Nationalisme économique

Nationalisme économique

Chapitre 2 – Une pensée politique tournée vers le nationalisme économique, 1873-1885

M. Chapleau n’est pas une nature aussi enthousiaste que l’on s’est plû [sic] de le dire. Il est au contraire un calculateur froid et patient. Il est l’homme des circonstances.
Charles Ouimet, « L’hon. J.-A. Chapleau, C.R. premier ministre de la Province de Québec », L’album des familles, revue mensuelle illustrée, No. 1(1882), P. 57.

Introduction

Le chapitre précédent a permis d’explorer les fondements de la pensée politique de Chapleau en regard des premières années de la Confédération canadienne. De 1867 à 1874, il a été possible de constater comment le jeune politicien a conçu son projet national et comment il l’a adapté selon le contexte politique. La Grande Dépression de 1873 éclate d’abord en Europe et gagne rapidement le Québec si bien qu’à partir de 1874-1875, l’administration provinciale est complètement paralysée, ce qui provoque un renouvèlement complet des thèmes discutés en chambre. La pensée politique de Chapleau est inévitablement influencée par la Grande Dépression qui survient dans un contexte économique déjà précaire. Le deuxième chapitre de ce mémoire sera donc articulé autour des thèmes centraux découlant de cette dépression.Ainsi, il sera d’abord question d’analyser les répercussions immédiates de cette crise économique puis de faire la lumière sur ses conséquences dans la pensée politique de Chapleau. Les années 1874 à 1878 sont aussi propices à analyser ses affinités et ses rivalités politiques depuis son entrée en politique. En deuxième lieu, il sera question de la période où il occupe le poste de premier ministre du Québec, de 1879 à 1882. Cette période constitue un moment privilégié afin d’explorer comment Chapleau articule son projet national à une époque qui constitue peut-être l’apogée de sa carrière politique. En 1882, Chapleau décide de quitter son poste de premier ministre pour faire le saut sur la scène fédérale. De nouveaux défis l’attendent alors. Il en sera question en troisième lieu.

Le Québec et la longue crise économique, 1873-1878

Nouveau contexte politique et économique québécois, 1873-1875

En juillet 1875, la deuxième législature provinciale tire à sa fin et les membres du gouvernement de Charles-Eugène Boucher de Boucherville s’apprêtent à faire face aux électeurs. Durant la dernière session parlementaire, Boucherville avait opéré une importante réforme électorale et plusieurs questionnements demeuraient en suspens. En plus de l’imposition d’un nouveau cens électoral, cette élection serait la première de l’histoire de la province à se tenir le même jour dans toutes les circonscriptions et à mettre en pratique le scrutin secret. Au nom des principes conservateurs, Chapleau s’était principalement opposé à l’idée d’un scrutin secret en invoquant toutes les formes de corruption électorale qu’une telle mesure ferait naître éventuellement, mais n’avait finalement eu d’autres choix que de s’y rallier314. Pour la première fois de sa carrière politique, le député conservateur n’est pas élu par acclamation et il doit faire face au docteur J.-Alfred Duchesneau, un riche propriétaire foncier établi à Terrebonne depuis une dizaine d’années315. Autre particularité en vue du vote de juillet 1875, les lignes de partis entre les Conservateurs et les Libéraux se durcissent316. Toujours dirigés par Henri-Gustave Joly de Lotbinière, les Libéraux tentent par tous les moyens de rappeler aux électeurs les scandales entourant le gouvernement, spécialement l’Affaire des Tanneries. Enfin, les Ultramontains modifient leur angle d’approche et choisissent maintenant de ne s’attaquer qu’au « danger libéral » laissant le champ libre aux Conservateurs de Boucher de Boucherville317. Toutes ces particularités ne changent rien aux résultats du sept juillet qui sont tout compte fait sans équivoque pour les Conservateurs. Ceux-ci remportent quarante-trois sièges, le plus petit nombre depuis 1867, mais bien assez pour être reportés au pouvoir. De son côté, Chapleau l’emporte facilement avec six-cents voix de majorité sur son opposant, ce qui confirme son ascendant dans la grande région de Montréal318. Pendant la campagne, le politicien terrebonnien avait livré un plaidoyer pour Boucher de Boucherville en plus de rappeler, comme il le faisait souvent, l’héritage de George-Étienne Cartier319.
L’élection de juillet 1875 se déroule presque entièrement sans qu’aucune allusion ne soit faite à propos de la plus importante crise économique à avoir frappé le Québec jusqu’alors. Les hommes politiques québécois ne sont pas encore complètement conscients de l’importance de cette crise. Ils croient aussi que celle-ci ne les concerne pas. La crise éclate à l’été 1873 avec le Krach de Vienne, ayant pour cause la spéculation téméraire des banques et l’euphorie immobilière atteignant toute l’Europe du début des années 1870320. Cette crise n’est certes pas la première crise du XIXe siècle, mais elle prend rapidement beaucoup plus d’importance que les précédentes en raison de l’internationalisation grandissante des économies321. Jusque-là, la crise semble plutôt éloignée du Québec. Lorsque la Banque d’Angleterre décide de hausser son taux d’escompte et que les financiers anglais terrent leurs capitaux, l’économie québécoise est frappée de plein fouet étant toujours grandement dépendante de Londres dans son développement industriel322. Les choses s’aggravent encore plus lorsque, quelques mois plus tard, la crise touche les États-Unis et elle provoque la faillite de nombreuses banques où la spéculation entourant la construction ferroviaire a atteint des sommets. Faute de barrière tarifaire, les industriels québécois sont alors aux prises avec le dumping des produits américains323. Les conséquences pour le Québec sont graves. Comme aux États-Unis, de nombreuses banques québécoises ayant consenti à des prêts trop risqués ne résistent pas à la crise. Dès 1874, on assiste à de nombreuses faillites324. La rareté du crédit provoque également la débâcle de plusieurs compagnies qui se voient dans l’obligation de réduire les salaires ou simplement de mettre à pied leurs employés325. Enfin, la crise de 1873-1874 accentue considérablement le mouvement d’émigration dont il a déjà été question lors du premier chapitre de ce mémoire326.

La fièvre des chemins de fer

Le spectre de la crise économique hante inéluctablement la province à partir de 1874 et provoque ainsi un renversement complet des thèmes discutés en chambre. Comme Marcel Hamelin l’indique, tous les députés ne s’entendent toutefois pas sur les solutions afin de trouver de nouvelles avenues à l’économie québécoise327. Du côté de Chapleau, il est très tôt l’un des plus grands adeptes du développement ferroviaire comme remède à la crise. Cette position n’est pas surprenante, lui qui avait depuis son entrée en politique préconisé cette avenue pour l’économie québécoise. En 1870, il déclarait déjà en chambre que « [l]a politique des chemins de fer […] est la politique qui tient en ses mains le secret de l’avenir des nations, aux gouvernements qui sauront le plus hardiment et le plus intelligemment la mettre en pratique appartient la palme du vrai progrès, surtout pour les nations jeunes.328 » Le contexte de la crise économique renforce cette idée qu’il est primordial de miser sur les chemins de fer pour l’avenir de la nation. Depuis 1867, une multitude de projets ferroviaires, se chevauchent et le gouvernement peinait à établir un ordre de priorité pour l’investissement329. Sans compter les rivalités régionales bien présentes entre les députés qui militent pour leur région. Par exemple, Chapleau plaide pour une voie ferrée sur la rive Nord du Saint-Laurent qui joindrait Terrebonne. Deux conceptions s’affrontent enfin dans l’aide que la Province doit apporter aux compagnies de trains. D’un côté, on préfère éviter d’octroyer des terres, car cela créerait un dangereux précédent probablement irréversible. De l’autre côté, plusieurs députés, dont Chapleau, privilégient cette avenue en faisant valoir que les compagnies mettront en valeur ces terres octroyées330.
Au cours de ce débat, l’administration provinciale adopte à partir de 1874, en dépit de la crise économique, une politique beaucoup plus audacieuse afin de construire son réseau de voies ferrées. Alors que le Grand Trunk Railway et l’Intercoloniale desservent toutes deux la rive Sud du Saint-Laurent entre Québec et Montréal, la priorité du gouvernement conservateur est désormais de construire une voie ferrée sur la rive nord331. Cette volonté se manifeste par la fusion de deux projets distincts : le Montreal Northern Colonization Railway332 et le Chemin de fer de la Rive Nord qui deviennent le Quebec, Montreal, Ottawa & Occidental Railway (QMO & O)333. Pour ce faire, le gouvernement Boucher de Boucherville prend la décision de réorienter ses subventions et de les bonifier, malgré l’incertitude de ses revenus en raison du contexte économique334. Les municipalités traversées par le tracé doivent elles aussi contribuer au financement global même si cette question n’est pas totalement ficelée335. Devant une telle intervention étatique, de nombreux députés s’indignent du fait que l’État doit assumer tous les coûts de construction pour laisser tous les bénéfices aux compagnies336. Quant à Chapleau, il soutient devant la chambre la position audacieuse du gouvernement Boucher de Boucherville. Dans une envolée oratoire, il dénonce vivement les détracteurs du QMO & O :
[…] Les gouvernements sacrifient des millions pour se créer des comptoirs, établir des stations navales qui augmentent leur puissance et leur influence au milieu des nations. Le peuple bas-canadien reculerait-il devant le sacrifice que le gouvernement lui demande aujourd’hui lorsque l’exécution des grands travaux qu’il projette peut lui assurer dans l’avenir, sinon la prépondérance absolue, du moins une influence considérable sur les destinées de la Puissance? L’économie mal entendue perd les peuples comme les individus. […]337.
En définitive, il est difficile d’évaluer précisément l’impact de ces projets de chemins de fer sur l’économie québécoise. Comme Jean Hamelin et Yves Roby l’indiquent, la construction de ces voies ferrées est certes génératrice d’emplois338, mais ne sert-elle pas d’abord et avant tout des intérêts privés ? Étant donné la lourdeur des projets et la lenteur à les mettre en place, cette avenue ne permet pas de résoudre les problèmes liés à la crise économique qui touche le Québec du milieu des années 1870, du moins pas à court terme. Telle qu’évoquée plus tôt, la fièvre des chemins de fer met aussi en lumière les rivalités régionales. Si le tracé du QMO & O passe finalement par Terrebonne et Sainte-Thérèse, ce choix n’est certainement pas étranger à la pression en coulisses de Chapleau, auprès du premier ministre339. Quoi qu’il en soit, Chapleau n’est pour l’instant pas directement impliqué dans le projet, même s’il l’appuie ouvertement. Chapleau ne fait pas partie du conseil exécutif depuis son expulsion à la suite de l’Affaire des Tanneries. Ceci n’empêche pas le projet de se mettre en branle.

Chapleau-Senécal-Dansereau : proximité avec les milieux financiers et le monde de la presse

L’histoire de la construction du QMO & O au milieu des années 1870 permet de mettre en relief un autre aspect de la pensée politique de Chapleau. Tout comme plusieurs de ses pairs, Chapleau entretient une relation de proximité avec divers milieux financiers ainsi que le monde de la presse. À l’image de Cartier et du Grand Trunk Railway, Chapleau est directeur depuis 1872 de la Montreal and Laurentian Colonization Railway340, un projet de deux petites lignes qui propose de relier Ste-Thérèse, son village natal, vers Saint-Eustache et une autre vers Saint-Lin341. En chambre, le politicien de Terrebonne essuie d’ailleurs quelques critiques à ce sujet342. Rappelons également la proximité de Chapleau avec le Curé Antoine Labelle, apôtre de la colonisation et promoteur de chemins de fer dans le Nord343. Au cours de cette période, il fait la connaissance de Louis-Adélard Senécal, l’un des plus grands capitalistes canadiens-français de son époque. Ce dernier est un riche homme d’affaires ayant fait fortune dans le transport maritime, puis le transport ferroviaire344. Il serait fastidieux de faire la liste exhaustive de toutes les entreprises auxquelles Senécal a participé. Sa carrière est néanmoins particulièrement intéressante, car elle constitue un cas d’espèce de l’entrepreneur-politicien. De fait, en plus d’être un important brasseur d’affaires, Senécal se fait élire lors des élections de 1867 dans les deux chambres, à Ottawa et à Québec, en vertu du double mandat345. Commentant les solidarités qui se sont créées entre les promoteurs, les politiciens et les entrepreneurs de l’époque – dans ce cas, Senécal porte les trois chapeaux – l’historien Gaetan Gervais note que chacun sert les intérêts des uns et des autres : « Les politiciens se font souvent promoteurs, et les promoteurs se font politiciens.346 » Dans le cas de Senécal et de Chapleau, les deux hommes se complètent parfaitement. L’un – Chapleau – est un orateur redoutable, un habile politicien et un fin stratège. L’autre – Senécal – est organisateur expérimenté, un astucieux homme d’affaires et possède les moyens de ses ambitions. L’un a besoin d’appuis financiers pour concurrencer ses adversaires politiques, l’autre est constamment à la recherche de subventions gouvernementales.
À leur duo, un autre membre vient se joindre durant cette même période. Parent par alliance de Senécal347, Clément-Arthur Dansereau est lui un homme de presse. Rédacteur en chef de La Minerve depuis 1869, il appuie vigoureusement les idées de Cartier et de la Confédération afin d’assurer la survie de la nationalité canadienne-française348. D’une intelligence rare, il n’a personnellement aucune envie pour la politique active, mais il se fait proche de politiciens éminents afin de véhiculer ses idées politiques. Il n’est pas tout à fait clair à quel moment de sa vie il rencontre Chapleau, mais les deux hommes se connaissent depuis longtemps. Dansereau avait d’ailleurs été impliqué dans l’Affaire des Tanneries sans qu’il n’y ait eu de conséquences graves pour lui. En tant qu’homme de presse, il entretient certaines solidarités politiques avec Chapleau dont il distribue moult conseils politiques. En retour, son prestige en tant que journaliste tient à son rapprochement des cadres du pouvoir. La presse sert aux Conservateurs et à Chapleau d’instrument majeur, non seulement de communication, mais de propagande349. Par l’entremise de Chapleau, Dansereau est lui aussi mis en relation avec Senécal. Le « triumvirat » Chapleau – Senécal – Dansereau, comme ils se font appeler fréquemment350, forme ainsi une alliance redoutable. En alliant l’autorité politique, le monde des affaires et le monde de la presse, ils représentent à eux trois une importante menace pour leurs adversaires politiques. À propos de leur relation de proximité, l’historien Robert Rumilly déclare que Senécal incarne la hardiesse, Dansereau l’habilité alors que Chapleau trône au-dessus de cette pyramide351. Pour l’instant leur relation est cependant trop peu connue pour attirer les critiques, mais cela ne saurait tarder.

Le « coup d’État » de Saint-Just et la conquête du pouvoir par Chapleau

Même si la crise économique affecte inexorablement le Québec au milieu des années 1870, il ne faut pas occulter les rivalités politiques qui demeurent prépondérantes durant cette période. À Ottawa, les Conservateurs ont perdu le pouvoir à la suite du Scandale du Pacifique. Ce sont les Libéraux d’Alexander Mackenzie qui sont bien en selle depuis novembre 1873. À Québec, d’importantes rivalités se dessinent à l’intérieur du parti. Alors que Boucher de Boucherville compte gouverner avec l’appui des Ultramontains, ou au moins en leur faisant d’importantes concessions, Chapleau demeure l’ennemi juré de ces derniers. Les personnalités de Boucher de Boucherville et de Chapleau sont aux antipodes. Le premier est un seigneur austère et traditionaliste, peu porté vers de grandes envolées oratoires et préférant plutôt opérer en coulisse. De plus, le premier ministre est convaincu que le clergé a un rôle à jouer dans la vie politique. De son côté, Chapleau, représente la jeunesse du parti, promouvant des idées nouvelles, même si celles-ci ne sont parfois pas suffisamment étoffées. Orateur flamboyant, Chapleau compte sur sa capacité de séduction et de conviction pour remplacer la vieille garde des Conservateurs à Québec. Boucher de Boucherville se méfie donc de Chapleau, mais il sait qu’il ne pourra l’écarter encore bien longtemps vu l’impatience du politicien de Terrebonne352. En janvier 1876, un événement auquel Boucher de Boucherville ne s’attendait pas survient lorsque le trésorier J.G.
Robertson démissionne en raison de son désaccord sur la politique des chemins de fer de son gouvernement. Cette politique favorise la rive Nord plutôt que la rive Sud. Boucher de Boucherville rebrasse les cartes et remanie son cabinet ministériel. L’ancien procureur général, Levi Ruggles Church, prend la place de Robertson comme trésorier alors que Chapleau occupe désormais le poste de secrétaire et registraire provincial353. Fait intéressant à noter, c’est la première fois depuis 1867 que les postes de secrétaire et registraire provincial ne sont pas occupés personnellement par le premier ministre. L’une des raisons qui expliquent ceci est la complexité croissante de l’administration publique provinciale354. Comme Chapleau avait été blanchi de l’Affaire des Tanneries, il redevenait « ministrable ». Son entrée au cabinet permettait d’assouplir les relations entre lui et le premier ministre.
Cette promotion pour Chapleau n’étouffe toutefois pas toutes les rivalités entre lui et Boucher de Boucherville. Même si les élections de 1875 ont permis de refaire l’unité des troupes conservatrices355, Chapleau demeure le mouton noir du cabinet356. Honni de la branche la plus traditionaliste des Conservateurs, particulièrement des Ultramontains programmistes, Chapleau entreprend de chercher des appuis du côté des Conservateurs modérés ainsi que des Libéraux. Lorsque les Conservateurs se réunissent à Saint-Lin à l’été 1877, le nouveau secrétaire et registraire provincial prononce un discours qui en surprend plusieurs :
Le gouvernement de Québec n’est pas lié à aucun parti…. Ce n’est pas un gouvernement de parti, mais de progrès…. Je serais heureux de voir mon ami personnel et mon adversaire politique M. Laurier concourir avec moi au bonheur du pays. Soyons le parti du progrès, et si vous avez de la répugnance à vous appeler conservateurs, nous l’appellerons le parti libéral-conservateur. Formons-le, ce parti, et engageons nos concitoyens à nous prêter main-forte357.
Cette invitation à Wilfrid Laurier n’est pourtant pas si surprenante. Quelques mois auparavant, ce dernier, qui est d’ailleurs originaire de Saint-Lin, prononçait de son côté un important discours sur sa conception du libéralisme politique qui se rapproche beaucoup de la pensée politique de Chapleau358. Même si elle est cohérente avec sa pensée, cette tentative de Chapleau de rapprocher les Conservateurs et les Libéraux a pour effet, à court terme, que d’envenimer les relations de Chapleau avec le premier ministre. Trop fier et surtout préférant éviter à tout prix de s’aliéner l’aile ultramontaine de son parti, Boucher de Boucherville ne peut tolérer un tel écart. D’un point de vue personnel, ce geste de rapprochement n’a pas plus de succès pour Chapleau qui voit la presse libérale se dresser contre lui359. Ce bref événement permet néanmoins d’éclairer le côté tacticien de Chapleau. Il sait pertinemment qu’il n’arrive jamais à trouver des appuis chez les Ultramontains. Il lui est tout à fait nécessaire de rechercher des appuis ailleurs s’il désire grimper les échelons et peut-être devenir premier ministre. Ses appuis dans le monde des finances – Senécal – et dans le monde de la presse – Dansereau – lui sont fort utiles, mais pour l’instant insuffisants. Durant l’année suivante, un événement vient toutefois changer la donne pour lui.
En 1878, le gouvernement Boucher de Boucherville dépose un projet de loi afin de revoir la part des municipalités dans le financement des chemins de fer de la province360. Alors que l’administration provinciale est empêtrée dans le dossier de la construction du QMO & O, Boucher de Boucherville se voit dans l’obligation de durcir le ton face aux municipalités qui refusent de respecter leurs engagements financiers envers la province361. C’est alors qu’intervient le nouveau lieutenant-gouverneur Luc Letellier de Saint-Just. Appelé par les Libéraux en remplacement de René-Édouard Caron, mort en 1876, ce dernier s’appuie sur le mécontentement des municipalités et des citoyens à l’égard du projet de loi de Boucher de Boucherville362. Pour le nouveau lieutenant-gouverneur, l’occasion est belle de faire sentir son influence363. Au début du mois de mars 1878, lorsqu’il prend connaissance de ce nouveau projet de loi, il force le premier ministre Boucher de Boucherville à démissionner. Il choisit aussitôt alors le leader de l’opposition, le libéral
358 « La politique du parti libéral est de protéger [nos] institutions, de les défendre et de les propager, et, sous l’empire de ces institutions, de développer les ressources latentes de notre pays. Telle est la politique du parti libéral ; il n’en a pas d’autre. » – Réal Bélanger, « Laurier, Sir Wilfrid », DBC, 2016, http://www.biographi.ca/fr/bio/laurier_wilfrid_14F.html, consulté le 3 octobre 2016.
Henri-Gustave Joly de Lotbinière, comme premier ministre du Québec. En toute partialité, Luc Letellier de Saint-Just utilise comme prétexte de ne pas avoir été consulté dans les décisions du gouvernement quant aux politiques liées aux chemins de fer364. Les Conservateurs condamnent ce qu’ils considèrent comme un véritable « Coup d’État ». Le gouvernement libéral à Ottawa refuse de faire quoi que ce soit, d’autant plus qu’il se sent indisposé à intervenir, clamant l’autonomie provinciale365. Du côté de Chapleau, il s’insurge évidemment d’une telle annonce. Il ne se gêne pas pour vilipender celui qu’il surnomme Luc 1er. Deux jours seulement après l’assermentation de Joly de Lotbinière comme premier ministre, il déclare devant une assemblée tenue à Lévis : « C’est la liberté du peuple qui est en jeu. Il s’agit de savoir si le peuple sera gouverné par un seul homme, ou bien si le peuple se gouvernera lui-même ; il s’agit de savoir si la volonté d’un seul sera substituée à la volonté de tous ; il s’agit de savoir, en un mot, si le lieutenant-gouverneur règne ou gouverne.366 » Dans le même discours, l’habile orateur se permet de citer nul autre que le leader des Insurrections des patriotes de 1837-1838 :
Plût à Dieu que le parti libéral qu’il a fondé respectât ses enseignements ! Que dirait donc [Louis-Joseph] Papineau, lui, l’expulsé des gouverneurs, s’il voyait maintenant ses héritiers devenus les défenseurs et les complices de l’expulsion de ceux en qui le peuple avait confiance ? Que dirait-il ? Il ferait entendre un de ces accents terribles dont l’écho est venu jusqu’à nous, et s’écrierait : “ Faites taire la voix de Spencer Wood, et, laissez parler la grande voix du peuple ! ” 367.
Dans l’impasse, le nouveau premier ministre Joly de Lotbinière décide de déclencher des élections générales afin de légitimer sa place au pouvoir368. Il s’agit déjà de la quatrième élection générale dans la jeune histoire confédérationelle de la province de Québec. Pour la première fois, ce sont les Libéraux qui forment le gouvernement sortant. Pendant tout le mois d’avril 1878, les Conservateurs remettent en doute la constitutionnalité douteuse du geste Letellier de Saint-Just alors que les Libéraux font valoir les piètres performances économiques des Conservateurs depuis le début de la décennie 1870369. Boucher de Boucherville s’étant fait montrer la porte, Chapleau s’affirme désormais comme le véritable chef des Conservateurs provinciaux. C’est lui qui dicte la voie de la contestation et qui organise la lutte dans la majorité des comtés électoraux. C’est lui aussi, en compagnie de Dansereau, qui élabore la brochure incisive Les ruines libérales : quelques pages de politique. Cette brochure est distribuée aux quatre coins de la province370. Elle reprend essentiellement les doléances des Conservateurs à l’égard de Letellier Saint-Just en plus d’y inclure un plaidoyer à propos du bilan du gouvernement Boucher de Boucherville. C’est Chapleau qui organise enfin le financement de la campagne sans oublier celui de l’important journal La Minerve, organe des Conservateurs dans la province371. La bataille s’avère ardue pour les Conservateurs. Dans son comté, Chapleau doit affronter le Dr Jules-Édouard Prévost qui croit en ses chances en raison des modifications récentes apportées au système électoral372. Les résultats du quatre juin 1878 rendent compte de la lutte serrée de cette élection : 49,5% voix vont aux Conservateurs alors que 47,5% des voix vont aux Libéraux373. Malgré cette victoire selon la répartition des voix pour les Conservateurs, la réalité traduite par la répartition des sièges à l’Assemblée est beaucoup plus complexe. De fait, les Conservateurs et les Libéraux se retrouvent nez à nez avec tous les deux une trentaine de sièges remportés, mais certains autres députés élus ne se rangent pas officiellement dans une formation ou l’autre374. Au dernier moment, quelques députés finissent par se ranger du côté des Libéraux, ce qui permet à Joly de Lotbinière de former le gouvernement de justesse375. Pour plusieurs députés conservateurs, c’est la consternation. À Terrebonne, Chapleau l’emporte par à peine un peu plus de deux cents voix de majorité alors que plusieurs autres candidats conservateurs subissent une défaite crève-cœur376. Les difficultés économiques ont manifestement eu raison des Conservateurs qui se voient dans l’obligation de céder le pouvoir. Le « coup d’État » est réussi.
La première session de la quatrième législature s’ouvre donc, le quatre juin 1878, sur un mandat précaire de Joly de Lotbinière. Devant lui à l’Assemblée législative, se trouve Chapleau, nouveau chef des Conservateurs et chef de l’opposition. La lutte s’annonce enflammée. Par le passé, les deux hommes ont souvent été à couteaux tirés377. En chambre, cela a laissé place à des débats mémorables entre les deux hommes qui ne s’aiment pas du tout. Maintenant que Chapleau est le seul chef des Conservateurs à Québec, les choses n’allaient certainement pas être différentes378. Les grandes préoccupations du gouvernement Joly de Lotbinière sont l’achèvement du QMO & O et la réduction des dépenses publiques379. La construction du QMO & O coûte cependant beaucoup plus cher que prévu et les politiques de réduction des dépenses s’avèrent particulièrement impopulaires au temps où les revenus de la province sont en baisse380. Alors que Joly de Lotbinière tente tant bien que mal de gouverner la province, une nouvelle tuile lui tombe sur la tête. À Ottawa, les Libéraux sont battus avec le retour au pouvoir des Conservateurs de Macdonald lors de l’élection fédérale du dix-sept septembre 1878381. Le gouvernement Macdonald annonce d’entrée de jeu qu’il prévoie destituer Luc Letellier de Saint-Just de son poste. Chapleau est évidemment ravi d’une telle nouvelle. Tout porte à croire que la décision de Macdonald est issue des pressions du chef des bleus à Québec382. À Langevin, le politicien de Terrebonne écrit : « Spencer-Wood est en ce moment un vrai baromètre. Si le bonhomme sort, c’est le beau temps, s’il reste chez lui c’est du mauvais ! . . . Et dire que c’est vous à Ottawa qui faites la pluie & le beau temps ! Caveté !… 383» La chose se concrétise finalement le vingt-cinq juillet 1879 alors que Luc Letellier de Saint-Just est remplacé par Théodore Robitaille, un membre de la vieille garde des Conservateurs à Ottawa384. Les Libéraux québécois expriment leur indignation, mais comme les Conservateurs l’avaient été un an auparavant, ils sont impuissants devant la décision. Ils le sont tout autant devant les assauts répétés en chambre provenant des Conservateurs avides de pouvoir. À la fin du mois d’octobre, la situation devient complètement intenable lorsque cinq députés libéraux quittent leur camp pour se rendre chez les Conservateurs385. Toute l’affaire a été orchestrée par Chapleau. Étant donné que son gouvernement se trouve désormais en situation minoritaire à la chambre, Joly de Lotbinière demande alors au nouveau lieutenant-gouverneur de déclencher de nouvelles élections. Cette porte de sortie n’allait pas lui être accordée par Robitaille386. Rempli d’amertume, le premier ministre libéral n’a donc d’autres choix que de démissionner le vingt-neuf octobre 1879, à peine moins de vingt mois après son entrée en poste. Le lendemain, le journal conservateur La Minerve titre : « Le 2 Mars vengé ! L’usurpation finie.387 » Pour le remplacer, qui d’autre que Chapleau ? Auguste-Réal Angers n’a pas été réélu, Joseph-Israël Tarte n’a pas assez d’appuis autour de lui, et ni Joseph Gibb Robertson ni Levi Ruggles Church n’ont l’étoffe d’un chef. Chapleau est tout désigné pour remplacer Joly. Quelques semaines auparavant, l’homme de Terrebonne avait concocté son futur cabinet ministériel, en compagnie de Dansereau388. Le trente octobre, Chapleau traverse la chambre d’assemblée pour s’asseoir dans son nouveau siège. À trente-huit ans et des poussières, Chapleau devient ainsi le plus jeune homme politique à accéder au poste de premier ministre de la province depuis 1867.

Chapleau et l’articulation de son projet national, 1879-1882

La Politique nationale de Macdonald et le développement économique du Québec

Outre le règlement du « coup d’État » de Letellier de Saint-Just, l’autre priorité des Conservateurs fédéraux nouvellement élus à Ottawa avait été l’établissement d’une Politique nationale comme solution aux difficultés économiques du pays. Cette politique se résume en l’application de tarifs douaniers visant particulièrement les produits américains389. Les revenus engrangés par ces tarifs permettraient de concrétiser l’idée originelle derrière la formation du Canada, soit de créer un vaste marché intérieur en favorisant les échanges interprovinciaux. Alors que Chapleau prend le pouvoir à Québec, cette politique des Conservateurs à Ottawa est en phase avec sa pensée politique axée sur le nationalisme économique. Dans le contexte de la crise économique des années 1870, la priorité pour Chapleau est de redresser l’économie de la province pour le bien-être de la nation canadienne-française. Pour ce faire, il importe à Chapleau est de résorber les effets négatifs de la crise de 1870 en misant sur des politiques économiques novatrices. Dans un discours-programme prononcé à Lévis deux jours à peine après avoir pris le pouvoir, le nouveau premier ministre énumère ainsi les priorités de son gouvernement :
Le gouvernement se propose un double but : d’abord, il nous faut courir au plus pressé, c’est-à-dire prendre les moyens les plus immédiats de mettre l’ordre dans nos finances ; ensuite, il faut développer les ressources naturelles du pays, ce qui est un autre moyen de combler le trésor public. Parmi les premiers moyens, je trouve ceux-ci : l – Vendre le Chemin de fer du nord; 2 – Formuler certaines réclamations contre le Gouvernement fédéral; 3 – Liquider le fonds d’emprunt municipal; 4 – Diminuer les dépenses. […] Quant aux moyens à prendre pour développer les ressources du pays, nous aurons à étudier les suivants entre autres : 1 – Encourager la fabrication du sucre de betterave; 2 – Encourager la fabrication du fromage; 3 – Encourager l’exploitation de nos mines de phosphates; 4 – Réviser les lois générales sur les mines; […] Voilà, Messieurs, notre programme dans ses lignes générales. Je crois qu’il répond aux vœux de la très grande majorité des électeurs de cette province390.
Voilà qui n’est pas une mince tâche que de rechercher de nouvelles sources de revenus pour la province. Comme Chapleau l’indique dans son discours à Lévis, le développement des ressources naturelles apparaît comme étant sa première mission. Pour ce faire, Chapleau prévoit miser sur la modernisation de l’agriculture puis l’industrialisation, thèmes qu’il a maintes fois élaborés depuis le début de sa carrière politique. Le nouveau premier ministre entend de ce fait intensifier les efforts de la province dans l’industrie de la betterave sucrière ainsi que l’industrie laitière391. Grâce à d’importantes subventions accordées, des usines de sucre à betterave naissent à Farnham et à Coaticook392 alors que la Société d’industrie laitière est plus tard créée afin de moderniser ce secteur d’activité393. Dans un même ordre d’idées, le premier ministre, également titulaire du poste de commissaire de l’Agriculture et des Travaux publics, revoit les lois générales sur les mines de la province. En 1880, le gouvernement Chapleau fait adopter de l’Acte concernant les mines de cette province. Cette loi régit les ressources qui se trouvent dans le sous-sol : elles sont désormais distinctes de celles qui se trouvent en surface, de sorte que celles qui se trouvent en sous-sol appartiennent à la Couronne et non au futur propriétaire de la terre. Cependant, il est possible d’acquérir ultérieurement les droits d’exploitations minières en fonction du type de minéraux qui s’y trouve394. L’État québécois élargit ainsi substantiellement son contrôle sur les activités minières sur son territoire en plus d’augmenter de manière significative ses revenus. Par ces nouvelles mesures, l’État entend notamment dynamiser l’exploitation lucrative des mines de phosphates, riche engrais nécessaire aux cultivateurs395.
Enfin, les efforts du gouvernement dans le domaine minier sont nouvellement coordonnés par un ingénieur français, Joseph Obalski, que Chapleau embauche lors de l’un de ses voyages outre-Atlantique396. Faisant suite à sa promesse aux citoyens de Lévis, le gouvernement Chapleau s’attaque par la suite au fonds consolidé d’emprunt municipal afin d’assainir les finances publiques de la province397. Rappelons que cette question avait fait tomber le gouvernement Boucher de Boucherville : il est extrêmement délicat d’y trouver une solution. Lors de sa première session au pouvoir, Chapleau parvient à faire ratifier l’Acte concernant « le fonds consolidé d’emprunt municipal du Bas Canada. » qui prévoit calculer « l’intérêt au taux de cinq par cent par année, pour douze années sur le montant industrie est largement favorisée par les gouvernements québécois qui la voient comme la pierre angulaire de l’agriculture au Québec. – Hamelin, Les premières années, p. 241-243. original emprunté par chaque municipalité, lequel dit intérêt sera ajouté à la somme capitale empruntée. […]398 ». Louis-Olivier Taillon est alors désigné par Chapleau comme commissaire de ce fonds399. Même si le projet de loi déplaît à l’opposition en chambre qui y voit une mesure draconienne, il est adopté sans difficulté. Toujours dans l’objectif de mettre de l’ordre dans les finances publiques, Chapleau entend diminuer les dépenses de son gouvernement en réduisant la taille de l’État. Même si le premier ministre se montre hésitant à abolir le Conseil législatif, institution que de nombreux acteurs politiques de l’époque estiment coûteuse et inutile, Chapleau parvient tout de même à abaisser significativement les dépenses de la Province par rapport à celles du gouvernement précédent. Celles-ci passent ainsi de 3,88$ investies per capita en 1878-1879 à 2,61$ pour 1879-1880400. Cette compression des dépenses est attribuable à la réduction des subventions aux compagnies ferroviaires, le gouvernement décidant désormais de concentrer ses efforts à terminer la ligne du QMO & O401. Étant donné le contexte économique difficile dans lequel se retrouve la province, Chapleau n’entend finalement pas demeurer silencieux face à Ottawa. Si la pensée politique du premier ministre se trouve en phase avec celle des Conservateurs à Ottawa, il ne se gêne pas pour autant pour réclamer une augmentation des subsides accordés à la province. Le quatorze décembre 1879, Chapleau écrit à Langevin :
[…] il faut se l’avouer, la position n’est guère tenable ici. Le mouvement de pression sur le gouvernement fédéral pour des better terms s’impose à nous comme il va s’imposer à votre administration. Il ne s’agit plus de pleurer sur le délire du règne Letellier – Joly, il faut nous regarder nous-mêmes en face de la situation qui nous est faite. L’intérêt sur notre dette va bientôt atteindre $700,000 (tout près de notre subside) et nos sources de revenus diminuent à mesure qu’on augmente les vôtres. Et l’on ne doit pas penser à la taxe aujourd’hui à moins de se suicider. C’est le temps ou jamais de demander le concours énergique de vos Ministres bas-Canadiens au Conseil Privé du Canada. Je sais que les gouvernements sont rarement disposés à se donner de la peine pour régler les difficultés des autres, mais notre position est tellement exceptionnelle qu’elle justifie n’importe quelle démarche, excepté la répudiation. Comme j’avais l’honneur de vous le dire à Ottawa le montant qu’il nous faut n’est pas énorme ($500.000.), mais il nous le faut, en sus de l’emprunt qu’il faudra contracter ($3.000.000.)402.
De telles réclamations sont également fréquentes auprès de Macdonald, que Chapleau estime son chef. Ces requêtes ne rencontrent pas le succès escompté et les transferts du fédéral à la province vont même diminuer entre 1879 et 1882403. Malgré cet insuccès relatif, force est de constater que la proactivité du premier ministre de la province porte ses fruits. De fait, la crise de 1874 semble vouloir se résorber une bonne fois pour toutes et les revenus totaux de la Province se retrouvent en augmentation404. Cela dit, la conjoncture favorable de la fin des années 1870 aide certainement le gouvernement Chapleau405. Les tarifs protectionnistes de la Politique nationale de Macdonald donnent des résultats positifs et Chapleau profite certainement de cette conjoncture pour mettre en branle son plan économique.

À la recherche d’investissements étrangers : l’accession aux milieux financiers français

Durant son mandat en tant que premier ministre, Chapleau ne se contente pas d’interventions en politique intérieure pour relancer l’économie de la province. Vingt-cinq ans après l’avènement de la corvette La Capricieuse, premier navire français à naviguer sur les eaux du Saint-Laurent depuis la Conquête406, Chapleau frappe à son tour un grand coup. Alors que les marchés britanniques et américains montrent leurs craintes à investir au Québec en 1880, Chapleau profite de son réseau et s’oriente vers le marché français comme solution de rechange. L’entrée du Québec sur ce marché vient directement combler les besoins de financement de la province dans sa politique ferroviaire407. Au cours de l’été, en compagnie de Jonathan Saxton Campbell Würtele, de Louis-Napoléon Carrier et d’Etienne-T. Paquet, Chapleau conclut un emprunt d’un peu plus de vingt millions de francs – plus de quatre millions de dollars – auprès du syndicat financier L. & R. Cahen d’Anvers et de la Banque de Paris et des Pays-Bas (BPPB)408. L’émission des obligations est lancée sur le marché parisien à partir du vingt-deux juillet 1880 à un prix de vente de cinq-cents francs chacune rapportant un intérêt de 4,5% remboursable à partir du premier juillet 1910.

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Table des matières

Introduction
Mise en contexte
Cadre conceptuel opératoire : la question du nationalisme
État de la question
a) Études portant spécifiquement sur J.-A. Chapleau
b) Contexte historique et économique
c) Histoire de la presse
d) Études menées par des contemporains de Chapleau
Problématique et hypothèse
Corpus de sources
a) Débats parlementaires
b) Discours
c) Correspondance
d) Brochures
Méthodologie
Plan d’argumentation
Chapitre 1 – Confédération canadienne, défense des intérêts des Canadiens français et nationalisme économique : fondements de la pensée politique de Chapleau, 1840-1874
Introduction
1.1. Premiers pas vers la politique, 1840-1867
1.1.1. Origines et éducation : prélude d’une carrière politique
1.1.2. Le Colonisateur
1.1.3. Appui aux Conservateurs et à la Confédération
1.1.4. L’École de Cartier
1.2. Le développement économique au centre des intérêts politiques, 1867 – 1871
1.2.1. Chapleau et l’établissement d’une nation politique canadienne
1.2.2. La question de l’éducation et la défense des intérêts des Canadiens français
1.2.3. L’épineux problème de l’émigration et ses solutions
1.3. La pensée « conservatrice libérale » de Chapleau, 1871 – 1874
1.3.1. Chapleau et l’ultramontanisme : fracture idéologique au sein des Conservateurs
1.3.2. Métamorphose du contexte politique québécois
1.3.3. L’Affaire des Tanneries
1.3.4. Chapleau et les Insurrections de la Rivière Rouge
Conclusion
Chapitre 2 – Une pensée politique tournée vers le nationalisme économique, 1873-1885 
Introduction
2.1. Le Québec et la longue crise économique, 1873-1878
2.1.1. Nouveau contexte politique et économique québécois, 1873-1875
2.1.2. La fièvre des chemins de fer
2.1.3. Chapleau-Senécal-Dansereau : proximité avec les milieux financiers et le monde de la presse
2.1.4. Le « coup d’État » de Saint-Just et la conquête du pouvoir par Chapleau
2.2. Chapleau et l’articulation de son projet national, 1879-1882
2.2.1. La Politique nationale de Macdonald et le développement économique du Québec
2.2.2. À la recherche d’investissements étrangers : l’accession aux milieux financiers français
2.2.3. Un éléphant blanc au Québec : la vente du QMO & O
2.3. À la recherche de nouveaux défis : Chapleau fait son entrée à la Chambre des communes, 1882-1885
2.3.1. À la recherche de l’unité du parti : alliance impossible avec les libéraux de Mercier
2.3.2. Premiers pas sur la scène fédérale
2.3.3. Une rivalité qui se dessine à la succession de Cartier
Conclusion
Chapitre 3 – Une pensée nationaliste mise à l’épreuve, 1885-1898
Introduction
3.1. L’Affaire Riel, 1884-1887
3.1.1. Transformation du contexte politique
3.1.2. Le projet politique de Chapleau face à la tourmente de l’Affaire Riel
3.1.3. Mercier et son parti national
3.2. La descente aux enfers des Conservateurs, 1886-1892
3.2.1. L’Ouest dans la pensée de Chapleau
3.2.2. La pensée politique de Chapleau face à l’impérialisme anglo-protestant
3.2.3. La mort de Macdonald et l’éclatement du parti
3.3. Retrait de la scène fédéral : la fin de son projet politique, 1892-1898
3.3.1. La vie à Spencer Wood, des rivalités toujours vives
3.3.2. L’unification nationale, un projet inachevé
Conclusion
Conclusion
Bibliographie
1. Sources primaires
a) Brochures
b) Correspondance
c) Discours
d) Débats parlementaires
e) Fonds d’archives
f) Journaux
2. Sources secondaires
a) Ouvrages méthodologiques
b) Ouvrages
c) Articles et autres
d) Articles du Dictionnaire biographique du Canada (DBC)
e) Autres sites web

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