Nouvelle méthode pour calculer la puissance de l’implant intra-oculaire dans la cataracte congénitale en fonction de l’âge

Le choix de la puissance de l’implant intra-oculaire est crucial dans le développement visuel d’un œil avec une cataracte congénitale. Le choix de la puissance de l’implant chez l’enfant est plus difficile que chez l’adulte pour de multiples raisons. D’une part, les mesures de biométrie et les formules de calcul de puissance de l’implant sont moins précises chez l’enfant. D’autre part, le choix de la cible réfractive nécessite l’anticipation de l’élongation oculaire. La stratégie pour déterminer la cible réfractive chez l’enfant a évolué au fil du temps. Avant 1986, certains auteurs préféraient viser l’emmétropie en postopératoire immédiat afin de faciliter la rééducation de l’amblyopie . Cependant, avec cette méthode, les enfants devenaient rapidement myopes et devaient souvent avoir recours à un changement d’implant. Ainsi, en 1997, Dahan a été l’un des premiers à proposer une sous correction de l’implant dans la cataracte congénitale1. En effet, il s’est aperçu que l’hypermétropie résiduelle à cette sous correction n’aggravait pas l’amblyopie tant qu’elle était bien corrigée. Il recommandait donc de choisir 80% de la puissance de l’implant visant l’emmétropie avant l’âge de 2 ans et 90% entre 2 et 8 ans. En 1998, Enyedi a proposé une autre méthode plus précise avec des cibles réfractives différentes en fonction de l’âge d’implantation : +6 dioptries (D) à 1 an, +5 D à 2 ans, +4 D à 3 ans, +3 D à 4 ans, +2 D à 5 ans, +1 D à 6 ans, plan à 7 ans et -1 à -2 D pour les enfants de plus de 8 ans . Ces 20 dernières années, les praticiens ont ajusté ces recommandations en fonction de leur expérience. Cependant, malgré le bon respect de ces méthodes, la majorité des enfants implantés présentent à l’heure actuelle une myopie importante à l’âge adulte . En effet, la plupart de ces méthodes estiment que l’enfant est emmétrope aux alentours de 8 ans. Or, une étude européenne récente incluant plus de 12 000 biométries entre l’âge de 6 et 45 ans a montré que la longueur axiale augmentait jusqu’à l’âge de 15 ans. De plus, aucune de ces méthodes ne prend en compte la longueur axiale initiale de l’œil. Or, chaque individu a une longueur axiale unique déterminée majoritairement par la génétique. Il serait donc intéressant de trouver une méthode plus précise pour calculer la puissance de l’implant chez l’enfant. En 2019, Trivedi et ces associés ont été les premiers à proposer de choisir la puissance de l’implant grâce à un modèle prédisant la croissance de l’œil des enfants avec une cataracte congénitale bilatérale8. Cependant, leur modèle se basait sur une équation linéaire alors que la croissance de l’œil se rapproche plus d’une équation logarithmique. L’ensemble de ces arguments nous a donc motivé à proposer une nouvelle formule basée sur un logarithme népérien qui permettrai de calculer la puissance de l’implant en fonction de l’âge et de la longueur axiale initiale tout en visant l’emmétropie à l’âge de 15 ans.

Base de données 

Il s’agit d’une étude descriptive rétrospective monocentrique dans laquelle on a recueilli les données des dossiers médicaux des enfants opérés et implantés de cataracte congénitale au CHU Nord de Marseille entre 2005 et 2020. Les caractéristiques collectées dans la base de données étaient : l’âge au diagnostic, le type de cataracte, la présence d’autres pathologies, la kératométrie et longueur axiale avant implantation, le type de biométrie, la puissance de l’implant, la marque de l’implant, la réfraction cible, la formule de calcul de l’implant, l’âge d’implantation, la position de l’implant, les complications per ou post-opératoires, l’acuité visuelle et la réfraction un mois après implantation ainsi que l’acuité visuelle, la réfraction, la kératométrie et la longueur axiale à la dernière visite. Les enfants ayant un glaucome, un suivi inférieur à un an ou des données manquantes ont été exclus de l’analyse.

Calcul de la puissance de l’implant 

Les enfants coopérant ont bénéficié d’une biométrie par interférométrie à cohérence partielle (Lenstar 900, Haag-Streit Diagnostics, Switzerland). Les nouveau-nés, nourrissons et enfants non-coopérants ont bénéficié d’un examen sous anesthésie générale avec mesure de la kératométrie avec un auto refractomètre portable (Retinomax 5, Righton, Japan) et de la longueur axiale avec un échographe mode A (Compact Touch, Quantel Medical, France). Entre 2005 et 2020, la stratégie de sous correction des implants dans le service d’ophtalmologie au CHU de Marseille était la suivante : 60% de SRKT entre 0 et 3 mois, 65% entre 3 et 6 mois, 70% entre 6 et 12 mois, 75% entre 12 et 18 mois, 80% entre 18 et 24 mois, 85% entre 24 et 36 mois, 90% entre 36 et 60 mois and 100% au-dessus de 60 mois. A noter que peu d’enfants ont été implantés avant l’âge de 18 mois afin d’éviter les erreurs liées à la forte variation de longueur axiale avant cet âge. En 2020, une nouvelle stratégie a été proposée dans le service. Cette stratégie était basée sur un modèle de régression logarithmique prédisant la croissance normale de l’œil publié par Bach en 2019 :

• “Longueur axiale = 0,966 x logₑ(age) + 18,270”
La longueur axiale mesurée par interférométrie ou par échographie avant l’implantation a été comparée à la longueur axiale prédite par Bach au même âge. La différence (Dt) entre la longueur axiale calculée et la longueur axiale mesurée a été ajoutée à la formule logarithmique pour créer un modèle de régression calibré :

• “Longueur axiale calibrée = Dt + (0,966 x logₑ(age) + 18,270)”
La longueur axiale à 15 ans et donc la croissance de l’œil entre l’implantation et 15 ans a été prédite avec cette formule calibrée. Cette croissance en millimètres a été transformée en dioptries pour servir de cible réfractive au moment de l’implantation. Finalement, il a été décidé volontairement de choisir l’implant ayant la cible réfractive un cran plus hypermétrope que celle prédite par la nouvelle formule.

Technique chirurgicale 

La chirurgie de la cataracte a été réalisée par le même chirurgien. L’incision principale était réalisée en temporal puis le chirurgien réalisait un capsulorhexis antérieur, suivi d’une aspiration du cristallin, d’un capsulorhexis postérieur, d’une vitrectomie antérieure puis de l’insertion de l’implant dans le sac ou le sulcus. S’il s’agissait d’une implantation secondaire, l’implant était inséré dans le sulcus ou fixé à la sclère. L’incision était suturée systématiquement par un point de nylon 10/0. Tous les enfants ont reçu un implant acrylique hydrophobe.

Rééducation visuelles 

L’acuité visuelle et la réfraction ont été évaluées un mois après l’extraction du cristallin, puis tous les 6 mois. La correction optique totale a été prescrite après le retrait du point un mois après la chirurgie. Des lunettes bifocales ont été prescrites après l’âge de 2 ans. La correction optique était changée uniquement en cas de modification significative de la réfraction. Les enfants avec une cataracte unilatérale devaient réaliser une occlusion de l’œil sain pendant 80 % des heures d’éveil. Les enfants atteints de cataracte bilatérale avaient une occlusion alternée adaptée à leur acuité visuelle.

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Table des matières

Version en Français
Introduction
Méthodes
Résultats
Discussion
Références
Annexe 1 : analyse de la nouvelle formule
Version en anglais
Abstract
Introduction
Methods
Results
Discussion
References
Supplemental Data 1: new formula analysis

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