Nanoparticules de FePt, FePd : propriétés et synthèses

Nanoparticules de FePt, FePd : propriétés et synthèses 

Généralités sur les propriétés structurales et magnétiques des alliages FePt et FePd

Pour comprendre l’intérêt de travailler avec de tels alliages, nous proposons dans cette partie de revenir sur les propriétés cristallographiques qui influencent directement les propriétés magnétiques.

Structure cristallographique et magnétisme des alliages FexM1­x (M=Pt,Pd) 

L’alliage FexM1‐x forme une solution solide par substitution pour une grande gamme de composition. Selon la température et la composition, il se présente sous plusieurs phases . On peut distinguer d’une part la phase dite chimiquement désordonnée (γ‐FePt ou phase A1 ) et d’autre part les phases chimiquement ordonnées L10 et L12 .

Phase chimiquement désordonnée (A1)

La phase chimiquement désordonnée est thermodynamiquement stable à haute température et cela pour une très large gamme de composition. Le terme «chimiquement désordonnée » renvoi aux sites atomiques aléatoirement occupé par un atome de métal noble M (Pt ou Pd) ou de fer . La maille est cubique à faces centrées (cfc, groupe d’espace: F 4/m ‐3 2/m), à l’image du système de cristallisation du Pt et du Pd pour une large gamme de composition. Cependant, les alliages principalement composés de fer (x>70% pour FeXPt1‐x et x>40% pour FexPd1‐x) cristallisent dans le système du α‐fer : cubique centré. Dans le cas du FePd, nous avons même coexistence (30%>x>70%) de deux phases cristallines stables pour une même composition .

Dans la mesure où la solution solide est composée de deux atomes de taille très différente (le fer est sur la 4ème période du tableau périodique des éléments alors que le palladium et le platine sont respectivement sur la 5ème et 6ème période), le paramètre de maille évolue significativement avec la composition de l’alliage. En première approximation, le paramètre de maille suit la loi de Végard dont les variations ont été étudiées en détail par Bonakdarpour et al. pour des nanocristaux (10 à 20 nm) de FePt dans la phase chimiquement désordonnée . Ces données nous permettront d’estimer la composition du cœur cristallisé de nos NPs de FePt à partir des paramètres de maille mesurés en diffraction de rayons X. Bien que ces résultats aient été établis à partir de particules de FePt beaucoup plus grosses que celles étudiées dans ce travail (diamètres 3 à 6 fois plus élevés), nous avons choisi d’utiliser cette étude, faute de données se rapprochant plus de notre cas.

Une relation similaire existe pour FePd . mais la faible pente reliant le paramètre de maille au pourcentage en fer augmente l’incertitude quant à l’évaluation de la composition de l’alliage. Soulignons que ces résultats ont été établis à partir de l’étude de couches minces. Ne disposant pas d’autre source pour supporter l’analyse de nos données de diffraction X, nous resterons prudents quant à l’interprétation des résultats et privilégierons les analyses relatives.

La phase L10

La phase chimiquement ordonnée L10 (groupe d’espace: P 4/m 2/m 2/m) est la phase thermodynamiquement stable à température ambiante pour une composition comprise entre 35% et 55% de Pt pour le FePt et entre 50% et 60% de Pd pour le FePd. Même si cela ne correspond pas à la maille élémentaire, elle est souvent représentée dans la même maille que la phase désordonnée. Pour la composition équiatomique 50/50, la position des atomes Fe et M n’est plus aléatoire mais forme un empilement de plans atomiques de fer pur et de M pur . Cette structure en « mille‐feuilles » implique une diminution du paramètre de maille selon l’axe c conduisant à une structure quadratique (a = b ≠ c). Cette distorsion de la maille cubique est plus importante pour le FePt, que pour le FePd, du fait de la plus grande différence de taille entre les atomes de fer et de platine (en comparaison du couple fer/palladium). C’est cette anisotropie cristalline qui donne aux alliages L10 leurs propriétés magnétiques exceptionnelles .

Entre les états chimiquement totalement ordonné (phase L10) et désordonné (phase A1), il existe à température ambiante toute une gamme d’états métastables correspondant à des mises en ordre chimique partielles. Deux notions permettent de décrire le degré d’ordre chimique : l’ordre à courte distance, qui est relatif aux premiers voisins, et l’ordre à longue distance, quantifié par le paramètre d’ordre S. La maille cristallographique de la phase L10 parfaitement ordonnée (S=1) peut être décrite comme la superposition de deux sous‐réseaux: un sous‐réseau I correspondant aux plans de fer pur et le sous‐réseau II correspondant aux plans de M (Pt ou Pd) pur. Pour décrire l’ordre, on définit les taux d’occupation n{Fe/I} (n{M/I}) et n{Fe/II} (n{M/II}) par les atomes de fer (de M) respectivement dans les sous‐réseaux I et II.

Dans le cas d’un alliage stœchiométrique (Fe50M50), le paramètre d’ordre S varie de S=0 pour un alliage idéalement désordonné (les taux d’occupations valent n{Fe/I}= n{M/II}=0.5 et n{Fe/II}= n{M/I}=0.5), à S =1 pour un alliage parfaitement ordonné (n{Fe/I}= n{M/II}=1 et n{Fe/II}= n{M/I}=0). Plus généralement, un alliage FexM1‐x peut exister dans la phase L10 pour des compositions proches de la stœchiométrie (0.45<x< 0.65 pour M=Pt et 0.5<x< 0.6 pour M=Pd), le paramètre d’ordre maximal ne vaut alors plus 1, mais est relié à x par l’Équation 2:

Équation 2 : Paramètre d’ordre maximal dans l’alliage FexM1‐x en fonction de x.

Smax= 1 – 2 |0,5‐ x|

Il est possible d’estimer la valeur du paramètre d’ordre à longue distance S à partir de mesures de diffraction de rayons X (raie Kα du Cobalt, λ = 1.78901 Å). La méthode la plus simple consiste à utiliser le rapport des intensités d’une raie de surstructure et d’une raie fondamentale, par exemple les raies (001) et (002). Avec un programme de simulation Rietveld, tel que High Score Plus (Phillips), il est possible d’ajuster le taux d’occupation des différents sous‐réseaux de la maille et ainsi de déterminer le paramètre d’ordre .

Phase L12

Pour des compositions proches de FePt3, Fe3Pt et FePd3, la phase thermodynamiquement stable à température ambiante est la phase chimiquement ordonnée L12. Elle est caractérisée par une maille cristallographique cubique à faces centrées (groupe d’espace: P m ‐3 m) avec un sous réseau de plans atomiques pur et un sous réseau de plans atomiques contenant autant de fer que de M (M=Pt ou Pd) . Comme pour la phase L10, la structure L12 présente un ordre chimique à longue distance qui se traduit par l’apparition de raies de surstructure dans le réseau réciproque. Il est cependant aisé de distinguer ces deux systèmes cristallins car seule la phase L10 présente un dédoublement de certaines raies de diffraction du fait de la maille quadratique associée à cette phase.

Nous avons vu que selon la composition et la température, l’alliage FexM1‐x se présente sous différentes phases. Dans la suite, nous verrons comment la structure cristalline influence les propriétés magnétiques de l’alliage FexM1‐x.

Propriétés magnétiques des alliages massifs

L’aimantation ne dépend que très faiblement de la phase pour des alliages de même composition chimique, l’essentiel de l’aimantation étant associé à la composition en fer. Par contre, l’anisotropie magnétique dépend essentiellement de la symétrie du cristal : elle est liée au couplage spin‐orbite qui tend à orienter chaque moment magnétique selon une direction privilégiée du fait de la symétrie particulière du réseau cristallin. Pour la phase A1, cubique, il y a six directions possible (les faces de la maille cubique) donc la constante d’anisotropie de l’alliage est relativement faible. Par contre, la phase L10 avec sa structure quadratique, impose une seule direction privilégiée (l’axe c de la maille cristalline) qui, dans ce cas, induit des valeurs gigantesques de la constante d’anisotropie.

La phase L10 n’existe pas uniquement pour les alliages FePt et FePd. De manière générique, elle existe pour tous les alliages XM avec X=Fe,Ni,Co et M=Pt,Pd et la valeur de la constante d’anisotropie de ces alliages en phase L10 va fortement varier en fonction de M (taille du rayon atomique) et de X (nombre d’électron portant l’aimantation). Même si la plus grande constante d’anisotropie est portée par le FePt en phase L10 (7×10⁻⁷ emu/cm3), le FePd dont l’anisotropie est du même ordre de grandeur a besoin de précurseur métallique de Pd dix fois moins chers.

En conclusion, il est important de retenir que les propriétés magnétiques des alliages de ce type sont directement reliées à leur structure cristalline. Pour obtenir un matériau avec une très forte anisotropie magnétique, il faut travailler avec des alliages de type FePt‐FePd, chimiquement ordonnés. L’anisotropie magnétocristalline maximale est atteinte pour les alliages de composition atomique proche de la stœchiométrie et en phase L10 (paramètre d’ordre S=1).

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Table des matières

Introduction
Sommaire Général
Abréviations
Remerciements
Partie 1 ‐ Synthèses
Chapitre 1 : Nanoparticules de FePt, FePd : propriétés et synthèses
Chapitre 2 : Synthèses et caractérisations des nanoparticules de FePt
Chapitre 3 : Synthèse de nanoparticules de FePd : Etude et optimisation via un plan d’expérience
Partie 2 – Changement de phase
Chapitre 4 : Nanoparticules de FePt, FePd : Applications et transformation vers la phase L10
Chapitre 5 : Changement de phase au sein des NPs de FePt par irradiation d’ions He+
Chapitre 6 : Changement de phase au sein des NPs de FePt par recuit à haute température dans une matrice de NaCl
Chapitre 7 : Dépôts contrôlés de NPs de FePt L10 sur des substrats nanostructurés
Conclusion
Perspectives
Annexes
Annexe 1 : Molécules
Annexe 2 : Protocoles de synthèses
Annexe 3 : Diffraction des rayons X
Annexe 4 : Plan d’expérience

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