Nouveaux composants électroniques à base du matériau AlN pour les futures applications de puissance

Bien que la pression environnementale pour réduire notre consommation soit forte, la demande mondiale d’énergie continue de croître et vraisemblablement cette tendance ne s’inversera pas. De nos jours, la production d’énergies fossiles représente plus de 80% de la production totale d’énergie dans le monde. D’après l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), la demande mondiale d’énergie pourrait augmenter de 45 % d’ici 2030, notamment en raison du développement démographique et de l’industrialisation de pays émergents. Afin de répondre à cette demande d’énergie en perpétuelle croissance, de nouvelles sources d’énergie sont développées. En parallèle, des efforts sont également déployés pour améliorer les systèmes de conversion d’énergie. Cette thématique, en plein essor, impacte de nombreuses applications qui nécessitent des composants aux performances de plus en plus élevées. C’est pourquoi il est indispensable d’améliorer les transistors de puissance qui composent les systèmes de conversion d’énergie, en partie à l’origine de pertes énergétiques dans les circuits.

Afin d’améliorer les performances des composants de puissance actuels, des efforts importants de recherches sont menés sur les matériaux et les technologies associées. Des moyens importants ont notamment été mobilisés dans le développement de transistors de puissance basés sur des semiconducteurs à «grands gaps», tels que le carbure de silicium (SiC) ou le nitrure de gallium (GaN). Ce dernier permet de repousser les limites des technologies silicium (transistors de type MOSFET ou IGBT), de manière significative, en termes de couple résistance à l’état passant/tension de claquage qui gouverne dans une large mesure le rendement des convertisseurs de puissance. La technologie HEMT (High Electron Mobility Transistor) en GaN permet également de bénéficier d’une tenue en température accrue.

CONTEXTE DE L’ELECTRONIQUE DE PUISSANCE

Généralités

L’électronique de puissance joue un rôle primordial dans le traitement, le conditionnement et l’utilisation de l’énergie électrique. Le convertisseur statique à semi-conducteur y est un élément clé. Des chargeurs de batterie de téléphones portables aux grandes interfaces d’éoliennes, l’électronique de puissance touche de nombreux aspects de l’activité humaine. Au cours de ces dernières années, la taille, le poids et le coût des convertisseurs n’ont cessé de diminuer, en grande partie grâce aux progrès réalisés dans le domaine des interrupteurs électroniques. Ces interrupteurs sont des composants commandables qui doivent être capables de supporter les contraintes en courant et en tension imposées par le reste du circuit. Dans le cas idéal, les transitions entre l’état ouvert (ON) et fermé (OFF) sont instantanées, la chute de tension à l’état passant est nulle et le courant est complètement bloqué à l’état OFF pour n’importe quelle tension. En réalité, les interrupteurs de puissance ne remplissent que partiellement ces conditions. Le comportement à l’ouverture, à la fermeture et en régime de conduction de l’interrupteur varie notablement selon le type d’interrupteur utilisé. Comme les puissances en jeu peuvent être importantes, la notion de rendement est essentielle car en plus des pertes, la chaleur devient difficile à évacuer et rend donc le système onéreux. D’un point de vue chronologique, c’est la diode qui a été inventée la première au tout début du 20ème siècle. En effet, c’est en 1901 que Peter Cooper Hewitt inventa le redresseur à vapeur de mercure. A cette même époque, en voulant améliorer la détection des ondes radio, John Fleming mettra au point la première diode à vide. Ce n’est qu’après la seconde guerre mondiale que la diode à semi conducteur (à base de germanium ou de silicium) remplacera la diode à vide. Le développement des semiconducteurs a entraîné la création de nombreuses variétés de diodes, exploitant les caractéristiques de la jonction PN, ou dans le cas des diodes électroluminescentes, des propriétés annexes du matériau. Le transistor à effet de champ (FET) a été observé et expliqué par John Bardeen et Walter Houser Brattain alors qu’ils travaillaient sous la direction de William Shockley aux Laboratoires Bell en 1947. Shockley a imaginé le concept des FET de manière indépendante en 1945, où il a d’abord essayé de moduler, sans succès, la conductivité d’un semi-conducteur composé de germanium et de cuivre. Ils inventèrent à la place un transistor à jonction bipolaire en 1947. Ils reçurent le prix Nobel de physique quelques années plus tard, en 1956. Le premier dispositif FET à avoir été mis au point avec succès est un transistor à effet de champ à jonction (JFET) en 1952 suivi du transistor à effet de champ métaloxyde-semi-conducteur (MOSFET) en 1959 [1], [2]. Les bases de la technologie MOSFET ont donc été posées par les travaux de Shockley, Bardeen et Brattain. En 1946, Bardeen explique son échec causé par les états de surface. Il a réalisé que les électrons sont piégés dans ces états localisés et forment une couche d’inversion. L’hypothèse de Bardeen a marqué la naissance de la physique des surfaces.

Bardeen a ensuite breveté en 1948 le précurseur du MOSFET, un FET à grille isolée (IGFET) avec une couche d’inversion. La couche d’inversion confine le flux des porteurs minoritaires, augmente la modulation et la conductivité, bien que son transport d’électrons dépende de l’isolant de la grille ou de la qualité de l’oxyde s’il est utilisé comme isolant au-dessus de la couche d’inversion. Le brevet de Bardeen ainsi que le concept de couche d’inversion constituent aujourd’hui la base de la technologie CMOS (Complementary MOS) dans lequel les MOSFET à canal p et à canal n sont connectés en série [3]. En 1955, Carl Frosch et Lincoln Derrick ont accidentellement recouvert la surface d’une plaquette de silicium d’une couche de dioxyde de silicium. Ils montrèrent que la couche d’oxyde empêchait certains dopants de pénétrer dans le silicium, tout en laissant passer d’autres. Ils découvrent ainsi l’effet passivant de l’oxydation sur la surface du semi-conducteur. Leurs travaux ultérieurs ont montré comment graver de petites ouvertures dans la couche d’oxyde pour diffuser les dopants dans des zones sélectionnées de la plaquette de silicium. Par la suite, le MOSFET a largement supplanté le transistor bipolaire et le JFET. Grâce à sa grande extensibilité, à sa consommation d’énergie beaucoup plus faible et à sa densité plus élevée que les transistors bipolaires à jonction, le MOSFET a permis le développement des circuits intégrés à haute densité. Le MOSFET est également capable de supporter une puissance supérieure à celle du JFET. Il a été le premier transistor véritablement compact qui a pu être miniaturisé et produit en masse pour une large gamme d’utilisations générant des niveaux de performance et de densité impossibles à obtenir avec des transistors bipolaires. D’un point de vue fonctionnement, le dispositif FET consiste en un canal actif par lequel les porteurs de charges, électrons ou trous, circulent de la source au drain. En effet, les FETs sont des dispositifs à semi-conducteur comportant trois électrodes :
– source (S), par laquelle les porteurs entrent dans le canal.
– drain (D), par lequel les charges quittent le canal.
– grille (G), la borne qui module la conductivité du canal et ainsi contrôle ID.

Les bornes de source et drain sont connectées au semi-conducteur par des contacts de type ohmique. De plus, la conductivité du canal est fonction du potentiel appliqué entre les bornes de grille et de source. Ces FETs peuvent être fabriqués à partir de divers matériaux tels que le carbure de silicium (SiC), l’arséniure de gallium (GaAs), ou le nitrure de gallium (GaN). Au milieu des années 1970, la technique de croissance par faisceaux moléculaires (MBE) a été mise au point, de même que la technique de dopage par modulation. En 1979, Takashi Mimura et ses collaborateurs ont fait partie des premiers à concevoir le transistor à haute mobilité d’électrons (HEMT) [4]. L’hétérojonction à dopage modulé conduit à la formation d’un gaz d’électrons bidimensionnelle (2DEG) à l’hétéro-interface entre deux semi conducteurs de bandes interdites différentes à forte mobilité [5]. Les premières démonstrations de modulation de dopage sur HEMT ont été réalisées avec des empilements AlGaAs/GaAs. Au cours des dernières décennies, les dispositifs de type HEMT ont utilisés divers systèmes de matériaux tels que AlGaAs/GaAs, InP/InAlAs/-InGaAs, SiC. Parmi ces systèmes, les HEMTs AlGaN/GaN sont les structures qui ont fait l’objet de recherches approfondies ces derniers temps de par leurs propriétés physiques exceptionnelles. Ils permettent de bénéficier d’une forte tenue en tension et possèdent une grande vitesse de saturation des électrons, le positionnant comme un excellent candidat pour les applications de commutation de puissance.

Applications et marché

Les composants de puissance pour la gestion de l’énergie sont utilisés dans des applications en constante évolution nécessitant des systèmes de plus en plus compacts, moins chers et plus efficaces. Les divers avantages du GaN sur substrat de silicium (Si), tels que son faible coût et la réduction des besoins de refroidissement, ont renforcé son intérêt par rapport à ses concurrents, comme le silicium et le carbure de silicium (SiC). Il est important de noté que le gallium est un élément de production primaire complexe et ayant un impact important sur l’environnement. Son adoption grandissante ces dernières années a également été renforcée par la demande croissante de composants de puissance à faible consommation d’énergie et haute performance. En effet, l’évolution rapide du marché des composants à base de semi-conducteurs à large bande interdite entre 2018 et 2019 a positionné le SiC et le GaN comme des matériaux clés pour l’électronique de puissance. L’intérêt pour le GaN dans les applications grand public a connu un essor remarquable en raison de ses propriétés physiques avantageuses. Il permet, en effet, de délivrer simultanément une haute tension, un courant élevé et une faible résistance à l’état passant, ce qui se traduit par un fonctionnement à haut rendement sous forte puissance. En outre, sa large bande interdite offre une technologie robuste et fiable, capable de fonctionner à haute température. Cela ouvre donc la voie à un nombre croissant d’applications, notamment dans le domaine de l’électronique grand public, des transports et de l’énergie incluant les domaines de l’automobile et l’aérospatiale.

Actuellement, les transistors GaN disponibles dans le commerce proposent plusieurs gammes de tension :
a) Basse tension (VDS,max < 200 V) qui trouvent leurs applications dans les convertisseurs de puissance DC-DC, les contrôleurs de moteurs (motor driver), le transfert de puissance sans fil, les applications LiDAR, les micro-onduleurs solaires et dans la robotique. Ces dispositifs peuvent avoir des résistances à l’état passant inférieures à 2 m² (pour des courants de drain de plusieurs dizaines d’ampères) [7] jusqu’à 100-200 m² (pour des courants de fonctionnement de l’ordre de 0,5-5 A) [8], [9].
b) Moyenne tension (VDS, max jusqu’à 650V) : pour des applications telles que les serveurs de télécommunication, les convertisseurs industriels, les onduleurs photovoltaïques, la commande de servomoteurs[10], les applications d’éclairage, les adaptateurs de puissance [11], les amplificateurs de classe D [12], les SMPS de centres de données [13], [14] et pour certaines applications automobiles telles que les systèmes à commande électrique, les systèmes de propulsion électrique et les convertisseurs pour les véhicules électriques (EV) et hybrides.
c) Haute tension (VDS, max au-delà de 1 kV). Actuellement, aucun transistor GaN n’est disponible dans cette gamme. Les transistors GaN commerciaux les plus puissants ont une tension maximale entre 900 V et 1 kV.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 INTRODUCTION AUX TRANSISTORS DE PUISSANCE DE TYPE HEMT A BASE DE GAN
1. CONTEXTE DE L’ELECTRONIQUE DE PUISSANCE
a. Généralités
b. Applications et marché
2. PROPRIETES DU GAN
a. Structure cristallographique
b. Structure de bandes électroniques
c. Croissance et Dopage
d. Propriétés physiques (EG, EC, μ, εr, κ)
3. TRANSISTOR HEMT GAN
a. Description de l’empilement typique d’un transistor GaN
b. Gaz bidimensionnel d’électrons
c. Techniques de fabrication
d. Techniques de caractérisation électrique
4. LIMITATIONS DES TRANSISTORS LATERAUX
a. Limitations du RON dynamique
b. Conduction parasite à l’interface du substrat Si
c. Transistors GaN de type normally-off
5. ETAT DE L’ART
CONCLUSION DU CHAPITRE 1
CHAPITRE 2 OPTIMISATION DU BUFFER AU SEIN DE TRANSISTORS DE PUISSANCE GAN NORMALLY-OFF
1. ANALYSE DU BUFFER PAR DECOMPOSITION
a. Description des structures
b. Caractérisations électriques
2. ETUDE D’UNE NOUVELLE ARCHITECTURE DE BUFFER A BASE DE SUPER RESEAUX
a. Comparaison du buffer référence (step-graded : gradient de buffer) et super-réseaux (SL)
3. DEVELOPPEMENT DE TRANSISTORS A BUFFER SL DE TYPE NORMALLY-OFF
a. Solution technologique choisie
b. Fabrication des composants
c. Caractérisations électriques
CONCLUSION DU CHAPITRE 2
CHAPITRE 3 GRAVURE LOCALISEE DU SUBSTRAT (LSR)
1. PRESENTATION DU PRINCIPE DE GRAVURE LOCALISEE DU SUBSTRAT
2. OPTIMISATION DE LA BRIQUE TECHNOLOGIQUE
a. Preuve de concept : transistors fabriqués à l’IEMN
b. Application de l’approche à des composants industriels larges
CONCLUSION DU CHAPITRE 3
CHAPITRE 4 VERS L’IMPLEMENTATION DE SEMI-CONDUCTEURS A ULTRA LARGE BANDE INTERDITE
1. INTRODUCTION AUX MATERIAUX A ULTRA LARGE BANDE INTERDITE
2. HETEROSTRUCTURES AVEC BUFFER EN ALN
a. Description des structures
b. Caractérisations électriques
c. Mesure en température
3. IMPACT DE L’EPAISSEUR DU CANAL GAN SUR BUFFER ALN
a. Description des structures
b. Caractérisations électriques
4. STRUCTURE A CANAL ALGAN
a. Description des structures
b. Caractérisations électriques
c. Contact ohmique par recroissance
CONCLUSION DU CHAPITRE 4
CONCLUSION GENERALE
PERSPECTIVES ET FUTURS TRAVAUX
1. FIABILITE DES TRANSISTORS GAN A 1200 V AVEC BUFFER SUPER RESEAUX : MESURES DYNAMIQUES ET VIEILLISSEMENT
2. PROCEDE DE FABRICATION DE TRANSISTORS NORMALLY OFF INNOVANTS SANS GRAVURE DE LA COUCHE GAN DOPEE P
3. UTILISATION DU PROCEDE DE GRAVURE LOCALISEE DU SUBSTRAT POUR LE DEVELOPPEMENT DE TRANSISTORS VERTICAUX
4. DEVELOPPEMENT DE TRANSISTORS DE PUISSANCE A BASE DE UWBG
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES

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