Nouvelles sondes électrochimiques pour le marquage de biocapteurs d’affinité

De nos jours, le problème de la pollution environnementale est devenu un sujet sociétal qui préoccupe autant la population que les gouvernements. Cette pollution qui concerne tous les compartiments de l’environnement, l’air, l’eau et le sol fait l’objet de différents accords internationaux depuis une quarantaine d’années. Le premier de ces accords est la convention de Genève de 1979 portant sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance. Ce premier accord a été suivi de nombreux autres portant sur la protection de la couche d’ozone et la lutte contre le réchauffement climatique ; la protection des milieux marins et aquatiques ; la protection de la flore et la faune pour le maintien de la biodiversité . Dans un contexte de changement climatique global, la réduction des pollutions affectant la santé des biosystèmes et leur biodiversité est devenue un objectif global comme l’atteste la signature de l’accord de Paris en 2016 par 195 pays sur les 197 pays reconnus par l’Organisation des Nations Unies. Bien que cet accord ne porte que sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, il atteste de par sa portée mondiale de cette prise de conscience collective. L’augmentation de la population, la généralisation d’un mode de vie basé en partie sur l’hyperconsommation se traduisent par une production massive de déchets, un épuisement des ressources naturelles concourant à une pollution généralisée.

Une des premières ressources qui est impactée et fragilisée est l’eau tant au niveau des rivières que des océans car elle constitue le réceptacle final de très nombreux polluants. Dans le but de remédier à cette pollution, les eaux usées sont collectées et traitées au niveau des stations d’épuration. Mais ces traitements restent insuffisants pour éliminer tous les polluants et préserver la ressource en eau. Ainsi, 35% de la population mondiale soit 3.5 milliards de personnes n’ont qu’un accès restreint à une eau de qualité sanitaire suffisante dont 800 millions ne disposent pas d’une source d’eau potable. Cette problématique est aujourd’hui au cœur des débats concernant l’environnement et l’accès à une ressource en eau en quantité et de qualité suffisantes. Pour traiter ce problème, plusieurs questions sont posées sur le devenir de ces substances dans le milieu aquatique, leurs effets sur les organismes vivants, le meilleur moyen de les éliminer et la possibilité de réduire leur déversement dans la nature.

Dans ce contexte, des directives européennes ont été mises en place. Parmi elles, la directive cadre sur l’eau ou DCE (2000/60/CE) vise à la protection et à l’amélioration de la qualité des milieux aquatiques naturels. Pour atteindre ces objectifs, la DCE présente une méthode de travail qui repose sur l’identification du problème, l’établissement d’un plan de gestion, la définition des actions nécessaires et enfin le suivi des résultats. La DCE a aussi établi une liste qui regroupe les substances jugées dangereuses et qui doivent être surveillées et traitées en priorité vu les menaces identifiées. Parmi ces substances, on trouve essentiellement des métaux lourds et des pesticides. Cette liste est ensuite complétée par une liste de vigilance avec, pour la première fois, des produits pharmaceutiques.

Afin d’assurer la surveillance de ces polluants dans les milieux naturels ou leur suivi au cours des traitements des eaux, des outils analytiques sont indispensables. Il existe certes des techniques analytiques conventionnelles efficaces mais elles sont souvent limitées par la durée des analyses et l’utilisation d’un appareillage imposant comme dans le cas des techniques chromatographiques. En effet, pour répondre aux défis actuels, il est indispensable de s’affranchir de ces outils conventionnels et de chercher d’autres alternatives qui sont plus adaptées aux besoins de pays ayant des budgets limités et aux mesures sur site rapides et directes. Les biocapteurs électrochimiques semblent être les plus à même de répondre à un projet de miniaturisation pour faciliter la surveillance et le suivi des polluants dans l’eau au niveau mondial. Pour ce type de biocapteur, un marquage redox est souvent utilisé afin d’améliorer le signal. Ces marqueurs bien que disponibles et efficaces sont en nombre très limité et développer de nouvelles sondes est un prérequis à leur développement.

Contexte scientifique

Pollution des eaux

Plus des deux tiers de la surface de la Terre sont recouverts d’eau et malgré cette abondance, cette ressource essentielle est en danger. Alors que la population mondiale continue de croître et que l’activité humaine se développe, la pression exercée sur les ressources en eau ne cesse d’augmenter. En plus d’une surconsommation d’eau à l’échelle mondiale, la pollution aquatique a atteint un seuil alarmant. La présence de polluants dans l’eau conduit à un changement des caractéristiques physico-chimiques des milieux, à des contaminations microbiologiques importantes, à une accumulation des substances toxiques, à des perturbations endocriniennes et enfin à une mortalité massive des espèces marines. Aujourd’hui, la menace ne se manifeste plus comme une simple dégradation de la qualité des eaux, mais elle concerne aussi la santé et la sécurité des êtres vivants. Les organismes aquatiques sont généralement les plus exposés aux dangers de cette pollution. Cependant, la santé humaine est aussi menacée, notamment par la consommation de produits de la mer (poissons, mollusques ou crustacés), qui ont accumulé des éléments toxiques dans leurs tissus ou aussi l’eau potable contaminée.

Les principales sources de pollution des milieux aquatiques sont les activités urbaines, industrielles et agricoles. En effet, le rejet d’effluents provenant de différentes sources (stations d’épurations, industries ou autre) et le lessivage des sols contaminés (voies routières ou terres agricoles traitées) sont à l’origine de la présence de divers polluants dans l’eau. Ces polluants peuvent être classés selon différentes catégories. Ainsi, parmi les polluants chimiques, on distingue les polluants minéraux qui sont généralement représentés par les éléments traces métalliques (plomb, zinc, chrome…), les phosphates, les sulfates et les nitrates des polluants organiques de l’environnement tels que les hydrocarbures (aromatiques polycycliques ou aliphatiques), les solvants chlorés et non chlorés, les phénols, les pesticides organiques… Il existe également des polluants, qualifiés de contaminants biologiques, comme les microorganismes pathogènes regroupant des bactéries, parasites ou virus, essentiellement d’origine fécale, mais aussi les cyanobactéries toxiques. Enfin, les éléments radioactifs forment une catégorie distincte car leurs sources sont bien définies et ils bénéficient d’un suivi et d’une surveillance spécifique. Face aux menaces qui pèsent sur nos ressources en eau, le parlement Européen a établi une politique globale communautaire dans le domaine de l’eau en adoptant une directive cadre sur l’eau (DCE) (2000/60/CE). Cette directive a pour but de protéger l’environnement et d’améliorer la qualité des écosystèmes aquatiques en établissant des programmes de prévention et réduction de la pollution de l’eau et en promouvant son utilisation durable.

Substances émergentes 

Le programme de surveillance et la protection des milieux aquatiques, établi par l’Union Européenne et réglementé par la DCE, se basait sur une liste regroupant des substances ou groupes de substances chimiques « prioritaires » dont certaines sont considérées comme « dangereuses prioritaires » (2455/2001). Cette liste est régulièrement mise à jour afin de faciliter le suivi et la surveillance de la qualité chimique des eaux, de limiter les dégâts de la pollution et d’améliorer l’environnement aquatique. En plus des substances prioritaires, les polluants dits « émergents » sont au centre des préoccupations des législateurs. Ces contaminants sont définis comme des composés utilisés quotidiennement en large quantité sans que leurs effets sur l’environnement ne soient toujours avérés. Leur suivi dans l’eau n’est pas encore soumis à réglementation et les études qui traitent cette problématique sont rares . Le manque des données concernant les risques liés à la présence de ces substances émergentes dans les milieux aquatiques rend la prise de décision difficile quant à leur intégration ou non, dans la liste des polluants prioritaires.

Pour remédier à ce problème, une liste de vigilance a été élaborée à partir des programmes de surveillance nationaux, en marge de la DCE. Cette liste regroupe les substances émergentes qui nécessitent une attention particulière en raison de leur quantité élevée, du potentiel danger pour la santé des organismes vivants et/ou du besoin de développer plus de techniques d’analyse pour leur détection. Cette liste de vigilance a été publiée en 2015 (2015/495) et mise à jour en 2018 (2018/840). Actuellement, elle inclut 8 substances ou groupes de substances : les dérivés estrogéniques : 17-β-estradiol (E2), estrone (E1) et 17-α-ethinylestradiol (EE2) ; les antibiotiques de la classe des macrolides : érythromycine, clarithromycine, azithromycine ainsi que l’amoxicilline et le ciprofloxacine ; les pesticides, methiocarbe ; les insecticides de la famille des néonicotinoides : imidaclopride, thiaclopride, thiamethoxame, clothianidine, acétamipride mais également le métaflumizone. Cette liste mentionne les concentrations sans effet prévisible pour l’environnement (PNECs : Predicted No Effect Concentrations) et les méthodes d’analyse possibles.

Hormones ostrogéniques

Parmi les substances de la liste de vigilance, figurent trois hormones estrogéniques, deux hormones sexuelles naturelles, l’estrone (E1) et le 17-βestradiol (E2) et une hormone synthétique, le 17-α-ethinylestradiol (EE2). Ces composés ainsi que leurs produits d’oxydation, sont considérés comme perturbateurs endocriniens . En effet, l’OMS a défini en 2002 les perturbateurs endocriniens comme « des substances chimiques d’origine naturelle ou artificielle étrangères à l’organisme. Elles peuvent interférer avec le fonctionnement du système endocrinien et introduire des effets néfastes sur l’organisme d’un individu ou sur ses descendants ». Une fois dans l’organisme, les perturbateurs endocriniens peuvent interférer avec l’action des hormones naturelles en se fixant sur les récepteurs de ces dernières. Des modifications des concentrations hormonales peuvent également être observées suite à une perturbation ou à une inhibition du mécanisme de production . Ces substances sont un danger potentiel pour l’environnement et la santé . Plusieurs études ont été réalisées afin de comprendre les conséquences de la présence des perturbateurs endocriniens dans les eaux. Chez l’Homme, les résultats ont montré que l’exposition à des perturbateurs endocriniens de type estrogénique pourrait être impliquée dans le cancer du sein, des testicules et de la prostate ainsi que des problèmes de reproduction et d’infertilité. Chez les organismes marins, des problèmes liés à la croissance, la reproduction et la mortalité ont été constatés en plus de l’hermaphrodisme animal .

Parmi les hormones estrogéniques, nous nous sommes intéressés dans ce travail au 17-β-estradiol (E2) et son dérivé synthétique le 17-α-ethinylestradiol (EE2). L’E2 est le principal estrogène chez les vertébrés. Il est associé au système de reproduction féminin et au maintien des caractères sexuels. Cette hormone est produite chez la femme par le follicule de De Graaf, le corps jaune, les glandes surrénales ainsi que le placenta et chez l’homme par les testicules. L’EE2 est une hormone synthétique dérivée de l’estrogène naturel E2 (Fig.1). Elle est principalement utilisée en tant que composant de pilules contraceptives mais aussi en médecine humaine pour la thérapie hormonale de substitution et dans le cas de la suspension de l’allaitement.

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Table des matières

Introduction Générale
Chapitre 1 : Etude bibliographique
I. Contexte scientifique
I.1. Pollution des eaux
I.2. Substances émergentes
I.3. Hormones ostrogéniques
II. Détection des substances cibles
II.1. Méthodes de détection classiques
II.1.1. Méthodes chromatographiques
II.1.2. Méthodes biologiques globales
II.1.3. Méthodes biologiques spécifiques
II.2. Méthodes alternatives : Les biocapteurs
II.2.1. Définition
II.2.2. Eléments pour la conception de biocapteurs
II.2.2.1. Récepteurs
a. Récepteurs catalytiques
b. Récepteurs d’affinité non catalytiques
II.2.2.2. Principales méthodes d’immobilisation des bio-récepteurs
a. Adsorption physique
b. Inclusion ou piégeage
c. Couplage covalent
II.2.2.3. Transducteurs
a. Transducteurs optiques
b. Transducteurs massiques
c. Transducteurs thermométriques
d. Transducteurs électrochimiques
II.2.3. Biocapteurs pour la détection des estrogènes
II.2.3.1. Immunocapteurs
II.2.3.2. Aptacapteurs
a. Principe général d’un aptacapteur
b. Aptacapteurs pour la détection des estrogènes
III. Sondes redox pour le marquage des biocapteurs
III.1. Marqueurs électro-actifs classiques
III.1.1. Bleu de méthylène
III.1.2. Ferrocène
III.1.3. Anthraquinone
III.2. Nouveaux marqueurs électro-actifs : Complexes métalliques de type salen/salan
Chapitre 2 : Synthèse et caractérisation des complexes métalliques
I. Introduction
II. Résultats et discussion
II.1. Synthèse des composés salen 1a et salan 1b
II.2. Synthèse des complexes
II.3. Caractérisation physicochimique des complexes
II.3.1. Caractérisation des composés 10 et 11
II.3.2. Caractérisation du composé 12
III. Partie expérimentale
III.1. Réactifs et appareillages
III.2. Synthèse des complexes métalliques
III.1.1. Synthèse du ligand salen
III.1.2. Synthèse du ligand salan
III.1.3. Complexation métallique
III.2. Caractérisation des complexes métalliques
III.2.1. Spectroscopie UV-Visible
III.2.2. Voltammétrie cyclique (CV)
IV. Conclusion
Chapitre 3 : Couplage d’un aptamère anti-estradiol aux composés synthétisés
I. Introduction
II. Résultats et discussion
II.1. Choix de l’aptamère
II.2. Résultats du marquage
II.2.1. Linéarisation de l’aptamère
II.2.2. Couplage aptamère-salen
II.2.3. Couplage aptamère-salan
III. Partie expérimentale
III.1. Linéarisation de l’aptamère
III.2. Couplage Aptamère-marqueur
IV. Conclusion
Chapitre 4 : Conception de l’aptacapteur pour la détection de l’estradiol
I. Introduction
II. Résultats et discussion
II.1. Conception de l’aptacapteur marqué au VO-salan
II.2. Détection des hormones cibles par l’aptacapteur marqué au VO-salan
II.3. Détection de l’estradiol par l’aptacapteur marqué au bleu de méthylène
III. Partie expérimentale
III.1. Conception de l’aptacapteur marqué au VO-salan
III.1.1. Modification de la surface de l’électrode
III.1.2. Activation de la surface modifiée
III.1.3. Immobilisation de l’aptamère marqué
III.1.4. Détection des cibles
III.2. Détection d’E2 par l’aptacapteur marqué au bleu de méthylène
IV. Conclusion
Conclusion

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