Le cancer est l’émergence d’un clone cellulaire qui prolifère, envahit et métastase malgré les différents niveaux de contrôle de l’organisme.
Cancérogenèse
Le cancer se développe à partir d’une cellule qui subit une mutation et évolue en suivant les mêmes étapes, mais à des vitesses très variables et selon des modalités propres à chaque type de cancer .
La cancérogenèse débute par une phase d’initiation. C’est-à-dire que la conséquence d’une mutation dans l’ADN résulte en un changement fonctionnel de la cellule atteinte. Cette cellule entre en phase de promotion pendant laquelle la synthèse d’ADN est augmentée. Il y a une surproduction de prostaglandines, de protéines Ras, d’oncoprotéines et de facteurs de croissance [2]. L’activité métabolique des cellules transformées est altérée. Les cellules tumorales se multiplient de façon incontrôlée.
Ensuite apparaît la phase de promotion conduisant la cellule à se multiplier et les gènes suppresseurs de tumeurs perdent leur activité normale. Il y a une suractivation de métalloprotéases permettant le remodelage de la matrice extracellulaire [3,4]. Le stade suivant est celui de l’angiogenèse avec formation des nouveaux vaisseaux afin d’alimenter la tumeur. L’invasion vers des sites secondaires est initiée pour en arriver à la formation de métastases [5,6]. En suivant ces stades de développement, les tumeurs acquièrent des caractéristiques qui définissent leurs changements phénotypiques (Figure 2).
• Premièrement, elles deviennent indépendantes des signaux normaux de prolifération cellulaire.
• Deuxièmement, elles sont insensibles aux signaux antiprolifératifs.
• Troisièmement, il s’installe une résistance à l’apoptose.
• Quatrièmement, elles adoptent une capacité anormale d’angiogénèse.
• Cinquièmement, elles deviennent invasives et mènent à la formation de métastases.
• Sixièmement, leur capacité de réplication de l’ADN est illimitée [7].
En plus de ces six principales caractéristiques, les tumeurs se distinguent par deux autres caractéristiques : la modification du métabolisme énergétique et par l’évitement de la destruction par les cellules immunitaires. Avec les années, l’approfondissement des connaissances a permis de définir deux nouvelles caractéristiques du cancer : l’instabilité du génome menée par des mutations ainsi que la présence de molécules liées au caractère inflammatoire dans le microenvironnement tumoral (Figure 3) [8]. La combinaison de ces dix caractéristiques permet l’identification de biomarqueurs et leur ciblage thérapeutique dans le but de mieux comprendre les composantes du cancer et de mieux les traiter.
Le microenviroment tumoral
Dernièrement, les tumeurs ont été de plus en plus reconnues comme des organes dont la complexité approche et peut même dépasser celle des tissus sains normaux. La biologie d’une tumeur ne peut être comprise qu’en étudiant les différents types de cellules spécialisées ainsi que le « microenvironnement tumoral » qu’ils construisent au cours de la tumorigenèse à plusieurs étapes.
Un ensemble de types de cellules contribue de manière importante à la biologie de nombreuses tumeurs et dans la signalisation intratumorale (Figure 4). Certaines populations cellulaires du stroma (fibroblastes, cellules endothéliales, cellules immunes, etc.), bien que non transformées, sont contrôlées par les cellules tumorales pour répondre à leurs propres besoins. Les deux processus, cancérisation et perturbation du microenvironnement, sont intimement liés : l’un participant au développement et au maintien de l’autre, et vice versa. La compréhension du microenvironnement cellulaire « normal » et tumoral est donc essentielle pour le développement de traitements spécifiques. Le mauvais pronostic des cancers colorectaux métastatiques et le taux de rechute important sont notamment attribués à la présence des cellules souches cancéreuses (CSC) [9]. Le concept de CSC émet l’hypothèse que la croissance tumorale est provoquée par CSC, une petite sous population de cellules similaires aux cellules souches embryonnaires (ESC) [10]. Ces cellules se divisent de manière asymétrique et elles vont produire des cellules cancéreuses différenciées ainsi qu’une cellule fille identique, une caractéristique partagée avec les ESC normaux. Cependant, les CSC ont perdu le contrôle de la réplication et de la différenciation, ce qui conduit à la tumorigenèse [11].
La perte de contrôle réplicatif entraîne une augmentation du nombre de cellules de type ESC, contribuant davantage à la croissance de la tumeur. Les CSC et leurs descendants peuvent contenir une importante variabilité génétique, probablement due à des mutations dans les gènes de réparation de l’ADN qui ont contribuées initialement à la carcinogenèse [13]. Une grande partie de la tumeur résulte de l’activité non réglementée du CSC, avec des cellules cancéreuses incapables d’initier la formation ou l’auto renouvellement de tumeurs, mais ils ont hérité la capacité de proliférer d’une manière incontrôlée. Deux théories ont été proposées pour expliquer l’apparition des CSC [12]: (1) des mutations d’oncogènes s’accumulent dans les cellules adultes normales ou cellules souches embryonnaires (CSE), conduisant à leur prolifération incontrôlée ; (2) la dédifférenciation cellulaire dans une cellule souche, qui dans une tumeur produira des CSC. Une cellule tumorale est définie comme souche cancéreuse lorsqu’elle répond à deux critères fondamentaux : 1) elle doit pouvoir reformer d’autres CSC lors du processus de division cellulaire (auto renouvellement) et 2) elle doit être capable de se différencier vers l’ensemble des composants cellulaires présents dans la tumeur/organe en question (multi-potentialité).
Le modèle CSC est basé sur quatre prémisses [14] :
– une partie importante de l’hétérogénéité cellulaire observée dans les tumeurs résulte de son organisation, qui est souvent similaire au tissu d’origine,
– les proliférations tumorales sont alimentées par des rares auto-renouvèlements CSC, alors que la majeure partie de la tumeur est composée de non-CSC, qui ne sont capables que d’une prolifération transitoire et ne peut pas contribuer à la croissance à long terme,
– l’identité du SCC est prédéterminée, ce qui est démontré par le fait que les non-CSC initient rarement des tumeurs chez des xénogreffes,
– les CSC sont résistantes à la chimiothérapie standard et à la radiothérapie, qui ciblent préférentiellement les non-CSC – un phénomène qui explique la rechute après traitement.
OCT4, SOX2 et NANOG sont les trois gènes qui jouent un rôle important dans la régulation de la pluripotence. Ce sont des facteurs de transcription qui mettent en œuvre l’autorégulation de leur propre expression en se liant à leurs propres régions promotrices [15]. Des marqueurs tels que c-Myc, transducteur de signal et activateur de la transcription 3 (STAT3), aldéhyde déshydrogénase (ALDH), ABCG2 et le CD133 ont des associations bien documentées avec le cancer, les cellules souches normales, les CSC et la chimiorésistance. Certains marqueurs sont particulièrement spécifiques pour le CRC, notamment CD44, LGR5 et la molécule d’adhésion des cellules épithéliales (EpCAM). Les cellules souches de l’intestin peuvent être identifiées grâce au gène Lgr5 considéré comme marqueur de ces cellules. Environ 10% des cellules de cryptes intestinales sont des cellules souches exprimant Lgr5 [16].
L’expression d’OCT4 peut favoriser la récidive tumorale, probablement en prévenant l’apoptose [18]. Le niveau d’expression de SOX2 dans les CRC a été corrélé avec les métastases et l’atteinte ganglionnaire lymphatique. SOX2 contrôle l’expression d’OCT4, et la pluripotence ne peut être atteinte sans cette combinaison de ces deux facteurs de transcription [19]. Il a été démontré que certaines populations de CSC expriment préférentiellement à leur surface cellulaire des transporteurs du type ABC (ATP binding cassette) qui confèrent une imperméabilité face aux médicaments en les expulsant continuellement dans le milieu extracellulaire [20]. Récemment, il a également été démontré que les CSC isolées à partir de cancer du côlon expriment et secrètent l’IL-4 (une cytokine proinflammatoire) qui protège ces dernières contre les effets pro-apoptotiques (effets induisant la mort cellulaire) des chimiothérapies conventionnelles. En intervenant directement au niveau d’IL-4 par le biais d’anticorps bloquant l’activité de cette cytokine, les CSC ont pu être désensibilisées à l’apoptose [21].
Hypoxie et néoangiogenèse
Comme les tissus sains, les tumeurs nécessitent un apport continu et croissant de nutriments et l’élimination des déchets. La croissance tumorale provoque l’apparition de zones, au cœur de la tumeur solide, où l’apport sanguin, et par conséquent l’apport en oxygène et autres nutriments, est diminué.
Hypoxie
L’hypoxie est une diminution de la quantité d’oxygène et est un facteur limitant pour la croissance tumorale. Au niveau cellulaire, l’hypoxie — par l’intermédiaire de voies de réponse spécifiques, comme celle des protéines de la famille HIF (Hypoxia Inducible Factor) — induit l’activation de plusieurs voies de signalisation, régulant des processus cellulaires tels que l’angiogenèse, le métabolisme, la prolifération cellulaire, l’apoptose ou encore le remodelage tissulaire [22]. L’hypoxie est le principal stimulus physiologique de l’angiogenèse tumorale. Un des gènes cibles de HIF-1 est le gène codant pour le facteur de croissance VEGF, un régulateur de l’angiogenèse dont le but est d’augmenter le débit sanguin vers les tissus privés d’oxygène [23]. En effet, pour répondre à la demande accrue en nutriments et en oxygène due au développement et à la croissance d’une tumeur, le réseau de vaisseaux sanguins déjà en place doit s’étendre et se densifier à proximité du site tumoral. Ce processus d’angiogenèse implique de nombreux acteurs du microenvironnement, principalement des facteurs solubles ayant une activité pro- ou antiangiogénique (par exemple : VEGF et thrombospondine-1, respectivement), et qui sont produits par les cellules normales et/ou tumorales. Ces facteurs agissent sur plusieurs cibles cellulaires, dont la plus importante est la cellule endothéliale [23][24].
L’ANGIOGENÈSE
La croissance de la tumeur nécessite une angiogenèse. Au-delà d’un volume d’un à deux millimètres cubes, une néovascularisation est nécessaire à la croissance tumorale, le plus souvent induite par l’hypoxie. Les cellules tumorales doivent alors acquérir la capacité d’induire le développement de nouveaux vaisseaux sanguins nourriciers pour leur apporter l’oxygène et les nutriments nécessaires à sa croissance. Pour cela, elles stimulent la prolifération des cellules endothéliales des capillaires voisins, qui forment des boucles vasculaires en direction de la tumeur, pour l’irriguer et permettre son développement.
Des facteurs clés (facteurs de croissance, cytokines, molécules d’adhésion, récepteurs transmembranaires, enzymes protéolytiques, etc.) interviennent séquentiellement dans les différentes étapes de l’acquisition du phénotype angiogénique en réponse au stress hypoxique (prolifération des cellules endothéliales, migration des néovaisseaux vers les tissus inducteurs, maturation des néovaisseaux et association péricytaire). Ainsi, dans un contexte tumoral, les cellules endothéliales sont activées par des facteurs proangiogéniques issus de la tumeur ou de son microenvironnement (cellules inflammatoires, cellules stromales, etc.). Elles retrouvent une activité proliférative et synthétisent des enzymes protéolytiques, telles que les métalloprotéases matricielles ou les collagénases, qui permettent la dégradation de la membrane basale endothéliale préexistante. Des bourgeons endothéliaux se forment à la surface des vaisseaux, migrent vers le site tumoral et se creusent d’une lumière qui permettra le passage du sang. Les structures néoformées s’anastomosent pour reconstituer un réseau capillaire [25]. Elles vont ensuite synthétiser une multitude de protéines nécessaires à la mise en place du nouveau réseau vasculaire : principalement des éléments de la membrane basale du nouveau vaisseau (collagènes, protéoglycans, etc.) et des molécules d’adhésion (les sélectines E et P, les intégrines ICAM1, ICAM2 et VCAM1) [26].
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Table des matières
Introduction
Chapitre 1
Oncologie-cancerogenese et caracterisation des tumeurs colorectales
Cancérogenèse
Le microenviroment tumoral
Hypoxie et néoangiogenèse
Mécanismes moléculaires du cancer colorectal
Les facteurs de risque
Facteur de risque lié à l’âge
Facteur de risque lié à une mutation génétique
Facteur de risque lié à une maladie inflammatoire du côlon
Facteur de risque lié à un antécédent d’adénome ou de cancer colorectal
Facteurs liés au mode de vie
Épidémiologie
Classification
Bilan d’extension
Cancer colique
Cancer rectal
Traitement
Traitement endoscopique
Traitement chirurgical
Cancer colique
Cancer du rectum
Radiothérapie /Chimiothérapie
Traitement neoadjuvant
Traitement adjuvant
Cancer colique
Cancer rectal
Place de l’imagerie dans la prise en charge des patients en oncologie
L’échographie
L’imagerie par résonance magnétique (IRM)
La Tomographie par émission de positons (TEP)
Tomodensitométrie (TDM)
Définition
Le tube
Le système de détection
Paramètres d’acquisition et de reconstruction
Acquisition volumique
Qualité de l’image
Visualisation et archivage des images radiologiques
Analyse radiomique
Segmentation des volumes d’intérêt
Paramètres d’histogramme et métriques de formes
Paramètres de forme
Discrétisation des intensités des images
Matrice de dépendance de niveaux de gris pour un voisinage
Caractérisation de l’hétérogénéité régionale
Matrice d’alignement
Matrice de taille de zone
Matrice de zones de distance des niveaux de gris
Chapitre 2
Introduction
Abstract
Rationale and Objectives
Materials and methods
Results
Conclusion
Keywords
Introduction
Materials and Methods
Patients cohort
CT imaging
Radiomics analysis
Statistical analysis
Results
Patient characteristics
Correlation and survival analysis
Clinical parameters
First-order metrics
Second-order metrics
Third-Order Metrics
Kaplan-Meier survival analysis
Discussion
Conclusions
References
Discussion
Chapitre 3
Introduction
Cancer stem cell molecular predictors of colorectal cancer outcome
Abstract
Introduction
Materials and Methods
Statistical analysis
Results
Discussion
References
Discussion
Chapitre 4
Introduction
Radiogenomics-based cancer prognosis in colorectal cancer
Abstract
Rationale and Objectives
Materials and methods
Results
Conclusion
Keywords
Introduction
Materials and Methods
Patients
Imaging
Radiomics analysis
Tissue samples processing
Statistical analysis
Results
Conclusion
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