Musiciens professionnels et métiers supports

Musicologie et histoire de la musique

Des études réalisées aux XVIIe et XVIIIe siècles

La musique et ses pratiques constituent pourtant une activité sociale étudiée – dans les limites quantitatives observées ci-dessus – par les musicologues comme par les historiens. Existerait-t-il une frontière entre ces deux approches, ou bien finalement le seul élément radical de distinction ne résiderait-il pas dans le fait de savoir ou non lire, analyser et jouer les œuvres, les partitions des compositeurs ?
Pour la partie de la période moderneque nous étudions, les études, recherches, colloques et publications font florès en ces temps de redécouverte et de grande sympathie pour la musique baroque.
L’analyse de cette musique, les contemporains l’avaient déjà entreprise. Mais avec quelles approches et méthodes écrivaient-ils à ce sujet ?

Traités de théorie musicale et de didactique

Nous disposons d’abord de traités théoriques sur lamusique. Parmi les savants qui ont vécu ou publié au moins pour une part dans le royaume de France, nous comptons René Descartes qui donne en 1618 son Musicae compendiumdont la première traduction française est effectuée en 1668 par le Père oratorien Nicolas-Joseph Poisson (1637-1710) et intitulé Abrégé de musique . Le religieux et savant Marin Mersenne (1588-1648) publie en 1627 son premier traité Harmonie universelle contenant la théorie et la pratique de la musique. Sébastien de Brossard (1655-1730), compositeur, laisse son Dictionnaire de musiqueédité par Ballard en 1701 et, sous forme manuscrite, un Catalogue des livres de musique, théorique et prattique, vocalle et instrumentalleaujourd’hui à la BNF.
Une deuxième veine d’écrits répond à l’objectif de l’enseignement musical. Au croisement de l’approche théorique et du conseil à la composition, Marc-Antoine Charpentier (1643-1704) laisse en manuscrit ses Règles de composition par Mr Charpentier (avant 1690). Jacques-Martin Hotteterre (1674-1763), facteur d’instruments, compositeur et célèbre joueur d’instruments à vent, vise notamment à faire connaître la bonne pratique de l’instrument avec ses Principes de la flûte traversière, ou flûte d’Allemagne, de la flûte à bec ou flûte douce et du hautbois, divisez par traitez(1707). Il est rejoint dans cette démarche par François Couperin (1668-1733) avec L’art de toucher le clavecin (1716). D’autres se soucient des débutants, comme Pierre Dupont Anon qui rédige ses Principes de musique […] à l’usage des enfants(Paris, 1719).
Au croisement de la musicologie avec les sciences dures, le physicien Joseph Sauveur (1653-1716) semble être le créateur de l’étude de l’acoustique et publie notamment Principes d’acoustique et de musique, ou système général des intervalles des sonsdans les Mémoires de l’Académie Royaledes sciencesde 1701. En 1726, après avoir lu Joseph Sauveur, Jean-Philippe Rameau (1683-1764) pense nécessaire de reprendre son traité de 1722 et publie un Nouveau système de musique théorique.
Dans la tradition des chroniqueurs, des contemporains fournissent leurs observations des pratiques musicales, tel Nicolas Boindin, avec ses Lettres historiques sur tous les spectacles de Paris(Paris, 1719). Nous disposons de récits de voyageurs qui décrivent les concerts auxquels ils ont assisté. D’autres rédigent un ouvrage de compterendu d’une manifestation, d’un spectacle particulier. Par exemple André Félibien avec son Divertissements de Versailles donnés par le Roi à toute sa cour, au retour de la conquête de la Franche-Comté en l’année 1674(Paris, 1676).
Donnons enfin toute sa place à un personnage important pour la connaissance de l’histoire de Grenoble et de l’art éphémère baroque : le jésuite lyonnais Claude-François Ménestrier (1631 1705), théoricien et praticien de l’image et de la représentation. Ce savant, tout à la fois historien – historien du blason, mais aussi de Lyon –, enseignant, organisateur des spectacles au collège ainsi que de fêtes publiques, se fait chroniqueur – avec sa Relation des cérémonies faites à Grenoble dans le premier monastère de la Visitation, à l’occasion de l’octave de la canonisation de S. François de Sales (1666), ou ses Décorations faites dans la ville de Grenoble, pour la réception de Mgr le duc de Bourgogne et de Mgr le duc de Berry(1701) – et aussi théoricien des arts du spectacle: Des Représentations en musique anciennes et modernes(1681) et aussi Des Ballets anciens et modernes selon les règles du théâtre(1682).

Construction d’une histoire de la musique

Les ouvrages adoptant une démarche historique ne paraissent pas avant le XVIII e siècle. Ainsi, de
Pierre Bonnet-Bourdelot (1638-1708) et restée inachevée, nous parvient l’Histoire de la musique et
de ses effets depuis son origine jusqu’à présent(1715). Dom Philippe-Joseph Caffiaux, (1712-1777)
écrit en 1754 une volumineuse Histoire de la musique depuis l’antiquité jusqu’en 1754 (3 tomes, manuscrits, à la BNF).
Admirée de Fétis, elle est une réponse à la lacunaire Histoire de la musique et de ses effets depuis son origine jusqu’à présent (1715) de Pierre Bonnet-Bourdelot (1638-1708). Il y analyse environ 1 200 œuvres, divise l’histoire de la musiqueen huit périodes (naissance du monde, prise de Troie, Pythagore, naissance du christianisme, Gui d’Arezzo, Lully, Rameau, 1754), étudie le rapport des animaux avec la musique aussibien que les « querelles du goût » françaises.
Ces premières démarches d’historiens de la musique nécessitent d’être replacées dans leur contexte culturel, et induisent leurs choix de méthodes. Des historiens ont analysé ces premiers temps de l’historiographie de l’histoire de la musique. Ainsi, à propos de l’ouvrage de Philippe Vendrix sur l’origine de l’histoire de la musique (XVII e et XVIII e siècles) , Sophie-Anne Leterrier écrit dans un récent article

Organisation et diversification du XIXe siècle à nos jours

Intégration des méthodes scientifiques par les sciences sociales

Au XIXe siècle, l’orientation des travaux visant à la connaissance historique de la musique s’inscrit dans une démarche d’ensemble menée par les savants des différentes disciplines. C’est le moment d’un effort général pour adapter des méthodes scientifiques aux sciences sociales, en même temps que s’organisent les nouvelles institutions du savoir : universités, archives, bibliothèques.
Effort aussi pour retrouver, traduire, transcrire, cataloguer, archiver les documents anciens. Cette démarche philologique et paléographique de confrontation des versions des sources, et de production d’éditions critiques, bien connue des historiens pour le travail effectué sur les documents des périodes ancienne et médiévale, voire moderne, trouve sa correspondance dans l’effort des musicologues pour constituer un corpus de sources musicales. Ainsi sont réalisées des éditions considérables visant, pour chaque compositeur jugé important, à cataloguer l’ensemble de ses œuvres. En ce domaine également, on trouve plus facilement des chantiers d’éditions allemands ou anglais que français.
Et pourtant, entre 1860 et 1940, se situe une véritable école de défricheurs, de promoteurs de l’histoire desmusiciens de l’ancien régime, écrivains qui, par-delà les mémoires, les gazettes, les correspondances, les libelles, les affiches, les cérémoniaux, où fourmillent déjà d’abondantes informations de valeur, allèrent à la recherche du document officiel, d’intérêt public ou privé : actes royaux, comptes, délibérations… Alors commence, pour le musicographe, la prospection de fonds manuscrits conservés dans les archives nationales, municipales, départementales, les archives des ministères, les archives paroissiales, notariales, les collections de la Bibliothèque nationale, de la Bibliothèque de l’Institut, les collections privées…
Au XXe siècle, ce qui paraît dominer l’évolution de la recherche musicologique ou historique de la musique pour les temps de l’époque modern esemble bien être l’élargissement et le croisement des champs de compétences et de recherches. L’organologie bénéficie des avancées de la recherche en physique et en chimie. Des recherches essentialistes sur l’esthétique ou le langage musical continuent certes, mais en s’ouvrant aux champs de la sociologie, de la psychologie et de la sémiologie.
Le champ des études paraît s’élargir à l’infini. Ainsi les institutions musicales, la représentation de la musique, les lieux de musique, le public lui-même, deviennent autant de sujets. Les différences entre musicologues et historiens de la société s’estompent grandement quand le courant plus historiquede la musicologie se combine à l’histoire sociale, culturelle, économique et politique, ou quand dans l’autre sens des historiens non musicologues se tournent vers l’histoire de musiciens pour enrichir
leur connaissance d’une période ; ainsi récemment Pierre Milza étudiant la vie de Verdi dans son rapport avec son contexte social.
La diversification concerne aussi le type d’acteurset les formes des recherches : des praticiens se font aussi musicologues. Dans le monde des acteurs de la musique savante, les curiosités et recherches actuelles sur l’interprétation par leurscontemporains des musiques des siècles passés, sur la facture des instruments anciens, mobilisent ensemble musiciens, historiens et musicologues. Nombre de musiciens, dirigeants de formations instrumentales ou chorales spécialisées en musique baroque, voire plus ancienne, prospectent eux-mêmesles archives et les bibliothèques à la recherche de partitions inédites.
Il faut noter également le rôle dans la recherche des joueurs contemporains de musiques populaires anciennes et des ethnomusicologues. Ainsi, par exemple, Jean-François Heintzen, mathématicien, ajoutant à la pratique de la musique traditionnelle la recherche historique sur les musiciens de Moulins au XVII e siècle, ou Luc Charles-Dominique, violoniste pratiquant la musique occitane traditionnelle, l’un des précurseurs de l’histoire sociale des musiciens avec son ouvrage de 1994 Les ménétriers français sous l’Ancien Régime.Pour les musiques des XVIIe et XVIIIe siècles, le CMBV – Centre de musique baroque de Versailles, lié au CNRS et au Ministère de la Culture – fédère des équipes de recherche constituées de musicologues, historiens et musiciens, ce qui illustre bien la dynamique de recherche inter-disciplinaire liée au mouvement baroqueuxné dans les années 1970-1980.
Cet élan pour la pratique et la connaissance de cesmusiques d’un large XVIIe siècle n’empêche pas que, paradoxalement, la définition d’un style musical et d’une période purement baroques semble délicate à opérer et continue à susciter réflexionset débats

Les outils des professionnels : instruments et livres de musique

Si quelques rares inventaires après décès de musiciens d’Église ont permis de repérer des instruments, des livres de musique et du matériel destiné à composer, ces mêmes sources restent muettes pour les musiciens indépendants. À Moulins, les 8 inventaires après décès de musiciens trouvés n’ont fourni aucun matériel musical. À part quelques livres, plutôt de religion, trouvés au Mans, dans l’ensemble des villes étudiées, l’intérieur des musiciens semble, quand il est connu, dépourvu d’instrument de musique. Cette absence généralisée déconcerte. Fils ou successeur, quelle raison celui qui prenait la suite du métier, voire celle du logement, aurait-il eu de dissimuler ses instruments de travail ; ou le notaire de les ignorer ?
Le livre de musique est l’autre grand absent des biens trouvés au domicile de ces musiciens professionnels, ce qui constitue une information sur la pratique musicale de ces professionnels.
La plupart des chercheurs estiment que, dans sa majorité, ce groupe a été formé par la pratique, par l’exemple, et a mémorisé son répertoire, sans disposer de partitions qu’il ne saurait d’ailleurs peut-être pas lire. Mais les sources n’ont pas davantage livré d’instruments de musique chez les musiciens indépendants ; pourtant ils en détenaient. Le doute est donc permis aussi pour la partition.
Si l’on accepte que tout le répertoire courant nécessaire à l’animation des bals, des processions et des fêtes diverses pouvait, après l’apprentissage nécessaire, reposer sur la mémorisation et la capacité d’improvisation, quelques pratiques de ces musiciens suggèrent qu’on ne devrait pas trancher trop abruptement en enfermant leur art dans le monde de l’oralité. La pratique du cours particulier ne fait pas obligatoirement rupture sur ce point, à condition de supposer que seuls les musiciens d’Église enseignaient aux particuliers le clavier et la lecture des partitions récentes. Quelques éléments rapprochent pourtant le professionnel de la partition. On a vu que les échanges, renforts occasionnels, étaient fréquents entre musiciens de la ville et musiciens d’Église. Les violons ou hautbois venant renforcer la psallette pour jouer motet ou Te Deumdevaient savoir lire les partitions nécessaires pour cette musique polyphonique plus complexe. Il existe d’ailleurs quelques rares traces des contenus de l’apprentissage auprès d’un maître qui semblent bien indiquer parfois une volonté de savoir la lecture musicale ;même l’écriture musicale semble en effet réservée aux membres des psallettes. Ainsi à Narbonne, pour ce cas où les apprentis sont adultes.

Le monde des musiciens amateurs

Dans les ouvrages examinés, cette question est fort peu étudiée pour le Grand Siècle, mais elle est davantage présente pour celui des Lumières, comme dans les recherches menées pour Aix et Lyon.
En Provence, la noblesse parlementaire du XVII e siècle, qui utilise ses hôtels pour danser, déclamer ou faire de la musique, se transporte pourson nomadisme saisonnier en ses demeures de campagne pendant les vacances parlementaires de juin à octobre, pour y reproduire les mêmes loisirs. Ces aristocrates danseurs, poètes et musiciens ne se satisfont plus de ces pratiques en leurs domiciles et, en 1719, fondent une Académie de Musique. Cette nouvelle vie collective de la musique prend initialement la forme de concerts privés, dont l’organisation est autofinancée, et se déroule dans une salle de jeu de paume, ou bien dans une salle de la municipalité.
À Lyon, c’est en 1700 que débute la première société savante, l’Académie des Sciences et BellesLettres, puis au XVIIIe siècle, ce sont deux académies de musique qui sontconstituées. L’Académie Royale de Musique est fondée en 1688, consacrée surtout aux ouvrages lyriques. Elle ne disposera d’une salle spécialisée qu’en 1756. La seconde est l’Académie des Beaux-Arts et du Concert, née en 1713. Elle offre parfois des conférences sur la musique ou les arts appliqués. Ses exécutants sont d’abord les amateurs issus de la noblesse ou de la bourgeoisie. Mais à partir de 1736, ce sont surtout des professionnels qui exercent dans les deux académies. Les chœurs ne sont pas directement connus, mais renseignés de 1724 à 1764 par la participation des choristes de l’Académie Royale de Musique et du Concert à la cérémonie du 8 août du «Vœu du Roi » en l’église du Grand Collège de la Trinité, dédiée à la santé du monarque ; ces chanteurs sont 28 en 1729. Ces groupes de musiciens sont dirigés par des chefs – les batteurs de mesure– qui sont issus des bons musiciens de la compagnie ou sont compositeurs ou professeurs de musique.

Présence de bas instrumentsdans les établissements religieux

Il est une circonstance où Ménestrier se fait plus précis en relatant la fête de 1666. Il décrit ainsi l’appareil musical utilisé dans l’église de Sainte-Marie-d’en-Haut :
La Musique fut la plus juste, la plus delicate, & la plus fine, que l’on ait encore oüie, & on auroit pû dire que c’estoient des voix descendues du Ciel, rant [tant] elles estoient agreables. Le concert de Luts y fut admirable, les Thuorbes, & les Clavessins soûtinrent l’harmonie excellement, & tous ceuxqui furent de cette Feste advoüerent qu’ils n’avoient jamais rien ouy de semblable.
Un degré qualitatif important est ici franchi pour les pratiques musicales monastiques. Luths, théorbes et clavecins qui accompagnèrent les chanteuses sont des bas instruments, joués le plus souvent dans les demeures de l’aristocratie. Précisons bien les circonstances : il s’agit d’une grande messe solennelle. Au dernier jour de l’octave pour la canonisation de François de Sales, une cérémonie est réservée aux curés de la ville et des environs. Ils sont cent à partir de la chapelle de l’évêché pour se rendre à l’église du monastère des Visitandines d’en Haut. C’est là que cette messe est célébrée et doublement accompagnée du chant desmoniales et d’un concertde luth, théorbe et clavecin.
Rien ne mentionne un renfort extérieur pour utiliser ces instruments. De toute manière et, en dépit de leurs compétences de poly-instrumentistes, ces cordes pincées ne font guère partie de la panoplie des instruments pratiqués par les maîtres violons régulièrement appelés en renfort aux fêtes civiques.
Pour cette messe, ce sont visiblement les moniales qui chantent excellemment et probablement elles aussi qui jouent des trois instruments cités. Ce savoir-faire instrumental ne s’improvisant pas, le plus vraisemblable est que les sœurs visitandines disposaient en permanence et jouaient elles-mêmes de ces instruments à cordes ; ce qui ferait de ces moniales musiciennes de probables interprètes des musiques savantes sacrées, voire profanes, les plusélaborées, soit de la Renaissance, soit de leur siècle.
Mais un doute persiste. En effet, quand Ménestrier décrit la seconde fête, celle des Visitandines de la rue Très-Cloîtres, il emploie une expression qui laisse supposer que les Visitandines du second monastères n’ont pas assumé seules l’exercice musical, mais qu’elles ont fait appel à des renforts extérieurs, à une belle Musique qu’elles avaient prise:
A deux heures apres midy les Religieuses chanterent les Vespres de N. D. à leur maniere accoûtumée ; ce qu’elles ont observé en tous leurs autres Offices durant toute cette octave, laissant chanter les grandes Messes, &les Vespres solemnelles aux Compagnies qui ont fait les Ceremonies de chaque jour, & à la belle Musique qu’elles avoient prisequi s’en est dignement acquittée, ayant durant toute l’Octave aux Messes Conventuelles, grandes Messes, Vespres, & Benedictions du S. Sacrement, fait des accords de voix, & d’instrumens, & des concerts merveilleux.
En revanche, la formulation de Boniel pour les fêtes de 1669 à Monfleury concernant la béatification de Rose de Lima est plus nettement favorable àl’hypothèse selon laquelle certaines dames religieuses détiennent et jouent des luths et même, ici, des violes de gambe.

L’attirance de quelques religieux pour la musique profane

Les mondes de la musique sacrée et de la musique profane ne sont pas séparés de manière absolue, loin s’en faut. Il est des exemples où les musiciens donnent leurs pratiques en sortant de leur domaine. L’appel aux musiciens indépendants de la ville pour renforcer ou compléter les effectifs religieux lors des grandes cérémonies est fréquent. Il arrive aussi, mais plus rarement, que les pouvoirs publics en appellent aux musiciens d’Église, comme en 1623 pour l’entré du comte de Soissons.
Mais au-delà de ces transferts ponctuels de musiciens, on observe aussi quelques traces d’une attirance des musiciens d’Église pour jouer chez eux, ou pour aller pratiquer en ville une musique profane, sans doute savante et contemporaine.
Nous l’observons en 1654 quand intervient à Saint-André un incident intéressant. Le 5 mai, le chapitre décide de mettre fin à sa musique pour un an en représailles à « l’abandonnement du chœur que font les sieurs prêtres et habitués ou enfants de chœur» qui s’en vont chanter ailleurs. En réalité cette décision ne sera appliquée que pendant quelques jours. Le nouveau maître nommé – Antoine
Sauvestre – se voit rappeler à son devoir de chanter la musique au chœur et non ailleurs .Que désigne cet ailleurs ? Qu’ils aient chanté pour la psallette concurrentede Notre-Dame est hautement improbable. La précision n’est pas donnée, mais il semble plus logique d’imaginer que ces chanteurs aient cédé à l’attrait d’une pratique musicale profane de la ville.
Beaucoup plus tard, alors que les nobles de la ville ont commencé à s’organiser en Concertpour jouer les musiques savantes de leur goût, cet ensemble paraît exercer une large attraction, attirant dans ses rangs l’un des clercs de Notre-Dame. Ce clerc mélomane est sanctionné par le chapitre de Notre-Dame, qui le prive quelque temps de chœur et donc du revenu afférant:
Le 26 août 1728, un clerc qui persistait à vouloir « chanter au concert », fut privé du chœur jusqu’à Pâques.
Mais l’organiste Louis de Batz n’avait apparemment pas eu de problème pour participer en 1725, avec son clavecin, au Concertaristocratique en plein essor.

Musiques organisées par le consulat

À partir des récits des fêtes publiques ou des archives des actes municipaux, il apparaît que le pouvoir municipal – les quatre consuls et le Conseil de ville à géométrie variable – est toujours l’organisateur et le payeur de ces manifestations. Le consulat a l’initiative de ces réjouissances quand il s’agit d’organiser une fête calendaire : processionannuelle à Saint-Jacques d’Échirolles, fête de l’arquebuse, etc. Mais quand il faut célébrer une affaire qui concerne le royaume ou la famille royale en réalisant une cérémonie solennelle pour laquelle laparticipation des habitants est obligatoire, l’ordre vient du Conseil du roi. Le gouverneur ou son lieutenant général et le Parlement sont aussi en cette matière des donneurs d’ordres quand le sujet des célébrations est local ou provincial. Il arrive pourtant que les consuls semblent prendre l’initiative,comme pour la réception de Lesdiguières nouvellement nommé connétable en 1624, ou plus sûrement pour inaugurer la pose d’un buste du roi en 1686, ou encore en 1722 quand ils organisent la réception solennelle du portrait du gouverneur, le duc Louis d’Orléans.

Les musiques fonctionnelles de la ville

Mais quand il n’est rien d’extraordinaire, pour la vie courante de la cité, la ville est-elle productrice de musiques et dispose-t-elle de quelques musiciens ? Ce questionnement large embrasse jusqu’aux sons de la ville produits à des fins de communication avec les habitants, lorsqu’il s’agit d’utiliser des instruments de musique, non d’abord pour la beauté de leur sonorité, mais pour la capacité de la population à entendre et interpréter le signal sonore émis.

Les musiques pour les circonstances extraordinaires

La lecture du Mercure Galant et de quelques récits de contemporains témoins des festivités, comme celle des sources secondaires – Prudhomme, Inventaires …, Maignien, Les Artistes … – permet de connaître un peu les circonstances, les organisateurs et les effectifs de musiciens mis en œuvre dans les différentes cérémonies grenobloises publiques au cours du XVIIe siècle. Notons qu’il ne s’agit pas ici de mener une analysede ces fêtes publiques – nous avons vu qu’elles ont déjà été étudiées – mais de suivre le seul fil conducteur de leurs dimensions musicales chantées ou jouées et entendues. Par conséquent il ne sera pas fait état de la totalité des fêtes solennelles, mais d’une petite partie d’entre elles seulement : celles où résonnent des musiques. Prenons un seul exemple. Il n’apparaît pas de traces de dépenses pour la musique quand Henri IV fait son entrée à Grenoble en août 1600 : cette entrée sera donc ignorée. Certes, il serait étonnant qu’un roi ait été accueilli sans musique, alors qu’en sus de la ventede « l’émoluement des peaux de la boucherie », 600 écus durent être empruntés par la ville pour financer les fastes de son entrée . Le pouvoir municipal a logiquement mobilisé à cette occasion au moins une bande de violons. D’autant que la réalité et ce rôle des bandes apparaissent déjà en 1548 – et cette pratique est sans doute plus ancienne encore – quand cinq violons jouent pour l’entrée du gouverneur et reçoivent un écu et demi chacun . Pourtant, même si nous gardons en mémoire que l’hypothèse de la participation d’un groupe de musiciens est parfaitement logique et vraisemblable pour chacune des nombreuses cérémonies organisée par le consulat de Grenoble de 1590 à 1730, ne figureront dans cette étude que les manifestations pour lesquelles les sources indiquent explicitement la mobilisation de musiciens, ou comportent au minimum les termes, plusieurs fois rencontrés, de « préparation d’une estrade pour les violons».

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Table des matières
Préface
Avant-propos
Remerciements
– Introduction –
Comment s’écrit l’histoire de la musique ?
Comment écrire une histoire de la musique à Grenoble ?
– Première partie – Pratiques musicales de la société grenobloise
Musiques dans la ville – l’espace public
Musiques privées des citadins – les amateurs
– Deuxième partie – Musiciens professionnels et métiers supports
Les musiciens d’Église
Les professionnels indépendants
Joueurs et compositeurs : le cas particulier des Farinel
Conclusion
Circonstances et styles des musiques
Les musiciens professionnels
Sources et bibliographie
Sources
Bibliographie
Annexes
Index des tableaux, graphiques & illustrations
Index des tableaux
index des graphiques
Table des matières

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