée PAC réversible (ou inversable) quand elle peut produire du chaud ou du froid selon la configuration du cycle frigorifique.
La pompe à chaleur est classée parmi les systèmes qui exploitent des énergies renouvelables, car elle prélève de la chaleur à l’environnement pour chauffer le bâtiment : à l’air, au sol ou à l’eau. Récemment, le Parlement européen a voté le 17 décembre 2008 la directive Energie Renouvelable : Directive CE/28/2009 reconnaissant la chaleur contenue dans l’air comme « énergie renouvelable ». Le bilan annuel en gaz à effet de serre rejeté (exprimé en équivalent CO2) par une pompe à chaleur est très performant dans le contexte français, comparativement aux systèmes de chauffage traditionnels. En France, 1 kWh de chaleur produit avec une pompe à chaleur de COP de 3, génère environ 5 fois moins de CO2 qu’1 kWh de chaleur produit par une chaudière au fioul de rendement de 90 % .
Principe de fonctionnement
Le dimensionnement d’une pompe à chaleur s’effectue en fonction du type de bâtiment et de ses besoins, des émetteurs de chaleur et du climat. Plusieurs types d’émetteurs existent. Les niveaux de température de départ de l’eau dans le circuit dépendent directement du type de distribution employé, ceci influence directement le dimensionnement de la PAC. En mode chauffage, des lois d’eau existent. Elles permettent de contrôler la température du circuit d’eau en fonction de la température extérieure et de l’inertie du bâtiment. L’intérêt de la loi d’eau réside dans l’adaptation du niveau de température de départ de la PAC au besoin de chauffage. En mode refroidissement, les niveaux de températures sont contrôlés en fonction des différents types de distributeurs de froid.
La température d’équilibre correspond à la température extérieure pour laquelle la puissance calorifique fournie par la PAC est égale au besoin thermique du bâtiment. A cette température, la PAC fonctionne en continu ; tandis que pour des températures supérieures à la température d’équilibre, la PAC fonctionne en charge partielle. La température d’arrêt correspond à la température extérieure pour laquelle la PAC est arrêtée pour des contraintes techniques qui correspondent à un fonctionnement hors plage du taux de compression du compresseur. Le domaine de fonctionnement des PAC traduit celui du compresseur. Le besoin de dégivrage dépend de la température de la surface en contact avec l’air Tc < 0 °C ce qui en général est résumé par une température extérieure Text < 7 °C et une humidité de l’air HR > 50 %. Ce point est défini dans les normes. Les constructeurs ont fait l’effort de réduire la différence ΔTévap entre la température d’évaporation et la température de l’air pour éviter le givrage dans ces conditions. Le givrage sera détaillé ultérieurement. L’appoint de chauffage peut être assuré par des résistances électriques ou par une chaudière. Pour les températures extérieures inférieures à la température d’équilibre et supérieures à la température d’arrêt, la PAC fonctionne en continu assistée par l’appoint, alors que pour les températures extérieures inférieures à la température d’arrêt l’appoint répond seul aux besoins de chauffage.
En mode refroidissement
Les températures de fonctionnement des différents types de distributeurs de froid :
✽ Ventilo-convecteur (Tretour = 12 °C pour Text = 35 °C)
✽ Plafond froid ou plafond à eau (Tdépart entre 16 °C et 18 °C)
✽ Poutre à eau (Tdépart = 15 °C et 18 °C) .
Marché
Le marché des pompes à chaleur air/eau en Europe est en pleine croissance. Le marché total pour tous types de PAC (réversibles, non réversibles, tertiaires et résidentielles) a atteint 392 756 unités en 2007 dans l’UE (Union Européenne). On observe une croissance globale de 4,6 % à partir des 370 447 unités de 2006. Et d’après des estimations d’experts, le marché total de l’UE ce nombre peut être majoré de 80 000 à 100 000 unités. Ainsi, le marché 2007 peut être évalué à environ 500 000 unités. [EHPA 2008] .
En nombre d’unités, la France occupe la deuxième place du marché européen des pompes à chaleur derrière la Suède. L’histoire du marché français a subi une évolution à la fin des années 70 et au début des années 80, avec la crise des prix du pétrole et le programme PERCHE d’EDF (Pompe à chaleur en relève de chaudière). Cette progression brusque a été rapidement interrompue du fait du manque d’installateurs qualifiés et de faibles performances qui conduisaient à des mauvaises performances globales des systèmes.
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Table des matières
1 Introduction
1.1 Introduction générale
1.2 Contexte
1.2.1 Le confort thermique : un défi environnemental économique et énergétique
1.2.2 Place des pompes à chaleur sur le marché de la climatisation
1.3 Enjeux
1.4 Objectifs
2 Modélisation thermodynamique détaillée d’une PAC intégrant des composants améliorant les performances hors régime nominal
2.1 Introduction
2.2 Caractéristiques du cyle
2.2.1 Cycle idéal théorique
2.2.2 Cycle réel de compression d’une pompe à chaleur
2.2.3 Synthèse des modèles existants dans la littérature
2.2.4 Structure globale du modèle de PAC
2.3 Modélisation du compresseur
2.3.1 Modélisation
2.3.2 Données constructeur
2.3.3 Compressions multiples
2.3.4 Compression à vitesse variable
2.3.5 Comparaison entre modèle de compresseur et valeurs expérimentales
2.4 Modélisation du détendeur
2.4.1 Bilan mécanique du détendeur et asservissement de la surchauffe
2.4.2 Modélisation envisagée
2.5 Modélisation des échangeurs
2.5.1 Typologie
2.5.2 Echangeur à plaques
2.5.3 Comparaison entre le modèle d’échangeur à plaques et les valeurs expérimentales
2.5.4 Echangeur à air et à tubes ailetés
2.5.5 Comparaison entre le modèle d’échangeur à air et les valeurs expérimentales
2.5.6 Echangeur à air à mini-canaux
2.5.7 Evaluation des pertes de pression
3 Modélisation thermodynamique globale de la PAC et validation
3.1 Introduction
3.2 Modélisation globale : Modèle thermodynamique de la PAC
3.3 Modélisation des phénomènes instationnaires
3.3.1 Charge partielle et cyclage
3.3.2 Givrage dégivrage
3.4 Auxiliaires
3.4.1 Réchauffeurs de carter
3.4.2 Ventilateur
3.5 Définition du prototype
3.5.1 Etapes de conception du prototype
3.5.2 Description du prototype
3.5.3 Instrumentation
3.5.4 Chargement de la machine en R410A
3.5.5 Premiers essais de mise en service
3.6 Validation du modèle par les essais en laboratoire
3.6.1 Essais servant à la validation du modèle
3.6.2 Résultats des essais
3.7 Validation du modèle par expérimentation in situ
3.7.1 Description conditions climatiques
3.7.2 Bâtiment retenu
3.7.3 Campagne d’essais hiver
3.7.4 Campagne d’essais été
3.7.5 Carte de performances en mode chaud de la PAC étudiée
3.7.6 Interprétation et discussion des résultats de mesure
3.7.7 Validation du modèle global en mode chaud
3.7.8 Validation du modèle global en mode froid
3.8 Conclusion
4 Simulation des performances saisonnières d’une pompe à chaleur couplée à un bâtiment
4.1 Introduction
4.2 Typologie des bâtiments climatisés par des pompes à chaleur
4.3 Modélisation dynamique du bâtiment de référence
4.3.1 Modèlisation du bâtiment
4.3.2 Description du bâtiment servant de référence
4.3.3 Dimensionnement des systèmes thermiques
4.3.4 Réduction des courbes de charges
4.4 Simulations de différents scénarios thermiques en vue d’une optimisation saisonnière
4.4.1 Description de la demande thermique des différents climats français
4.4.2 Signature énergétique du bâtiment de référence
4.4.3 Synthèse des résultats obtenus pour les différents climats étudiés
4.5 Calcul des performances saisonnières SCOP et SEER
4.6 Sensibilité au niveau de réduction de la courbe de charge
5 Optimisation des performances saisonnières
5.1 Introduction
5.2 Optimum de point de vue local
5.2.1 Courbe de charge
5.2.2 Machine de référence
5.2.3 Etagement de puissance
5.2.4 Conception du compresseur orientée mode chaud ou mode froid
5.2.5 Echangeurs surdimensionnés
5.2.6 Ventilateur à vitesse variable
5.3 Optimum du point de vue de l’industriel
5.3.1 Intégration de composants innovants à fort enjeu concurrentiel
5.3.2 Résistance de carter innovante
5.4 Etude technico-économique
5.4.1 Comparaison énergétique de la PAC de référence et de la PAC prototype
5.4.2 Gain économique d’exploitation de la PAC de référence par rapport à la PAC prototype
5.4.3 Comparaison énergétique de la PAC de référence et la PAC de référence améliorée
5.4.4 Gain économique d’exploitation de la PAC de référence améliorée par rapport à la PAC de référence
5.4.5 Rentabilité économique des améliorations
5.5 Perspective : une nouvelle PAC regroupant les meilleures options d’amélioration
6 Conclusion
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