Neuroprotéines sensibles aux ions calcium

Neuroprotéines sensibles aux ions calcium

N-myristoylation des protéines

La N-myristoylation est un type d’acylation protéique. Dans un premier temps, le concept d’acylation sera brièvement introduit. Ensuite, la N-myristoylation sera discutée plus en détails comme elle est importante pour ce projet.Tout d’abord, l’acylation d’une protéine consiste en la liaison covalente d’une molécule lipidique à un acide aminé d’une protéine. Cette acylation peut être faite de manière co-traductionnelle (dans la cellule lors de la traduction des protéines) ou post-traductionnelle (immédiatement après la synthèse de la protéine).9, 79 Les protéines acylées se trouvent partout dans les cellules (membrane plasmique, cytoplasme, noyau, cytosquelette, matrice extracellulaire).80 Les molécules lipidiques se lient de plusieurs manières. Il y a l’isoprénylation (liaison thioéther stable entre un résidu cystéine (Cys) C-terminal et un isoprène [farnésyl ou géranylgéranyl]), la S-acylation (liaison thioester stable entre un résidu Cys et un acide gras [plutôt l’acide palmitique que l’acide myristique]), l’O-acylation (liaison oxyester simple entre un résidu sérine (Ser) et un acide gras) et la N-acylation (liaison amide entre un résidu glycine (Gly) N-terminal et un acide gras [exclusivement de l’acide myristique (excepté dans l’œil) d’où la N-myristoylation]).L’acylation protéique la plus décrite dans la littérature est la N-myristoylation (Figure 1.16).81, 82 L’enzyme permettant la catalyse de cette réaction d’addition d’un groupement myristoyle à une protéine cible est la N-myristoyl-transférase (NMT).83-85 La séquence consensus Met-Gly-X-X-X-Ser/Thr (Met, méthionine; Thr, thréonine ), où X peut être n’importe quel acide aminé, est nécessaire en N-terminal de la protéine cible pour que la liaison avec l’acide myristique se produise.82 La Met doit toutefois être enlevée par une méthionine amino peptidase avant la liaison du groupement myristoyle.86-88 L’acide myristique doit alors être activé grâce à une molécule de coenzyme A (CoA) par l’enzyme acyl-CoA synthétase dans le cytoplasme de la cellule pour créer le complexe myristoyl-CoA. La NMT va ainsi utiliser le complexe myristoyl-CoA pour myristoyler la protéine cible.9, 82, 85-89 Ce processus est illustré à la Figure 1.16. La N-myristoylation est considérée comme une modification irréversible vu la force du lien amide entre la protéine et le groupement myristoyle. En règle générale, cette modification va se retrouver presqu’exclusivement sur des protéines ne contenant pas de domaine transmembranaire.80

N-myristoyltransférase

Il existe une exception pour l’exclusivité de la NMT pour l’acide myristique et elle se trouve dans l’œil. Les protéines seront uniquement myristoylées sauf dans l’œil où elles vont être acylées de manière hétérogène.9 Les principaux types de chaînes acyle retrouvés dans la rétine sont le myristoyle (C14 :0), des acides gras insaturés (C14 :1 et C14 :2) et le lauréoyle (C12 :0).9 Les proportions de chaque type d’acylation des protéines de la rétine varient d’une espèce à l’autre9, 90 Par exemple, la recoverine humaine (bovine) possède 4 % (0 %) de C12:0, 36 % (10 %) de C14:0, 21 % (48 %) de C14:1n-9, 39 % (43 %) de C14:2n-6.9 Il n’y a pas encore d’explication relative à l’hétérogénéité d’acylation des protéines rétiniennes.Le rôle de la myristoylation est variable tel que l’augmentation de la liaison membranaire, des interactions protéine/protéine, de l’activité catalytique et de la stabilité structurale.9, 82, 91, 92 En réduisant son mouvement dans le plan de la membrane, la protéine myristoylée peut par diffusion latérale atteindre plus facilement son effecteur si ce dernier est membranaire. La myristoylation peut aussi être nécessaire pour effectuer une liaison membranaire.93-95 Le groupement myristoyle étant toutefois à peine suffisant pour permettre une liaison membranaire,91 les acides aminés de la protéine peuvent aussi contribuer.96-98 Les lipides jouent aussi un rôle complexe et peu connu dans la liaison membranaire qui n’est pas facile à décrypter.Le groupement myristoyle n’est pas toujours orienté de la même manière chez toutes les protéines et il peut changer d’orientation au sein de la même protéine. Ainsi, il existe deux principales conformations que les protéines peuvent prendre. Une conformation présente le groupement myristoyle enfoui dans la protéine. L’autre conformation présente le groupement myristoyle exposé au solvant pouvant ainsi interagir avec les membranes.99 Une phosphorylation peut toutefois contrer l’effet du groupement myristoyle en raison du changement de la charge de la protéine.Le changement de conformation des protéines en présence du groupement myristoyle est dû à un mécanisme se nommant «myristoyl switch». Ce mécanisme peut être dû à trois éléments, soit un ligand, un facteur électrostatique ou un facteur protéolytique tel que mentionné et illustré précédemment.82 Ces changements de conformation des protéines permettent habituellement une liaison réversible aux membranes et de réguler ainsi la liaison de nombreuses protéines périphériques.

Aspects généraux des neuroprotéines sensibles aux ions calcium

Les NCS se retrouvent dans de nombreux organismes en passant de la levure à l’humain.60, 61 Chez les mammifères, elles sont exprimées exclusivement dans les photorécepteurs, les neurones et les cellules endocrines.60, 100 Leurs rôles vont de la régulation de canaux ioniques, au métabolisme des lipides, à la phototransduction visuelle, l’apprentissage, la régulation de la neurotransmission, l’endocytose, l’activation d’enzymes, la répression de la transcription et quelques autres fonctions.60 Cette famille de protéines se divise en cinq classes selon l’alignement de leur séquence et provient d’un ancêtre commun, la calmoduline. L’identité de séquence des membres de cette famille varie de 31 à 91 %.100 Ces protéines possèdent environ entre 190 à 208 acides aminés avec une masse molaire variant entre 22 et 24 kDa. Elles sont constituées de quatre motifs EF-hand.61, 100 Le motif N-terminal ne lie jamais de Ca2+.60, 61, 100 Ainsi, les trois autres motifs EF-hand peuvent lier le Ca2+.100 Parfois, un motif EF-hand supplémentaire autre que celui en N-terminal ne lie pas aussi de Ca2+ à la suite de mutations ou délétions; il y a donc minimalement deux motifs EF-hand actifs.100 L’affinité pour le Ca2+ est de l’ordre du micromolaire.60, 100, 101 Seulement quelques protéines de cette famille ne sont pas N-myristoylées.61, 100 La structure de nombreuses protéines de cette famille a été déterminée tant en présence qu’en absence d’un groupement myristoyle et de Ca2+ (Voir Tableau 1.2 de la thèse de Phillipe Calvez75 pour les numéros PBD). Le phénomène de calcium-myristoyl switch (ligand-myristoyl switch dû au Ca2+) n’est pas présent et confirmé chez tous les membres de cette famille (pour une revue, voir la Section 1.3.3.2 de la thèse de Philippe Calvez75). La section suivante décrira plus en détails la protéine d’intérêt de ce projet de doctorat qu’est la recoverine.

Recoverine

La recoverine a été la première protéine liant le Ca2+ à être isolée des photorécepteurs. Sa découverte a eu lieu de manière quasi simultanée par deux groupes réunissant des chercheurs de Russie, d’Allemagne et des États-Unis entre la fin des années 1980 et le début des années 1990.102, 103 Son nom, recoverine, lui fut attribué comme les premières recherches montraient que la recoverine agissait dans la restauration (recovery) du niveau de GMPc par l’activation de la GC.103, 104 Cependant, cette action était plutôt due à une contamination par la GCAP, mais son nom fut conservé.La recoverine est exprimée exclusivement dans la rétine, plus précisément dans les bâtonnets, les cônes et en faible quantité dans les cellules bipolaires reliées aux cônes.104 Elle est l’unique représentante de la classe C des NCS. Elle a 202 acides aminés (201 sans la Met lorsque N-myristoylée), elle est acylée en N-terminal et elle a une masse moléculaire de 23 kDa chez le bovin.108, 109 L’acylation de la recoverine est hétérogène et varie selon les tissus étudiés (voir Section 1.2.4).9, 109-111 Aussi, cette protéine contient 11 hélices et deux paires de courts feuillets antiparallèles. Quatre paires d’hélices forment les quatre motifs EF-hand. Les motifs EF-hand 1 et 2 forment le domaine N-terminal et les motifs EF-hand 3 et 4, le C-terminal.112 Les motifs EF-hand 2 et 3 lient le Ca2+.39, 112-114 L’affinité pour le Ca2+ de la forme acylée et non-acylée de la recoverine n’est pas la même. La forme myristoylée lie le Ca2+ de manière coopérative avec une constante de dissociation de 17 M.115 La forme non-myristoylée lie le Ca2+ de manière séquentielle en débutant avec le motif EF-hand 3 qui a une constante de dissociation de 110 nM, puis le motif EF-hand 2 à 6,9 M.115 Ces mesures sont faites en «flow dialysis», donc en absence de membranes.115 La chaîne acyle diminue l’affinité pour le Ca2+. La combinaison de la N-myristoylation et de la capacité de la recoverine à lier le Ca2+ permettent de moduler sa liaison membranaire. La structure tridimensionnelle de la recoverine myristoylée (Rec-Myr) a été déterminée en présence et en absence de Ca2+ et elles ont mis en évidence le mécanisme de calcium-myristoyl switch grâce à un groupement 13-oxamyristoyl en présence de Ca2+.39, 40 Ce dernier sera expliqué plus en détails dans la section suivante.

Calcium-myristoyl switch de la recoverine

Le mécanisme de calcium-myristoyl switch est lié à la combinaison de deux caractéristiques qui incluent la liaison du Ca2+ et la N-myristoylation. Il est confirmé pour la recoverine, mais pas pour toutes les NCS. Grâce à ce mécanisme, les protéines changent de structure tertiaire selon la concentration en Ca2+ du milieu (Figure 1.17).116 Ainsi, à faible concentration en Ca2+, plusieurs protéines ne lient pas le Ca2+ et leur groupement myristoyle est enfoui dans une poche hydrophobe à l’intérieur de la protéine. Ainsi, elles se trouvent dans une conformation cytosolique ou globulaire. À l’opposé, à une concentration en Ca2+ élevée, ces protéines vont lier entre 1 à 3 Ca2+ (2 pour la recoverine) et leur structure tertiaire va changer pour que le groupement myristoyle soit extrudé à l’extérieur de la protéine laissant ainsi des zones hydrophobes apparentes.39 Donc, ces protéines peuvent être recrutées à l’interface membranaire.39, 116 Ces deux conformations sont illustrées à la Figure 1.17. Lorsqu’une protéine lie un seul Ca2+, elle se trouve dans un état de transition de sa structure tertiaire.Représentation selon le modèle cartoon :
A. La recoverine en absence d’ion calcium (pdb 1IKU).
B. La recoverine avec un ion calcium (en rose) lié à son motif EF-hand 2 (en vert) et un autre à son motif EF-hand 3 (en jaune orangé) (pdb 1JSA).
Figure reproduite de la thèse de Philippe Calvez.75
Plus en détails, voici comment la structure de la recoverine change selon la liaison du Ca2+ pour mener à l’extrusion du groupement myristoyle, tel qu’illustré à la Figure 1.18. La recoverine dans son état cytosolique en forme globulaire mesure environ 40 Å (Figure 1.18A). Le groupement myristoyle est enfoui dans la poche hydrophobe située en N-terminal où cinq hélices le séquestrent.119 Dans sa conformation ouverte, en présence de deux Ca2+, la recoverine mesure environ 60 Å de long et 35 Å de large (Figure 1.18C). Peu de changements structuraux sont présents au niveau des motifs EF-hand 2 et 3. Le motif EF-hand 2 s’ouvre légèrement à la suite de la liaison du Ca2+, l’angle inter-hélice varie de 135° à 124°. Le motif EF-hand 3 se ferme légèrement en passant de 117° à 93° dû à la liaison du Ca2+. Ces deux changements d’angle font bouger aussi légèrement le motif EF-hand 4, bien qu’il ne lie pas le Ca2+, de 99° à 90°. C’est le motif EF-hand 1, bien qu’il ne lie pas lui aussi le Ca2+, qui bouge le plus en passant de 170° à 116°. La première liaison d’un Ca2+ dans la boucle du motif EF-hand 3 induit une rotation de 45° de la Gly96 et une réorientation importante du domaine C-terminal par rapport au N-terminal (Figure 1.18B).120 Une portion des résidus de la poche hydrophobe est exposée.121, 122 L’extrusion complète du groupement myristoyle est causée par la rotation de la Gly42 du motif EF-hand 1 à la suite de la liaison du deuxième Ca2+ dans le motif EF-hand 2 (Figure 1.18C).39 Ainsi, le domaine N-terminal s’ouvre grandement et la poche hydrophobe est toute exposée. Le Glu (-Z) va rapprocher les deux hélices du motif EF-hand 2 et diminuer les interactions électrostatiques entre les boucles des motifs EF-hand 1 et 2. En conformation ouverte, huit acides aminés N-terminaux deviennent exposés au solvant et la séquence N-terminale se montre très flexible en étant possiblement le bras mobile permettant la libération du groupement myristoyle.La liaison d’un premier ion calcium par l’EF-3 entraîne la rotation autour de glycine 96 tandis que la liaison du second ion calcium entraîne la rotation autour de la glycine 42 et, de manière plus importante, l’extrusion du groupement myristoyle116 (pour plus de détails sur la dynamique et les différentes transitions conformationnelles de la recoverine, voir 123).

Rôle biologique de la recoverine

Le rôle de la recoverine dans la phototransduction a été brièvement introduit précédemment dans le mécanisme d’inactivation de la phototransduction (Section 1.1.2.2). Plus précisément, à l’état de noirceur, donc en présence de Ca2+ ([Ca2+] = 500-800 nM),35, 124 la recoverine inhibe la RK.41, 125-129 En conséquence du changement de conformation vers une forme plus ouverte de la recoverine, la région hydrophobe est ainsi exposée au solvant et la RK peut venir s’y insérer pour être inhibée tel que montré précédemment à l’aide d’un peptide représentant la portion fonctionnelle de la RK.130 La poche hydrophobe joue donc un rôle tant en présence qu’en absence de Ca2+, soit pour l’inhibition de la RK ou pour l’enfouissement de son groupement myristoyle. L’inhibition de la RK permet de prolonger la durée de vie de la Rho* comme cette dernière ne peut pas être phosphorylée.126, 129, 131, 132 Plusieurs mesures in vivo et in vitro ont été effectuées montrant ou non l’inhibition de la RK par la recoverine125, 131 41, 125-129, 131, 133-136 ce qui laisse planer des doutes sur le rôle de la recoverine. Cependant, des modèles de souris knock-out ont montré que la recoverine participe à l’adaptation de la réponse nerveuse de la rétine à la lumière et à la phase de rétrocontrôle de l’excitation lumineuse des photorécepteurs. Ainsi, la photoréponse des bâtonnets est réduite chez ces souris en absence de recoverine.137, 138 Par conséquent, le rôle de la recoverine est bel et bien celui d’inhiber la RK. À faible concentration en Ca2+ ([Ca2+] = 50-100 nM),35, 124, 139 la recoverine est dans un état cytosolique et n’interagit pas avec la RK.La myristoylation de la recoverine n’est pas nécessaire pour l’inhibition de la RK. Cependant, sa liaison au Ca2+ est très importante. Des études ont montré que la recoverine non myristoylée (Rec-nMyr) peut inhiber la phosphorylation de la Rho qu’en présence de Ca2+.125, 126 La Rec-Myr inhibe plus abruptement la RK que la Rec-nMyr à forte concentration en Ca2+. La Rec-nMyr peut inhiber à plus faible concentration en Ca2+, soit qu’avec la liaison d’un seul Ca2+, mais avec une moins grande efficacité. La liaison de deux Ca2+ par la Rec-nMyr la rend aussi efficace que la Rec-Myr. Il a été postulé que cette différence entre les deux formes de recoverine est due à la coopérativité de la Rec-Myr et la non-coopérativité de la Rec-nMyr pour la liaison du Ca2+ sur ces dernières.128 De plus, la recoverine inhibe 50 % de la phosphorylation de la Rho par la RK à une concentration en Ca2+ entre 200 nM et 3 M.125, 126, 128, 140-142 Ce dernier point suggère que la recoverine a une plus grande affinité pour le Ca2+ en présence de membranes que les mesures en «flow dialysis» le laissaient percevoir.Aucune maladie directement liée à la structure ou à des mutations de la recoverine n’est connue à ce jour. Cependant, la recoverine est au centre de rétinopathies associées au cancer. Les rétinopathies sont des conséquences d’un cancer présent dans d’autres tissus dans le corps. Ainsi, des cellules cancéreuses peuvent alors exprimer la recoverine dans des tissus inattendus.143 Le corps va ainsi produire des anticorps anti-recoverine pour combattre cette présence non désirée, mais aussi pour la protéine retrouvée dans l’œil. Les photorécepteurs vont ainsi dégénérer et la vision va être perdue. La présence de la recoverine a été principalement observée dans des tumeurs malignes des cancers gastriques, du col de l’utérus, de l’ovaire, du sein, de l’endomètre, du rectum, du côlon et du poumon, ainsi que dans le sarcome utérin et le thymome.
Maintenant que la vision et son fonctionnement, ainsi que les caractéristiques générales de la famille des NCS et celles de la recoverine ont été exposés, il reste à décrire les membranes lipidiques avant de présenter l’état des connaissances sur la structure et l’interaction membranaire de la recoverine, ainsi que les objectifs.

Membranes biologiques

Les membranes biologiques ont une fonction de compartimentation des cellules en tant qu’élément de base fonctionnel et structural qui compose les tissus et les organes des êtres vivants.64 La compartimentation permet de ségréguer l’extérieur de l’intérieur de la cellule. D’autres ségrégations ont lieu à l’intérieur de la cellule pour les diverses organelles. Les membranes biologiques sont un assemblage de multiples composantes, tels que des lipides et des protéines (Figure 1.19). Plus spécifiquement, la famille des lipides est composée de phospholipides, de glycolipides, de stérols et d’acides gras libres. La famille des protéines est composée de protéines intégrales, de protéines périphériques, de glycoprotéines et de protéines acylées. Les membranes biologiques ne sont pas statiques, mais dynamiques, tel qu’il sera discuté dans la Section 1.3.4. La Figure 1.19 illustre schématiquement une membrane lipidique avec ses principaux constituants. La composante protéique ayant déjà été abordée dans les sections précédentes, la composante lipidique sera présentée en détails. Seulement le constituant majoritaire, les phospholipides, sera présenté plus en détails dans la section suivante.

Phospholipides

Les phospholipides peuvent aussi être nommés phosphoglycérolipides. Ils se divisent en quatre parties soit une tête polaire, un groupement phosphate, un groupement glycérol et des chaînes acyle tel qu’illustré dans le haut de la Figure 1.20. Seulement la nature de la tête polaire et des chaînes acyle peuvent changer et ainsi modifier la nature et le nom des phospholipides. Ces molécules ont un caractère amphiphile, soit qu’une portion est hydrophile (tête polaire et groupement phosphate, ainsi que la zone interfaciale qu’est le groupement glycérol) et qu’une autre est hydrophobe (chaînes acyle).La tête polaire des lipides dicte leur charge. Les lettres entre parenthèses sont celles utilisées pour l’abréviation du nom des phospholipides et elles font référence à leur tête polaire. Ainsi, la sérine (PS), l’inositol (PI) et le glycérol (PG) sont des têtes polaires neutres ou zwitterioniques (une charge positive et une charge négative sur la même molécule ce qui annule la charge), mais avec la charge négative du groupement phosphate, la charge globale de ces lipides est négative. L’éthanolamine (PE) et la choline (PC) sont chargées positivement, donc, avec le phosphate, ces lipides sont neutres/zwitterioniques. Le nom des phospholipides en fonction de la nature de leur tête polaire et de leur structure chimique est indiqué à la Figure 1.20.Structure de la formule des X prise du site internet de Avanti Polar Lipids, Inc.(https://avantilipids.com/ ) visité le 6 février 2018.
La nature des chaînes acyle fait aussi varier le nom des lipides. Ces chaînes peuvent être plus ou moins longues, saturées ou insaturées. La nomenclature des chaînes acyle peut se faire de trois manières, soit avec le nom systématique, le nom courant ou le symbole. Le nom systématique est celui recommandé par l’Union Internationale de Chimie Pure et Appliquée. Toutefois, le nom courant rappelant son origine est plus couramment utilisé. Le symbole est une nomenclature numérique. Dans cette terminologie, C16:0 signifie que la chaîne acyle comprend 16 atomes de carbone et 0 double liaison, alors que C18:1 9 correspond à 18 atomes de carbone et 1 double liaison. De plus, 9 spécifie que la double liaison est située au niveau de l’atome de carbone 9 à partir du dernier atome de carbone de la chaîne acyle, soit le CH3. La position des doubles liaisons peut aussi être indiquée entre parenthèses, mais en débutant par le groupement carbonyle. La conformation cis ou trans de la double liaison doit aussi être indiquée. En absence de cette information, on prend pour acquis qu’il s’agit de la conformation cis compte tenu de sa plus grande présence dans les organismes vivants. Brièvement, voici quelques exemples de nomenclature de chaînes acyle importantes pour ce projet de doctorat avec, entre parenthèse, la lettre servant d’abréviation pour cette chaîne acyle dans le nom des phospholipides: C14:0, myristoyle (M); C16:0, palmitoyle (P); C18:1 9, oléoyle (O); C22:6 3, docosahexaénoyle (D). Leurs structures sont illustrées à la Section 1.5 pour les objectifs du projet avec la Figure 1.25.Le nom complet des phospholipides s’abrège en quatre lettres, les deux premières pour les chaînes acyle et les deux dernières pour la tête polaire. La première lettre pour les chaînes acyle peut être un D signifiant di ou double dans le sens que les deux chaînes sont identiques. Si les deux chaînes acyle diffèrent, la première lettre est pour la chaîne acyle en position 1 sur le glycérol et la deuxième lettre, pour la position 2. La position 3 sur le glycérol est occupée par le groupement phosphate liant la tête polaire. Par exemple, la DMPC est le dimyristoylphosphatidylcholine (diC14:0PC) et le POPG, palmitoyloléoylphosphatidylglycérol (C16:0 – C18 1PG).Outre un caractère amphiphile, les phospholipides possèdent d’autres propriétés physiques dont la température de transition de phase (Tm), soit la température à laquelle les phospholipides passent de la phase gel (Lβ’) à la phase fluide (Lα).146-148 La Tm est caractéristique à chaque phospholipide.149 La nature de la tête polaire et celle des chaînes acyle fait varier la Tm. Plus la chaîne acyle augmente en longueur, plus la TM augmente. Pour une même longueur de chaîne acyle, plus le nombre d’insaturations augmente, plus la Tm diminue. S’il y a une seule insaturation pour une même longueur de chaîne acyle, plus cette dernière sera vers le centre de la chaîne acyle, plus la Tm diminuera. La valeur de la Tm varie en fonction des interactions de van der Waals. Plus il y a d’interactions, plus la Tm est élevée et moins il y a d’interactions, plus la Tm est basse. Une insaturation cis entraîne une courbure d’environ 30° de la chaîne acyle, ainsi il y a diminution de la Tm en raison de la force des interactions de van des Waals qui sont moindres.

Composition lipidique des segments externes des bâtonnets

Les SEB sont composés d’une proportion équimolaire de protéines et de lipides.150 Près 174, 175
de 85 % du contenu protéique total est de la Rho.150, 151 Le contenu lipidique est majoritairement des phospholipides.150, 152 La portion lipidique est particulière comparativement au reste du corps. Le Tableau 1.1 montre la composition en phospholipides (têtes polaires) des disques des SEB ainsi que leur contenu en chaînes acyle. Trois principales têtes polaires sont présentes, deux sont zwitterioniques (la PC à 33 %mol et la PE à 38 %mol) et une est chargée négativement (la PS à 12 %mol). La composition lipidique des feuillets interne et externe de la membrane des disques des SEB est asymétrique.153-157 Le niveau d’insaturation des chaînes acyle est beaucoup plus élevé dans la rétine et le cerveau,158 avec un contenu près de 60 %mol en chaînes acyle polyinsaturées.152, 159-162 Généralement, les membranes contiennent 10 %mol de lipides monoinsaturés.163 L’acide docosahexaénoïque (22 :6), connu aussi sous l’abréviation ADH, est majoritaire avec près de 50 %mol.152, 164, 165 Les autres tissus du corps ne présentent guère plus de 5 %mol d’ADH.164 La présence de cette chaîne acyle dans un phospholipide lui confère un caractère fluide,166-170 une épaisseur plus petite (comparativement à la chaîne acyle oléoyle) et une plus grande perméabilité membranaire.171, 172 La majorité des combinaisons de chaîne acyle des phospholipides contient une ou deux chaînes acyles insaturées.159 Les principales chaînes acyle saturées sont le palmitoyle et le stéaroyle. Ces membranes possèdent aussi une plus faible quantité de cholestérol (Chol), d’acides gras libres, de sphingomyélines et de PI que les autres membranes cellulaires.159 Le contenu en Chol des disques est d’environ 10 %mol et varie le long du SEB.173 Ce pourcentage est beaucoup plus faible que la valeur près de 40 %mol rapportée pour les autres membranes plasmiques du corps.145 La présence d’une grande quantité d’ADH et d’une faible quantité de Chol permet de proposer que ces membranes seraient les plus fluides du corps et comporteraient des radeaux lipidiques,170, la présence de 8 %mol de membranes résistantes aux détergents (DRM, detergent-resistant membranes) suggère l’existence de tels radeaux dans ces membranes.176 Il a été prouvé qu’une membrane insaturée favorise l’activation de la Rho et augmente l’interaction entre la G t et la Rho.177, 178 Le caractère fluide de ces membranes par leur grand nombre d’acides gras mobiles et désordonnés a été confirmé par spectroscopie de résonance paramagnétique électronique et calorimétrie différentielle à balayage.179, 180 Ce caractère pourrait favoriser l’interaction des protéines acylées avec la membrane. Ces caractéristiques pourraient ainsi moduler la cascade de réactions biochimiques prenant place au cours de la phototransduction.171

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Table des matières

Chapitre 1  Introduction
1.1 Vision
1.1.1 Anatomie de l’oeil
1.1.1.1 Rétine
1.1.1.2 Cellules photoréceptrices : cônes et bâtonnets
1.1.1.2.1 Bâtonnets rétiniens
1.1.2 Mécanisme de phototransduction visuelle
1.1.2.1 Photoactivation
1.1.2.2 Inactivation et retour à l’état basal
1.2 Neuroprotéines sensibles aux ions calcium
1.2.1 Concepts généraux sur la structure des protéines
1.2.2 Famille des protéines liant le calcium (calcium-binding proteins)
1.2.3 Famille des protéines à motif EF-hand
1.2.4 N-myristoylation des protéines
1.2.5 Aspects généraux des neuroprotéines sensibles aux ions calcium
1.2.6 Recoverine
1.2.6.1 Calcium-myristoyl switch de la recoverine
1.2.6.2 Rôle biologique de la recoverine
1.3 Membranes biologiques
1.3.1 Phospholipides
1.3.2 Composition lipidique des segments externes des bâtonnets
1.3.3 Organisation lipidique et auto-assemblage
1.3.4 Dynamique membranaire
1.3.5 Systèmes modèles pour les membranes
1.3.5.1 Vésicule multilamellaire lipidique
1.3.5.2 Bicouches lipidiques orientées entre des plaques de verre
1.4 État des connaissances sur la structure de la recoverine et son interaction membranaire
1.4.1 Structure tridimensionnelle de la recoverine
1.4.2 Études en absence ou présence des ions calcium et du groupement myristoyle sur la recoverine
1.4.3 Lipides utilisés pour l’étude de la recoverine
1.4.4 Interaction membranaire de la recoverine
1.4.4.1 Liaison membranaire
1.4.4.2 Impact des lipides sur la structure secondaire de la recoverine
1.4.4.3 Impact de la recoverine sur les lipides
1.5 Objectifs du projet de recherche au doctorat
1.5.1 Stabilité thermique de la recoverine myristoylée et non myristoylée en présence et absence d’ions calcium
1.5.2 Effet de la liaison d’ions calcium sur le phosphatidylglycérol et sur l’interaction entre la recoverine et ce type de lipide
1.5.3 Immobilisation du groupement myristoyle de la recoverine selon la fluidité membranaire de lipides zwitterioniques
1.5.4 Interaction de la recoverine avec un lipide zwitterionique, la dioléoylphospatidylcholine
Chapitre 2  Approche expérimentale
2.1 Surexpression et purification de la recoverine
2.1.1 Surexpression de la recoverine
2.1.2 Purification de la recoverine
2.1.2.1 Évaluation de la pureté de la recoverine par électrophorèse sur gel de polyacrylamide contenant du laurylsulfate de potassium
2.1.2.2 Évaluation du taux de myristoylation de la recoverine par chromatographie liquide à haute pression
2.1.2.3 Dialyse et lyophilisation de la recoverine purifiée
2.1.2.4 Détermination de la concentration en recoverine par spectroscopie ultraviolet-visible
2.1.2.5 Détermination de la masse moléculaire de la recoverine par spectrométrie de masse
2.2 Spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier
2.2.1 Étude par spectroscopie infrarouge de systèmes biologiques
2.2.1.1 Lipide
2.2.1.1.1 Vibration d’élongation symétrique du groupement CH2
2.2.1.1.2 Vibration d’élongation symétrique du groupement carbonyle
2.2.1.1.3 Vibration d’élongation du groupement phosphate
2.2.1.2 Protéine
2.2.1.2.1 Vibration du groupement amide
2.2.1.2.2 Vibration d’élongation antisymétrique du groupement carboxylate
2.3 Spectroscopie de résonance magnétique nucléaire à l’état solide
2.3.1 Concepts fondamentaux
2.3.1.1 Moment angulaire de spin et aimantation nucléaire
2.3.1.2 Effet du champ magnétique et de la fréquence de Larmor
2.3.1.3 Impulsion de radiofréquence et relaxation
2.3.2 Interactions de spins nucléaires en spectroscopie de résonance magnétique nucléaire à l’état solide
2.3.2.1 Interaction de Zeeman
2.3.2.2 Interaction de déplacement chimique
2.3.2.3 Interaction de couplage scalaire
2.3.2.4 Interaction de couplage dipolaire
2.3.2.5 Interaction quadrupolaire
2.4 Étude en spectroscopie de résonance magnétique nucléaire de systèmes biologiques
2.4.1 Spectroscopie de résonance magnétique nucléaire à l’état solide du phosphore-31………
2.4.1.1 Séquence d’impulsions « Écho de Hahn »
2.4.1.2 Séquence d’impulsions « Centerband-only detection of exchange »
2.4.2 Spectroscopie de résonance magnétique nucléaire à l’état solide du deutérium . 94
2.4.2.1 Séquence d’impulsions « Écho quadrupolaire »
2.4.3 Spectroscopie de résonance magnétique nucléaire du fluor-19
2.4.3.1 Séquence d’impulsions à découplage haute puissance
Chapitre 3  The thermal stability of recoverin depends on calcium binding and its myristoyl moiety as revealed by infrared spectroscopy
3.1 Résumé
3.2 Abstract
3.3 Introduction
3.4 Material and methods
3.4.1 Material
3.4.2 Expression and purification of recoverin and removal of the salts
3.4.3 Transmission infrared spectroscopy
3.5 Results
3.5.1 Effect of calcium and myristoylation on the secondary structure of recoverin
3.5.2 Effect of calcium and myristoylation on the thermal stability of recoverin
3.6 Discussion
3.7 Conclusion
3.8 Acknowledgments
3.9 Funding
3.10 Supporting information
Chapitre 4  Discriminating lipid- from protein-calcium binding to understand the interaction between recoverin and phosphatidylglycerol model membranes
4.1 Résumé
4.2 Abstract
4.3 Introduction
4.4 Materials and methods
4.4.1 Materials
4.4.2 Expression and purification of recoverin
4.4.3 Sample preparation
4.4.4 Infrared (IR) spectroscopy
4.5 Results
4.5.1 DMPG forms two populations: fully hydrated or Ca2+-complexed
4.5.1.1 Evidence from the lipid acyl chain conformation
4.5.1.2 Evidence from the interfacial and polar head regions
4.5.1.3 Evidence from recoverin secondary structure
4.5.2 The absence of Ca2+-lipid complexes enhances recoverin-lipid interactions
4.5.3 Unsaturated and saturated lipids behave similarly and have an equivalent effect on recoverin
4.6 Discussion
4.6.1 Recoverin-DMPG interactions are modulated by the availability of calcium
4.6.2 Recoverin has a strong affinity for Ca2+
4.6.3 Ca2+-bound recoverin acts a peripheral protein
4.6.4 Proportion of interacting phospholipids
4.6.5 Similar interactions are observed between recoverin and unsaturated or saturated lipids……
4.7 Conclusion
4.8 Associated content
4.8.1 Supporting Information
4.9 Funding
4.10 Acknowledgements
4.11 Supporting information
Chapitre 5  Membrane fluidity is a driving force for recoverin myristoyl immobilization in zwitterionic lipids
5.1 Résumé
5.2 Abstract
5.3 Introduction
5.4 Materials and methods
5.4.1 Materials
5.4.2 Sample preparation
5.4.3 NMR spectroscopy
5.5 Results
5.6 Discussion
5.7 Conflict of interest statement
5.8 Acknowledgements
5.9 Funding
Chapitre 6  Novel approaches to probe the binding of recoverin to membranes
6.1 Résumé
6.2 Abstract
6.3 Introduction
6.4 Materials and methods
6.4.1 Materials
6.4.2 Sample preparation
6.4.3 Infrared (IR) spectroscopy
6.4.4 NMR spectroscopy
6.5 Results
6.5.1 Vesicle integrity
6.5.2 Acyl chain order and lipid hydration
6.5.3 Lipid lateral diffusion
6.5.4 Recoverin thermal stability
6.5.5 Myristoyl group environment
6.6 Discussion
6.6.1 19F NMR as a probe of myristoyl group location
6.6.2 Effect of myristoylation and calcium on recoverin membrane interactions and thermal stability
6.7 Conclusions
6.8 Acknowledgements
6.9 Conflict of interest statement
6.10 Supporting information
6.10.1 Determination of the molar absorption coefficient of recoverin by UV-visible spectroscopy
Chapitre 7  Conclusion et perspectives
7.1 Importance de la présence d’ions calcium
7.1.1 Influence sur la recoverine
7.1.2 Influence sur les lipides
7.2 Importance du groupement myristoyle de la recoverine
7.2.1 Influence sur la recoverine
7.2.2 Influence sur les lipides
7.3 Importance de la composition membranaire
7.3.1 Influence des lipides sur la recoverine
7.3.2 Influence de la recoverine sur les lipides
7.4 Perspectives des travaux de recherche
Bibliographie

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