Nanofiltration et mecanismes de transfert de matière

NANOFILTRATION ET MECANISMES DE TRANSFERT DE MATIÈRE

La nanofiltration est une technique à membrane particulièrement étudiée depuis peu et décrite dans les années quatre-vingt sous l’appellation d’hyper filtration. Elle est située à la transition entre l’osmose inverse et l’ultrafiltration. Les membranes d’hyper filtration étaient considérées comme des membranes d’osmose inverse qui présentent des fuites en soluté. Aujourd’hui la nanofiltration est considérée comme une technique à part entière en ce sens que les membranes mises en œuvre ont leurs caractéristiques propres qui les différencient fondamentalement des membranes d’osmose inverse et d’ultrafiltration; on a une structure micro poreuse avec des pores de diamètre de l’ordre du nanomètre et un matériau membranaire qui, généralement, porte des charges ioniques superficielles. La nanofiltration est une technique de séparation membranaire qui permet de moduler la sélectivité de rétention des solutés en fonction de leur taille et/ou de leur charge, des paramètres opératoires physiques ou chimiques, et du seuil de coupure ou diamètre de pore de la membrane. Le transfert des solutés se fait par un double mécanisme, l’un diffusionnel comme en osmose inverse et l’autre convectif comme en ultrafiltration . En effet, l’ultrafiltration fait appel à un phénomène essentiellement physique où seuls les éléments de tailles supérieures au seuil de coupure de la membrane sont retenus, elle est liée au coefficient de transfert et fonction de la taille des solutés[48-49]. En osmose inverse, la sélectivité est liée au coefficient de partage et est fonction de la solubilité et de chaque soluté dans la membrane ; elle est chimique[50] parfaitement efficace et permet une déminéralisation presque totale. Mais elle est relativement coûteuse et en plus il faut re minéraliser l’eau traitée pour qu’elle soit potable[51-52]. Avec l’osmose inverse, l’ultrafiltration et la microfiltration, la nanofiltration fait partie des procédés à membranes dont la force motrice est un gradient de pression. La pression appliquée est de l’ordre de 5 à 20 bars. Le seuil de coupure des membranes de nanofiltration, pour des molécules non-chargées, se situe dans une gamme de 200 à 1000 g/mol. Les ions sont partiellement retenus à cause d’une charge électrique (le plus souvent négative) à la surface de la membrane. Donc en plus de ce critère de la taille, la séparation des solutés électriquement chargés se fait aussi en fonction de leur charge et puis les pressions de travail sont plus basses et les flux de solvants plus importants qu’en osmose inverse. Les flux de matières à travers les membranes sont analysés sur les bases théoriques des phénomènes physiques et chimiques. La nanofiltration prend ainsi une place intermédiaire entre l’osmose inverse et l’ultrafiltration .

COEFFICIENT DE TRANSFERT GLOBAL

Lors d’une diffusion simple à travers une membrane, différents paramètres physico-chimiques influent sur le transfert des espèces. Si l’on considère le transfert d’un soluté par solubilisation-diffusion en tenant compte des trois phases traversées : la solution en amont (x), la membrane (y) et la solution en avale (z), on peut définir un coefficient de transfert global qui sera fonction des coefficients de transfert kx, ky, kz dans chacune des trois phases et des coefficients de partage Pyx et Pyz entre la membrane et la solution[53]. L’écriture de ce coefficient de transfert global d’un soluté ne peut être envisagée que dans le cas d’un transfert de soluté régi exclusivement par la solubilisation – diffusion et sans flux de solvant(c’est à dire le flux de solvant traversant les trois phases restant nul).

1/K=1/Kx + 1/Ky .Pyx +1/Kz.Pzx (12)

avec Pzx=Pzy/Pyx et Pzy=1/Pyz

Ce coefficient de transfert global permet de montrer l’influence à la fois des coefficients de transferts dans les phases liquides qui dépendent en particulier des conditions hydrodynamiques, du coefficient de transfert dans la membrane qui dépend de la structure physique de celle-ci et de son épaisseur puis des coefficients de partage entre la membrane et les solutions, qui sont fonctions des énergies de solvatation et des paramètres chimiques. Il faut remarquer que pour les différents solutés, le coefficient de transfert ne peut guère varier que d’un facteur 10 environ, alors que le coefficient de partage, peut varier de plusieurs puissances de dix. Le coefficient de partage entre la membrane et la solution amont Pxy représentant la participation chimique au transfert, est donc le facteur le plus important de sélectivité. L’influence relative de chacun de ces paramètres, dépend également de la nature chimique de la membrane et de sa structure physique. Ky représente la participation physique au transfert, il dépend du coefficient de transfert dans la solution et du rapport entre le diamètre du soluté et celui des pores de la membrane( d/d0)[54].

En nanofiltration, le transfert de certains solutés peut se faire à la fois par solubilisationdiffusion et par convection. L’eau faiblement liée à la membrane peut également avoir des propriètés particulières de solvatation: les coefficients de partage et les transferts dans cette couche d’eau peuvent être spécifiques. De toute façon, en nanofiltration, le coefficient de partage et le coefficient de transfert vont tous les deux intervenir sur la sélectivité. Ce sont les gros ions fortement chargés qui sont les mieux retenus. En effet le coefficient de partage est d’autant plus petit(donc la rétention meilleure) que la charge ionique est grande ; le coefficient de transfert est d’autant plus petit(et la rétention plus grande) que la particule est grosse. La pression a une influence sur le transfert par convection, mais n’en a pas sur le transfert par solubilisation-diffusion. Avec certaines membranes il sera donc possible de passer de l’osmose inverse à la nanofiltration, simplement en jouant sur la pression. En effet, la diminution de la pression diminue la convection, donc l’influence du coefficient de transfert; par contre la pression n’a aucune influence sur le coefficient de partage et la solubilisationdiffusion. Par ailleurs, il faut remarquer qu’en osmose inverse l’augmentation de pression se traduit généralement par une amélioration de la rétention. En effet, la pression augmente le flux de solvant sans avoir d’effet sur le flux de solutés, la concentration en soluté à la sortie de la membrane est donc plus faible. Cet effet est toutefois limité à cause du gradient de concentration qui augmente au voisinage de la membrane quand la rétention devient plus importante, ce qui se traduit alors par une augmentation de la diffusion.

ÉNERGIE DE SOLVATATION ET D’HYDRATATION

La fonction solvatante d’une membrane se traduit par son affinité pour différents solutés ; une membrane non chargée aura, de façon générale, moins d’affinité pour les ions que pour les molécules neutres et parallèlement les ions sont beaucoup plus fortement solvatés par l’eau que par les solvants organiques ; cependant la membrane gonflée à l’eau peut être considérée, à l’échelle macroscopique comme un solvant hydro organique ayant des propriétés de solvatation spécifique . La faible solvatation des sels par la membrane permet de considérer que les différences de solvatation entre chacun d’eux sont faibles. Et son effet sera donc négligeable devant l’énergie d’hydratation qui est très forte pour les sels. En plus l’énergie de solvatation des différents solutés par la membrane est difficile à évaluer. Par contre l’énergie d’hydratation, qui est très forte pour les sels, peut beaucoup varier d’un sel à un autre et peut être facilement évaluée [18]. Cette énergie est fonction du carré de la charge et inversement proportionnel au rayon (ou racine cubique de la masse molaire). Le diamètre de sel est lié à sa masse molaire par la relation d = 1,34M1/3[51]. Avec des valeurs connues de l’énergie d’hydratation [55], on peut tracer une courbe de l’énergie d’hydratation(Ehyd) en fonction de (q2 /M1/3). La courbe obtenue correspond à (figure15) une équation Ehyd = 127 + 634(q2 /M1/3) + 534(q2 /M1/3)2 .

Cette relation permet à partir des seules masses molaires, pour une charge donnée, de déterminer les énergies d’hydratation des solutés avec une assez bonne approximation; ce qui simplifie largement les possibilités de prévisions lorsqu’on se trouve en présence de membrane pratiquement inerte ou non chargée. Dans le cas des membranes réactives et/ou chargées, l’énergie de solvatation par la membrane ne peut plus être considérée comme une constante caractéristique de celle ci; il est alors nécessaire de connaître son affinité pour les différents solutés.

Si un ion est particulièrement hydraté par rapport aux autres ions présents, il aura un coefficient de partage plus faible et sera mieux retenu par des membranes à solvotransfert, il faudra donc utiliser la nanofiltration(cas de la défluoruration). Si un ion est moyennement solvaté, il sera facile de le distinguer des autres avec une membrane à solvotransfert ; il sera alors plus difficile de le transférer préférentiellement par dialyse en utilisant une membrane sélective de cet ion. Par exemple, l’ion fluorure(le plus petit des anions monovalents) peut être retenu sélectivement par nanofiltration et il sera beaucoup plus difficile d’obtenir son transfert préférentiel à travers une membrane de dialyse.

L’importance de différences relatives des énergies d’hydratation qui sont d’autant plus marquées pour les ions et les molécules polaires montre que ce sont souvent les propriétés de l’eau qui modifient le plus les valeurs de coefficients de partage, surtout pour les sels. Il apparaît alors que le transfert d’un soluté donné est essentiellement fonction de son coefficient de partage entre la membrane et la solution amont

Le transfert de masse global de soluté à travers la nanofiltration sous une pression trans membranaire peut s’écrire :

Js = Jdiff + J.Cconv (14)

avec Js: flux de soluté et J = Je: flux de solvant (eau).

Cette équation peut s’écrire

Je.Cp = Jdiff + Je.Cconv (15)

D’où la concentration dans le perméat devient alors:

Cp = Jdiff/ Je + Cconv (16)

Ainsi la courbe expérimentale Cp = f(1/Je) doit être une droite d’ordonnée à l’origine Cconv et de pente Jdiff. Ce qui permet de déterminer expérimentalement les valeurs du flux de diffusion Jdiff et de la concentration de soluté Cconv entraînée sélectivement par convection.

MODELE DE SPIEGLER, KEDEM ET KATCHALSKY

Les efforts consentis pour décrire et comprendre les mécanismes inhérents aux transports membranaires remontent aujourd’hui à plus d’un siécle. La mise à disposition de modèles mathématiques capables de transcrire ces phénoménes dans le but de prévoir la sélectivité et le flux des matériaux, a longtemps été entravé par la diversité des membranes et des effluents pouvant entraîner de fortes disparités de résultats. Ce n’est qu’en 1958 avec l’approche basée sur la thermodynamique des processus irréversibles proposée par Kedem et Katchalsky sur la base des travaux antérieurs(Onsager, Staverman), que l’étude théorique du transport dans les membranes a véritablement posé ses premiers fondements cohérents de travail. Les modèles phénoménologiques traitent la membrane comme une boîte noire, où les mécanismes de transport sont inconnus. On considère que les flux de solvant Je et de soluté Js sont provoqués par des forces motrices, respectivement Fe et Fs. Pour des conditions proches de l’équilibre, des relations linéaires entre les flux et ces forces sont supposées et une dépendance entre le flux du solvant et le flux du soluté est présumé[56]:

Je = L Fe L Fs ⋅ + ⋅ 11 12 (17)
Js = L Fe L Fs ⋅ + ⋅ 21 22 (18)
F : Forces généralisées (L·M·T-2·N-1)
J : Flux molaires (L-2·T-1·N)
L : Coefficients phénoménologiques (L-3·M-1·T·N2)

Ces quatre coefficients L sont réduits à trois coefficients indépendants par le postulat de symétrie des coefficients d’Onsager[57], basé sur le principe de micro-réversibilité de la mécanique statistique :

L21 = L12 (19)

La pente de la droite de l’équation 29 permet de déterminer la valeur de la perméabilité au soluté(Ps), connaissant celle du coefficient de réflection(σ) obtenue à partir de l’équation 28 en faisant tendre le flux de solvant vers l’infini. En nanofiltration, il a été démontré que les membranes possédent des pores et que des coefficients de réflexion inférieurs à 100% devraient être trouvés pour des solutés suffisament petits pouvant entrer dans les pores des membranes. Ces explications tiennent compte du fait que l’on soit capable de limiter la concentration polarisation puis de négliger l’influence de la charge de membrane dans le transport des ions halogénures en solution diluées. En effet le modèle de Spiegler, Kedem et Katchalsky a été initialement développé sur des membranes non chargées telle que l’osmose inverse[56,59] pendant que celles de nanofiltration généralement chargées, de façon négative ou positive[60-67], dépendant des conditions physico chimiques(pH, force ionique) et de la nature du matériau utilisé. Ce modèle s’applique aux membranes de nanofiltration non chargées présentant des comportements similaires à celles d’osmose inverse et le transfert de masse global de soluté à travers la membrane de nanofiltration sous pression transmembranaire s’écrira selon l’équation (14) décrite précédement.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
I. ETAT DE L’ART
I.1. Procédés Chimiques
I.2. Procédés Physico-chimiques ou à Membranes
I.3. Conclusion et Choix du Procédé
II. TECHNIQUES MEMBRANAIRES
II.1 Classification des Techniques à membrane
II.2.Polarisation et Colmatage
II.3.Facteurs réduisant le colmatage et Nettoyage
II.4.Limitation des Techniques à membrane
II.5.Intérêts des Techniques à membrane
II.6.Applications
II.6.5 Filtration Frontale ou Tangentielle à gradient de pression
II.7.Définitions principales en procédés membranaires
II.8.Conclusion
III. NANOFILTRATION ET MECANISMES DE TRANSFERT DE MATIÈRE
III.1. Cœfficient de transfert global
III.2. Énergie de solvatation et d’hydratation
III.3. Modèle de Spiegler, Kedem et Katchalsky
IV. RESULTATS ET DISCUSSIONS
IV.1. Principe du pilote
IV.2. Membranes utilisées
IV.3. Eau du réseau d’ANJOU RECHERCHE
IV.4. Filtration d’une eau de boisson fluorurée de VIELMUR-TOULOUSE
IV.5. Filtration d’eaux de boisson fluorurées du SENEGAL
IV.6. Transfert de Masse et modèlisation pour une élimination sélective des ions fluorure
IV.7. Influence des sels de Chlorure, Nitrate et/ou de sulfate sur la rétention de Fluorure à partir de solutions synthétiques
V. ÉTUDE DE CONDITIONS MICELLAIRES DE TENSIOACTIFS DÉRIVÉS DE LA DIÉTHYLÈNE TRIAMINE
V.1.Matériels utilisés
V.2.Théorie sur la Méthode
V.3.Résultats et discussions sur différents Tensioactifs
V.4.Conclusion
VI. ULTRAFILTRATION
VI.1. Place de l’Ultrafiltration parmi les différents procédés de filtration
VI.2. Résultats d’Ultrafiltration
CONCLUSION
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
VII. LISTE DES TRAVAUX
PUBLICATIONS
COMMUNICATIONS
POSTERS

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