OBSERVATIONS FACE AU MONDE DES BIBLIOTHÈQUES
Historique
L’histoire de l’éducation supérieure au Royaume-Uni commence avec la fondation des universités d’Oxford (au XIe siècle), puis de Cambridge, par un groupe d’universitaires venus d’Oxford, au XIIIe siècle. A l’époque ces universités ne sont pas des bâtiments mais des corporations d’étudiants et d’enseignants, principalement ecclésiastiques, et les cours se déroulent dans des maisons privées louées ou des édifices religieux ; les bibliothèques universitaires n’existent pas. Les premières bibliothèques d’étude à voir le jour au Moyen-Age sont celles des colleges2, des bâtiments fondés à Oxford et Cambridge dès la naissance des universités par de riches donateurs afin d’héberger les étudiants en théologie ; il est en effet courant que ces fondateurs lèguent leur bibliothèque personnelle au college qui porte leur nom. Les bibliothèques d’université ne voient le jour que plus tard, au XIVe pour Oxford et XVe pour Cambridge, lorsque ces établissements commencent à avoir des bâtiments propres. La grande majorité des collections est alors constituée de dons. Pendant très longtemps, Oxford et Cambridge restent les deux seules universités en Angleterre. Le reste du Royaume-Uni (dont l’Irlande toute entière fait à l’époque partie) comprend six autres universités, avec une en Irlande (Trinity College à Dublin), cinq en Ecosse, mais aucune au Pays-de-Galles. Il faut attendre le début du XIXe siècle pour que ce nombre augmente avec la création des universités de Londres (1826) et de Durham (1832).
Tous ces établissements comprennent des bibliothèques mais leur principale source d’enrichissement est toujours les dons, ainsi que le dépôt légal3 pour Oxford et Cambridge depuis le début du XVIIIe siècle et Trinity College depuis le début du XIXe. Jusqu’au milieu du XIXe, les bibliothèques d’universités ne fournissent pas véritablement de supports pour l’étude mais plutôt pour la recherche, et sont réservées majoritairement aux enseignants et aux chercheurs extérieurs ; les étudiants doivent souvent payer pour avoir le droit d’y entrer (les bibliothèques de colleges où ils résident leur sont en revanche ouvertes sans frais, mais leurs collections ne correspondent pas forcément à leurs besoins). Parmi les bibliothèques recevant le dépôt légal, seule celle de Cambridge autorise l’emprunt pour les professeurs.
Au milieu du XIXe siècle, l’apparition des « civic universities », fondées non plus par des corporations ecclésiastiques ou l’agrégation de colleges, mais par les pouvoirs publics dans les villes industrielles du nord de l’Angleterre (Manchester, Liverpool, Sheffield etc), amorce un mouvement de développement de l’éducation supérieure au Royaume-Uni4. Le gouvernement commence notamment à envoyer des Royal Commissions inspecter les bibliothèques universitaires et faire des rapports sur leur état : la conclusion du rapport de 1850, par exemple, est qu’il faut moderniser les bibliothèques des anciennes universités (Cambridge, Oxford et Dublin). Ces établissements n’en tiennent néanmoins pas beaucoup compte, notamment parce qu’ils sont libres d’utiliser les fonds publics qu’ils reçoivent comme ils l’entendent (il n’y a pas de budget réservé aux bibliothèques universitaires5). L’idée qui prévaut parmi les anciennes universités est que les bibliothèques de colleges pourvoient aux besoins immédiats des étudiants, tandis que les bibliothèques universitaires font plutôt office de musées du livre, préservant les trésors nationaux (une grande partie de leurs fonds remontant au Moyen-Age). Les bibliothèques universitaires se sont aujourd’hui modernisées : en 1972, celle de Trinity College a été la première à se doter d’un catalogue informatique, et les autres ont suivi dans les années 80 et 90. Néanmoins on constate toujours une différence entre les bibliothèques des anciennes universités et celles des nouvelles. Si l’idée de « musée du livre » a fait son temps, les anciennes universités ont continué à développer leurs fonds plutôt dans le souci de servir la recherche que les besoins immédiats des étudiants, au contraire des universités récentes.
Le paysage actuel des bibliothèques universitaires britanniques
Les universités britanniques, anciennes et nouvelles, sont publiques et dépendent du Department7 for Business, Innovation and Skills. Elles sont financées par des fonds d’Etat répartis par le Higher Education Funding Council, un corps dépendant du Department, mais aussi par leurs frais d’inscription, très élevés au Royaume-Uni. Malgré leur statut public, leur fonctionnement est différent de celui des universités françaises : elles sont en effet indépendantes de l’Etat dans le recrutement de leur personnel (qui n’est donc pas fonctionnaire) et la gestion de leur budget. Chaque établissement prend ainsi ses propres décisions quant à la gestion de sa bibliothèque universitaire (BU). Néanmoins, les BU britanniques sont aussi coordonnées par le Joint Information Services Committee (Jisc)8, un corps dépendant du Higher Education Funding Council, auprès duquel elles peuvent demander des financements. Les associations professionnelles ont aussi une grande importance pour les bibliothèques universitaires au Royaume-Uni. La plus généraliste est le Chartered Institute of Library and Information Professionals (CILIP), né en 2002 de la fusion de la Library
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Table des matières
LES BIBLIOTHÈQUES UNIVERSITAIRES BRITANNIQUES ET CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY
I.1 Les bibliothèques universitaires au Royaume-Uni
I.1.1. Historique
I.1.2. Le paysage actuel des bibliothèques universitaires britanniques
I.1.3. Le dépôt légal au Royaume-Uni
I.2 Cambridge University Library
I.2.1. Introduction : les bibliothèques d’étude à Cambridge
I.2.2. Le bâtiment : historique et aménagement
I.2.3. Administration de la bibliothèque : gestion, organisation, personnel et outils
I.2.4. Accueil du public
I.2.5. Collections
I.2.6. European Collections and Cataloguing
I.3 Le catalogage au Royaume-Uni et à Cambridge
I.3.1. AACR2 et RDA : histoire des normes
I.3.2. Le catalogage à Cambridge University Library et à ECC
LE STAGE : DÉROULEMENT ET MISSION
II.1 Déroulement du stage : observations, réalisations et visites
II.1.1. Introduction : premières impressions
II.1.2. Postes d’observation
II.1.3. Visites
II.1.4. Tâches accomplies
II.1.4.1. Tâches hebdomadaires : participation à la chaîne du livre
II.1.4.2. Activités ponctuelles, aide au travail du département
II.1.4.3. Organisation du temps : calendrier
II.2 Mission : traitement d’un don
II.2.1. Contexte et enjeux
II.2.2. Déroulement de la mission
II.2.2.1. Procédure donnée par la structure
II.2.2.2. Constitution d’une méthode de travail et prise progressive d’autonomie
II.2.2.3. Problèmes et solutions
II.2.3. La création de notices en RDA
II.2.4. La création d’autorités pour NACO
II.2.5. Valorisation
II.3 Conclusion : les acquis de l’expérience
BILAN CRITIQUE DU STAGE : OBSERVATIONS FACE AU MONDE DES BIBLIOTHÈQUES
III.1 Cambridge University Library, un établissement particulier dans le monde des bibliothèques universitaires
III.1.1. Un lieu paradoxal, entre conservation et modernité
III.1.2. Les limites de l’établissement : le service au public
III.1.3. Une différence majeure par rapport aux bibliothèques françaises : les relations avec les établissements américains
III.2 Mon expérience : découvertes, limites et acquis
III.2.1. Limites
III.2.2.Découverte de la vie professionnelle
III.2.3. Constats sur le catalogage : un conflit entre intérêt du lecteur et intérêt du professionnel
III.2.4. Le RDA : un acquis majeur pour la vie professionnelle
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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