La pollution de l’environnement et l’exposition permanente des êtres humains à des métaux lourds toxiques tels que le mercure, le cadmium, le nickel ou le plomb sont de graves problèmes qui ne cessent de prendre de l’ampleur dans le monde entier. L’exposition aux métaux s’est fortement aggravée au cours des cinquante dernières années avec l’augmentation exponentielle de l’utilisation de métaux lourds dans les processus et produits industriels.
Le nickel est un élément naturel de la croute terrestre, appartenant au groupe VIIIb du tableau périodique. Il était inconnujusqu’au milieu du XVIIIéme siècle, quand ses caractéristiques physicochimiques ont été mises en évidence et utilisées plus tard, notamment dans les batteries et les pièces de monnaie. Le nickel a aussi servi pour protéger l’acier contre la corrosion (Nickelage), ou encore comme stabilisant pour les plastiques et comme pigment dans les produits céramiques (Maniyar et al., 2012; Scha umlöffel, 2012). Les principales causes d’exposition de l’Homme au nickel sont l’alimentati on (poissons, mollusques bivalves, végétaux dont les légumes riches en fibres) et le tabagisme où le métal ingéré principalement par voies digestives, se distribue dans le sang, et s’accumule ensuite dans différents organes cibles (foie, reins, et cerveau), provoquant ainsi des effets hépatotoxiques, néphrotoxiques et hématotoxiques (He et al., 2013; Bardack et al., 2014; Boulila et al., 2015a). De plus, de nombreuses études permettent de penser que ce métal peut induire de multiples cancers comme certains affectant le rein, le poumon, les testicules ou la prostate (Kasprzak et al., 2003).
Au niveau cellulaire, le nickel se présente sous des formes chimiques différentes, mais il ne pénètre efficacement dans les cellules que sous la forme cationique bivalente (Ni2+) ou sous forme de chlorure ou de sulfate de nickel. L’ion nickel des composés solubles peut atteindre le noyau cellulaire par solubilisation et diffusion ou par les systèmes de transport des ions métalliques, les composés peu solubles sont phagocytés et les vacuoles libèrent les ions nickel dans le noyau cellulaire (Kasprzak et al., 2003), qui peuvent provoquer des lésions directes sur tous les composants cellulaires: peroxydation des lipides, protéines et des acides nucléiques, due aux attaques des radicaux libres générées par le nickel (Audrey et al., 2015). Par ailleurs, les cellules ont développé des systèmes de défenses pour métaboliser les espèces oxydantes et ainsi limiter les dégâts qu’elles provoquent. Ces systèmes antioxydants protègent les constituants cellulaires des agressions radicalaires en interagissant directement avec ces radicaux ou indirectement en produisant des peptides comme les métallothionéines ou le glutathion (Lou et al., 2013). De nombreuses études indiquent une production massive d’espèces oxydantes et l’inhibition des activités des principales enzymes antioxydants due à la cytototoxicité du nickel dans une cellule peuvent favoriser une mort cellulaire excessive ou une évolution tumorale. Les effets oxydatifs des métaux lourds peuvent être réduits par les antioxydants naturels comme les oligoéléments (zinc, cuivre, cobalt) ou les vitamines. La vitamine C (hydrosoluble) et la vitamine E (liposoluble) sont des antioxydants puissants protègent le corps contre les attaques des radicaux libres, responsables aux peroxydations lipidiques et protéiques (Hattiwale et al., 2013).
La littérature scientifique internationale a accumulé une masse considérable de preuves attestant de l’extrême toxicité des métaux lourds pour les êtres humains (Henderson et al., 2012). Les effets protecteurs de la vitamine C et/ou la vitamine E contre les effets hépatotoxiques (Ajith et al., 2009; Ebuehi et al., 2012), néphrotoxiques (Atasayar et al., 2008) et hématotoxiques (Das et al., 2007) des métaux lourds ont été bien documenté. Cependant, certains chercheurs ont étudié le rôle bénéfique de la vitamine C ou vitamine E contre le nickel qui induit des lésions hépatiques (Rao et al., 2009; Kasprzak et al., 2011) et altérations hématologiques (Das et al., 2007). Jusqu’à aujourd’hui, aucune étude ne s’est penchée sur l’effet protecteur de la vitamine C et la vitamine E en combinaison contre la toxicité du nickel.
Nickel caractéristiques et toxicité
Généralités
Le nickel (Ni) est un élément chimique métallique blanc argenté symbole Ni et numéro atomique 28. Il a la structure électronique [Ni] 4s2 3d8 , et il fait partie des éléments de transition qui se trouvent dans bloc d du tableau périodique. Pendant plusieurs milliers d’années, le nickel fut utilisé dans les pièces de monnaie sous forme d’alliages nickel-cuivre, mais il ne fut considéré comme un élément à part entière qu’à partir de 1751, lorsque le chimiste suédois Axel Frederic Crönstedt l’isola à partir du minerai de niccolite (NiAs) (Schaumlöffel, 2012). Le nickel est un métal résistant, malléable, ductile et facilement polissable. Il existe sous la forme de cinq isotopes stables et a une faible réactivité chimique. Il est soluble dans l’acide nitrique dilué, est passif (non réactif) dans l’acide nitrique concentré et ne réagit pas avec les bases (Maniyar et al., 2012). Il présente deux états principaux d’oxydation correspondant aux espèces ioniques Ni+2 et Ni+3 (David et al., 2015). Le nickel est assez peu répandu dans l’écorce terrestre. On le trouve dans les météorites et sous forme combinée dans des minéraux comme la garniérite ((Ni, Mg) 3[Si2O5] (OH)4)), la millérite (NiS), la niccolite (NiAs) et la pentlandite ((Fe,Ni)9S8). La plupart des sels de nickel, comme le chlorure de nickel (NiCl2), le sulfate de nickel (NiSO4) et le nitrate de nickel (Ni(NO3)2) sont verts ou bleus, et sont le plus souvent hydratés. Alors, le nickel métallique ne se rencontre pas fréquemment dans la nature, il existe le plus sauvent sous forme d’un alliage fer-nickel dans certaines roches ultramafiques riche en fer et en magnésium. Les composés du nickel sont souvent identifiés en ajoutant un réactif organique, l’éthylgloxime, qui forme un précipité rouge et floculeux en présence de nickel (Chi et al., 2016).
Usages des composés de nickel
Le nickel et ses composés possèdent des meilleures caractéristiques physico-chimiques, qui le font un métal le plus demandé dans divers produits et procédés :
• Le carbonate tétrahydroxytrinickel est employé pour le revêtement électrolytique, comme catalyseur pour céramique.
• Le carbonate de nickel est employé dans des pièces électroniques.
• Le dichlorure de nickel anhydre sert d’absorbant pour l’ammoniac dans les masques à gaz et pour le nickelage.
• Le dihydroxyde de nickel est employé pour la fabrication des électrodes dans les piles secondaires.
• Le monoxyde de nickel est principalement utilisé dans les opérations métallurgiques, où il constitué une importante matière première pour les procédés de fonte et de production d’alliages, et il est aussi employé dans la fabrication des catalyseurs et des solutions électrolytiques dans les piles nickel-cadmium (IARC, 2012).
Devenir dans l’organisme
En cas d’exposition professionnelle, la principale voie de pénétration dans l’organisme est l’absorption par voie respiratoire. Le dépôt, la rétention au niveau du tractus respiratoire et l’absorption du nickel après inhalation dépendent des caractéristiques physico-chimiques des particules inhalées. La solubilité et la taille gero-dynamique des particules étant des facteurs déterminants. Chez l’homme, environ 20 à 35 % du nickel déposé au niveau des poumons sont absorbés. Le reste est expectoré, ingéré ou alors retenu au niveau du tractus respiratoire (Delemotte et al., 2001). De façon schématique, les composés solubles sont facilement absorbés: des composés tels le sulfate, le chlorure et le nitrate de nickel (11 %, 9,8 % et 34 % respectivement) sont donc rapidement absorbés. En revanche, les composés moins solubles comme le subsulfite et l’oxyde de nickel (0,47 %, 0,01 % respectivement) sont absorbés très lentement. Ces valeurs d’absorption en % sont en relation avec la solubilité des différents composés de nickel (Kasprzak et al., 2003). Dans le plasma, le nickel est essentiellement liée à l’albumine, l’alpha 2 globuline et à le L-histidine avec une demi-vie d’absorption chez l’homme variant de 1 à 2 jours. Chez l’animal, Après exposition par voie orale, la distribution du nickel s’effectue principalement dans les reins, mais il est également retrouvé au niveau du foie, du cœur, des poumons, du tissu adipeux, du système nerveux périphérique et du cerveau (Tallkvist, 1997). Après administration intra trachéale, la voie d’élimination du nickel chez les rats dépend de la solubilité des composés; Pour les composés solubles (chlorure, sulfate), environ 70 % de la dose administrée est excrétée dans l’urine en 3 jours. Pour les composés moins solubles (oxyde, disulfure de trinickel), une grande partie de la dose est excrétée dans les fèces. La concentration de nickel dans l’urine et le plasma constitue un indicateur valable d’une exposition aux dérivés solubles du nickel (ATSDR, 1997).
Evaluation toxicologique
Toxicité aiguë
L’intoxication aiguë accidentelle par voie orale provoque essentiellement des troubles digestifs (nausée, vaniteusement, diarrhée, douleur abdominale), des céphalées et une asthénie associés parfois à une bradycardie et une légère hyperthermie. Ces signes cèdent assez rapidement mais dans certains cas, peuvent persister quelques jours. D’après un rapport récent, l’ingestion chez plusieurs personnes de 15 à 45 mg/Kg de nickel en 24 heures (sous formes de chlorure) a entraîné également, dans quelques cas, une petite élévation de la bilirubinémie (De Brouwere et al., 2012). Un cas mortel à été signalé; celui d’un enfant ayant ingéré environ 200 mg/kg de nickel (sous forme de sulfate). L’emploi des sels de nickel dans l’industrie peut produire une dermatite, cette lésion appelée eczéma du nickel «Nickel itch »; apparaît surtout chez les travailleurs occupés aux opérations de nickelage. Il s’agit d’un eczéma allergique, cependant que l’allergie respiratoire est rare (Kolokitha & Chatzistavrou, 2009). Des études ont été pointé sur des animaux de laboratoire et in vitro, indiquent que les sels solubles de nickel tel que le dichlorure, le sulfate et le nitrate de nickel ont une toxicité aiguë qui varie de modérée à très élevée chez le rat [(DL50)] de 42,5 à 112 mg/Kg de masse corporelle, alors que la poudre de nickel et les sels de nickel insolubles (monoxyde de nickel vert ou noir, disulfure de trinickel et sulfure de nickel amorphe ) présentent une toxicité plus faible ( DL50 de 3235 à 9000 mg/Kg(m.c) (Haney et al., 2012).
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Table des matières
Introduction
Chapitre 01 : Etude bibliographique
1. Nickel caractéristiques et toxicité
1.1.Généralité
1.2.Usage et sources d’exposition
1.3.Devenir dans l’organisme
1.4.Evaluation toxicologique
1.4.1.Toxicité aigue
1.4.2.Toxicité chronique et subchronique
1.4.3.Cancérogénicité
1.4.4.Toxicité hépatique et rénale
1.4.5.Toxicité pulmonaire
1.5.Cytotoxicité du nickel
1.6.Radicaux libres générés par le nickel
2. Stress oxydative
2.1.Définition du stress oxydatif
2.2.Les espèces réactives de l’oxygène (ERO)
2.2.1.Sources endogènes d’ERO
2.3.Stress oxydative et conséquences cellulaires
2.3.1.Peroxydation lipidique
2.3.2.Oxydation des protéines
2.3.3.Oxydation des glucides
2.3.4.Altération de l’ADN
2.4.Les systèmes de défenses antioxydants
2.4.1.Les systèmes antioxydants enzymatiques
2.4.1.1.Les superxydesdismutases (SODS)
2.4.1.2.La catalase
2.4.1.3.Le glutathion peroxydase (GSH-Px)
2.4.2.Les systèmes antioxydants non enzymatiques
2.4.2.1.Le glutathion
2.4.2.2.Les métallothionines
2.4.3.Les antioxydants exogènes
2.4.3.1.Les oligoéléments
2.4.3.2. Vitamine E (ou α-Tocophérol)
2.4.3.3.Vitamine C (ou Acide Asorbique)
Chapitre 02 : Matériels et Méthodes
Matériels et Méthodes
1. Matériels
1.1.Matériel biologique
1.2.Matériel chimique
2. Méthodes
2.1.Prélèvement des échantillons
2.2.Prélèvement des organes
2.3.Dosage des paramètres hématologiques
2.4.Dosage des paramètres biochimiques
2.4.1. Dosage du glucose
2.4.2. Dosage du calcium
2.4.3. Dosage des protéines totales
2.4.4. Dosage de l’albumine
2.4.5. Dosage de la bilirubine totale et directe
2.4.6. Dosage de l’activité enzymatique de l’alanine aminotransférase (ALT/TGP)
2.4.7. Dosage de l’activité enzymatique de l’aspartate aminotransférase (AST/TGO)
2.4.8. Dosage de l’activité de phosphatase alcaline (PAL)
2.4.9. Dosage de l’urée
2.4.10. Dosage de la créatinine
2.4.11. Dosage de l’acide urique
2.4.12. Dosage des lipides totaux
2.4.13. Dosage du cholestérol
2.4.14. Dosage des triglycérides
2.5. Dosage des paramètres antioxydants
2.5.1. Préparation de l’homogénat
2.5.2. Dosage du taux de glutathion hépatique (GSH)
2.5.3. Dosage de l’activité de glutathion péroxydase (GSH-PX)
2.5.4. Dosage de l’activité du catalase
2.6.Evaluation histologique
2.7.Analyse statistique
Chapitre 03 : Résultats
1. Effet des traitements sur la croissance corporelle des souris
2. Effet des traitements sur les poids relatifs et absolu du foie et des reins
3. Effet des traitements sur la consommation alimentaire et en eau
4. Effet des traitements sur les paramètres hématologiques
5. Effet des traitements sur les paramètres biochimiques
6. Effet des traitements sur les biomarqueurs biochimiques de la fonction hépatique
7. Effet des traitements sur les activités des biomarqueurs enzymatiques de la fonction rénale
8. Effet des traitements sur le profile lipidique
9. Effet des traitements sur les paramètres de stress oxydative
10. Evaluation histopathologiques de l’organe métabolique (foie)
11. Evaluation histopathologiques de l’organe excréteur (reins)
Chapitre 04 : Discussion
Conclusion générale