Nanotubes de carbone (NTC) et leurs nanocomposites
Les nanotubes de carbone
Depuis leur première observation en 1991 par Iijima, [Iijima, 1991], les nanotubes de carbone sont le sujet de nombreuses recherches et font aussi l’objet de travaux et de brevets visant à étudier leurs méthodes de fabrication, leur caractérisation ainsi que le développement de leurs applications. De nombreuses applications sont envisagées dans le domaine des MEMS (Micro Electro Mechanical Systems) et NEMS (Nano Electro Mechanical Systems) pour la réalisation de nanomoteurs, d’interrupteurs et d’oscillateurs haute fréquence à l’échelle nanométrique [Kis et Zettl, 2008 ; Baughman et al, 2002].
Structure
Tout comme le graphite, les NTC sont une forme allotropique du carbone, représentés par l’enroulement d’un feuillet de graphène. Ce dernier, aussi appelé « graphite 2D », est connu depuis 60 ans et a été largement étudié pour décrire les propriétés des matériaux à base de carbone [Geim et Novoselov, 2007].
Production
Les procédés de décharge d’arc électrique, d’ablation laser et de dépôt chimique en phase vapeur (CVD par son sigle en anglais) sont les 3 principaux modes de production des NTC. La technique de décharge par arc électrique est aussi utilisée pour la production de fullerènes dont l’analyse en microscopie électronique à transmission (MET) a d’ailleurs permis d’observer pour la première fois des MWNT [Iijima, 1991].
Propriétés des nanotubes de carbone
Les NTC présentent une structure et des propriétés uniques. L’estimation de leurs propriétés mécaniques, électriques et thermiques nécessite des observations et analyses à l’échelle nanométrique.
Propriétés électriques :
Le graphène, tout comme les NTC, présente une conduction balistique : les électrons sont transportés sans diffusion à travers le matériau. Associée à une très haute conductivité thermique, cette caractéristique leur permet de supporter de très hautes densités de courant, jusqu’à 10¹³ A.m⁻² soit 1000 fois plus que le cuivre, sans dissipation excessive de chaleur [Wei et al, 2001]. Dans les cas les plus favorables, la conductivité électrique des NTC est similaire à celle du cuivre, quel que soit le nombre de tubes ou l’enroulement [Kaiser, 1998]. Ainsi les NTC sont des candidats sérieusement étudiés pour entrer dans la composition d’émetteurs à effet de champ ou de dissipateurs de charges électrostatiques [Yang et al, 2004]. D’où, par exemple, l’intérêt particulier porté aux NTC par les professionnels de l’industrie électronique. Les SWNT présentent une conductivité électrique qui peut atteindre 10⁸ Ω -1 .m-1 [Li et al, 2007]. Cependant, les calculs théoriques montrent que les propriétés électroniques des NTC sont très dépendantes de leur géométrie [Dresselhaus et al, 2005]. Les SWNT peuvent avoir les propriétés électriques de semi-conducteurs ou de métaux, selon la chiralité du tube. Celle-ci peut être définie suivant la relation : n – m = 3i, qui prédit que le SWNT sera conducteur si i est un entier. Dans tous les autres cas, le SWNT présentera un comportement semi-conducteur [Dresselhaus et al, 2001]. Cette distinction géométrique n’est valable que pour les SWNT.
Les MWNT possèdent des tubes de géométries variées, ils ont tous un comportement métallique et leur conductivité peut atteindre 3,3×10⁶ Ω-1 .m-1 [Li et al, 2007]. Cependant, l’existence de défauts tels que des pentagones ou heptagones, des lacunes ou des éléments dopants, dans la structure des NTC modifie considérablement leurs propriétés électriques ceci sera d’autant plus vrai dans les MWNT composés de plusieurs tubes. Ces modifications ouvrent de nouvelles perspectives dans la recherche de nouvelles applications en « nano électronique » mais tendent aussi à minimiser les performances finales des NTC. Ainsi, les caractéristiques électriques des NTC varient dans une large gamme de conductivité comprises entre 10⁴ et 10⁸ Ω -1 .m-1 [Grossiord et al, 2008 ; Xie et al, 2005 ; Brosse, 2009].
Propriétés mécaniques :
Les propriétés mécaniques des NTC peuvent être décrites par les lois de la mécanique classique. Elles sont gouvernées par l’hybridation sp² des atomes de carbone et les liaisons covalentes qui forment les hexagones. Le graphène présente des valeurs de module d’Young proches de celui du diamant, de l’ordre de 1 TPa. Le module d’Young des NTC ne peut être mesuré de façon conventionnelle mais les calculs montrent qu’il peut atteindre 0,97 voire 1,22 TPa [Kis et Zettl, 2008 ; Hernandez et al, 1998]. Ces valeurs sont en accord avec le module d’Young d’un plan de graphite qui est de 1,06 TPa [Kis et Zettl, 2008]. Salvetat et al, ont mesuré des modules par MET qui atteignent 1.8 et 1.3 TPa pour des MWNT à 11 et 27 parois respectivement. La forte variation des données peut provenir de la pureté des NTC ou encore de la méthode de calcul ou de mesure employée [Salvetat et al, 1999].
Communément, le module d’Young d’un NTC est estimé à environ 1 TPa, il représente alors 19 fois le module spécifique de l’acier, du fait notamment de leur faible masse volumique (1,75 g.cm-3 pour les MWNT). De plus, la contrainte à rupture d’un NTC équivaut à 50 fois celle d’un acier [Baughman et al, 2002 ; Shaffer et Windle, 1999].
Propriétés thermiques :
Les prédictions théoriques indiquent que les NTC ont une excellente conductivité thermique, de 3000 W.m-1 .K-1 , supérieure à celle du diamant et du graphite. De plus, ils présentent une excellente stabilité thermique et une expansion thermique négligeable. Ainsi, les NTC pourraient entrer dans la fabrication des circuits intégrés pour jouer le rôle de dissipateurs thermiques.
Les Nanocomposites à matrices organiques chargés de NTC
Le terme nanocomposite désigne les matériaux dont au moins un des composants a une dimension nanométrique. L’addition de NTC dans une matrice organique conduit à la formation d’un matériau structuré dont les propriétés finales dépendent des caractéristiques individuelles des NTC, des propriétés de la matrice ainsi que de l’interface matrice/NTC.
Les matrices organiques
Les matrices organiques sont des matériaux polymères parmi lesquels se distinguent deux principales familles : les thermodurcissables et les thermoplastiques. De nombreux composites à matrices thermodurcissables sont employés comme matériaux de structure notamment dans l’aéronautique. Les composites à matrice époxy chargés de fibres de carbone présentent d’excellentes propriétés mécaniques pour une masse volumique faible par rapport aux matériaux métalliques. Ainsi cette matrice fait l’objet d’un intérêt particulier qui s’illustre par la multitude de travaux dédiés aux systèmes époxy/NTC [Bauhofer et Kovacs, 2009 ; Gojny et Schulte, 2004; Allaoui et al, 2002 ; Sandler et al, 1999 ; De la Vega et al, 2009 ; Barrau et al, 2003]. De leur côté, les matrices thermoplastiques se mettent en forme relativement facilement et leurs applications concernent tous les marchés. Elles ouvrent donc un champ d’investigation très large.
De nombreuses études s’intéressent à l’addition de NTC dans des matrices telles que le polyéthylène (PE), le polypropylène (PP), le polystyrène (PS), le polycarbonate (PC) et le polyméthacrylate de méthyle (PMMA), dont les propriétés physico-chimiques sont connues [Harris, 2004 ; Lee et al, 2008 ; Logakis et al, 2010 ; Prashantha et al, 2009 ; Alig et al, 2007 ; McClory et al, 2011 ; Sun et al, 2010 ; Villmow et al, 2008 ; Pötschke et al, 2005 ; Pegel et al, 2008 ]. Les propriétés résultantes du mélange avec des NTC sont liées à leur affinité avec la matrice, fortement influencée par la polarité de cette dernière. Elles dépendent aussi de l’arrangement des charges, conditionné notamment par la cristallisation d’une matrice semi-cristalline. D’autres polymères dits techniques, tels que le polyamide 6 (PA6), le polyamide 12 (PA12) et le polyfluorure de vinylidène (PVDF), sont largement étudiés afin d’améliorer les propriétés de la matrice et de diversifier les applications [Meincke et al, 2004 ; Bose et al, 2009 ; Fuse et al, 2009 ; Logakis et al, 2009 ; Wang et al, 2008 ; Bhattacharyya et al, 2004 ; Chávez-Medellín et al, 2010 ; Perrot et al, 2009 ; El Bounia et Piccione, 2008].
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Table des matières
Introduction
Chapitre I – Étude Bibliographique
1. Nanotubes de carbone (NTC) et leurs nanocomposites
1.1 Les nanotubes de carbone
1.1.1 Structure
1.1.2 Production
1.1.3 Propriétés des nanotubes de carbone
1.2 Les Nanocomposites à matrices organiques chargés de NTC
1.2.1 Les matrices organiques
1.2.2 Formulation des nanocomposites
2. Mise en forme des nanocomposites NTC à matrices organiques
2.1 Propriétés rhéologiques des nanocomposites
2.1.1 Propriétés en écoulement
2.1.2 Propriétés en rhéométrie dynamique
2.2 Mise en forme par injection
2.2.1 Influence des conditions de mise en forme sur l’écoulement
2.2.2 Microstructures induites
3. Relation microstructure/propriétés électriques des nanocomposites
3.1 Propriétés électriques
3.2 Paramètres influençant la percolation électrique des nanocomposites
3.2.1 Notion de percolation
3.2.2 Aspects géométriques
3.2.3 Percolation dynamique
4. Caractérisation des microstructures induites
4.1 Microscopies
4.2 Détermination des microstructures par spectroscopie Raman
4.2.1 Analyses qualitatives des spectres Raman
4.2.2 Analyses quantitatives des spectres Raman
Chapitre II – Techniques expérimentales : Matériaux, Mise en forme et Caractérisation
1. Choix des matériaux
1.1 Polyamide 12
1.2 Composites
1.2.1 Les nanotubes de carbone multi-parois
1.2.2 Formulation des composites
2. Mise en forme des échantillons
2.1 Mise en forme par compression
2.2 Mise en forme par injection
2.2.1 Injection des échantillons
2.3 Acquisition des données
3. Méthodes de caractérisations employées
3.1 Rhéologie
3.2 Mesures diélectriques
3.3 Mesures rhéologiques et électriques couplées
3.4 Spectroscopie Raman
Chapitre III – Influence de la microinjection sur les nanocomposites PA 12/MWNT
1. Caractérisation des nanocomposites PA 12/MWNT
1.1 Propriétés rhéologiques des nanocomposites à l’état fondu
1.2 Propriétés électriques et diélectriques des nanocomposites hors écoulement
1.2.1 Propriétés des nanocomposites à l’état fondu
1.2.2 Propriétés des nanocomposites à l’état solide
2. Influence de l’écoulement sur les propriétés électriques PA12/MWNT
2.1 Influence du cisaillement sur les propriétés électriques à l’état fondu
2.2 Influence de la température
3. Influence du procédé de microinjection sur les propriétés des nanocomposites PA12/MWNT
3.1 Caractérisation de la microstructure par spectroscopie Raman
3.1.1 Mesures Raman
3.1.2 Estimation de l’orientation des MWNT
3.2 Caractérisation des pièces finales à l’état solide
3.2.1 Propriétés électriques des pièces injectées et compressées
3.2.2 Influence de l’épaisseur sur les propriétés électriques
3.3 Influence d’un recuit des pièces microinjectées
Conclusions
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