Mycorhization de l’ananas

Mycorhization de l’ananas

La Martinique, contexte géographique du travail

La Martinique est une île volcanique de l’arc des petites Antilles, située à une altitude de 14° Nord, entre la Dominique et Sainte-Lucie. Elle bénéficie d’un climat tropical humide adouci par une exposition aux vents dominants venant de l’Est : les Alizées (SIDE, 2011). Le Nord montagneux reçoit de grandes quantités de pluie tandis que le Sud est plus sec et moins accidenté. Deux saisons s’y succèdent, une première caractérisée par un climat plus sec et frais : le « Carême » de décembre à mai. Et une seconde qui présente une pluviométrie plus forte et une température moyenne plus élevée: « L’hivernage », s’étendant de juin à novembre.
En fonction des années s’observent des intersaisons plus ou moins marquées. Cette île possède une richesse écologique exceptionnelle avec un taux d’endémicité élevé. Cependant, son territoire insulaire restreint couplé à une forte densité de population augmente la pression exercée par les activités humaines sur l’environnement (SIDE, 2011).En Martinique, les plantations d’ananas sont concentrées dans le nord-atlantique de l’île, principalement sur des andosols sur ponces (Albrecht et al, 1992) et sur andosols sur cendres.Ces sols sont relativement jeunes et riches en minéraux, quoique parfois légèrement déficients en éléments potassium et phosphore. Cependant les apports dans le cadre de l’agriculture classique pour ces derniers éléments sont apportés en quantité couvrant plus que largement les besoins réels de la culture (FRANCOIS, et al, 2005).

Culture de l’ananas en Martinique

L’ananas est une plante qui appartient à la sous-classe des monocotylédones, à la famille des Broméliacées et au genre Ananas. Originaires d’Amérique du Sud, certaines espèces sont ornementales, d’autres produisent des fruits comestibles. L’espèce comosus est celle qui est cultivée pour ses fruits.La croissance de l’ananas se divise en trois phases :
-Phase 1: La croissance végétative, qui dure de 12 à 18 mois. Elle s’arrête au moment de l’induction florale, provoquée par la diminution de la durée du jour, sur les plants ayant atteint un stade de développement suffisant (entre 12 et 18 mois). En agriculture l’induction est provoquée artificiellement grâce à un apport d’éthylène car cette technique limite le nombre de passages pour récolter les fruits à maturité facilite la gestion des parcelles pratiques (Lebeau et al, 2008).
La fraicheur des températures participe également à cette induction. Les fleurs s’épanouissent du bas vers le haut de l’inflorescence.
-Phase 2: La maturation du fruit, qui a lieu également du bas vers le haut, mais aussi du cœur vers la périphérie. L’épiderme, vert lorsque le fruit est jeune, se colore de jaune orangé en mûrissant. Ananas comosus est autostérile, son fruit est donc parthénocarpique (se développe sans fécondation, donc ne contient pas de graines). De la floraison à maturité du fruit, il s’écoule environ 150 jours.
– Phase 3: La croissance des rejets, qui débute sur les réserves du plantet l’activité résiduelle du plant-mère. Les rejets peuvent conduire à la formation d’un second fruit ou produire des racines s’ils sont détachés.
La culture de l’ananas est favorisée dans les sols légers et poreux, car son système racinaire est très sensible à la compaction des sols même quand il s’agit d’une zone de compaction comme les semelles de labour, de zones argileuses ou d’horizons gravillonaires peu profonds.
De plus les racines de l’ananas sont également très sensibles à l’asphyxie dans les sols peu perméables ou sujets au phénomène d’hydromorphie. Le choix d’un sol pour la culture d’ananas doit s’orienter idéalement sur des sols sablo-argileux à argilo-sableux. Un autre facteur à prendre en compte est l’acidité du sol, dont le pH optimal serait compris entre 4,5 et 5,5(Arbrofuit, 2007). L’ananas est peu exigeant en eau et tolère assez bien les climats secs. Il peut se cultiver sous des pluviométries allant de 600 à 4000 millimètres par an, mais une bonne pluviosité est indispensable pour de bons rendements (Py et al, 1984).
Sa culture, son histoire en Martinique:
L’ananas a vraisemblablement été introduit en Martinique par les Arawaks, peuple amérindien originaire d’Amazonie. Les colons, qui appréciaient l’ananas, le consommaient frais ou confis. En 1908, la première usine de transformation d’ananas fut ouverte au GrosMorne ; mais c’est au début des années 1930 que cette production prit son essor avec la création de la société anonyme « Ancienne Compagnie antillaise » et l’apparition d’exploitations de taille moyenne. En 1935, l’ananas couvrait 135 hectares, 250 hectares en 1937, puis 300 hectares en 1940. Depuis les années 2000, la filière ananas connaît un certain déclin, tant sur le plan économique que structurel. En effet, le nombre de producteurs d’ananas a diminué de 80 % environ en l’espace de dix ans. De ce fait la superficie en ananas a également été fortement réduite, de même que la production. Aujourd’hui on considère que la surface cultivée en ananas est inférieure à 100 hectares, répartis dans le nord atlantique de la Martinique, principalement sur les communes de l’Ajoupa Bouillon, le Morne Rouge, Basse Pointe et Macouba. La production en 2012 serait de l’ordre de 800 tonnes (Letchimy,
2012).

Effet des pratiques culturales

 Diminution de la fertilité des sols et détérioration de leurs structures
Les sols sont affectés via diverse raisons par la culture d’ananas. Tout d’abord il y a une volonté de modification de la structure du sol. L’objectif pour la culture est d’obtenir un sol « meuble, aéré, filtrant et peu sensible à la compaction au cours du temps », les racines d’ananas étant sensibles à l’asphyxie. Selon le « Manuel du planteur d’ananas Bouteille en Guadeloupe » (2000), la préparation du terrain se divise en deux étapes (destruction du couvert existant et préparation du sol) qu’il est nécessaire de planifier au moins deux mois avant la date de plantation.
Ensuite au niveau de la flore (et donc indirectement de la faune du sol), il y a également de grande perturbations qui sont effectuées, par exemple dans le cas d’une jachère il est conseillé de « détruire l’herbe par un désherbage avec des herbicides totaux à action non résiduelle comme par exemple le glyphosate (ROUND UP) puis passer un rom plow ». Ou plus généralement, ce qui ce fesait pour diminuer le stock de graines d’adventices présentes dans le sol, il était préconisé de les laisser germer et d’appliquer un herbicide total comme le glyphosate, au moins une semaine avant la préparation du sol.
Il existe également des modifications du sol résultant de la lutte contre les ravageurs de l’ananas. Les nématodes et les symphyles sont les ravageurs telluriques principaux de l’ananas. Les nématodes sont des vers de quelques millimètres de long, qui « se nourrissent aux dépens des racines ». Les symptômes provoqués sont les mêmes que ceux observés en cas de stress hydrique ou nutritif de la plante. Il semble que le labour du sol lors de sa préparation permet de créer un milieu qui n’est pas favorable aux nématodes (FREDON, fiche phytosanitaire). Pour maintenir les populations de nématodes à un seuil bas, évitant ainsi les pertes de rendement, les nématicides étant interdits de nos jours, on plantes des espèces défavorisant les nématodes tel que les crotalaires. Les symphyles (myriapodes attaquant l’extrémité des racines) provoquent en général un développement hétérogène des plants. La destruction des résidus de la plantation précédente permet de réduire le stock de symphyles présents dans le sol.
L’intensification de la culture d’ananas et la monoculture entraînent un déséquilibre entre les populations de micro-organismes bénéfique et pathogène au profit de ces derniers.
L’utilisation massive de produits phytosanitaires participe à la diminution de la diversité des populations microbiennes. La diminution du taux de carbone organique du sol va diminuer sa fertilité, ce qui va jouer sur la culture de l’ananas, où l’homme va devoir de plus en plus intervenir avec des apports d’engrais chimiques. L’utilisation massive de produits phytosanitaires participe à la disparition de populations microbiennes. De plus, la culture d’ananas entraîne une détérioration de la structure du sol. Ses faibles systèmes radiculaires et aériens ne protègent pas les sols, qui subissent l’érosion. Ce phénomène est accentué par les plantations sur des pentes et la préparation du terrain non adaptée aux caractéristiques du sol.
Les cultures sont réalisées de telle sorte que les récoltes sont régulières, ce qui a pour conséquence des rotations de parcelles laissées à nues en périodes de fortes pluies (FAO, 2001).
 Pollutions sols et eau
La monoculture d’ananas est également responsable de la pollution des sols et des nappes phréatiques par l’utilisation de pesticides que ce soit au niveau des sols ou hydrique(en 2005, 77000 tonnes en France pour 290 000 km2 de surface cultivée). Il est considéré que sur une tonne de produits phytosanitaires appliqués à la culture, 60% se retrouve directement dans les eaux et sols, pour 40% de fixé par la plante (Bellec et al, 2002 ; Cabidoche et al, 2011). En effet, lors de la préparation du sol en vu d’une culture d’ananas, des traitements herbicides sont appliqués, ensuite au moment du semis on procède à un autre traitement, et enfin au cours des premiers mois de croissance les traitements herbicides suivent. Il n’y a pas que des herbicides, on trouve aussi des antifongiques et des insecticides. La flore, la faune se trouvent atteintes par la contamination de l’eau. Les composés organochlorés présents dans les pesticides sont toxiques pour les poissons et organismes aquatiques (Côte et al. 2011).

Règlementation future pour l’utilisation des pesticides/ engrais et volonté d’une agriculture raisonnée

 Ecophyto 2018
L’agriculture a eu plusieurs impacts néfastes sur l’homme et son environnement, que ce soit sur la biodiversité, sur la santé et la survie des être vivants ou encore sur la qualité et quantité des ressources disponibles. La prise de conscience s’est faite à plusieurs échelles. Il en est ressorti la mise en place de mesures vers une agriculture durable. Il est nécessaire de trouver de nouvelles pratiques capables de répondre à ces exigences.
Au niveau national, l’une des applications concrètes est proposée par le grenelle de l’environnement à travers Ecophyto 2018. (Ministère de l’agriculture, de l’Alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire, 2011). Ce projet possède plusieurs objectifs définis, comme par exemple l’utilisation des pesticides qui doit d’ici 2018, diminuer de 50% ou le retrait du marché des substances actives dangereuses. Les pratiques agricoles doivent être améliorées grâce à l’appui de la recherche et l’innovation de nouveaux systèmes de production viables et diffusables.
Dans la filière ananas les exploitations présentent un état s’étant fortement dégradé ces dernières années pour deux causes principales : tout d’abord plus faibles revenus des producteurs mais aussi parce que la réglementation en matière d’usage de produits phytosanitaires à fortement réduit le nombre de produits autorisés sur le marché. En particulier, il n’existe presque plus de produits autorisés pour le contrôle des cochenilles (provocant le Wilt qui est un flétrissement rapide de toute la plante) et des bioagresseurs telluriques (nématodes et symphyles) et le choix en matière de contrôle des adventices est très limité (Bellec et al, 2002).
L’intérêt de favoriser un système répondant à des normes plus respectueuses de l’environnement est une approche qui devient obligatoire dans le contexte actuel. L’objectif est de favoriser les effets positifs des organismes vivants constitutifs de ce système afin de limiter le recours aux intrants chimiques. L’utilisation de plantes de services s’inscrit dans cette démarche (Strassart et al, 2012).
 Vers une agriculture raisonnée, importance de la mycorhization
Les mycorhizes, littéralement «champignon de racines», est le nom donné aux relations mutualistes entre certaines plantes terrestres et des champignons qui colonisent leurs systèmes racinaires. Le type d’interaction le plus commun est l’association mycorhizienne arbusculaire (Harrier and Watson, 2003) impliquant les champignons mycorhiziens à arbuscules (CMA).
Ils peuvent représenter de 5 à 50% de la biomasse microbienne du sol (Cardoso and Kuyper, 2006). Ces micro-organismes sont des symbiotes obligatoires (Harrier and Watson, 2003), ils fournissent à la plante des minéraux, principalement le phosphore, prélevés dans le sol par un réseau mycélien dense. Il a été démontré que les plantes mycorhizées bénéficient dans certaines conditions, d’une meilleure nutrition minérale. En particulier la concentration en phosphore, qui est le macronutriment le moins mobile dans le sol (Declerck, 1996), est augmentée dans les plantes mycorhizées. Dans une moindre mesure, la mycorhization peut améliorer la nutrition en potassium, azote et en micronutriments tels que le zinc et le cuivre.
La mycorhizosphère (zone d’influence de la racine mycorhizée) s’étend au-delà de la zone d’exploration de la racine (la rhizosphère). La présence de CMA augmente les surfaces et les volumes d’absorption. On peut trouver 10 à 100 mètres de mycélium mycorhizien par centimètres de racines (Cardoso and Kuyper, 2006). De nombreuses recherches ont montré l’implication des CMA dans la protection des plantes (Azcón-Aguilar and Barea, 1997). La structure du sol affecte les potentiels d’érosion, les dynamiques hydriques et les cycles biogéochimiques des nutriments. Une des composantes majeures de la structure du sol est l’agrégation des particules qui le composent (Cardoso and Kuyper, 2006). Un des facteurs jouant sur cette agrégation est la présence de polysaccharides très stables Ces derniers sont exsudés par le mycélium des CMA, tels que la glomaline (Declerck, 1996). Ils assurent la cohésion physique des microparticules du sol. Le réseau mycélien agit donc comme un squelette assurant la cohésion des particules du sol (Cardoso and Kuyper, 2006).
Les champignons mycorhiziens sont affectés par des pratiques culturales qui ne prennent pas en compte l’importance de l’activité des organismes des sols (Declerck, comm pers.). Que ce soit:
-L’utilisation de fertilisants qui est néfaste à la mycorhize, en effet cette dernière dépend de la biodisponibilité des engrais. Si la plante n’a pas vraiment d’utilité à être colonisé par un champignon car les nutriments sont très disponibles dans le sol, cette dernière aura moins de sites réceptif. Tandis que si les éléments sont peu biodisponibles, la présence du champignon devient un besoin essentiel à la plante.
-Le labour qui détruit le réseau mycélien, de ce fait la capacité du transport des éléments par le champignon très limitée.
-Les fongicides toxiques pour ces champignons, et de plus la monoculture en elle même diminue la diversité des champignons.
De plus, les sols tropicaux sont susceptibles de limiter les rendements agricoles via des toxicités (Aluminium, Manganèse), ainsi que par un grand pouvoir fixateur de phosphore (lié à des pH trop acides ou trop basiques) (Sieverding, 1990).
L’augmentation du potentiel de mycorhization d’un sol est une des solutions qui peut contribuer à concevoir des systèmes de production plus « raisonnés » ou « agro-écologiques » répondant aux nécessités actuelles d’adapter les cultures soumises à de plus en plus de contraintes. Une utilisation d’une plante de service mycorhizante comme les crotalaires répondant à la nécessité à la fois, d’une augmentation de la résistance des cultures, une augmentation du potentiel de mycorhization du sol et une diminution des besoins en intrants.
C’est dans ce contexte que la détermination du potentiel de mycorhization des sols dans la zone de production d’ananas s’impose naturellement dans une démarche d’amélioration des rendements. Cette amélioration vise également une limitation de l’utilisation de biocides dans l’optique d’une meilleure conservation de la biodiversité.

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Table des matières

1. Introduction 
2. Contexte et bibliographie 
2.1 La Martinique, contexte géographique du travail
2.2 Culture de l’ananas en Martinique
2.3 Effet des pratiques culturales
2.4 Règlementation future pour l’utilisation des pesticides/engrais et volonté d’une agriculture raisonnée
3. Matériel et Méthodes 
3.1 Matériel
3.2 Méthodes
4. Résultats 
4.1 Mise en place d’un protocole de coloration
4.2 Mycorhization de l’ananas
4.3 Comparaison du niveau de mycorhization de différentes plantes
4.4 Résultats des analyses effectuées par L’université du Louvain
5. Discussion

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