MUTATION DU PAYSAGE AGRO-ECOLOGIQUE DANS UN TERROIR

Les cultures de la zone forestière

                 L’unité de production de la zone forestière est colonisée par la pratique de la culture sur brûlis. Ce fait confirme la dépendance du système agraire aux ressources forestières. En fait, on appelle cette pratique « tavy » ou « ramasana » dans la zone. La zone forestière est occupée par les « nouveaux venu » originaire de l’ethnie Betsimisaraka d’Anosibe an’Ala.
Tavy Le tavy se définit comme la culture de riz pluvial, sans labour, sur défriche-brûlis de forêt naturelle humide, en général de forêts secondaires, ou de recrû forestier, sur la côte est de Madagascar (Aubert et al. 2003). Par ailleurs, la pratique du tavy est considérée par la population locale comme un itinéraire technique incontournable pour ses cultures de survie. La culture de riz sur tavy occupe la première place dans leurs activités agricoles. Cependant, cette pratique déconseillée étant donné que c’est une exploitation extensive ou traditionnelle c’est-à-dire à faible production. Mais pour assurer leur sécurité alimentaire et pour ne point dépendre entièrement de l’extérieur, les paysans préfèrent la continuer car cela peut leur approvisionner après six mois de travaux.
Ramarasana Le ramarasana est aussi une pratique comme le Tavy mais le défrichement se fait sur des parcelles en jachère de la forêt secondaire (savoka). Le sol est alors moins fertile par rapport à celui qui était sous la forêt primaire. D’ailleurs, le type de relief de la région ne permet pas d’avoir un espace aisé pour l’agriculture. Les bas-fonds sont très étroits et la plaine alluviale est déjà occupée par les « tompon-tany1». Ce qui mène au défrichement de la forêt et à la pratique du Tavy. En fait, l’insuffisance de terres arables pose déjà des problèmes. Enfin, pour la raison économique, la population doit cultiver pour son autosubsistance alimentaire étant donné que le riz est son aliment de base. Dans le fokontany Miadana, la riziculture est accompagnée par les cultures d’haricot et de maïs. Ce sont les principales sources de revenu de la population.
Agro-forêt Le système d’agroforesterie est un système d’utilisation des terres pour faire pousser des arbres ou des arbustes en accompagnés par des cultures, des pâturages ou du bétail. Dans cette unité se sont existent des interactions à la fois écologiques et économiques entre les ligneux et les autres composantes (Cirad 2013). L’agro-forêt à Miadana se pratique à proximité de l’habitation. Il se caractérise par la culture de caféier, bananier, canne à sucre et des arbres fruitiers. Elle se trouve dans les zone basses mais dans les vallons humide de la zone forestière. En somme, Miadana représente diverses unités de production relatives à l’organisation générale des reliefs (Fig.6).

Le plan d’Aménagement simplifié proposé par l’ONG Fanamby

                        Le zonage est un outil pour gérer rationnellement les ressources et pour éviter les utilisations incompatibles. La division de la zone tampon en zones d’aménagement est une démarche fondamentale qui a pour objet de reconnaître et de protéger convenablement les ressources et facilite leur gestion. La zone tampon est un espace, dans lequel les activités sont réglementées pour assurer une meilleure protection du noyau dur de l’Aire Protégée. Elle est subdivisée en :
– Zone d’Occupation Contrôlé (ZOC): la zone d’habitation, située à l’intérieur de l’Aire protégée et qui a existé avant même de la création de l’AP.
– Zone d’Utilisation Durable (ZUD) : est un espace de valorisation économique où l’utilisation des ressources et les activités de production sont réglementées et contrôlées. Le ZUD présente six sous-zones.
– Zone de service qui représente les infrastructures touristiques
Ces différents types de zonage sont accompagnés par des objectifs d’aménagement de l’AP, leur fonction, la qualité et les réglementations d’accès dans l’AP (ANNEXE 3). Le plan d’aménagement simplifié par l’ONG Fanamby que les 5 zones ont des dimensions similaires : le noyau dur occupe 22,36 % de la surface totale de l’A.P., la zone de restauration 26,43%, la zone de transfert de gestion 19,2%, la Zone d’Utilisation Durable Toutes activités pouvant nuire à l’intégrité de l’aire protégée, notamment les atteintes irréparables au milieu protégé, les comportements perturbateurs, les comportements incompatibles avec la vie naturelle. Néanmoins, les pratiques suivantes sont encore tolérables :
– la valorisation des anciens champs de culture sans les agrandir et sans les brûler
– le ramassage des plantes médicinales
– la récolte des produits issus des cultures de rente telles comme le café, la banane ce qui amène la majorité des paysans d’arrêter la culture au sein de l’AP.

Immobilisation des parcelles de Ramarasana

              La nouvelle réglementation de l’AP en interdisant l’utilisation du feu dans la zone de savoka va également bloquer la mise en valeur des parcelles en jachère qui sont incluses dans le plan de zonage car leur mise en valeur utilisent du feu et répond au même principe de fertilisation du sol que la culture sur brûlis. Cette restriction est à l’origine de la disparition des ramarasana qui sont des parcelles en jachères, ce qui engendre la diminution des surfaces cultivables et de la production rizicole. Mais certains produits vivriers comme le haricot et le maïs qui sont pratiqués dans les parcelles de ramarasana disparaissent. Il est à noter que la commercialisation du haricot (produit complémentaire) constitue la majorité des revenus de la population locale (enquête Octobre 2016). La disparition de ces unités de production aggrave le problème d’autosuffisance alimentaire des ménages ainsi que leur situation sociale et économique.
 Les ménages dépendant de l’exploitation du ramarasana : Le résultat de nos enquêtes (tableau 11) montre que 80 % de la population du fokotany de Miadana vivent de l’exploitation des parcelles de ramarasana et les villages riverains de l’aire protégée dépendent totalement de cette unité de production telle qu’Ambatotsara, Ampilanona et Sahamanolotra et secondairement Miadana. Plus que la moitié des villages du fokotany de Miadana dépendent des parcelles en jachère (ramarasana), les trois villages restants sont les anciens villages dont la population est qualifiée comme originaire de la zone vit exclusivement de la riziculture irriguée et de la culture sur bahibo ainsi que les produits de l’agroforêt qui est situé à proximité de la zone d’habitation (tableau 9). Selon le Chef fokotany de Miadana dans ce village seuls quatre ménages ne pratiquent pas le ramarasana (Auteur, enquête octobre 2016).

Les rizières irriguées de zone basse : unité de production endommagée

                 La riziculture est à la fois une passion par les paysans et occupe tout leur temps. Toutefois, quelles que soient les techniques culturales adoptées comme le repiquage en ligne ou le système de riziculture intensif, la riziculture demande un travail minutieux qui prend du temps. En effet, pour un champ de 1Ha le labour fait par la charrue peut durer jusqu’à 10 jours. Le repiquage fait par des femmes prend 15 jours pour la technique extensive et 30 jours pour la technique intensive (SRI8). Il faut également10 à 15 jours pour le sarclage. De plus, s’il y a retard ou insuffisance de pluies, cela se répercute sur le rendement et la productivité. L’année 2016 est marquée par une insuffisance de pluies qui a provoqué des conflits d’usages en matière de gestion de l’eau entre les paysans étant donné que chacun veut irriguer ses rizières. En fait, certains paysans dérivent l’eau des canaux d’irrigation des autres pour drainer leurs parcelles. Par conséquent, il faut garder jour et nuit les canaux d’irrigation pour éviter cette situation. Et c’est ainsi que se présente le conflit d’eau entre les paysans (ady rano) (RAZAFINDRAKOTO enquête 2016). Ce qui requiert plus de temps de travail pendant la nuit. L’insuffisance de l’eau est également expliquée par la multiplication des prises à l’amont de la plaine. Ces pratiques se situent dans les zones où les cours d’eau prennent source et favorisent la diminution du débit de l’eau et le problème d’insuffisance d’eau au niveau de la plaine alluviale de Sahajonjanana. Alors que lors des crues les rizières situées dans la zone basse sont ensablées durant la saison de pluies. Ce phénomène s’aggrave à cause du déboisement au niveau du bassin versant témoigne RAZAFINDRAKOTO. Au mois d’octobre, les éleveurs renouvellent leur terrain de pâturage par la mise à feu de la zone herbeuse mais cette pratique n’est pas maîtrisée et déclenche les feux de brousse. En revanche, dès les premières pluies durant mi-octobre le sol dénudé par les feux de brousse subit directement l’érosion hydrique qui va ensabler la zone basse. Cette destruction des cultures abaisse les productions rizicoles de Miadana. Quand les pluies sont suffisantes et bien réparties, le rendement peut atteindre jusqu’à 2T à 2,5 T/ha pour la SRI et 1 à 1,5T/ha pour la technique traditionnelle. Cependant, le rendement diminue jusqu’à 0,95 T à 1T/ha seulement actuellement. Pour faire face à cette situation, les paysans pratiquent une double culture de : « vary taona » durant la première saison de riz (mois de novembre au moi avril), « Vary aloha » pendant la deuxième saison de riz (mois de juin au novembre). Pourtant, cette dernière est peu productive faute d’irrigation et de fertilisation du sol. Mais cela n’empêche pas la majorité de la population à adopter la polyculture sur une même parcelle afin d’assurer la nourriture et une source de revenus complémentaires.

L’agro-forêt : unité de production de plus en plus abandonnée

                L’unité de production agro-forêt de Miadana est un espace à vocation agricole sédentaire comme les caféiers et les bananiers, les cannes à sucre, quelquefois avec des arbres fruitiers et des espèces annuelles. Dans le terroir de Miadana, on peut les trouver sur des vallons ou des bas-fonds et sur les tiers inférieurs des versants, sur les versants proches du village. Parfois, le système agro-forestier est toujours associé avec la pratique de culture sur brûlis car il constitue une source de revenus signifiante pour les paysans. L’agroforesterie apporte de nombreux avantages en termes économique qu’écologique. Du point de vue écologique : il présente une architecture aérienne fermée. Les plantes protègent les versants et les sols contre l’action des eaux de ruissellement et les vents durant la période cyclonique. A l’exemple des bananiers, ils favorisent la couverture rapide du sol par leur mode de multiplication par bulbe. Les gaines des vieilles feuilles ainsi que les troncs des bananiers forment également un excellent tapis végétal (Razafimahatratra, 1998). Alors, l’agro-forêt est considérée comme une alternative à la culture sur brûlis. Selon TOMICH et al. (1998) toutes les alternatives à la culture sur brûlis basées sur une association avec des arbres semblent, d’un point de vue agronomique durable. Les systèmes agro-forêt font partie des orientations centrales du développement rural durable, et peuvent ainsi être implantés sur des terres dégradées par des activités agricoles nuisibles, et contribuer à la réduction de la déforestation de nouveaux espaces. Par ailleurs, à Miadana, plus particulièrement dans les villages Ambatotsara, Ampilanonana, Sahamanolitra, l’agro forêt est une unité de production en disparition progressive. Face au plan de zonage de l’AP et à la stratégie mise en place par des ménages, les unités d’agro-forêt sont transformées en rizières irriguées. Auparavant, Ampilanonana était reconnu dans la région d’Ampasipotsy-Mandialaza par sa production de bananes qui atteint plus de 1,8 T par ménage. Mais actuellement, à cause de l’abandon progressif de cette unité de production la production n’atteint que 0,25 T (RABARIVELO enquête 2016). De plus, des ravageurs comme les insectes et les parasites, détruisent les récoltes sur pied. A Ampilanona, l’attaque chauves-souris sur les caféiers endommage jusqu’à 28% de la production (Enquête octobre 2016). Ces phénomènes expliquent le fait que les ménages dans les villages Ambatotsara, Ampilanonana, Sahamanolotra sont déficitaires en termes de niveau d’autosubsistance le (tableau 9, p 38)

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : LE CADRE OPÉRATOIRE ET LES MILIEUX NATURELS
Chapitre I- La démarche de recherche
1 La recherche bibliographique
1.1Élaboration de la problématique et des hypothèses de recherche
1.2La phase de conception des outils de recherche
1.2.1. Cartographie
1.2.2 Enquêtes
1.2.2.1 Elaboration des questionnaires
1.2.2.2 Types d’enquête
2. Phase de terrain
2.1 Phase de pré-terrain
2.2 Enquête proprement dite
2.2.1 Échantillonnage
2.2.2 Approche participative avec les villageois pour les observations directes
3. Dépouillement et traitement des données
Chapitre II – Les différentes zone agro-écologique
1 Milieu écologique
1.1 Relief
1.2 La zone de Miadana marquée par un climat subhumide
1.3 La zone de Miadana prédominance de forêt humide
1.3.1 Forêt primaire
1.3.2 Formation secondaire
1.3.3 Les formations artificielles
1.4 Sols ferralitiques précaires
2 – Le système agraire et la tenure foncière dans le fokontany de Miadana
2.1- La culture de la zone basse
2.1.1- Les rizières irriguées
2.1.2- Le Baiboho
2.2- Les cultures de la zone forestière
2.2.1. Tavy
2.2.2 Ramarasana
2.2.3- Agro-forêt
DEUXIÈME PARTIE : PLAN DE ZONAGE DE L’AP ÉLÉMENT PERTURBATEUR DU SYSTÈME AGRAIRE
Chapitre I La mise en place du Plan d’Aménagement et de gestion de l’AP AnjozorbeAngavo
1 Le plan de zonage de l’AP et segmentation du terroir de Miadana
1.1- Rôle
1.2- Les conséquences du plan de zonage dans l’espace agraire
2- Plan d’Aménagement et gestion simplifié par l’ONG Fanamby
2.1- Le plan d’Aménagement simplifié proposé par l’ONG Fanamby
2.2 Mode de gestion et l’impact dans le système agraire
Chapitre II. Les conséquences du plan de zonage et le plan d’aménagement pour la population riveraine
1- La disparition des unités de production par la mise en place du plan de zonage
1.1 Spatialisation du phénomène
1.2 Disparition des unités de Tavy
1.3 Immobilisation des parcelles de Ramarasana
2 Les stratégies des ménages face à cette situation
2.1 La transformation des agro-forêts de rizières irriguées en terrasses
2.2 La modification des ramarasana en agro-forêts ou reboisées en eucalyptus
2.3 Réduction de la quantité ou changement de régime alimentaire
TROISIEME PARTIE : LA VIABILITE DE LA RECOMPOSITION DU SYSTEME AGRAIRE
Chapitre I L’évolution du système agraire
1- La culture de zone basse : actuellement unité de production en difficulté
1.1- Les rizières irriguées de zone basse : unité de production endommagée
1.2- Le Baiboho : une unité à forte revenu mais temporaire
2 Les cultures de la zone forestière : base d’unité de production pour les classes déficitaires (Ambatotsara, Ampilanonana, Sahamanolitra)
2.1 Le système de culture sur brûlis (Tavy) : une pratique qui est reprise progressivement
2.2 Ramarasana : unité de production contrastée
2-3 L’agro-forêt : unité de production de plus en plus abandonnée
3- L’évolution de l’occupation du sol entre 2000 et 2016
3.1- La dynamique spatio-temporelle de la forêt
Chapitre II- Reconversion des agro-forestiers en rizières irriguées
1 Le système de production d’autoconsommation
1.1 La taille d’exploitation
1.2 Niveau d’équipement pour la riziculture
1.3 Productivité des unités de production
1-4 Etude de la viabilité de la reconversion de système agraire
2 Structure agraire en difficulté
2 .1 L’appropriation foncière et le Mode de faire valoir
2 .2 Le problème foncier et la pratique du « tavy»
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE

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