Anatomie fonctionnelle
La colonne vertébrale est non seulement l’axe du corps, mais un organe porteur et locomoteur entourant la moelle. Elle remplit ainsi trois fonctions : statique, cinétique et protectrice.
Fonction statique La colonne des corps vertébraux et des disques intervertébraux est l’organe de la statique corporelle. Elle supporte le poids de la tête, du tronc et des membres supérieurs, transmet cette charge aux membres inférieurs. D’après certains auteurs, comme SAUNDERS, le corps vertébral peut supporter, avant de s’écraser une charge importante jusqu’à 600kg. Il résiste à cette pression et aux chocs qu’il reçoit grâce aux disques intervertébraux qui les amortissent. Le disque comprend en son centre une partie gélatineuse riche en eau, le nucleus pulposus, qui est maintenu en place par l’anneau fibreux. Les pressions qui s’exercent sur le disque sont réparties sur toute la surface des plateaux sus et sous-jacents. En raison de sa constitution, le disque perd une partie de son eau de constitution sous l’effet d’une charge prolongée et s’aplatit à la fin de la journée ou sous une charge continue ou encore trop forte. La répétition de pression au cours de la vie entraîne sa déshydratation progressive et sa diminution de hauteur. Les disques ne jouant plus leur rôle d’amortisseurs, la colonne vertébrale devient moins élastique, plus rigide et se tasse.
Fonction cinétique La colonne vertébrale est aussi siège de mouvement, mieux encore elle est l’organe de mouvements d’ensemble du tronc, de la tête et du cou. La direction et l’amplitude des mouvements de chaque vertèbre sont déterminées par l’orientation des surfaces de glissement des apophyses articulaires. Ainsi se détermine la nature de chaque mouvement (flexion, extension, inclinaison, rotation). La hauteur des disques intervertébraux et l’appareil ligamentaire (ligaments jaunes, vertébraux communs, interépineux) limitent les déplacements de chaque vertèbre.
Fonction protectrice Comme nous avons vu plus loin, la moelle épinière est protégée à l’intérieur du canal vertébral, formé par la succession des trous vertébraux et des diverses formations qui occupent les espaces entre les vertèbres. On peut citer également d’autre élément protecteur tel que : le grand ligament vertébral commun postérieur qui revêt la face postérieure des corps vertébraux et des disques empêche le nucleus pulposus de faire hernie dans la lumière du canal. Ce ligament protège ainsi la moelle ou ses racines au cours des mouvements du rachis. En arrière se trouvent les ligaments jaunes, tendus entre les lames, assurent la continuité et la solidité de la paroi postérieure du canal vertébral.
Le syndrome osseux clinique
En cas de localisation osseuse, il est représenté par :
• les douleurs osseuses qui sont observées dans 70% de myélome au moment du diagnostic, évoluant depuis six mois en moyenne. Dans la plupart des cas, elles s’expliquent par une ostéolyse vertébrale avec ou sans tassement. Plus rarement, les douleurs sont en rapport avec une fracture périphérique tels que le sternum, diaphyse humérale ou fémorale, des côtes. Les tuméfactions des parties molles en regard du foyer d’ostéolyse, fracturé ou non s’observent surtout au stade terminal de la maladie.
• les compressions radiculaires ou médullaires s’observent dans 10 à 15% des cas. Elles s’associent le plus souvent au syndrome douloureux et s’explique soit par une ostéolyse vertébrale compressive, soir par une infiltration intra-rachidienne tumorale sans ostéolyse. Quelque soit leur mécanisme, elles grèvent lourdement le pronostic à court terme.
• l’hypercalcémie s’observe dans 25% des myélomes au moment du diagnostic, mais dans près de 50% des cas s’il existe déjà une ostéolyse étendue.
Radiothérapie
Elle est complémentaire aux autres traitements, surtout en cas d’ostéolyse diffuse. Une dose de 20 à 45 grays sera utilisée en 4 à 5 semaines.
Traitement chirurgical
La chirurgie et la radiothérapie sont fondamentales dans la prise en charge des formes solitaires. Cependant du fait des retards de diagnostic souvent constaté par beaucoup d’auteurs, le geste chirurgical n’a qu’une action antitumorale très limitée.
– Au niveau du rachis, deux types de chirurgie peuvent être pratiqués.
• la chirurgie palliative en cas de envahissement médullaire ou de tumeurs au delà de toutes ressources curatives. Elle a pour but de décomprimer le fourreau dural et de stabiliser le rachis. Elle peut se faire par voie postérieure ou antérieure selon les cas. On pratique souvent la laminectomie, mais d’autres techniques peuvent également utiliser selon la localisation de la tumeur tels que : corporectomie, transversectomie, arthrectomie,…
• La chirurgie «carcinologique ou curative » ayant pour but de réséquer toute la tumeur «en bloc ».
Nous n’allons pas entrer dans les détails techniques, mais nous tiendrons seulement à rappeler quelques règles générales :
– En cas d’exérèse, le temps opératoire doit comprendre l’exérèse chirurgicale proprement dite et la reconstruction.
– Au niveau du rachis, il n’est pas possible d’envisager une résection qui répond aux critères habituels de la carcinologie. Les rapports de voisinage sont bien étroits pour autoriser des gestes larges et forcément délabrants.
Les possibilités de résection sont donc fonction du siège de la tumeur sur l’arc vertébral, mais aussi fonction du niveau rachidien et de la localisation de l’artère nourricière de la moelle. Les indications et les limites de la vertèbrectomie ont été bien décrites par ROY CAMILLE. Ainsi d’après lui :
– Au rachis cervical supérieur (C1 – C2), aucun geste monobloc extra-tumoral n’est techniquement réalisable, en dehors de quelques exceptionnelles lésions localisées dans la partie toute antérieure du corps de C2.
– Au rachis cervical inférieur (C3 – C7), seule une lésion isolée du corps vertébral est accessible à une vertèbrectomie subtotale réalisée par un abord pré-sterno-cléidomastoïdien.
– Au rachis dorsal, la présence de l’artère d’ADAMKIEWICZ à un trou de conjugaison correspondant à la lésion tumorale contre-indique toute résection complète de la tumeur, surtout par voie postérieure élargie.
– Au rachis lombaire, la difficulté technique est la profondeur du corps vertébral à ce niveau. Une chirurgie de résection vertébrale en un temps comme au rachis dorsal est donc impossible. La résection doit passer en deux temps (antérieure puis postérieure) voire en trois temps (postérieure, antérieure puis postérieure).
– Au niveau du sacrum, la chirurgie est techniquement plus difficile. Lors d’une résection sacrée, la localisation tumorale envahissant S1 ou S2 nécessite systématiquement un double abord, antérieur et postérieur.
Au niveau périphérique, aussi bien que les fractures rachidiennes, les fractures ou lésions pré-fracturaires pouvaient bénéficier d’un traitement chirurgical soit à visée fixatrice ou réparatrice.
RESUME CLINIQUE
Il s’agit d’une dame, âgée de 48 ans qui a été admise au service de chirurgie générale du centre hospitalier régional de Fianarantsoa pour exploration d’une paraplégie évoluant depuis deux ans. Dans ses antécédents on a noté un traumatisme dorsal négligé précédant son état paralytique et une hypertension artérielle modérée traitée médicalement. A l’examen :
– la patiente présentait une paraplégie spasmodique avec hypertonie spastique.
– les réflexes ostéo-tendineux étaient exagérés.
– les réflexes cutanés abdominaux étaient abolis.
– le signe de Babinski était positif.
– elle présentait une incontinence uro-anale.
– une anesthésie cutanée superficielle sous lésionnelle (niveau T6) ainsi qu’une raideur et douleur provoquée à la palpation des épineuses au niveau lésionnel.
SYMPTOMATOLOGIE
Selon BATAILLE [21], la maladie est le plus souvent révélée par des fractures pathologiques parfois d’apparence banale. Elles peuvent être des fractures périphériques costales, du bassin ou tassement vertébral [12,14]. Notre patiente a été découverte avec un tassement de sa 6ème vertébrale dorsale, évoluant depuis 2 ans et compliquée d’une paraplégie. Sur le plan morphologique, certains auteurs [18,21] affirment que les symptômes radiologiques sont essentiels pour orienter le diagnostic. Les radiographies simples montrent le plus souvent une ostéolyse, avec géodes et lacunes à l’emporte-pièce, à rechercher notamment au fémur, au crâne et au bassin, mais il peut s’agir d’un tassement vertébral d’apparence banale [15]. Ceci est confirmé par notre observation : ce tassement témoigne déjà une destruction étendue des vertèbres, mais n’affirme en rien le diagnostic de la maladie myélomateuse. Dans ce cadre, on pouvait évoquer l’ostéoporose ménopausique compte tenu de l’âge de la patiente. Le scanner est plus sensible que les radiographies standards et la scintigraphie pour détecter les lésions ostéolytiques médullaires des myélomes. Il est notamment utile pour affirmer le caractère le caractère malin d’un tassement vertébral [7]. Cependant le TDM (tomodensitométrie) n’est pas une technique de dépistage de localisation vertébrale de myélome, du fait de son caractère segmentaire. Elle est réservée pour le diagnostic de confirmation. Sur le plan biologique, le syndrome inflammatoire est fréquent avec élévation de la vitesse de sédimentation et de la protéine C réactive, sauf en cas de myélome à chaînes légères [1]. Dans cette pathologie, l’augmentation de la protidémie est parfois massive, supérieure à 100g/l. Il existe un pic monoclonal à l’électrophorèse des protéines sériques, migrant le plus souvent avec les gammaglobulines. L’immuno-électrophorèse permet de caractériser le pic, le plus souvent de type IgG, parfois IgA, rarement IgD, exceptionnellement IgE. Pour notre cas, l’immuno-électrophorèse des protéines n’a pas pu être réalisée. Par contre, l’accélération importante de la vitesse de sédimentation des hématies avec l’hypercalcémie nous ont amené à penser à une pathologie maligne. Selon CHIRAS J. [2], la biopsie ostéo-médullaire ou d’une biopsie chirurgicale d’un foyer permettent parfois d’obtenir un diagnostic fiable. Pour notre patiente le diagnostic du myélome vertébral a été retenu après l’examen biopsique.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIER CHAPITRE : RAPPELS
I. La colonne vertébrale
– description
– rapports
– aspects fonctionnels
II. Le myélome solitaire
DEUXIEME CHAPITRE : NOTRE OBSERVATION
I. Résumé clinique
II. Examens biologiques
III. Examens radiographiques
IV. Hypothèse diagnostique
V. Protocole opératoire
VI. Résultat de l’examen anatomo-pathologique
VII. Bilan évolutif
VIII. Traitement médical
IX. Evolution
TROISIEME CHAPITRE : COMMENTAIRES
I. Epidémiologie
II. Symptomatologie
III. Traitement
IV. Pronostic
CONCLUSION
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