Nanotechnologies : de l’apparition au développement

Nanotechnologies : de l’apparition au développement

Manipuler la matière à l’échelle de l’atome et créer des machines à l’échelle nanométrique : c’est par cette vision que le célèbre physicien Richard Feynman ouvre la voie sur une nouvelle dimension lors de son discours à l’American Physical Society en 1959. L’intérêt porté très tôt à la miniaturisation ne représentait alors que perspectives, mais celles-ci devaient se concrétiser dans les années 1990 pour voir apparaitre les premières utilisations des nanomatériaux dans l’industrie. Il faudra cependant attendre le début des années 2010 pour assister à une véritable explosion du développement des technologies dites « nano », lesquelles pourraient représenter une nouvelle révolution industrielle selon les économistes.

Ce terme de « nano » (du grec nanos qui signifie nain) fait référence à une unité métrique (le nanomètre) égale à 10⁻⁹ mètre, soit approximativement 1/50000 de l’épaisseur d’un cheveu humain. Ainsi, selon la définition proposée par l’Institut national de Recherche et de Sécurité (INRS, 2016), « les nanotechnologies reposent sur la connaissance et la maîtrise de l’infiniment petit. Elles regroupent l’ensemble des techniques qui permettent de fabriquer, de manipuler et de caractériser la matière à l’échelle nanométrique ». Quant aux nanomatériaux, ils sont définis par la norme ISO TS 80004-1 (2010) comme « matériaux dont au moins une dimension externe est à l’échelle nanométrique, c’est-à-dire comprise entre approximativement 1 et 100 nm ou qui possèdent une structure interne ou de surface à l’échelle nanométrique». Les nanomatériaux regroupent aussi bien des matériaux nanostructurés (agrégats et agglomérats de nano-objets, nanocomposites et matériaux nanoporeux ) que des nano-objets, c’est-à-dire des matériaux dont une (nano-feuillets ou nano-plaquettes), deux (nanofibres ou nanotubes) ou trois dimensions externes (nanoparticules ) est (sont) inférieure(s) à 100 nm. Au sens strict, une nanoparticule (NP) présente donc trois dimensions externes à l’échelle nanométrique. Néanmoins, cette définition est souvent passée outre dans la littérature où il est courant d’employer le terme de nanoparticule pour tout objet dont au moins une dimension est inférieure à 100 nm (Gaffet, 2011). Ainsi, tous les nano objets étudiés dans ce manuscrit feront uniquement référence à ce terme.

Des propriétés uniques, une pléthore d’applications…

L’échelle même des NP est à l’origine de l’engouement qui gravite autour d’elles. Leur surface spécifique élevée (m2 .kg-1 ) leur confère des propriétés intrinsèques différentes de leurs homologues non-nanométriques (matériaux de même composition mais de taille plus grande). Plus la taille d’une particule diminue, plus sa surface spécifique augmente (Figure 1). Par conséquent, ce rapport volume/surface ouvre la voie à de nombreuses applications dans des domaines extrêmement variés, mais peut en contrepartie grandement conditionner leur toxicité de même que leur devenir dans l’environnement (Nel et al., 2006).

Les NP peuvent être d’origine anthropique, mais aussi naturelle, à l’instar des argiles (phyllosilicates) qui sont très abondantes sur terre et peuvent atteindre des dimensions nanométriques. La combustion incomplète de combustibles carbonés ou d’énergie fossiles peut également donner naissance à des NP, notamment lors d’incendies ou d’éruptions volcaniques (Navarro et al., 2008). De même, d’autres phénomènes tels que l’érosion des roches ou les réactions photochimiques peuvent produire des NP (Luther et Rickard, 2005). La vie a donc évolué en présence de NP naturelles. Néanmoins, l’exposition à de nouveaux types de NP ou à des concentrations plus importantes pourrait avoir des impacts sur le vivant (Gaffet, 2011; Wiesner et al., 2009). Les NP d’origine anthropique peuvent être produites de manière intentionnelle ou non. Ce sont des NP dites manufacturées (produites intentionnellement et de façon spécifique) qui feront l’objet de ce manuscrit. Cette catégorie de NP se développe aujourd’hui dans une grande variété de secteurs d’activité et de nombreux produits du quotidien .

Le marché des NP et de leurs produits dérivés connait un essor constant, même si la très grande variabilité des données chiffrées présentée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES, 2014) illustre la difficulté à réaliser une analyse précise et fiable de leurs production et utilisations. En particulier, les informations recueillies dépendent de la manière dont les enquêtes sont menées, du secteur d’activité des auteurs de l’enquête ainsi que du degré de coopération du secteur industriel. Néanmoins, le marché mondial des NP manufacturées était estimé à plusieurs billions de dollars par an en 2016, avec un taux de croissance annuel prévu à plus de 18 % jusqu’en 2021 (McWilliams, 2016). A l’échelle nationale, une étude de l’INRS estimait déjà à plusieurs centaines de milliers de tonnes la production annuelle des NP manufacturées en 2007. En dépit des effets désirés de ces matériaux, des conséquences imprévues sur l’environnement et la santé sont à prendre en compte, puisque leur rejet dans l’environnement semble inévitable face à la multitude de leurs applications.

…mais avec des retombées potentielles sur la santé et l’environnement

Additifs alimentaires, crèmes solaires, peintures, produits pharmaceutiques, technologies sans fil et autres exemples témoignent de l’utilisation grandissante des nanoparticules dans notre vie quotidienne. Que leur émission dans l’environnement soit intentionnelle ou non, les nanoparticules vont inéluctablement se déposer au sol ou à la surface de l’eau. Celles atteignant le sol peuvent ainsi le contaminer et migrer à travers jusqu’aux eaux souterraines. De même, les NP des déchets solides ou des effluents d’eaux usées peuvent être transportées vers les systèmes aquatiques par le vent ou le ruissellement (Ray et al., 2009). De plus, les NP manufacturées peuvent être considérées comme des contaminants émergents . La recherche de l’éventuelle « nanotoxicité » gagne ainsi de l’ampleur, tant vis-à-vis de la santé humaine que de l’environnement.

Toute évaluation des risques liés à une substance chimique s’appuie à la fois sur les dangers qu’elle représente pour la santé et l’environnement et sur ses niveaux et durées d’exposition. A ce jour, les stratégies et outils de mesure pour quantifier l’exposition aux nanoparticules ne font pas encore l’objet d’un consensus au niveau national et international, même si des efforts sont faits dans ce sens (ANSES, 2014). Certaines techniques de mesure demeurent par ailleurs complexes, onéreuses et peu répandues. Malgré une volonté de caractériser l’exposition tant des professionnels (salariés amenés à fabriquer ou utiliser des nanoparticules dans les entreprises et les laboratoires de recherche) que de la population générale, la traçabilité des NP tout au long de leur cycle de vie (de leur conception jusqu’à leur recyclage ou leur traitement en tant que déchets) pose généralement problème. Qui plus est, le devenir des NP dans l’environnement, c’est-à-dire leur répartition, leur état de dispersion, leur biodégradabilité, l’identification de leur éventuels produits de dégradation, leur potentiel de bioaccumulation ou encore leur cinétique d’adsorption/désorption sont autant d’éléments qui complexifient leur analyse (OCDE, 2010a). D’autre part, compte tenu du large éventail de NP existantes, dont les caractéristiques varient non seulement par rapport à leur équivalent macroscopique, mais aussi d’un type de NP à un autre, et même d’une forme de NP à une autre, il n’est pas possibled’identifier « un » danger associé à ces particules prises dans leur ensemble. Remarquant l’importance de la variabilité des paramètres physico-chimiques des NP sur leurs effets toxicoet écotoxicologiques, un groupe de travail de l’OCDE, le WPMN (Working Party on Manufactured NanoMaterials), précise certains paramètres critiques à définir pour évaluer la dangerosité spécifique des NP (OCDE, 2010a). Par exemple, il est question de l’état d’agrégation / d’agglomération des NP, de leur distribution de taille, de leur surface spécifique, de leur potentiel Zeta (charge de surface), ou encore de leur coefficient de partage octanol-eau. La solubilité des NP dans l’eau est aussi prise en compte et, comme l’indique l’Institut de Recherche Robert-Sauvé en Santé et en Sécurité du Travail (IRSST), dans le cas de nanoparticules solubles, la toxicité est d’origine purement chimique après dissolution, tandis que la taille initiale importe peu (IRSST, 2008). Par ailleurs, la norme ISO / TR 13014 :2012 (qui décrit les propriétés physico-chimiques pertinentes des nano-objets nécessaires à une évaluation des risques) souligne également l’importance de ne pas se baser sur les caractéristiques commerciales indiquées par les fournisseurs. En effet, les impuretés contenues dans les nanomatériaux n’y sont pas indiquées, alors qu’elles peuvent être la principale cause d’effets néfastes. Néanmoins, bien que la communauté scientifique semble s’accorder sur le fait que parmi les facteurs physico-chimiques évoqués, plusieurs contribuent à la toxicité des NP, pondérer leur importance respective ou prédire avec précision la toxicité d’une nouvelle NP reste actuellement impossible dans la plupart des cas.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 – INTRODUCTION BIBLIOGRAPHIQUE
1. Le « nanomonde »
1.1. Nanotechnologies : de l’apparition au développement
1.2. Des propriétés uniques, une pléthore d’applications
1.3. …mais avec des retombées potentielles sur la santé et l’environnement
1.4. Cadre législatif des nanomatériaux
2. Le cas des nanoparticules de carbone
2.1. Les allotropes du carbone
2.2. Structure et propriétés
2.3. Synthèse et purification
2.3.1. Synthèse et purification du graphène
2.3.2. Synthèse et purification des nanotubes de carbone
2.3.3. Synthèse et purification des nanodiamants
2.3.4. Synthèse et purification du noir de carbone
2.4. Fonctionnalisation covalente et non-covalente
2.4.1. Fonctionnalisation non-covalente
2.4.2. Fonctionnalisation covalente
3. Le devenir des nanoparticules de carbone dans l’environnement
3.1. Voies de contamination des milieux environnementaux
3.2. Les écosystèmes aquatiques, réceptacles de pollution
3.2.1. Propriétés d’adsorption des NPC dans les milieux aquatiques
3.2.2. Comportements d’agrégation et de dispersion de NPC dans les milieux aquatiques
3.3. Détection et quantification des NPC
3.4. (Bio)Dégradation des NPC
4. Effets des NPC sur le vivant
4.1. Ecotoxicité des NPC sur différents organismes : état de l’art
4.1.1. Effets des NPC chez les bactéries
4.1.2. Effets des NPC chez les végétaux
4.1.3. Effets des NPC chez les animaux terrestres
4.1.4. Effets des NPC chez les animaux aquatiques
4.2. Ecotoxicité des NPC dans un écosystème aquatique complexe
4.3. Organismes vivants vs nanoparticules de carbone : quelles interactions ?
4.3.1. Biocompatibilité des NPC
4.3.1.1. Voies d’entrée des NPC dans les organismes et rôle des barrières biologiques
4.3.1.2. Distribution des NPC dans les tissus et les cellules
4.3.2. Origines et mécanismes de la toxicité des NPC
4.3.2.1. Origines : des facteurs physico-chimiques déterminants
4.3.2.2. Mécanismes cellulaires et moléculaires
Références bibliographiques
CHAPITRE 2 – PRESENTATION DES MODELES BIOLOGIQUES ET DES NANOPARTICULES DE CARBONE
1. Introduction
2. Présentation des nanoparticules de carbone
3. Présentation des modèles biologiques
3.1. Le diptère Chironomus riparius
3.2. L’amphibien Xenopus laevis
3.3. L’amphibien Pleurodeles waltl
4. Gestions des déchets contaminés par les NPC
Références bibliographiques
CHAPITRE 3 – COMPARAISON DES EFFETS DE DIFFERENTS NANOCARBONES SUR LA CROISSANCE DE XENOPUS LAEVIS : APPROCHE PAR UNE NOUVELLE METRIQUE
1. Un modèle pour décrire la toxicité de différents allotropes de carbone chez X
laevis : la surface spécifique comme meilleur descripteur de l’inhibition de croissance
Surface area of carbon nanoparticles: a dose metric for a more realistic
ecotoxicological assessment
Abstract
Acknowledgments
Abbreviations
References
2. La croissance de X. laevis face à des nanoparticules de carbone dispersées de manière covalente ou non-covalente : une relation surface/effet toujours valable
Surface area of carbon-based nanoparticles prevails on dispersion for
growth inhibition in amphibians
Abstract
Introduction
Experimental
Synthesis and characterization of the studied CNPs
Chemical dispersants
CNP physical dispersion and contamination of the exposure media
Xenopus rearing and breeding
Exposure conditions
Chronic toxicity and calculation models
Results
Chronic toxicity
Macro-observations of dissected larvae
Discussion
Metric doses
State of dispersion
Biological hypothesis
Conclusion
Declaration of interest
Acknowledgements
References
3. Exemples d’un graphène multi-feuillets et du noir de carbone, ou comment
mieux cerner les limites du modèle
Références bibliographiques
CHAPITRE 4 – ETUDE DE LA GENOTOXICITE DU GRAPHENE CHEZ XENOPUS LAEVIS : UN EFFET LIE AU DEGRE D’OXYDATION ?
1. Evaluation de la génotoxicité chez X. laevis
2. Génotoxicité chez X. laevis après exposition à différentes NPC brutes
3. Le rôle du degré d’oxydation dans la génotoxicité – Le cas de l’oxyde de graphène
Removal of genotoxicity of graphene oxide in vivo: towards an environmentally safeby-design approach
Abstract
Introduction
Experimental
Xenopus rearing and breeding
Characterization of the studied GFMs and contamination of the exposure media
Genotoxicity assessment
Results and discussion
Conflict of interest
Acknowledgments
References
Supporting information
Synthesis and characterization of graphene samples
Graphene physical dispersion and contamination of the exposure media
Metals concentration analysis in graphene oxide
PAHs concentration analysis in graphene oxide
Mitotic erythrocytes in X. laevis exposed to GO, rGO200 and rGO1000
References
4. Génotoxicité du GO chez le xénope : prolongement et perspectives
4.1. Génotoxicité d’autres NPC de surface chimiquement modifiée et/ou
fonctionnalisée chez le xénope
4.2. Génotoxicité du GO chez un autre amphibien : Pleurodeles waltl
Références bibliographiques
CONCLUSION GENERALE

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *