La ménopause :
Avec la puberté et la grossesse, la ménopause est l’un des tournants majeurs dans la vie d’une femme. Elle marque la fin de la période de fertilité en entrainant avec elle de nombreux changements. Il s’agit d’un processus physiologique naturel qui est inéluctable lors du vieillissement chez la femme. Elle intervient en général aux alentours de 51 ans.(1) Son diagnostic est clinique et rétrospectif, définit par l’arrêt total des menstruations résultant de la perte de l’activité folliculaire ovarienne.(2) Il est confirmé après une période d’aménorrhée de 12 mois, sans cause pathologique attribuable.
Etymologiquement, le terme ménopause vient du Grec « mênos », règles et « pausis», arrêt. Nous le devons à un médecin français du XIXème siècle, Charles Gardanne, lorsque qu’il publie en 1821, dans une période d’intérêt grandissant pour les maladies des femmes, « De la ménopause ou de l’âge critique des femmes ».(3) C’est d’ailleurs cette pathologisation occidentale qui fait émerger le concept de transformation et de déséquilibre proprement féminin, à l’origine de la construction sociale actuelle de la ménopause.
Bien que commune à toutes les femmes, la ménopause est perçue différemment en fonction des civilisations et des époques. Dans certaines sociétés traditionnelles d’Afrique, la ménopause signe un gain symbolique avec un accroissement des possibles et des pouvoirs. Certaines cultures n’ont quant à elle pas de mot pour la définir.(4) Dans la société traditionnelle japonaise d’avant les années 1990, on parle de « konenki » qui englobe le vieillissement en général et les changements qui s’y rattachent en concernant également les hommes. Pour Daniel Delanoë, psychiatre et anthropologue, la description de la ménopause ne doit pas être limitée à un fait biologique. Elle doit être également considérée comme une construction sociale et culturelle.(5) Ce que représente ce changement, important dans la vie génitale de la femme mais également dans sa vie sociale, conditionne en partie le vécu qu’elles en ont.
Cette période marquée par des changements hormonaux, ne se limite pas à un arrêt des menstruations et rassemble tout un ensemble de signes regroupés sous le terme de « syndrome climatérique » :
– Manifestations vasomotrices : bouffées de chaleur principalement nocturnes. Elles sont souvent décrites comme très gênantes avec une sensation de chaleur du visage et de la moitié supérieure du corps apparaissant brutalement et sont parfois associées à un érythème cutané et à une hypersudation.
– Troubles du sommeil et de l’humeur : irritabilité, anxiété, insomnie, dépression.
– Atrophie vulvo-vaginale parfois responsable de dyspareunie, de troubles de la libido ou de troubles urinaires (prolapsus, infections urinaires).
– Trouble des phanères : amincissement et perte d’élasticité de la peau, cheveux clairsemés, pilosité androgénique.
– Douleurs articulaires diffuses.
– Augmentation de l’IMC avec redistribution des graisses corporelles.
– Ostéopénie.
Le THM :
Il existe cependant une grande variabilité d’une femme à l’autre quant à la présence et à l’intensité de ces symptômes. Certaines femmes symptomatiques ressentent nettement une altération de leur qualité de vie. En cas de symptômes très gênants le traitement hormonal de la ménopause (THM) existe pour pallier cet inconfort. Le THM est indéniablement le traitement le plus efficace pour soulager les symptômes de la ménopause en particulier les symptômes vasomoteurs qui peuvent être très gênants. Les femmes traitées sont très largement satisfaites : régression des symptômes, mieux-être, amélioration de la qualité de vie. Pour autant, sur 20 à 25 % des femmes se plaignant de trouble altérant leur qualité de vie, on estime que seulement 8 à 10 % auront recours au THM en France, alors qu’elles étaient près de 50% au début des années 2000.(6) En effet, de nombreuses études sont venues ébranler l’utilisation du THM depuis le début des années 2000 en confirmant ou infirmant tout à tour les risques liés à son utilisation.
La plus connue de ces études est l’étude américaine WHI(9), réalisée en 2002 auprès d’Américaines âgées. Celle-ci rapportait un risque accru de cancer du sein et d’accidents cardiovasculaires. Mais les produits incriminés (des œstrogènesconjugués équins associés à un progestatif de synthèse appelé acétate de médroxyprogestérone) ne sont pas les mêmes que ceux utilisés en France. Et la plupart des femmes recrutées avaient commencé leurs traitements tard (à 63 ans en moyenne, soit longtemps après le début de leur ménopause), présentaient égalementdes facteurs de risque cardiovasculaires et les quantités d’hormones étaient plus importantes., Depuis des études françaises sont venues nuancer ces risques selon le traitement utilisé et sa voie d’administration, mais ces nouveaux résultats ont du mal àcontrebalancer ceux décrits dans les premières études.
L’utilisation d’internet :
De nos jours la révolution numérique, avec son accès facilité aux sujets médicaux, notamment via internet, change le mode d’information des patientes.(11) Dans ce cadre, internet constitue une source d’information accessible librement, et est utilisé pour effectuer des recherches en santé. Les internautes, majoritairement des femmes actives d’âge moyen, aspirent à chercher des informations spécialisées, par curiosité, pour compléter les informations transmises dans les consultations ou, pour pallier un manque dans l’échange avec les professionnels.(12) Les recours à internet par les patients ne cessent de croitre, il est important que les professionnels prennent en compte ces différents usages dans leurs pratiques.(13) D’autant plus que le web constitue un lieu d’échange libre, ouvert et anonyme permettant le partage d’expérience tout en se libérant de certains freins.
Le terme « Netnographie » est la compression des mots anglais « network » et «ethnographie ». La méthode netnographique consiste à observer les actes communicationnels des membres d’une communauté virtuelle en cherchant à leur donner un sens. C’est une méthode d’enquête qualitative, qui exploite internet comme source de données. Il s’agit d’une observation dans l’espace virtuel des différentes interactions.
Analyse des résultats :
L’étape de la ménopause :
Pour de nombreuses internautes, la transition vers la ménopause est une étape dans le chemin de vie d’une femme. Les représentations négatives liées à l’entrée dans la ménopause comme maladie ou le deuil de la jeunesse ont été exprimées sur internet. Plusieurs femmes déclarent cette étape comme difficile. L’approche médicale a sa part de responsabilité dans la vision négative de la ménopause. En effet en médecine, la ménopause est classée comme la pathologie de la femme âgée avec comme champ lexical « carence » ou « dérèglement hormonal ».(17) Dans notre société, quand la femme devient ménopausée, celle-ci est assimilée à la femme qui vieillit et l’impression de ne plus être attractive vis-à-vis de la société.(18) En plus d’une ménopause physiologique, les femmes subissent une ménopause sociale, ce qui a été souligné sur les forums internet.(19)
Néanmoins pour d’autres femmes, cette nouvelle vie est vécue comme une libération, une délivrance. Actuellement les femmes ménopausées travaillent, sont actives, ont une vie épanouie. Elles s’organisent afin de concilier leur vie de femme. Elles adoptent une meilleure hygiène de vie, ont du temps pour elle, pour faire du sport et s’entraident sur les forums internet.
Le tabou de la ménopause dans notre société
Dans notre étude, la plupart des internautes se plaignaient des nombreux symptômes de la ménopause. Nombreuses d’entre elles avaient besoin de réconfort et de soutien face à ce bouleversement. En effet, cela reste un sujet peu abordé en dehors des femmes concernées. Ceci fait écho aux résultats de l’étude KANTAR de 2020, réalisée par la MGEN, où il est rapporté que 42% des Françaises en parlent peu et 39% pas du tout, et ce pour plusieurs raisons : sujet pénible auquel on n’a pas envie de penser (40%), sujet tabou, dont il est délicat de parler (31%), symptômes non facilement identifiables (35%), on ne sait pas à qui en parler(33%), pas assez d’information (18%).
L’information aux patientes :
De même, nous avons pu voir que de nombreuses femmes se plaignent de ne pas être informée par leur médecin. Certaines femmes expriment le fait que leur médecin traitant n’est pas apte pour un suivi gynécologique, alors que d’autres au contraire consultent leur médecin traitant pour ce suivi. C’est ce qu’il en ressort également dans la Thèse du Docteur F.CRETIN sur « les facteurs déterminants le choix des femmes entre leur médecin généraliste et leur gynécologue pour une consultation gynécologique ». On y retrouve que la majorité des femmes interrogées (56,2%) n’a jamais consulté son médecin généraliste pour un motif gynécologique, que 66% d’entre elles ignorent si leur médecin généraliste réalise des consultations de gynécologie et que celles qui choisissent leur médecin généraliste le font parce que les rendez-vous sont plus rapides à obtenir avec lui qu’avec le gynécologue.(21)
La profession médicale et ses limites
Dans notre étude, les internautes françaises ont souligné la présence des déserts médicaux avec leur impact sur leur santé. En effet tous types de médecins confondus, la France est légèrement en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE (regroupe plus d’une trentaine de pays), avec près de 3,3 médecins pour 10000 habitants, contre 3,4 en moyenne.(22) Quand la prise en charge médicale a lieu, elle est décrite sur les forums comme insatisfaisante. Plusieurs commentaires ont souligné le retard au diagnostic de la ménopause. Les femmes, devant leurs nombreux symptômes sont démunies et ne trouvent pas d’interlocuteur. Elles entrent dans l’engrenage de l’errance médicale, avec une multiplication des consultations et des examens. Les recours au médecin généraliste pour les questionnements à propos de la ménopause sont faibles selon les commentaires. Pourtant selon le code de la santé publique le médecin généraliste est l’interlocuteur de première ligne.(23) Mais ces derniers reconnaissent le peu de temps et le peu de formations engendrant un retard de traitement. Sur internet, les femmes expriment le sentiment de ne pas être écoutées, laissant leurs plaintes sous-diagnostiquées par leurs médecins. En effet, dans plusieurs travaux, il ressort que la ménopause est un sujet qui n’intéresse pas le médecin généraliste, qui n’a pas le temps, ou dont ce n’est pas la spécialité. Ainsi dans la thèse du Docteur S.BELLANGER sur « Les femmes et la ménopause : le ressenti et la prise en charge en médecine générale» , il en ressort que seulement 13% des femmes interrogées s’informent auprès de la profession médicale contre 33% qui se documentent grâce aux recherches sur internet.
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Table des matières
INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODES
1. Type d’étude
2. Population
3. Recueil des données
4. Méthode d’analyse
5. Méthodologie de la recherche bibliographique
6. Comité d’éthique
RESULTATS
A. Le vécu de la ménopause
1. Une étape
2. Les symptômes de la ménopause
3. La profession médicale
4. Sujet tabou
5. La recherche
6. Recours à internet
B. Les avis sur le THM
1. La vision du THM
2. Le choix du THM
DISCUSSION
A. Analyse des résultats
B. Propositions d’ouverture
C. Forces et limites
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ARTICLE SOUMIS A LA REVUE EXERCER
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