Neurophysiologie élémentaire de la décharge électrique

Définition

La crise d’épilepsie représente l’ensemble des conséquences cliniques d’une décharge neuronale brusque, excessive et hypersynchrone d’une partie plus ou moins étendue du cortex cérébral. L’aspect électrique permet de distinguer les épilepsies généralisées, impliquant l’activation hyper synchrone de tous les neurones, sans qu’un point de départ puisse être identifié, des épilepsies partielles, qui intéresse au départ un groupe de neurones bien localisés. Cependant, toute épilepsie partielle peut se généraliser, d’emblée ou secondairement. Depuis 2005, l’épilepsie est définie de façon conceptuelle comme un trouble cérébral caractérisé par une prédisposition durable à générer des crises. En pratique, cette définition s’applique en général lorsque deux crises non provoquées surviennent à plus de 24 heures d’intervalle. L’International League Against Epilepsy (ILAE) (Ligue internationale contre l’épilepsie) a accepté les recommandations d’un groupe de travail modifiant la définition pratique dans des circonstances particulières ne répondant pas au critère des deux crises non provoquées. Le groupe de travail a proposé de considérer l’épilepsie comme une maladie cérébrale définie par l’une quelconque des manifestations suivantes :
❖ survenue d’au moins deux crises non provoquées (ou réflexes) espacées de plus de 24 heures ;
❖ survenue d’une crise non provoquée (ou réflexe) et probabilité de survenue de crises ultérieures au cours des 10 années suivantes similaire au risque général de récurrence (au moins 60 %) observé après deux crises non provoquées ;
❖ diagnostic d’un syndrome épileptique.

On considère l’épilepsie comme ayant été résolue chez les patients qui présentaient un syndrome épileptique âge-dépendant et ont désormais passé l’âge correspondant et chez ceux qui n’ont pas eu de crise au cours des 10 dernières années sans avoir pris d’antiépileptique depuis au moins 5 ans. La « résolution » n’est pas nécessairement identique au concept classique de « rémission » ou de « guérison ». Différentes définitions pratiques peuvent être conçues et utilisées à des fins spécifiques diverses. Cette définition révisée de l’épilepsie met ce terme en concordance avec son usage courant .

Elément de physiopathologie

Neurophysiologie élémentaire de la décharge électrique 

La survenue de la décharge électrique suppose l’existence d’un trouble constitutionnel ou acquis de l’excitabilité neuronale. Les neurones épileptiques sont hautement instables et sont caractérisés par deux facteurs :
– L’hyperexcitabilité : la tendance d’un neurone à générer des décharges répétées en réponse à une stimulation ne provoquant habituellement qu’un seul potentiel d’action
– L’hypersynchronie : la propriété d’un groupe de neurones à générer de façon synchrone des trains potentiel .

Ces perturbations électrophysiologiques élémentaires peuvent être sous-tendues par diverses anomalies biochimiques qui modifient les propriétés intrinsèques des membranes neuronales diverses anomalies biochimiques peuvent être impliquées dans la survenue des perturbations électrophysiologies :
– Anomalies des canaux ioniques voltage-dépendants sodique, calcique ou potassique.
– Déficit des ATPases membranaires responsables de transport ionique
– Déficit de la neurotransmission inhibitrice médiée par l’acide gammaamino butyrique (GABA)
– Augmentation de la neurotransmission excitatrice médiée par les acides aminés excitateurs tels que le glutamate ou l’aspartate.

Anatomie des crises épileptiques

Les crises focales prennent naissance au niveau d’une région limitée du cortex cérébral : la zone épileptogène. Les caractéristiques des crises dépendent de l’activation de réseaux épileptoènes qui comprennent différentes structures séquentiellement recrutées par la décharge critique à partir de la zone épileptogène. Les données de l’expérimentation animale ont montré que les absences sont générées par un circuit réverbérant organisé autour d’une boucle thalamo-corticale comprenant le cortex d’une part et les noyaux relais et réticulaires du thalamus d’autre part. Les crises généralisées tonico-cloniques semblent quant à elles dépendre mécanisme cortico-réticulaire : la phase tonique s’accompagne d’une intense activité des structures sous corticales en particulier mésencéphalique tandis que la phase clonique pourrait impliquer le cerveau antérieur et plus particulièrement le néocortex.

Le rôle de la neurotransmission excitatrice et inhibitrice

Le neurotransmetteur excitateur principal au sein du système nerveux central est le glutamate qui agit sur 3 récepteurs : N-méthl-Daspartate, KainateAMPA et métabolique. Le neurotransmetteur inhibiteur principal est le GABA qui agit sur 2 types de récepteurs. L’activation de récepteur GABA-A active un canal ionique perméable aux ions chlore et détermine une repose inhibitrice rapide par hyperpolarisation de la membrane. Ce récepteur contient des sites de fixation pour plusieurs autres produits : benzodiazépines, barbituriques, neurosteroides…

L’activation du récepteur GABA-B active un récepteur métabotropique perméable aux ions potassium et détermine une réponse inhibitrice plus lente. Ainsi par une désinhibition par défaut de synthèse ou de libération du neurotransmetteur, par modification des récepteurs ou par dysfonctionnement inter neurones Gabaergiques de même qu’un renforcement de la neurotransmission excitatrice par libération excessive de glutamate, par modification des récepteurs correspondants ou par développement de circuits récurrents excitateurs pourront être épileptogènes. Ces travaux ont abouti à la mise au point de médicaments antiépileptiques dont les mécanismes d’action impliquent au moins en partie une potentialisation de la neurotransmission GABAergique.

Epileptogénèse et neuroplasticité

L’hyperactivité neuronale au cours de certaines crises entraine, au sein du circuit initiateur et des circuits de propagation des phénomènes excitotoxiques déterminants pour le passage à la chronicité du processus épileptique. Selon les théories classiques, cette neuroplasticité du circuit initiateur tend à augmenter son excitabilité, favorisant ainsi la création de circuit récurrent epileptogenes. Cependant plusieurs données récentes suggèrent que certains mécanismes de réorganisation tendent en fait à limiter l’epileptogénicité.

Epidémiologie

A l’inverse de ce qui a longtemps été admis, l’épilepsie n’est pas l’apanage du sujet jeune. Le taux de fréquence des épilepsies après 60 ans est plus élevé que dans l’enfance et l’adolescence, et les crises épileptiques sont un des problèmes neurologiques les plus fréquents chez les personnes âgées .

Incidence
L’incidence des crises épileptiques symptomatiques aiguës est plus élevée dans les deux tranches d’âge extrêmes de la vie, notamment après 60 ans, pour atteindre un pic après 80 ans .

Du fait de l’allongement de l’espérance de vie, l’incidence de l’épilepsie est en augmentation. Elle est estimée autour de 50/100 000 habitants tous âges confondus [11]. Après 50 ans, plus l’âge avance, plus l’incidence augmente.

En effet, l’incidence des crises chez les patients de plus de 60 ans est de plus de 120/100 000 habitants. Plus précisément : pour la tranche des 65- 69 ans l’incidence est de 76 / 100.000; pour 70-79 ans, de 139 à 147 / 100.000 et 159 / 100.000 pour les personnes de 80 ans et plus  Les dernières estimations supposent qu’environ 30% des nouveaux casd’épilepsie concerneront les personnes âgées de plus de 65 ans .

Prévalence

La prévalence des crises épileptiques du sujet âgé est estimée entre 6.8 et 9.9/1000 [18] (en moyenne 8.4/1000 [19] entre 60 et 74 ans ; et jusqu’à 19.3/1000 dans un contexte de faible statut socio-économique, selon une étude américaine récente [20]. Après 75 ans, la prévalence de l’épilepsie atteint 15/1000, dont 75% sont des crises focales [14]. Elle peut atteindre 50 /1000 en maisons de retraite .

Classifications de l’épilepsie

La crise d’épilepsie

Le mot « crise » vient du grec ancien et signifie « décision ». Terme utilisé par Hippocrate, il définissait le moment où l’on devait décider du traitement du malade, phase critique où l’on se devait d’agir. La terminologie populaire moderne utilise le mot « crise » pour tout événement soudain et important, par exemple pour parler de « crise cardiaque » [24]. Une crise épileptique est définie comme «un phénomène transitoire de signes et / ou de symptômes dus à l’activité neuronale anormale excessive ou synchrone dans le cerveau. Le terme transitoire est utilisé comme délimité dans le temps, avec un début clair et une fin» [25]. Les éléments importants à caractériser pour définir la crise sont donc :
❖ Le mode de début et le mode de fin
❖ Les manifestations cliniques
❖ L’augmentation anormale de la synchronisation neuronale .

Ces éléments sont détaillés ci-après :
❖ Le mode de début et le mode de fin de la crise épileptique : La crise épileptique étant un phénomène transitoire, il existe un début et une fin. La fin est souvent moins évidente car souvent masquée par les déficits postcritiques, qui sont fréquemment majorés chez la personne âgée. Les critères électroencéphalographiques ou cliniques peuvent aider à déterminer le début ou la fin de la crise mais ils peuvent aussi ne pas coïncider entre eux.
❖ L’augmentation anormale de la synchronie Le trait le plus commun aux crises épileptiques est l’augmentation anormale de la synchronisation entre les neurones.

Hughlings Jackson a fourni en 1870 une définition, devenue classique, de la crise épileptique comme « un symptôme… une décharge occasionnelle, excessive et désordonnée du tissu nerveux ». Il s’agit là de l’élément de définition le plus difficile à appliquer en pratique, parce que la décharge électrique n’est visible que dans certaines conditions d’examen. Des patients avec crises récidivantes peuvent avoir un EEG de scalp normal entre les crises, et même pendant les crises. La définition suppose néanmoins que dans des conditions idéales, une telle décharge anormale pourrait être constatée .

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
1. Elément de physiopathologie
1.1. Neurophysiologie élémentaire de la décharge électrique
1.2. Anatomie des crises épileptiques
1.3. Le rôle de la neurotransmission excitatrice et inhibitrice
1.4. Epileptogénèse et neuroplasticité
2. Epidémiologie
2.1. Incidence
2.2. Prévalence
3. Classifications de l’épilepsie
3.1. La crise d’épilepsie
3.2. Les crises spontanées, crises provoquées
3.3. L’état de mal épileptique
3.4. L’épilepsie et les syndromes épileptiques
4. EEG
5. Les particularités du sujet âgé
5.1. Aspects clinique
5.2. Le seuil épileptogène diminue-t-il avec l’âge ?
5.3. L’EEG du sujet âgé
5.4. Les étiologies spécifiques au sujet âgé
5.4.1.Etiologies dans le cadre des crises symptomatiques aigues (CSA)
5.4.2.Etiologies dans le cadre des crises non provoquées (CNP)
5.4.3.L’approche gériatrique et le modèle de Bouchon
5.4.4.Spécificité du traitement antiépileptique chez le sujet âgé
5.5. Le généraliste et l’épilepsie du sujet âgé
DEUXIEME PARTIE
1. Objectif
2. Cadre de l’étude
3. Type d’étude
4. Population d’étude
5. Le protocole
6. Saisie et analyse des données
6.1. Aspects éthiques
7. Résultats
7.1. Le sexe
7.2. L’âge
7.3. Antécédents médicaux
7.4. Habitude de vie
7.5. Lieu de la survenue des crises épileptique
7.6. Le nombre des crises
7.7. Sémiologie clinique des crises épileptiques
7.8. Etiologies
7.8.1.Les crises secondaires
7.8.1.1.Etiologie vasculaire
7.8.1.2.Le bas débit cérébral (ou hypoxie cérébrale)
7.8.1.3.Les troubles métaboliques
7.8.1.4.Origine dégénérative
7.8.1.5.Les causes infectieuses
7.8.1.6.L’étiologie tumorale cérébrale
7.8.2.Origine cryptogénique
7.9. Examens paracliniques
7.10. Prise en charge
7.11. Evolution
8. Discussion
8.1. Aspects épidémiologique
8.1.1.Age
8.1.2.Genre
8.1.3.Antecedents
8.2. Aspects cliniques
8.3. Aspects paracliniques
8.3.1.Imagerie cérébrale
8.3.2.EEG
8.4. Aspects étiologiques
8.4.1.Causes vasculaires
8.4.2.Les causes métaboliques
8.4.3.Pathologie dégénérative
8.4.4.Les tumeurs cérébrales
8.4.5.Les traumatismes crâniens
8.4.6.Les causes toxiques
8.4.7.Etiologie inconnue
8.5. Traitement
8.6. Evolution
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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